Chapitre 33 : Oui, je t'aime

Write by Auby88

Margareth IDOSSOU

Les événements se succèdent — comme la brillante réussite de Sibelle au CEP —, les mois aussi. Un, deux, trois, quatre, si je ne me trompe.

Tout va pour le mieux dans ma vie. A un détail près. Un être cher me manque chaque jour un peu plus : David.

LAMARTINE avait raison " Un seul être vous manque et tout votre monde est dépeuplé."


"David". Je me surprends parfois à murmurer son prénom. Depuis notre rencontre à l'inauguration du restaurant de Judith, je ne l'ai pas revu. Je n'ai pas non plus fait de démarche dans ce sens. Et lui encore moins. J'envie tellement Cynthia, elle qui l'a pour elle toute seule. Juste le fait de les imaginer ensemble me fait mal. Pourtant, je ne suis pas parvenue à définir mes sentiments pour lui : amour ou amitié. Je ne sais vraiment pas. Je ne m'efforce pas non plus à le savoir.

C'est d'ailleurs pour cette raison​ que je n'ai pas tenté de le revoir depuis tout ce temps. J'ai peur qu'en le revoyant, je me retrouve face à une évidence que je ne veux, ni ne peux accepter : "Moi, amoureuse de David."

Car ce serait comme trahir mon principe de vie le plus important : ne plus jamais tomber amoureuse, ne jamais me mettre en couple.


L'amour rend faible. L'amour fait mal. Très mal. L'amour, ce n'est pas pour moi. Mon existence est tellement compliquée ! Je soupire profondément.


Tout à l'heure, j'aurai à revoir David. Même si j'ai dû accepter l'invitation de sa mère pour ne pas la vexer, j'hésite vraiment à y aller. Un vrai dilemme, d'autant plus que madame N'KOUE me considère comme sa fille et que je l'aime comme une mère…

Son invitation m'a d'ailleurs beaucoup surprise. Je pensais qu'elle m'aurait gardé rancoeur pour n'avoir pas été correcte avec David. C'est d'ailleurs pour cela que je ne l'ai plus jamais visitée, ni appelée comme j'en avais l'habitude...



Quelques heures plus tard.

Dans la demeure des N'KOUE, je me trouve. Je suis finalement venue à l'anniversaire de noces du vieux couple N'KOUE. Je porte une robe empire rose cousue dans de la soie de Chine et des chaussures hautes. Mes cheveux sont relevés en "banane", maintenue avec des barrettes. Mon visage est au naturel.


La petite famille est présente dans la chapelle derrière la maison. Les parents de David ont voulu faire quelque chose d'assez intime. Je suis venue juste à temps avant le début de la cérémonie. De derrière, j'aperçois David assis deux bancs avant le mien. Eugénie fait son apparition aux bras de son fils aîné Paul qui la conduit jusqu'à Pierre, son époux. Je la vois radieuse et souriante. Elle et Pierre sont habillés en bazin riche de couleur blanche.

Leur renouvellement de voeux assez simple m'émeut beaucoup, ce qui n'aurait pas été le cas quelques mois plus tôt. J'ai toujours​ trouvé les cérémonies de mariage ennuyeuses et juste folkloriques.


Ces deux-là s'aiment beaucoup, malgré leur âge. Je ne peux m'empêcher de lever les yeux vers David. Cynthia lui tient la main. Une larme coule sur ma joue. Je l'essuie promptement...


A présent, nous sommes à l'extérieur de la chapelle. Je vais me "refugier" dans les bras de ma "maman" qui m'accueille avec grand enthousiasme, puis dans ceux de mon "papa" qui comme à son habitude ne tarit pas d'éloge à mon sujet. Je les félicite. Viennent ensuite le tour de Paul, Dora son épouse, ses deux enfants ainsi qu'Ariane qui sont bien heureux de me revoir. Enfin, je me retrouve devant David et Cynthia. Je salue brièvement David tout en évitant de le regarder. Quant à Cynthia, dès que je me suis approchée d'elle, elle a feint d'être au téléphone. Je n'ai donc pas insisté. J'ai laissé le couple pour revenir près de Paul, Dora et Ariane. Les bambins ont déserté le salon. Ils doivent jouer dehors. Nous avons papoté quelque peu, puis pris la direction du grand salon pour un déjeuner familial.


Ariane s'est arrangée pour que je me retrouve face à David à table. A contrecoeur, je m'asseois. Comme à son accoutumée, Cynthia ne perd aucune minute pour me rendre jalouse. Quoi qu'il en soit, je ne compte pas rentrer dans son jeu. Elle perd son temps si elle croit m'atteindre ainsi. Il lui en faut beaucoup plus. David, quant à lui, se laisse faire. Il fuit mon regard, comme je fuis le sien. Les deux tourtereaux discutent à n'en point finir comme s'il n'y avait qu'eux deux. Moi, je papote avec Ariane, tout en m'efforçant de finir mon plat. L'entrée chaude et le plat de résistance sont vraiment exquis mais je n'ai pas grand appétit.

Quant au gâteau d'anniversaire, je n'ai pris qu'une miniscule part, d'autant plus que j'évite les sucreries.


A l'instant danse, j'ai profité de la liesse commune pour aller prendre de l'air dehors. Je vais m'asseoir dans le canapé mis à l'entrée du salon. Les rires parviennent à mon oreille.


Je suis là, dans ma solitude et mes pensées, quand une main se pose sur mon épaule. Je me retourne.


- Ma fille, que fais-tu là toute seule ? Tu devrais te réjouir avec nous à l'intérieur.

- Je suis contente pour vous, vous savez ! J'avais juste besoin de libérer mes pieds un moment de ces chaussures que je porte.

- Vraiment !

- Oui, maman.

Elle s'assoit près de moi.

- Tu es sûre que c'est tout ? Parce que tes yeux disent le contraire. Ils sont tous tristes alors que c'est un jour heureux.

- N'y faites pas attention. Je vis des moments un peu difficiles ces temps-ci, mais ce n'est rien de bien grave.

- Je devine que cela a un lien avec David ?

- Non, balbutie-je.

- Tu ne sais pas mentir Mélanie, me répond-t-elle en me fixant.

- Je ne veux pas vous embêter avec mes problèmes. Vous devriez être à l'intérieur en train de danser.

- Tu es amoureuse de David, n'est-ce pas ?

Je fuis son visage.

- Mélanie, j'attends une réponse !

- Je ne sais pas, maman. Je ne sais pas. Je suis confuse.

- Dis plutôt que tu ne veux pas le savoir ou que tu te refuses à accepter cette évidence parce que tu t'es promis de ne plus retomber amoureuse. N'est-ce pas cela ?

Je hoche la tête.

- Oui, maman. C'est cela. Je pense à David tout le temps et quand je le vois, j'ai ces petits "papillons" dans le ventre, les pieds qui chancellent. J'ai mal quand je le vois si heureux avec cette Cynthia. J'aimerais bien être à sa place… Oui, je l'aime. Oui, j'aime David. Mais j'ai du mal à l'admettre parce qu'il y a longtemps que j'ai renoncé à l'amour. Et puis, il est en couple actuellement avec cette Cynthia qui le comble énormément. Je ne pense pas pouvoir l'aimer autant qu'elle. En outre, il m'évite et ne me pardonne pas.

- Viens, me dit-elle.

Tout contre elle, je me blottis.

- Tu te fais trop de mal, Mélanie. Plutôt que de garder tout cela pour toi et de souffrir en silence, tu devrais en parler à David.

- Je n'en ai pas le courage. Je ne veux pas briser son couple et je doute qu'il puisse croire en la véracité de mon amour pour lui, après que je l'ai injustement rejeté.

- Mélanie, voyons ! De quel couple parles-tu ? Cela saute à l'oeil que cette fille n'est pas faite pour lui. Leur couple ne fera pas long feu, crois-moi. Je connais mon fils et je sais qu'il se lassera très vite de cette hypocrite. Elle joue à la petite-amie modèle, gentille, toujours souriante, toujours aimable mais je sais qu'elle n'est pas si nette que cela. Elle porte juste un masque.

- Vous semblez si bien la connaître ! dis-je en souriant.

- Oui, ma fille. J'ai acquis de l'expérience en la matière au fil des années. Alors je te le redis Mélanie, bats-toi pour David. Nous faisons tous des erreurs, mais l'essentiel c'est de le reconnaître comme tu le fais. Alors, dis-lui ce que tu ressens pour lui. Il n'y a que toi qui soit faite pour lui, parce qu'il n'y a que toi qu'il aime et parce que tu l'aimes aussi. Tu me le promets ?

- Oui, maman, je vous le promets, dis-je en gardant le sourire sur mon visage.


- Enfin, je te retrouve ma dulcinée ! commence Pierre qui vient d'arriver près de nous. Que font toutes seules ici les deux plus belles femmes de la maison ?

- Vous exagérez, papa ! La plus belle femme ici c'est votre épouse !


Nous rions aux éclats.

- Allez, chères dames, on s'en va.

Nous mettons chacune un bras de chaque côté du vieux et nous regagnons l'intérieur.


Pierre va sur la piste de danse avec Eugénie. Je cherche David. Il est debout, apparemment seul. Je décide de tenter ma chance. De lui, je m'approche.


- David, peux-tu m'accorder quelques minutes ?

Il lève les yeux vers moi. Nos yeux se croisent. A présent, je n'ai plus aucun doute : J'AIME DAVID N'KOUE.


- Pour quoi faire, Mélanie ?

- Pour que nous parlions de quelque chose de très important nous concernant.

- Je t'écoute.

- Non, pas ici. Ce que j'ai à te dire est privé. Allons dehors, c'est mieux.

Il hoche la tête.

A peine je me retourne, que je reçois un liquide frais et un peu piquant dans les yeux.











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