Chapitre 34 : Le bout du tunnel se dessine
Write by Fleurie
Le lendemain matin à la clinique Mahuena
°°° Ariana °°°
La température de Lemmy ne fait que monter depuis des jours. Il nous a même fait une hypertension. Le docteur l’a pris en charge depuis notre arrivée. Il est actuellement sous perfusion. Pendant que mon mari dort, je suis sortie pour me prendre une tasse de café. Je n’ai pas fermé l’oeil de la nuit. Et je ressens une fatigue extrême.
En passant dans le couloir, je regarde à mes côtés les différentes chambres. L’hôpital et moi c’est juste une autre histoire. Je suis passé devant une chambre, dont la porte est entrouverte. Sans y accorder d’importance, j’ai continué ma route.
J’ai entendu par la suite une voix féminine derrière moi.
Voix : Ariana !
Moi ( me tournant ) : Euh oui ?
Ce n’est personne d’autre que notre avocate.
Moi ( souriant ) : Euh bonjour maître Charlotte. Comment vas tu ?
Elle ( me rendant mon sourire ) : Ça peut aller je dirai. Je suis ici à cause de ma mère. Elle nous a fait une crise hier. Ça été la panique totale.
Moi : J’espère que tout va bien à présent.
Elle ( l’air soulagée ) : Par la grâce de Dieu, on a pu éviter le pire.
Moi ( levant les yeux ) : Dieu soit loué. C’est Lemmy mon mari qui est un peu souffrant. Mais ce n’est rien de grave. Il va s’en sortir.
Elle : Okay, je t’ai vu passer et j’ai tenu à prendre de tes nouvelles.
Moi : C’est sympa de ta part. J’allais prendre un café, non loin d’ici.
Elle : J’en voulais aussi. ( Fermant la porte ) ma mère est un peu stable, on peut y aller si cela ne te gêne pas.
Moi : Mais non, pas du tout. Allons y.
Nous sommes sorties de la clinique pour aller prendre notre café.
°°° Charlotte °°°
Être en compagnie d’une femme aussi merveilleuse que Ariana, m’a remonté les idées. J’ai eu la frayeur de ma vie hier. J’ai cru qu’elle allait nous lâcher. Ma mère est âgée de la cinquantaine. Toujours égale à elle – même, elle préfère subir toutes les souffrances. Elle prête à mourir pour son mari. Je croyais que ce genre d’amour n’existe que dans les comtes de fée.
[ ... ]
Mes parents ont toujours vécu dans une harmonie parfaite. Toute personne les enviait sur leur passage. J’étais une fille très épanouie. J’avais dix sept ans à cette époque, lorsqu’ils ont eu une forte dispute. J’avais voulu répliqué et prendre la défense de ma mère, mais mon père m’avait violemment donné un coup.
Flash-back dix ans plutôt
Je revenais des cours un soir, quand j’avais surpris mes parents en pleine dispute. Mon père vociferait sur ma mère. Celle ci ne faisait que pleurer et cacher son visage. Toute la maison était en désordre. Ma mère avait des bleues un peu partout sur le corps. Elle est de teint clair, ce qui les rendaient plus remarquables. La vue de ces bleues m’avait poussée à réagir.
Moi : Lâche ma mère papa s’il te plaît. Elle ne t’a rien fait.
Lui ( les yeux injectés de sang ) : VAS DANS TA CHAMBRE LOLO
Il avait tellement crié, que j’avais cru perdre pieds. À mon âge, j’avais un caractère très tenace. Malgré son cri, je n’avais pas bougé d’un pouce. Je m’étais avancé pour me mettre entre ma mère et lui. Sûrement dépassé par ma réaction, il m’avait donné un coup dans l’abdomen. Je me tordais de douleur.
Ma mère ( à mon père ) : Tu vas me tuer l’enfant ?
Lui : Qu’elle meurt et toi aussi, bande de salopes. Vous allez me le payer.
Elle : Tu n’es qu’un lâche Stephen, tu ne nous mérite pas sniff. ( À moi ) lève toi ma chérie, on s’en va. On va quitter cette maison.
Moi ( en pleures ) : Mais pourquoi, je ne comprends rien maman. Papa que se passe t-il ?
Elle ( reniflant ) : Il n’y a rien à comprendre. Boys n’avons plus rien à faire ici.
Mon père se contentait de nous jeter un mauvais regard. Je ne reconnais ais plus cet homme qui était mon père.
Lui ( croisant les bras sur sa poitrine ) : Sortez de ma maison et ne revenez plus jamais.
Ma mère ne lui avait plus répondu. C’est ainsi que nous avions quitté cette maison. Ma mère nous avait conduit chez ma grande mère. C’était là bas, qu’on avait trouvé un refuge.
Trois mois plus tard, l’état de mon père s’était empiré. Il s’était transformé en un ivrogne professionnel. Plus rien n’allait pour lui. Il s’était endetté jusqu’au cou. Il était venu plusieurs fois présenter ses excuses à ma mère. Ma mère ayant une activité rémunérante ne supportait pas de voir son mari sombrer.
Moi ( triste ) : Maman je ne veux plus qu’il te batte.
Elle : Cela n’arrivera pas chérie. Fais moi confiance. Je pense que ton père a changé. Et qu’il a enfin compris ses erreurs.
Ma grande mère qui était silencieuse, s’était enfin décidé à placer un mot.
Grand mère : Je dis hein, maboule que tu es, tu vas retourner près de ce porc ? ( Levant les yeux au ciel ) eh Dieu c’est quoi cette chose que j’ai comme enfant dans ma maison ?
Elle : Jaime mon mari et je ne suis pas prête à le quitter. S’il est venu me présenter ses excuses, c’est qu’il regrette, et je veux lui donner une seconde chance.
Grand mère : C’est comme tu voudras. Mais ne viens pas pleurer après dans mes oreilles. Je t’ai donné mon avis. Mais comme tu es ce que tu es je te laisse voir de toi-même. J’ai fait ma part. Je ne t’ai pas mise au monde pour être le ballon de quelqu’un. C’est ton choix et je le respecte. J’ai fini.
Ma mère s’était levée pour aller vers elle. Mais le regard de ma grand mère l’avait arrêté dans son geste.
Grand mère : Vas rejoindre ton foyer.
Face à cette conversation, je ne pouvais plus placer un seul mot.
[ ... ]
J’avais suivi ma mère, et nous avions regagné notre maison. Mon père était debout devant le portail et nous avait accueilli le sourire aux lèvres. Dans mon fort intérieur il m’avait manqué.
Fin du flash-back
Comme on le dit toujours, le chien ne change jamais sa manière de s’asseoir. Mon père avait changé pour un court temps. Ses mauvaises habitudes ont repris. Après l’obtention de mon diplôme, j’ai quitté pour de bon cette maison. Ma mère a choisi d’y rester. C’est la raison pour laquelle, j’ai embauché Afi pour prendre soin d’elle quand je ne suis pas là. Si seulement mon père était là lors de sa crise, saurait été mieux. Un vieux comme lui, il traîne toujours dehors avec sa bande d’amis. Tout son monde tourne autour des petites filles et de l’alcool.
Ariana ( me touchant ) : Charlotte, ça fait plus de cinq minutes que je te parle.
Moi ( revenant sur terre ) : Euh excuse moi, j’étais ailleurs.
Elle : J’espère que tout va bien.
Moi : Euh oui.
J’ai saisi le téléphone, mais la personne a déjà raccroché. J’ai lancé à nouveau l’appel.
°°° Nora °°°
Plus d’une heure que je traîne dans son cabinet. Je l’appelle depuis mais elle ne décroche pas. J’ai pris place pour patienter un peu.
Mon téléphone s’est mis à vibrer dans ma sacoche .
Moi : Bonjour maître, j’essaie depuis de vous joindre mais en vain.
Elle : J’étais un peu occupée Nora.
Moi : Je suis dans ton cabinet, il n’y a que ta secrétaire ici.
Elle : J’ai eu un imprévu hier. C’est la raison pour laquelle je ne suis pas encore au bureau.
J’ai difficilement trouvé mon sommeil hier. Je dois apprendre cette nouvelle aujourd’hui. Qu’il pleuve ou qu’il neige.
Moi : C’est à propos de ton coup de fil d’hier.
Elle : Je me rappelle parfaitement. Je suis actuellement non loin de la clinique Mahuena. Si tu peux patienter, je vais te rencontrer dans l’après midi.
Si elle pense que je vais encore attendre, elle se trompe.
Moi : Envoie moi l’adresse et je te rejoins.
Elle : Okay, dis à la secrétaire de te remettre le dossier posé sur mon bureau. Il a une couleur orange.
Clic.
J’ai pris le dossier. J’ai tenu à ne pas l’ouvrir avant ma destination.
Une demie heure plus tard
Je l’ai trouvée assise avec Ariana autour d’une petite table. Après les avoir saluées, j’ai fait la bise à Ari avant de poser mes fesses. Elles m’ont brièvement fait part de leur visite ici.
Moi : Je suis désolée pour toi ma chérie, ( à Charlotte ) à toi aussi maître.
Charlotte : Nous n’allons tout de même pas tarder sur ce sujet. Il y a bien un autre plus intéressant. J’ai une bonne et une mauvaise nouvelle.
Moi ( impatiente ) : Ah oui dis nous.
Charlotte : Je vais commencé par la bonne dans ce cas. Les papiers que tu tiens en main sont ceux du divorce.
Mes yeux se sont illuminés de joie.
Moi : Je suis tellement émue d’apprendre une nouvelle aussi bonne.
Ariana : Enfin ma chérie, il était tant.
Charlotte : J’ai peur de gâcher ta joie par la suivante. Ronan recevras la moitié de vos biens Nora.
Moi : D’autant plus que je serai officiellement divorcée de lui c’est vital pour ma santé. Je devais me libérer de ce démon, vous comprenez.
Charlotte : Tu signes et je me charge d’envoyer celui de Ronan.
Moi : Merci pour tout maître.
Charlotte : Je n’ai fait que mon travail Nora.
Je pouvais plus attendre de partager cette nouvelle avec ma mère. J’ai pris congé d’elles.
°°° Ronan °°°
Docteur : Monsieur Da SILVA, je suis navré de vous annoncer cette triste nouvelle.
Je ne vois vraiment pas de quoi il veut parler.
Moi : Dites moi docteur, ma femme a t-elle un problème ?
Lui : Euh eh bien, elle a fait une fausse couche.
Moi ( m’exclamant ) : Mais mais comment est ce possible docteur ?
Lui : J’avoue qu’on a fait les analyses, mais on ne lui a rien trouvé qui puisse causer la perte du bébé. Et pourtant tout allait bien.
Moi : Puis je la voir ?
Lui : Elle est sous sédatif monsieur. Vous irez la voir lus tard.
Moi : C’était mon enfant. Le monde est si cruel, j’ai tant espéré cet enfant.
Lui : Une fois de plus, je suis désolé. Prenez votre mal en patience et tout ira bien. Dans ces cas, on se dit juste que c’est l’oeuvre de Dieu. Nous ne pouvons que l’accepter. Je suis sûr que vous en aurez d’autres.
Moi : Merci docteur. Je l’espère.
J’ai quitté le bureau du docteur le coeur en miettes. J’ai décidé d’aller faire un tour. Le soleil brille dehors et il fait une forte chaleur. En récupérant ma voiture au parking, j’ai aperçu Nora. Je suis descendu pour lui dire un mot.
Moi ( à sa hauteur ) : Nora chérie
Elle : Ronan ne m’adresse plus la parole. Tu recevras bientôt les papiers du divorce. Après cela nous n’aurons plus rien du tout à nous dire. Alors fais moi le plaisir de quitter mon chemin.
Moi : S’il te plaît écoute moi, je t’en conjure. Je t’aime toujours bébé.
Elle : Tu peux te la mettre ton je t’aime où je pense.
Elle m’a bien chipé avant de continuer sa route. J’ai insisté mais ce n’est pas la peine. Elle vient de me parler de divorce. C’est tout énervé que j’ai regagné ma voiture.
°°° Laure °°°
La première étape de mon initiation est le haussement. Par cette étape, je serai élevée spirituellement, et ce sera le cas chaque fois que je vais recevoir un grade. Je suis habillée en blanc et j’ai noué un foulard rouge à la tête. Je suis assise et j’attends le signal pour présenter mes hommages à ma mère devant tous les dignitaires.
[ ... ]
Après le signal, j’ai été conduite à ma mère par le président du couvent. Pendant ce rituel, j’ai juré fidélité au “ sakpata “. À la suite de cet acte solennel, j’ai été proclamé sakpatassi*. Ensuite je suis retournée m’asseoir sur un grand fauteuil spécial entourée de quatre dignitaires.
Un groupe de jeunes femmes se sont mises à défiler devant l’assistance. Elles sont vêtues de pagnes multicolores, avec des dessins de poudre de différentes couleurs sur la peau. Elles dansent au rythme des tam-tams que jouent les hommes. Leurs pas sont mélangés à la terre rouge ferme. Ce spectacle est celui qui me fascine le plus chez nous. C’est si magnifique.
[ ... ]
Après les danses, les salutations, le fauteuil a été haussé à trois reprises par les dignitaires. Ensuite j’ai été promenée autour de notre vaudoun pendant que l’assistance acclame. Tout ceci est tellement nouveau pour moi. La veille j’ai été servie à des échelons préliminaires. À tout cela, des sacrifices d’animaux ont été faits au dieu. Ma mère est un être purifié en communion permanente avec le dieu “ sakpata “, jouissant de son appui surnaturel, et de la constante protection de son esprit protecteur.
J’ai fait voeu d’une obéissance et d’une discipline rigoureuse. Puisque tout est transmis par tradition orale, je dois être douée d’une mémoire supérieure et d’une remarquable intelligence, ce qui me permettra d’apprendre et de comprendre les divers rites. Je dois également comprendre tout sur les cérémonies, les rythmes des tambours, les chansons la nomenclature du “ sakpata “, son comportement pendant la transe, ses goûts et couleurs préférés, les prières et invocations, la terminologie traditionnelle en fon.
Pendant tout ce temps, je me posais des tas de questions. Mon esprit s’embrouille à chaque instant. L’un des dignitaires s’est levé pour venir à moi.
Lui : À présent ma fille, tu devras consacrer la majeure partie de tes jours à l’apprentissage de la profession et, par conséquent, tu ne pourras pas vaquer à bon nombre de tes occupations habituelles.
Moi : ...
[ ... ]
À la fin de la cérémonie, tout le monde s’est régalé. Je n’avais pas la tête à me réjouir de mon couronnement. Je pense ma fille qui m’attend depuis des semaines.
Ma mère ( à mon oreille ) : Réjouis toi ma fille, tu es maintenant à la tête de notre patrimoine familial. Je sens que je peux mourir en paix.
Moi : Maman je dois aller à Cotonou pour défendre ma fille.
Elle : Je le sais, tu as entendu le dignitaire tout à l’heure. Je te laisserai partir à une seule condition.
Moi ( un peu gaie ) : Laquelle ?
Elle : À condition que tu me promets de revenir.
Moi : Oui je reviendrai.
Elle : Dans ce cas, tu devras suivre pendant deux semaines les enseignements. Ensuite tu pourras quitter. Tu n’as pas le droit de quitter le couvent avant cette période.
Moi ( déçue ) : D’accord.
C’est avec cette solution, que j’ai pu toucher à mon plat...