Chapitre 33
Write by WumiRa
Djibril sourit devant le froncement de sourcils de son ex fiancée. En plus, il n'avait vraiment pas du tout l'air surpris de la voir.
- Je ne viens pas t'importuner, Maya. Je viens en ami.
Elle détourna le regard, tandis que son sang commençait à bouillir dans ses veines.
- Tu m'as suivie ? demanda t-elle.
- Par Allah, non. Je viens déjeuner dans ce restaurant tous les jours, depuis un moment. Je travaille dans l'immeuble en face.
Un travail ? Depuis quand ? Eh bien...
Elle reporta son regard sur lui.
- Je te l'ai déjà dit, je viens en paix. Tu m'autorises à m'asseoir ? À moins que ton mari ne soit dans les parages.
Oh si seulement...
- Assieds-toi, dit-elle.
Ce qu'il fit. C'était bizarre. Il avait considérablement changé. Et si c'était vrai qu'il n'était plus au chômage, son nouveau travail devait en être la cause.
- Donc maintenant, tu travailles... ?
- Oui, enfin. Tu te souviens du type que tu m'avais présenté à ton anniversaire passé ?
Elle pinça les lèvres.
- Stéphane.
- C'est à lui que je dois mon nouveau poste. Il m'a été d'une grande aide.
- C'est bien... Je suis sincèrement contente pour toi. Il était quand même temps.
L'un des serveurs arriva avec la commande de Maya.
- Tu n'as rien commandé ? demanda t-elle.
- Déjà. J'allais retourner au bureau, quand je t'ai vu entrer.
- Ah d'accord.
- Tu as trouvé un job ?
- Si si. Chez Lincoln.
- J'aurais dû y penser, tu es quand même la fille de...
- Mon père n'y est pour rien. J'ai tout fait moi même.
Pendant un court instant, il parut surpris.
- Sans blague.
Elle agita sa main devant ses yeux.
- Allô, j'ai presque vingt-cinq ans, tu t'en souviens ?
Puis elle haussa les épaules.
- Je ne fais pas partie de ces enfants de riches, qui s'attendent à ce que que papa ou maman lève tout le temps le doigt. Tu ne l'as jamais compris, c'est sûr.
- Tu te trompes. J'ai toujours su que tu étais différente. D'ailleurs le fait que tu acceptes de me parler après tout ce que je t'ai fait en es la preuve.
Un ange passa.
- Peut-être parce que je ne suis pas non plus indemne dans toute cette histoire ? Je t'ai quand même largué pour un autre.
Elle s'empara d'une part de pizza et la porta à sa bouche.
- Tu as l'air très épanouie et heureuse, fit-il remarquer. Ce que je n'aurais pas su t'apporter.
Moins un et elle se serait étranglée avec sa bouchée de pizza ? Épanouie, elle ?!
- Tu me permets de t'inviter à mon prochain anniversaire ?
- Oh...non. Je suis désolée.
- À cause de lui ?
- Pas à cause de "lui". Tu es mon ex, Djib, ce serait très mal vu et je ne veux pas de problèmes.
Il jeta un coup d'œil à sa montre.
- Bon OK. Peut-être que dans dix ans, les choses changeront, mais tu sais où me trouver au cas où.
- ...
- Moi non plus je n'ai rien contre toi. Au contraire, si c'était à refaire, j'éviterais de me comporter avec toi comme je l'ai fait.
Il se leva.
- Je te laisse. Prends bien soin de toi.
Il sortit du restaurant et elle put enfin complètement se concentrer sur la délicieuse pizza en face d'elle.
Au final, le fait de le revoir n'était pas une mauvaise chose ; au moins, elle était sûre d'avoir un ennemi en moins. Elle venait également de réaliser qu'en fait, ils n'avaient jamais été vraiment été amoureux. Ou plus précisément, elle ne l'avait jamais aimé pour de vrai. Sa rencontre avec lui, remontait à peu de temps après que Théo l'ait brutalement abandonnée. Elle ne se souvenait plus de pourquoi elle avait été aussi entêtée vis-à-vis de ses parents, avec une idée aussi stupide que celle de devenir sa femme, mais maintenant que Malik avait fait irruption dans sa vie, elle se demandait si pendant tout ce temps, elle n'avait pas été envoutée. Djibril ne lui faisait même pas ressentir le millième de ce que l'évocation du simple nom de Malik, pouvait réveiller en elle. Et dire qu'elle aurait pu se lier à lui à vie ! Elle n'imaginait que trop bien ce que une telle union aurait donné. Ils n'auraient peut-être pas divorcé au bout de quelques semaines, mais leurs existences à tous les deux auraient été détruites.
Dix minutes plus tard, elle interpella un serveur, régla l'addition et se leva pour retourner à son travail. Elle avait encore une heure à elle, mais le travail de la veille l'attendait et s'y mettre tout de suite, pouvait lui être bénéfique, si elle voulait partir retrouver sa mère à temps.
***
Le soir, comme prévu, elle se mit en route et une demi heure plus tard, elle débarqua chez ses parents. Elle trouva sa mère au salon, mais son père par contre, était sorti peu de temps avant son arrivée.
- C'est moi ou ton mari m'évite ? demanda t-elle, en se laissant choir dans un fauteuil.
- Laisse mon mari en paix, hein. C'est un homme très occupé.
- Han, trop occupé pour voir sa fille. En tout cas. Tu es prête ? On peut y aller ?
- Oui, je vais chercher mon sac et nous...
Dring ! Driiiing !!!
Le retentissement de la sonnerie interrompit Firda.
- Ou est Maï ? demanda Maya.
- Je l'ai envoyée. Va ouvrir s'il te plaît.
Elle se leva et se dirigea vers la sortie. Devant le portail, elle regarda à travers le judas et vit une femme richement vêtue qui attendait. Son visage lui était inconnu ; sans doute une cliente de sa mère. Elle ouvrit.
- Salamalékum ! fit la femme, le sourire aux lèvres.
- Malékoumsalam, répondit Maya. Soyez la bienvenue.
- Merci. Je suis bien chez Firda Fall ?
- Oui, vous êtes au bon endroit. Venez avec moi s'il vous plaît. Qui dois-je annoncer ?
- Oh, dis lui que c'est Awa. Sa nouvelle cliente.
Maya l'installa sur la terrasse et alla chercher sa mère.
- L'une de tes nouvelles clientes. Awa, à ce qui paraît.
- Awa ? s'étonna Firda.
- Oui. Quoi, je n'aurais pas dû la laisser entrer ?
- Mais bien sûr que si !
Elle se leva.
- Cette femme est l'épouse du ministre Thiam Diarra. Elle achète gros, celle là.
- Et moi qui pensait que les gens comme eux portaient des vêtements tout juste sortis d'usine.
- Pardon, va chercher mon sac et les catalogues que tu trouveras sur le lit.
- Mais...et la coiffeuse ?
- Ah Maya, tu fatigues. Je te parle d'argent, tu parles de cheveux ? Fais vite, là.
Alors que sa mère se dirigeait vers la porte, elle alla dans la chambre de celle ci, chercher le sac et les catalogues.
Lorsqu'elle réapparut, les deux femmes étaient à présent assises dans le salon, parlant de nouvel arrivage, de pagnes et de mode.
- Tu as rencontrée ma fille, Maya ? demanda Firda en la voyant.
- C'est elle qui m'a ouvert le portail. Elle est très belle.
- Merci, madame, répondit Maya, en déposant à côté de sa mère ce que celle ci l'avait envoyée chercher.
- Je lui disais justement que tu es l'une de mes clientes les plus assidues. Mais comment as-tu retrouvée ma maison ?
- Grâce à une amie, répondit la prénommée Awa. Je voulais être la première à voir les nouveaux pagnes Vlisco, dont tu m'as parlé au téléphone.
- Et tu as bien fait ! J'allais justement commencer à appeller les autres.
- Euh, maman ? intervint Maya, je t'appelle une fois rentrée d'accord ?
- Tu pars déjà ?
- Oui, nous reparlerons de notre sortie entre filles au téléphone.
Elle lui fit la bise.
- Bonne soirée. Aurevoir madame.
Awa lui fit signe de la main et son regard la suivit jusqu'à ce qu'elle soit parti.
- Ta fille te ressemble beaucoup, fit-elle ensuite remarquer à Firda.
- Oui, apparemment, répondit cette dernière. Tiens, voici les dessins des pagnes, tu peux y jeter un coup d'œil et me dire lesquels tu veux que je te réserve ?
***
De son côté, Malik ne rentra pas chez lui, comme tous les soirs. Après avoir quitté sœur Léa, il avait appelé sa secrétaire pour lui signaler qu'il était enrhumé, il était ensuite allé manger puis il avait pris la direction de son appartement en ville.
Maya et lui devaient y emménager dans quelques jours, mais pour le moment, il avait besoin d'être seul. Encore qu'il était sûr qu'elle allait trouver une nouvelle raison de l'énerver.
Une fois rentré, il jeta ses clés sur la table, se débarrassa de ses vêtements et passa directement dans la salle de bain. Il en sortit quelques minutes plus tard et après avoir consultés ses nouveaux mails, il se coucha et s'endormit aussitôt.
Seulement, environ deux heures plus tard, il fut réveillé par quelque chose ou plus précisément par quelqu'un. Il se tourna se le côté, croyant être la proie d'un cauchemar, mais la chose persista jusqu'à ce qu'il ouvre les yeux et se redresse brusquement.
- Maya ? appella t-il, avant de se rendre compte qu'il n'était pas avec elle.
- Ce n'est pas Maya, c'est moi.
Il reconnut aussitôt la voix.
- Rachel ?
- Désolé de t'avoir réveillé.
Malik bondit hors du lit.
- Qu'est-ce que tu fais là ? gronda t-il.
Il chercha l'interrupteur d'une main fébrile et alluma. Elle se leva à son tour et se tint immobile devant lui. En la détailla de haut en bas, il blemit en voyant qu'elle ne portait rien de plus qu'une chemise de nuit, transparente qui ne laissait aucune place à l'imagination.
- Qu'est-ce que... Tu peux m'expliquer ce que tu fous chez moi, à une heure pareille, habillée comme ça ?
Elle demeura silencieuse, tandis que des tas de questions se bousculaient dans la tête de Malik, qui malgré lui n'était pas insensible à la quasi nudité de la jeune femme. Le doute s'immisça en lui.
- On a couché ensemble ? demanda t-il, d'une voix blanche.
- Non !
- Comment...
- Je t'ai trouvé ici en rentrant.
- Ici ? Tu parles de...
- Tu m'as dit après ton mariage, que tu voulais louer l'appartement et je t'ai dit que je le voulais.
- Je ne t'ai jamais données mes clés.
- Non... Je les ai prises à ton bureau.
- Tu les as volées tu veux dire. Et pourquoi déjà ?
Elle détourna les yeux.
- Tu ne crois pas qu'il aurait été plus sensé de me réveiller ?
- J'ai essayé, je te rappelle que tu es somnanbule.
- Mais il y'a trois chambres dans ce foutu appart, tu aurais quand même pu utiliser l'une d'entre elles ! Tu es folle ou quoi ?
- Pardon. Désolée, mumura t-elle, en s'asseyant au bord du lit. Mais je...je ne vois pas quel mal il y'a à ce que nous dormons dans le même lit.
Décidément...
- Nous n'avons rien fait de mal. Cesse de me crier dessus comme ça.
- Nous ne sommes pas en Occident, Rachel, nous sommes à Dakar et même les relations entre meilleurs amis ont une limite. J'ai une femme à présent.
Sa dernière phrase eut le don de la faire réagir.
- J'ai dit que j'étais désolée. Je n'avais aucune arrière pensée.
Elle se leva.
- Je vais arrêter de venir ici, si c'est ce que tu veux, d'accord ? Mais ne sois pas fâché s'il te plaît.
- Je ne le suis pas, maugréa t-il, alors qu'au fond il se demandait si toutes les femmes de son entourage n'étaient pas en train de devenir folles.
- Je vais aller dans la chambre d'ami, déclara Rachel, en se dirigeant effectivement vers la porte. Passe une bonne nuit.
Il ne dit rien, se contentant juste de hocher la tête, jusqu'à ce que la porte se soit refermée. Son téléphone choisit également ce moment pour se mettre à sonner et Malik allait l'éteindre ou le jeter au loin, avant d'être stoppé par le nom qu'afficha l'écran.
Maya.