CHAPITRE 3

Write by EdnaYamba

 

Rien ne m’oblige à rebrousser chemin mais c’est pourtant ce que je fais, je ne peux pas la laisser seule, dehors et dans le noir. Quel genre d’homme serais-je ? Notre quartier est un  quartier sympathique mais peu bruyant, très animé avec ses boutiques vivantes, ce n’est pas très dangereux mais on n’oublie pas ces adolescents qui à peine sortis de la puberté se lancent dans le banditisme. Une fille seule, la nuit dehors, elle pourrait  se faire emmerder.

Je reviens m’assoir près de celle qui les bras croisés sur elle-même boude. Je suppose que si elle doit s’en prendre à quelqu’un c’est à sa grand-mère.

-         Toujours la même gamine pourrie gâtée, grommelé-je en venant m’asseoir à bonne distance d’elle.

-         Rien ne t’obligeait à revenir ! réplique-t-elle m’ayant entendu.

Elle piaffe, me toise alors que ses yeux me lancent des éclairs, on aurait dit du feu sortant de la bouche d’une dragonne, une jolie dragonne agaçante.

La trêve est déjà finie, constaté-je

L’alliance de paix que j’étais prêt à signer avec elle n’aura été qu’un projet pas prêt de prendre forme maintenant. Le froid qu’il souffle est sévère mais cette entêtée quitte à mourir de froid ne me suivra pas, à moins qu’en réalité c’est un plan pour que je meure plutôt moi.

-         Si tu utilisais les éclairs qui sortent de tes yeux pour nous réchauffer ce serait encore mieux, lui dis-je alors qu’elle fulmine de colère. Au moins ça servirait à quelque chose d’utile.

-         Ils sont là uniquement pour te foudroyer !

-         Si ça pouvait changer pour une fois... lui dis-je en souriant, mais apparemment il n’y a pas grand-chose qui a changé chez toi !

-         Toi c’est bien pire, tu te comportes comme un gamin frustré !

Elle se lève pour s’accouder sur la balustrade de la terrasse.

Un gamin frustré ?

-         Tu veux bien m’expliquer ce que gamin frustré signifie ? dis-je en la rejoignant

-         Je ne vais pas te faire un cours de Français ! réplique-t-elle en me défiant du regard, et je ne compte pas rester là à me disputer avec toi !

Quand elle veut descendre les escaliers, c’est par la main que je la retiens. À cette allure, elle pourrait valser et se retrouver au sol. La petite insolente me fait face.

L’air crépite entre nous. Nous sommes bien trop proches.

-         Je me demande ce qu’elle peut te trouver cette blonde !

-         Tu voudrais peut-être que je te rappelle ce que tu me trouvais toi, dis-je sarcastique en l’attirant plus proche de moi.

Alors que dans le mouvement nous ne sommes plus qu’à quelques centimètres elle et moi, et qu’un désir irrésistible m’attire comme un aimant vers elle, avec l’envie de l’embrasser nait en moi. Quand je penche ma tête pour l’embrasser, instinctivement elle lève la sienne vers moi et quand nos lèvres se rapprochent, comme si elles se reconnaissaient, elles fusionnent, comme si elles n’entendaient pas les commandes de nos cerveaux qui doivent certainement leur dicter d’arrêter.

Mon téléphone sonne. C’est Andy.

Nous nous arrachons l’un à l’autre.

-         Vivant à ce que je vois ? se moque-t-il une fois que je décroche ne détournant pas mon regard d’Aurore qui me semble toute aussi troublée que  moi

Il a suffi que l’on soit proche l’un de l’autre, une minute de plus et…

-         Eh oh, alpha ici delta, vous me recevez ? continue Andy

-         Tu trouves ça drôle ?

-         On est en chemin, disons qu’on sera là dans 20 minute !

-         Si tu pouvais faire un peu plus vite, ce serait bien !

Il est préférable qu’ils fassent vite et qu’on ne nous laisse pas seuls encore plus de temps, parce que mon corps semble vouloir ne pas m’obéir. Et je ne suis pas prêt à prendre un risque qui me coûterait encore cher, et la voir retourner tranquillement à Paris comme si rien n’avait compté pour elle.

-         Je vais me marier dans peu, je ne tiens pas à faire un accident ! à toute !

Et il raccroche en continuant à se foutre de ma gueule.

-         Qu’est-ce qui s’est passé toute à  l’heure ?

-         Rien. je suis un homme, il fait froid, ça aurait été toi ou une autre fille, j’aurais réagi pareil !

Elle accuse le coup.

-         Si c’est le cas la blonde a bien du souci à se faire ! me lâche-t-elle avant d’ajouter, je ne compte pas passer les fêtes à me disputer avec toi Alan, et vu qu’on est amené à se voir, on ferait mieux de se tolérer ou de s’éviter !

Le silence entre nous est vite comblé par le bruit des déneigeuses qui déblayent les axes proches du quartier.

                      

                                                  ***

Je salue à peine Andy qui arrive avec ma grand-mère, dès qu’elle ouvre la porte, je vais directement dans ma chambre bouillante de colère, bientôt elle apparait à l’embrasure de la porte.

-         Eh bien Aurore Thérèse, tu m’as l’air bien remontée !

C’est bien un sourire que je vois sur ses lèvres, elle a bel et bien fait exprès !

-         Toi ! lui dis-je en arrêtant mes allées et venues le long de la pièce, je ne te parle plus !

-         Eh pourquoi donc ?

-         Tu as fait exprès ! lui reproché-je

-         Tu ne vas pas m’accuser non plus d’avoir usurpé tes clés et d’être partie avec, tu les as oublié, je n’allais pas changer mon programme alors que je te savais en de bonnes mains. Vous ne vous êtes pas tués c’est déjà au moins ça.

Elle lève les mains innocemment vers le ciel,  avec sa toute petite mine je suis sûr  que même le jury le plus perspicace  ne saurait prouver sa culpabilité mais on ne me l’a fait pas à moi. C’est ma grand-mère je la connais. Tout comme je sais que ça ne sert à rien d’insister sur ce sujet.

-         Quand tu seras vieille, je te mettrais dans une maison pour personnes âgées, la menacé-je en lui tirant la langue.

Elle me fait un sourire qui fait qu’on ne peut jamais rester longtemps fâchée avec elle

-         Aurore Thérèse…. Tu n’oserais pas ! d’ailleurs j’ai déjà dit à tout le monde que quand je serais vieille c’est chez toi que je voudrais rester, c’est fini ma grande tu me supporteras jusqu’à la fin !

Elle arrive à me faire décocher un sourire alors que je voulais rester fâcher contre elle.

-         Donc vous n’avez pas discuté un tout petit peu ?

Je secoue ma tête en guise de non.

-         Mon exercice de communication a donc échoué, mon Dieu quels bêtas vous êtes !

-         Ah tu vois mamie, tu l’avais donc fais exprès.

-         Qui ? moi ?

Elle s’en va en riant  alors que je m’assois sur le lit !

Comment je vais m’en sortir après avoir ressenti tout ce que j’ai ressenti avec ce baiser qui n’a même pas duré plus d’une minute et que pour ce gamin frustré, ça n’a pas l’air d’avoir signifié grand-chose !

Soupir !

Normal, il est amoureux d’une autre maintenant.

Ou alors il fait tout ça juste pour me narguer ; qu’est-ce qu’il croit que ça été facile pour moi de partir, de le quitter. C’est la mort dans l’âme que je suis partie.

                   ***

Assis dans le bar d’Alex à deux pâtés de maison, où la serveuse une belle rousse ne manque pas au passage de me faire quelques œillades en nous déposant nos bières, comme si à l’heure actuelle mes pensées pouvaient être dirigées ailleurs que sur ce qui venait de se passer avec Aurore.

-         Gamin frustré ? rit Andy, qui n’a pas cessé de se moquer de moi depuis que je lui ai raconté notre échange.

Il fallait que j’en parle.

Mais voilà que mon pote de qui j’attendais quelques conseils en profite pour bien se foutre de ma gueule. Je ne vois pas ce qu’il y a de drôle dans mon récit.

-         Tu vas arrêter oui, lui dis-je agacé. C’est bon là !

-         Avoue qu’elle n’a pas tort, me dit-il en reprenant son sérieux, 3 ans sont passés Alan et tu l’as toujours en travers de la gorge

-         C’est faux, ça me laisse à 37 !

Il hausse les sourcils, dubitatif.

-         À 37 mais tu l’as embrassé ? j’imagine que la température a dû brusquement augmenté sur le coup !

Ça je ne te le fais pas dire, ai-je envie de lui dire, mais il continuerait à se foutre de moi.  C’est comme si mon corps l’avait reconnu, aucune de mes forces ne voulaient résister à cette attraction entre nous…

-         Écoute Alan, il y a deux choses soit tu oublies complètement le passé et essaie de la reconquérir à nouveau parce que ça saute aux yeux que tu en es encore amoureux ! soit définitivement tu fermes ce livre! Surtout sois réglo avec Elodie, ce serait dommage qu’elle soit un dommage collatéral de toute cette histoire !

Soupir.

Elodie.

S’il y a bien quelqu’un que je ne voudrais pas faire souffrir dans tout ça, c’est elle ; c’est vrai que ça ne fait pas longtemps que j’ai pris le pari d’essayer une relation avec qu’elle après qu’elle ait tenté de me séduire toute l’année.  Je ne me suis jamais mis dans une relation sans y être en entier et là, c’est plutôt le cas.

-         Je réitère mes propos fais un choix et arrête de te comporter en gamin ! en amour il n’y a pas d’orgueil !

       

-          

                     
L'hiver de notre amo...