Chapitre 22

Write by Les Chroniques de Naty

Chapitre 22

 

Je rentre directement à la maison ranger mes affaires. Moi aussi je dois quitter cette maison au plus vite. J’aurai la tête et l’esprit plus tranquille quand je serai loin d’ici. Je pourrai mieux réfléchir à mon plan d’attaque.  Je vais vérifier dans la chambre d’Akabla et je constate que celle-ci a déjà ramassé toutes ses affaires.

Cette maison construite au prix de mille sacrifices ne me dit plus rien. J’ai plutôt hâte de la quitter. Je ne pense pas y remettre les pieds un jour, de toutes les façons Martine ne le permettrait jamais. Elle ne sera plus cette femme douce et dévouée que j’ai connue. Je me prépare déjà mentalement à subir toutes sortes de peine venant d’elle.

En un temps record, je vide la maison de tout ce qui est mien. Je laisse seulement les affaires de ma femme et de mon fils ; car je sais qu’elle ne voudra jamais me laisser Orphée. Chose qui ne me peine pas vraiment, vu que j’aurai bientôt des enfants avec Akabla. Ceux-ci seront plus mien que ceux de Martine. Je ne veux rien emporter de cette maison qui ne soit à moi. Juste mes vêtements et d’autres documents. Quand je finis, je jette un dernier coup d’œil dans les autres pièces afin d’être sûr de n’avoir rien oublié. Après quoi je monte dans ma voiture, c’est à ce moment que je me rends compte que je n’ai pas informé les parents de ma femme. J’ai complètement oubliée, tant j’ai hâte d’en finir avec tout ça.

J’irai d’abord dans ma garçonnière me reposer. Réfléchir à tout ce que je dois faire et procéder par étape. Les étapes les plus faciles, ensuite les plus difficiles. Dans une semaine Martine rentrera à la maison, elle récupérera Orphée. Akabla viendra me retrouver à la maison. J’appellerai mon avocat pour commencer la procédure de divorce. Je ne la veux pas longue ; Martine devra signer rapidement les papiers, afin que nous puissions passer tous les deux à autres choses. Quand j’aurai fini tout ça, viendra le mariage avec Akabla, et nous voyagerons afin de nous faire oublier par tout le monde. Peut-être même que nous déménagerons. Dans tous les cas, cette hypothèse n’est pas à négliger. Abidjan est petit, et je pourrai rencontrer Martine un jour ; chose que je ne veux pas du tout.

Je regarde l’heure sur le tableau de bord. 9 heures 30. Je ne sais même pas si Martine est réveillée. Après une courte réflexion, je décide d’appeler le père de ma femme et d’envoyer un message à Fatou. Oui c’est mieux ainsi ! Et à elle, je vais lui demander de se rendre au plus vite au chevet de son amie. Et puis, je crois que je n’aurai même pas besoin de le dire. Fatou le fera de son propre chef ; c’est tellement évident l’amour et l’affection qu’elle porte à Martine.

Je compose fébrilement le numéro de mon ex beau-père. J’ai les mains qui tremblent ; cet homme m’a toujours impressionné. J’avoue que j’ai un peu peur de la réaction qu’il aura lorsqu’il saura tout ce qui se passe. Je pari même qu’il ne sera pas étonné, vue qu’il n’a jamais voulu que j’épouse sa fille chérie.

—Bonjour papa. Dis-je quand il décroche.

—Bonjour Moctar. Comment vas-tu ?

—Je vais bien papa. Et vous-même ça va ?

—Oui je me maintiens. Que me vaut cet appel ? Parce que tu es un peu matinal.

Il trouve que je suis matinale à 9 heures passés de plusieurs minutes. Si je l’avais donc appelé hier nuit, il en sera plus qu’inquiet.

—Tout va bien ; c’est pour vous annoncer une bonne nouvelle.

—Ah c’est mieux. Oui je t’écoute.

—Martine a accouché ce matin d’un garçon.

Je l’entends qui crie à l’autre bout du fil pour appeler sa femme.

—Félicitations Moctar. C’est vraiment une très bonne nouvelle que tu m’annonce ainsi. Je suis très heureux pour vous.

—Merci papa. Tu informeras maman s’il te plait.

—Je le fais déjà, ne t’en fais pas pour ça. Comment vont ma fille et mon petit fils ?

—Ils se portent très bien. Ils sont encore à l’hôpital. Elle a été césarisée, donc elle devra rester encore à l’hôpital pour quelques jours.

Je ne peux dire la vérité ; il posera trop de questions. Je préfère dire l’essentiel. Ils constateront la vérité plus tard.

—Ah oui je vois. Nous passerons tout à l’heure.

Je serai déjà loin. Pensais-je intérieurement.

—D’accord papa. Je vous envoie l’adresse de la clinique par message.

—N’est-ce pas l’endroit où elle a été hospitalisée la première fois qu’elle a eu un accident ?

—Oui c’est là.

—Je connais déjà. Nous y serons en début d’après-midi.

—C’est compris. Je dois vous laisser papa. Passez une agréable journée, et à bientôt.

—Merci Moctar. Encore félicitations ; tu as fait du bon travail. À plus tard.

Je raccroche le cœur lourd. Quand je pense que je vais décevoir tous ceux-là, je ne peux m’empêcher d’être triste. Pourquoi pour être heureux, il faut rendre triste ceux qu’on aime ? Je me dis que dans ce cas, notre bonheur ne peut être complet, s’il est conditionné. Un bonheur n’est certes jamais total, néanmoins il rend plus de la moitié de notre entourage heureux. Cependant dans mon cas, mon bonheur ne rend pas plus du quart de ces gens-là heureux. À part ma mère, je sais que j’aurai tout le monde sur le dos. Soit ! J’accepte d’y faire face. Mais ais je le choix ?

On a toujours le choix me répond ma conscience. Ne pas faire de choix est en soi un choix. S’abstenir est un choix ; lutter est un choix. Je ne peux plus faire marche arrière, ou du moins, je ne veux plus faire marche arrière.

Je crois que le plus formidable dans sa vie, c’est de rencontrer l’être avec qui nous sommes en osmose. Peu importe la relation, le devenir, la situation, c’est juste formidable de connaitre au moine une fois dans sa vie cette sensation d’être désirée à fond chaque jour. D’être aimé pour ce que vous êtes, simplement, sans artifice, et en faisant de sorte que cette osmose soit réciproque, à en devenir passionnelle. Il faut vivre ce que l’on doit vivre. Sans chercher le pourquoi des choses. Car il Ya des choses que l’on doit vivre tout simplement et avec certaines personnes. Je crois aussi que tout ça est écrit dans le grand livre de nos vies et l’on ne peut rien y changer. Aimer Akabla, la chérir, lui donner tout, et ce sans jamais rien demander en retour est ma devise désormais.

Peu importe ce que cela me coutera comme perte ou gain ; je m’y donnerai et ce sans retenu.

Je regarde la maison une dernière fois et démarre la voiture. Aujourd’hui commence un nouveau chapitre de ma vie. Que dis-je, je commence la rédaction d’un nouveau livre sur ma vie. Je l’espère belle et prometteuse.

*

**

***

****Akabla****

Je dépose mes affaires dans la chambre que m’a montrée la mère de Moctar. Je suis épuisée et j’ai besoin de dormir. J’ai mal à la tête et je n’arrive même plus à garder les yeux ouvert pendant plus de cinq minutes.

Les événements se sont enchainés comme si une main invisible prenait un malin plaisir à tout faire basculer. Quand j’ai vue martine pleurer de douleur, mon cœur s’est contracter ; elle me faisait beaucoup de peine. Dans l’histoire c’est plutôt moi la méchante ; parce que cette femme ne m’a jamais rien fait. Au contraire, elle se comportait envers moi comme si j’étais sa sœur. J’ai fait beaucoup de foyer, et des femmes comme Martine, je n’en ai jamais connu. Elle m’a toujours respectée, et tenait compte de mon avis, pas en tant que simple nounou, mais plutôt en tant qu’un être humain dotée de faculté de réflexion.

À vrai dire je ne voulais pas qu’elle nous surprenne. J’aurai préféré m’en aller et son mari aurait pu demander le divorce et ce sans qu’elle ne sache vraiment ce qui se trame. Mais ça n’a pas été le cas. Elle nous a surpris en train de faire l’amour. Elle a vu son mari qui avait sa tête dans mon entrejambe ; me mangeant l’intimité. Rien que d’y penser j’en fais des frissons. Ça dû être un coup dur pour elle.

J’ai eu peur qu’elle ne perde la vie ; je priais intérieurement Dieu afin qu’il épargne sa vie et celle de son bébé. Je voyais comment Moctar tremblait ; s’ils leur étaient arrivés quelque chose, il ne se le serait jamais pardonné, et moi aussi. Par ailleurs cela aurait été un nuage au-dessus de notre tête. Quand le médecin est venu annoncer qu’elle a accouchée, je voulais pleurer de joie tant j’étais soulagée.

Je ne sais pas où tout ça va nous mener, mais j’espère que ça ne va pas s’arrêter là. Non pas en si bon chemin. Moctar est fou de moi plus que jamais ; nous avons aussi la bénédiction de sa mère ; alors je ne vois pas de frein à ce que tout se passe comme prévue. C’est vrai que Martine est en vie, mais cela ne devrai rien changer à mes plans. Et une chose est sûre et certaine, Moctar me mange dans les mains. Mame Dia l’a bien dit, si jamais il ne se plie pas, il deviendra fou. Car la force de ses secrets est bien trop puissante. Il ne peut pas me résister et ce même s’il le voulait. Il me suivra comme un chien, jusqu’à la fin de ses jours. C’est soit ça, soit la folie. Donc pourquoi gâcher un si bon produit ?

TU ES A MOI MOCTAR ! 

Que tu le veuille ou non tu m’appartiens. Pensais-je satisfaite.

—Ma fille, commençais la mère de Moctar ; votre relation n’a rien de commun je sais. Je ne dis que pas que je suis d’accord avec ce qui se passe, mais c’est le choix de mon fils. En plus c’est un grand garçon et sur cette base je me dis qu’il sait ce qui est bien pour lui. Je ne peux que le soutenir.

—Je sais maman, et je t’en suis reconnaissante. Dis-je d’une petite voix.

Je veux qu’elle s’en aille et qu’elle me laisse dormir. De toutes les façons elle n’a pas le choix que de se plier selon le bon vouloir de son fils. C’est lui qui s’occupe d’elle ; l’avoir contre elle signifierait qu’elle ne pourra plus prendre son argent. Même si j’ai toujours pensé qu’elle passait tout son temps à lui demander de l’argent. C’est tout le temps elle qui a des soins à faire à l’hôpital. Mais tout ça finira bientôt. L’argent de Moctar est le mien, donc je devrai être informée de la gestion. Mais je ne peux pas en parler pour l’instant vue que je dois cohabiter avec elle. De plus elle est la seule qui nous sert de soutien dans cette affaire, alors le perdre ne serait être supportable à Moctar.

—Ce n’est pas la peine ma chérie. Tu sais quoi, je t’ai toujours appréciée. Tu es une bonne fille, respectueuse ; je sais que tu ferais une très bonne épouse pour mon fils.

—Merci maman. J’en suis flattée.

—Ya pas à l’être. Je ne te juge pas ; même si je reconnais que votre méthode n’est pas très catholique. Tromper Martine sous son propre toit a été une erreur monumentale de votre part. Le fait qu’elle vous ait surpris a été un choc pour elle, et cela a failli lui couter la vie. J’espère que vous saurez comprendre qu’on ne joue pas avec la vie des personnes qui nous entoure. Vous n’avez pas respecté Martine. Je ne l’aime peut-être pas, mais je ne peux être d’accord encore une fois avec ce que vous avez fait. Mets-toi un peu à sa place ; aurais-tu appréciée cela ?

Je la fixe, et tout ce qui me vient en tête, c’est de lui dire d’aller se faire foutre. Cette vieille pie m’emmerde. Je ne suis pas Martine, et à moi on ne marche pas sur les pieds. Mais tout ça, elle ne le saura que plus tard. Pour l’instant, j’ai besoin d’elle. Mais surtout j’ai besoin de dormir. Alors il faut que je réponde oui à tout ce qu’elle me dira afin qu’elle me foute la paix. Je baisse donc la tête et prends un air navré.

—Non maman ; je n’aurai pas supporté ça.

—Ah tu vois.

—Mais ça juste été plus fort que nous. Pas que je me justifie, mais je pense que nous sommes amoureux. Et l’amour ne sait se contenir quand il est fort. Il arrive à braver tout et à faire fi de certaines règles préétablit. Mais une chose est sûre, tu as bien raison.

—Je comprends ma fille. Moi aussi j’ai déjà été amoureuse ; alors je sais de quoi tu parles. dit-elle conciliante.

—Merci de nous comprendre. Et sache que ton soutien nous est très précieux. C’est grâce à toi que Moctar est debout ; il sait que sa maman est toujours là pour lui. Nous avons besoin de toi plus que jamais, dans cette lutte qui s’annonce.

Elle me sourit avec bienveillance. La flatterie fait partie de mes atouts. Je sais dire aux gens ce qu’ils aiment entendre. Ça leur fait du bien, que les personnes qu’ils croient être inférieurs à eux les flattes.

—C’est compris Akabla ; je ne vous laisse pas tomber. Moctar est mon seul fils et son bonheur passe avant tout. Donc s’il est possible avec toi, alors je ne vois pas pourquoi je serai contre cela. Bon, je vais te laisser te reposer. Je devine que tu dois être épuisée. Il Ya a mangé dans la cuisine ; quand tu te réveilleras, tu pourras te servir. Ici tu es chez toi, alors ne te gêne pas du tout.

—D’accord maman. Encore merci pour tout.

Lorsqu’elle s’en va, je referme la porte derrière elle et me laisse tomber sur le lit. Je me sens légère et bien. Je suis heureuse ; car je vois enfin mes plans aboutir. Je ne pouvais pas rêver meilleur dénouement à cette histoire. En outre, nous avons la mère de Moctar dans notre sac, cela me suffit. Du moins pour l’instant. Elle ne me sera plus utile après. Quand j’aurai suffisamment mis le grappin sur le fils, je jetterai la mère aux oubliettes. Je ne veux pas d’une belle-mère envahissante et ayant la langue pendue.

Je ne suis pas comme Martine. Je ne me laisse pas faire, je ne suis pas fragile, je ne me laisse pas dominer. Moi je suis Akabla ; je sais ce que je veux. Je suis forte ; je suis une lionne, et quand on veut me marcher sur les pattes, et bien on m’entend rugir jusqu’à l’autre bout de la forêt.

*

**

***

****Fatou****

Je ne suis pas d’humeur très joviale ce matin. J’ai eu une dispute terrible avec Aboubacar hier et on s’est dit des paroles très blessantes. Je n’en peux plus de ses infidélités. J’ai cru qu’avec le temps il finira par s’assagir, mais j’ai tôt fais de déchanter. Un homme ne change que lorsqu’il le veut vraiment ; il ne changera pas pour les beaux yeux d’une femme.

Quand je pense qu’en dépit de tout ce que je lui donne, qu’en dépit de tous mes sacrifices, il trouve bon de me tromper et me mener la vie dure.

Quel ingrat !

Je suis déçue de lui. N’eussent été mes enfants, je crois que je m’en serai allé depuis belle lurette. Je me souviens encore de la conversation que j’ai eue avec la mère de Martine. Cette dame est la mère que je n’ai pas connue. C’est une vraie perle ; une source de savoir et de bons conseil.

—Fatou ne quitte jamais ton homme parce qu’il te trompe. C’est dur à accepter, mais fais-le quand même. Il ne changera que lorsqu’il sera vieux et sénile, et pas parce que toi tu le veux. Alors laisse-le courir autant qu’il veut. Il finira par s’assagir.

—Maman ce que tu dis là est difficile en effet. Ce n’est pas tant le fait qu’il me trompe qui me fait mal, non ! Loin de là. C’est plutôt les circonstances autour de ses infidélités qui me font le plus souffrir. Il sort avec des femmes qui n’en valent pas la peine. Il ment qu’il est veuf, à d’autres il leur dit qu’il est célibataire.

Elle éclate de rire.

—Que ne feront ils pas pour une paire de fesses et de seins ? Tuer sa propre femme dans sa bouche, rien que pour paraitre mieux devant d‘autres femmes.

—Je te dis hein maman. Souvent je reçois des messages de certaines. Je me demande où et comment elles ont mon numéro. Je me rends compte que mon mari ne m’aime pas ; il ne me protège pas contre ses maitresses. Sinon pourquoi celles-ci se permettront de me menacer ?

—Hum c’est vrai que là tu as raison.

—J’ai toujours eu raison ; du moins je crois. J’ai tout donné à Bouba. Quand je pense qu’il a fait des pieds et des mains pour m’avoir. A l’époque il aurait pu déplacer des montagnes si je le lui avais demandé. Mais aujourd’hui, à peine va-t-il enlever une pierre sur mon chemin.

—Ils sont tous comme ça. Les fidèles se comptent du bout des doigts ; il en existe certes, mais ils ne sont pas légions comme tu peux le constater. Quand on se marie, c’est pour la vie Fatou ; on ne doit pas se dire qu’on a le choix de divorcer. Et surtout on ne doit pas mettre ça comme une option, et une issue de secours. Pas que le mariage soit une fin en soi, non, loin de là. Le mariage ne garantit pas non plus une vie heureuse et sans incident. Le mariage c’est plus que ça ; c’est la fusion de deux être, deux âmes. Vous devenez un, en vous unissant devant Dieu et les hommes. C’est difficile de tenir les promesses faites le jour de la célébration, mais fais un effort. En chaque femme dort un pouvoir insoupçonné. Une faculté à pardonner l’impardonnable. Surtout une fois que tu deviens mère, ce pouvoir triple. Raison pour laquelle tu réfléchis longtemps avant de songer à quitter ton mari. Parce que ce lien qui existe entre vous à décupler avec la naissance des jumeaux. C’est ce lien, aussi invisible soit-il qui t’empêche de te léguer contre lui. Il est certes infine, mais réfère toi toujours à lui.

—Oh maman, tout ce que tu dis est bien beau, et surtout vrai. Cependant mon cœur n’en peut plus des frasques de mon mari. Quand comprendra-t-il qu’il n’est plus ce jeune fringant qui pouvait sauter sur tout ce qui bouge ? Quand se rendra-t-il compte que sa femme et ses enfants ont besoin de lui ? Ses femmes n’en veulent qu’à son argent, que dis-je à notre argent. Puisque je me prive de sommeil chaque matin pour aller me trainer dans un bureau afin de gagner des sous, que je mets sur un compte afin de nous faciliter la retraite. Et c’est cet argent qu’il prend pour entretenir ses sales maitresses.

À bout de souffle, je me mets à pleurer. J’ai trop supporté et trop pardonner ; mon cœur est fatigué. Je suis fatigué de faire bonne figure quant à l’intérieure je suis bousillée. Comme on le dit, mieux vaut être seule que mal accompagnée.

—Je sais que tu souffres ; je comprends aussi ta souffrance ma chérie et je la partage. Toutefois, je veux te faire une petite confidence. Le père de ton amie a fait bien pire.

Je la regarde hébétée. Le père de Martine que je connais et respecte, car pour moi c’est le meilleur homme qui soit. Je ne l’ai jamais vue se disputer avec sa femme ; depuis que je connais ce couple, c’est le prototype d’un mariage réussi selon moi. Même si je sais que ça n’est pas toujours ainsi, néanmoins, je dois reconnaitre que ce n’est pas aussi le feu là-bas. Et vue ce qu’elle me dit, ça me bousille complètement non seulement le système, mais aussi l’image de presque toute une vie.

Et quand elle commence à me parler des déboires qu’elle a connus avec son mari, je crois que j’ai eu le cerveau en compote. Comme on le dit chez nous, j’ai oublié mes problèmes quand elle m’a parlé de pour elle.

—Maman, je ne sais quoi dire. Dis-je quand elle termina. J’en ai presque froid au dos.

—Je sais ma fille. Mais tout va bien maintenant et ce grâce à Dieu. C’est lui qui m’a permis d’être là où j’en suis. Sinon je serai surement morte d’un infarctus. Par ailleurs, c’est le souci avec toi et martine ; vous n’avez pas cette culture de vous confier à Dieu. Vous voulez gérer tout vous-même ; or cela est impossible.

—Mais est ce que Dieu a le temps de gérer tous nos problèmes de couple.

Nous rions de bon cœur à ma remarque.

—Il a le temps pour tout ce que vous voudrez bien lui accorder. Décharge-toi de tout ce qui te tracasse et laisse-le faire. J’en ais parler à Martine déjà, mais tu la connais. Elle croit tout connaitre. Je me dis souvent qu’elle est trop intelligente et cela fera surement sa perte ; elle pense pouvoir tout contrôler. Ce qui ne peut être possible.

—Je vais parler à ma sœur maman. Sinon moi j’accompli mes cinq prières quotidiennes ; en outre je fais l’effort d’être une bonne pratiquante.

—Je sais tout ça ; je ne suis pas musulmane, mais je sais cependant qu’il Ya des prières spéciale que tu peux adresser à Dieu, dans lesquelles tu peux te confier à lui. Lui confier ta vie, ton foyer, tes enfants.

— Si ; il y en a maman. Mais je ne le fais pas ; j’avoue.

— Alors fais-le ! Tu verras la différence. Tu te sentiras plus libre et plus légère. Tu es trop jeune et trop fragile pour porter toutes ces charges. Aussi, quand tu le ferras, confie à Dieu non seulement le cœur de ton mari, mais aussi son sexe.

—Han ! M’exclamais-je. Je suis surprise car elle ne prend pas de pincette avec moi. C’est pour ça que je l’admire. Elle ne fait pas dans la dentelle quand elle nous donne des conseils.

—Bien sûr. Parce que toutes les femmes avec lesquelles ton mari te trompe ne sont pas dans son cœur. Ce n’est pas comme s’il est amoureux d’elles ; il ne l’est pas et tu le sais. Car c’est toi sa femme et c’est toi qu’il aime. Mais il leur donne du sexe. Ce côté de son anatomie leur appartient. Si tu les confie à Dieu, il incitera ton mari à en faire un bon usage. Parce qu’on ne sait jamais ; il peut arriver qu’un jour le cœur suive le sexe et là, rien ne sera plus envisageable.

—Mais ce que je ne comprends pas maman, pourquoi est-ce moi qui doit prier pour Bouba ? Il est grand et il peut le faire de son propre chef. Nous sommes tous les deux responsables de la bonne marche de notre foyer.

Je ne peux concevoir l’idée de non seulement cautionner son attitude, mais pire, prié pour lui. Cela est au-dessus de mes forces. Ça serait trop lui faire plaisir selon moi.

—Ah ma fille ! Tu es trop jeune pour comprendre. Mais je pense que tu n’ignores pas que la femme est celle sur qui reposent la réussite et l’échec du mariage. Aboubacar est ton mari, il est le chef de famille ; celui qui s’occupe de vous et qui vous couvre. Il commande et dirige, c’est à lui que revient tout ce qui est décisoire. Toutefois, toi Fatou, tu es la femme, sa femme, son pilier. Tu es celle sans qui Aboubacar ne peut rien. C’est comme une entreprise, il Ya le PDG qui gère toute l’entreprise. C’est lui le grand patron, il fait ce qu’il veut. Mais il Ya aussi le Conseil d’Administration et son président qui n’est autre que le PCA. C’est ce dernier qui est le vrai boss ; c’est lui qui commande le premier et ce sont ces décisions que le PDG exécute. Tous les employés pensent que c’est le premier qui gèrent tout, mais le PDG et le PCA savent très bien qui est le vrai et grand patron. Il est dans l’ombre et ne fais pas de bruit, mais nous connaissons tous sa force de frappe.

—En effet maman ; c’est ainsi que ça se passe.

—Donc, il faut que tu sache quelle place veux-tu occuper dans cette grande entreprise qu’est le mariage. Soit le PCA qui est dans l’ombre, mais qui mène d’un bras de fer le PDG. Ton mari est celui que tout le monde voit, le père de famille, l’homme fort et tout ce qui va avec. Cela n’empêche que c’est toi qui fais cet homme fort et convoité par tous. Tu es sa dame de fer, sa femme de feu comme le dirai le chanteur Gadji Céli dans sa chanson « derrière un grand monsieur se cache une femme de feu ». Et cela ne sera possible que par la prière.

—J’ai compris maman. Merci beaucoup.

Nous avons beaucoup parlé ce jour-là ; je suis sortie de chez elle très réconforter et avec beaucoup d’espoir. Mais avec la dispute d’hier, je ne sais plus quoi penser. Je prie et depuis il ne change pas ; moi j’en ai juste marre. Pourquoi c’est lui qui fais des bêtises et c’est moi qui doit prendre les pots cassé ? Je suis fatiguée et je crois que je n’en peux plus.

À cause de tout ça, je suis même arrivée en retard au boulot. Je ne sais plus où donner de la tête. C’est en rouspétant contre le monde entier que je reçois un message de Moctar.

Un cri de joie et de soulagement s’échappe de ma gorge. Gloire à Dieu ma sœur a accouché. Et sans problème surtout. Je range rapidement mes affaires et me rends directement à la clinique. J’ai essayé d’appeler Moctar en vain ; il est injoignable. Je ne connais pas la chambre de Martine. Mais bon ce n’est pas bien grave pensais je. Je demanderai sur place.

Arrivée à la clinique, je me renseigne auprès de la réceptionniste qui me demande si je suis de la famille. Quelle question idiote ! Mais je me garde de lui dire ça et demande à voir le Dr Sié. Dès que celui-ci arrive, nous nous saluons et il me conduit à la chambre de Martine.

Elle est couchée, silencieuse. Il m’a dit que c’est maintenant que les effets de l’anesthésie s’estompent ; donc elle aura très mal. De ça je n’en doute point.

Elle a le visage crispé par la douleur. Je lui fais un grand sourire et la prends dans mes bars.

—Félicitation ma chérie. Tu as très bien travaillé.

Pour seules réponses, deux grosses larmes roulent sur ses joues. Des larmes de joie, je suppose.

—Je comprends ton émotion ; mais tu vas te rétablir et ton bébé ira bien.

Mais elle continue de pleurer ; elle sanglote de plus en plus fort.

—Qu’est ce qu’il Ya Martine ? Demandais je inquiète.

—Oh Fatou !

—Qu’est ce qui ne va pas ? M’impatientais-je. Je n’aime pas que les gens pleurent en me parlant, ça me fous la trouille.

—Je crois que je vais mourir. Je n’arrive toujours pas à y croire.

Elle se recroqueville dans son lit et pleurs de plus belle.

—Mais parle-moi Martine ! Criais-je ; bon sang tu me fais peur là. Tu as quoi ?

Elle renifle un bon coup, se redresse et fixe un point imaginaire, comme si elle regardait une scène invisible.

—C’est Moctar…

—Quoi Moctar ?

—Akabla…

—Quoi Akabla ? Parle s’il te plaît tu me fais peur. Je ne sais pour quelle raison, mais j’ai l’impression que je ne serai pas surprise parce qu’elle me dira.

—Ils couchent ensemble. Ils me trompent tous les deux. Ils se foutent de moi et de ma gueule depuis je ne sais combien de temps.

Puis elle se remet à pleurer comme une fontaine. Pourquoi ne suis-je pas surprise ? Parce que tu le savais déjà, me réponds ma conscience. Mon Dieu pourquoi faut-il que les hommes soient faits de la même argile ? Je prends Martine dans mes bras et essaie de la réconforter du mieux que je peux.

J’ai le cœur en lambeau. Martine ne mérite pas ça ; surtout pas maintenant qu’elle a plus que jamais besoin de nous. 

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