Chapitre 27 : De cause naturelle

Write by Max Axel Bounda

 

Quelques jours plus tard.

 

Les jours qui avaient suivi notre entretien avec Lema avaient été magiques. Jessica devint heureuse comme un pinson. Elle avait obtenu de précieuses informations et beaucoup plus qu’elle n’aurait cru. Maintenant, la balle était dans son camp. Mais avant, elle devait s’assurer qu’elles aient des personnes capables de corroborer leur version des faits. Elle n’en espérait pas beaucoup. Juste deux ou trois et toutes les autres viendraient d’elles-mêmes. Il en fallait quelques-unes pour motiver les autres. C’est ainsi que les choses se passaient toujours.

Bien que nous ne fumes que lundi. Et que notre soirée cinéma ne se déroulait que les vendredis et samedis soirs, j’avais très envie de regarder une de nos séries préférées. En fait, c’était celle de Jess qui me l’avait fait découvrir deux ans plus tôt. Elle adorait les thrillers juridiques tels que Suits avocats sur mesures[1], The Firm[2], ou Scandal[3]. Ma petite amie avait adoré toutes les créations de ShondaRhimes[4], et lui vouait une certaine admiration. Même si elle lui reprochait le fait d’un peu trop promouvoir l’homosexualité dans ses œuvres.

Moi, par contre j’étais plutôt films et séries d’actions et thrillers politiques. Quand ça parlait de pouvoir, de complotset des coups bas, ça me plaisait.Ma série préférée House of Cards[5] avec Kevin Spacey était en tournage pour peut-être sa dernière saison et c’était dommage car je l’avais adorédès le premier épisode. Il fallait donc que je me contente du feuilleton préféré de ma chérie. Il faut avouer qu’il n’était pas mal. En fait, How to getawaymurder[6] était excellent.

La dernière production de Shondaland et ABC Studios mettait en scène les aventures d’une avocate atypique, la très controverséeAnnalyse Keating, et cinq de ses étudiants en droit pénal à la Middleton Law Institut de Philadelphie.

— Que rédiges-tu encore à vingt-deux heures ? J’ai pris la dernière saison de Murderce matin chez Freddy. J’ai envie de la regarder.

— Sans moi ?Si tu fais ça, je te tue. Je ne veux pas que tu me spolies. On doit la regarder ensemble vendredi.Et comme je télécharge le final de Game of thrones[7] au bureau je crois qu’on aura toute la saison pour samedi.

—Mais je veux connaitre la suite moi.

— D’accord. Je termine juste de saisir ces notes de l’entretien avec Lema. Elles me seront utiles pour la saisine du procureur. Comme ça, s’il demande à m’auditionner, les détails m’aideront à me défendre.

— Dans ce cas fais vite. Au fait, de quoi avez-vous parlez avant mon arrivée.

— Oh rien de beau. On commençait à peine quand tu t’es pointé. Elle s’est excusée et m’a expliqué pour sa soutenance. Et qu’elle avait bien réfléchidonc qu’elle envisageait de porter plainte.

— Je vois! Je me demande ce qui l’a fait changer d’avis. Tu sais, un moment, j’ai cru que tu ne l’aimais pas.

— C’est exact! Je ne l’aime pas beaucoup, me lança froidement Jessica. Putain, Thierry, elle est gouine cette fille. J’avais la chair de poule quand elle me touchait. Elle n’arrêtait pas de me peloter, dit-elle en feignant l’air dégoutée.

—Mais tu es là, à l’aider quand même.

—Oui,à chacun ses penchants sexuels. Elles ne savent pas ce qu’elles ratent. Aussi, ce n’est pas parce que je ne l’aime pas beaucoup qu’elle ne doit pas avoir justice. Après tout, Rhianne et elle ne seraient peut-être pas devenues gouines et ne se seraient pas prostituer si le système ne leur y avait pas contraint.

— Qu’en sais-tu ?

— Beh quand des hommes vous traitent comme elles l’ont été, il y’a de quoi devenir recto verso[8]. Tu ne trouves pas ?

— Certainement.

— Au fait, dès demain on commence la préparation de ton pitch de soutenance.

— Quoi ?

— Tu as bien entendu. Tu dois t’entrainer. Et j’y veillerai tous les jours. Quinze minutes de simulations et de questions.

— D’accord.Mais fais vite, s’il te plait. Je t’attends.

Soudain, le téléphone de Jessica sonna.

—Oh en parlant du loup. Jessica décrocha. Bonsoir Sam… La jeune femme sanglotait, à l’autre bout du fil.Qu’y a-t-il ? Qu’est ce qui ne va pas ?

— Je ne te dérange pas ?

— Euh pas vraiment. Pourquoi pleures-tu ? Qu’est-ce qu’il y’a ?Parle-moi s’il te plait.

— Je voulais te remercier pour ce que tu as fait pour moi. Une liste rectificative a été publiée mon nom y est. Je ne sais comment te remercier. Je t’en serais à jamais reconnaissante.

—Oh tu n’en as pas besoin.

— Aussi, le programme des obsèques de Rhianne est connu. La veillée aura lieu ce samedi chez son oncle à Sogatol[9] dès seize heures.

— Ah ! C’est b…

— La police a bouclé l’enquête sur sa mort.

Lema éclata en pleure.

— Comment ça ? Quelles en sont les conclusions ?

Elle s’exclama

— Ils disent que Rhianne est morte de cause naturelle !

—C’est quoi cette histoire ?!

Jessica ne tenait plus en place.

— D’après l’autopsie,elle serait morte des suites d’une fracture crânienneayant été causée par une chute !

Ma petite amie s’affola. Elle n’en croyait pas ses oreilles.

— Pardon ? Tu es sérieuse ?

— Ai-je l’air de plaisanter ? Ils disent qu’elle était ivre. Elle est tombée et s’est brisé la nuque.

Je regardai ma petite amie dont les yeux s’emplissaient de sang. Sa colère l’envahissait peu à peu.

—D’après eux, c’est logique que quelqu’un quitte son domicile, aille se promener en plein milieu de la nuit au pavillon G, qui est inachevé, et finisse par faire une chute qui lui brise la nuque !

      Mais c’est une connerie. Rhianne était enceinte. Ça fait trois mois qu’elle ne buvait pas !

Jessica se mit aussi à pleurer.

—Les enfoirés ! Un vrai légiste n’aurait pas déclaré une chute comme une mort naturelle mais plutôt accidentelle. Qu’est ce qui ne va pas dans cette histoire ?

— Ils n’ont même pas cherché de coupables. Ils veulent juste étouffer l’affaire, s’affola Lema encore plus. Rhianne n’aura jamais justice.

— Calme-toi Sam, on lui rendra justice. On ne l’a laissera pas tomber.Je te le promets.

— Merci. Je suis désolé de t’embêter avec nos problèmes. Je vais te laisser dormir.

— Tu ne m’embêtes pas.

— Bonne nuit Jess.

— Bonne nuit.

Ma petite raccrocha.Et aussitôt se mit à appeler un autre numéro. Ça ne se passera pas comme ça, murmura-t-elle.

—Allo, Griffin ? C’est Jessica de KNA. Désolé du dérangement. J’ai un scoop pour toi…


   

Chapitre 28

   

L’enquête sur la mort de Rhianne Abessolo aurait-elle été bâclée par la police ?

   

La mort de Rhianne Abessolo, au sein de l’Université Publique du Gabon, il y’a deux semaines avait défrayé la chronique tant ce décèsau sein du campus universitaire remettait au grand jour les problèmes d’insécurité dont les étudiants sont tant victimes depuis des années.

La communauté étudiante très émue avait espéré que Justice soit faite pour leur collègue. Malheureusement, nous venons de recevoir par communiqué de la préfecture de police les résultats de l’enquête concernant cette affaire.

En effet, après cette enquête qui n’aura duré que dix jours, la police vient d’annoncer aux parents, amis et connaissances de la victime, que cette dernière n’aura jamais justice car morte de mort naturelle. D’après le légiste ayant autopsié la victime, Rhianne Abessolo serait décédé des suites d’une fracture crânienne causée par une chute. Une chute qui selon la police aurait été occasionnée par l’état d’ivresse de la victime au moment des faits. Informations que remettent en cause ses proches car « Rhianne avait arrêté de boire, surtout qu’elle était enceinte et ne pouvait risquer la vie de son bébé », nous relate une très proche de la victime.

Devant ce rapport tant contesté par l’opinion, qui le qualifie de faux « car un vrai légiste ne peut pas déclarer naturelle une mort par chute. Celle-ci est plutôt accidentelle. Je suis curieux de savoir qui a procédé à cette autopsie et pourquoi aucun parent n’y a été invité, »souligne un médecin. Gabon Herald c’est rapproché des forces de polices pour y voir plus clair mais a reçu une fin de non-recevoir.

Ce qu’il ressort de l’opinion c’est que « cette enquête a été bâclée parce que les autorités ne veulent pas donner raisons aux étudiants, ce qui légitimerait nos revendications actuelles. Mais nous ne laisserons pas tomber. Rhianne ne sera pas mort en vain »déclare le leader du Bureau des Etudiants de l’UPG.

Que cherche-t-on à nous cacher dans cette affaire ? Qu’est-il réellement arrivé à Rhianne Abessolo pour qu’on veuille aussi vite enterré le dossier ? Qu’adviendra-t-il des revendications étudiantes maintenant que la source de cet étrange décès semble ne plus être l’insécurité toujours présente au sein de l’université ? S’interrogela rédaction de Gabon Herald, premier magazine d’investigations journalistiquesau Gabon.

Toutefois, dans le but de faire la lumière sur cette sombre affaire, nous y reviendrons au cours de nos prochains numéros.

 

Gabon Herald

 



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[8]

[9]Quartier situé dans le cinquième arrondissement de Libreville

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