Chapitre 35

Write by Auby88

Chanson intro du chapitre


Qui sait si je l'aime, problème qui toujours m'étreint

Face à son tendre dilemme, je perds tous mes moyens

Je vivais ma jeunesse en fleur, mes jours ont changé de couleur

Est-ce l'amour, est-ce l'amour,

Ce mal extrême qui vient perturber mon cœur ?


Je ne sais que dire, prédire, bien qu'il soit changeant

Son charme étrange m'attire et à corps défendant

Je vis de craintes et de passions, obsédée par cette question

Est-ce l'amour, est-ce l'amour

Qui me déchire et qui perturbe ma raison ?


J'ai bien du mal à m'expliquer ce qui m'attire en lui

Est-ce l'estime ou l'amitié, ou son esprit ?

Quand il me regarde, mon cœur se lézarde

Il me dit "Prends garde, prends garde, prends garde"


Près de lui je reste sans geste, bien que révoltée

Quoi que je dise ou conteste, il me faut pardonner

Ses faiblesses et sautes d'humeur, ses foudres, ses élans du cœur

Est-ce l'amour, est-ce l'amour, est-ce l'amour

Ou nuit et jour, n'est-ce qu'un leurre ?


Dois-je le garder pour combler le vide de ma vie ?

Suis-je simplement aveuglée ou asservie ?

Dans ma tête lasse, il prend trop de place

Faut que je l'efface, l'efface, l'efface


Parfois je tempête, projette de fuir loin de lui

Mais mon cœur force ma tête et vient troubler mes nuits

Quand, des silences de mon cœur, monte en moi comme une rumeur

Est l'amour, est-ce l'amour, est-ce l'amour

Au vent des jours qui me fait peur ?


Est-ce l'amour ? - Aznavour



**********


Nadia Page AKLE


- Laisse-moi porter tes affaires jusqu'à la voiture, commence monsieur Eliad en se penchant vers moi.

- Je peux le faire ! objecté-je aussitôt.

- Bien. Je n'insiste pas.


Je porte ma valise toute seule jusqu'à l'arrière de sa bagnole. Nos mains se frôlent tandis que je la lui remets. Il lève les yeux vers moi. Je retire promptement ma main et m'éloigne de lui...


- Après toi, PAGE ! poursuit-il en ouvrant la portière avant du véhicule.

- Je préfère rester derrière.

- D'accord.

Il s'apprête à ouvrir l'une des portières arrière quand je l'arrête.

- Je peux le faire toute seule.

- Comme tu veux ! achève-t-il sèchement en contournant la voiture pour atteindre la portière côté chauffeur.



Nous roulons depuis plus d'un quart d'heure. Pourtant, aucun mot n'est sorti ni de sa bouche, ni de la mienne. Et ça demeure ainsi jusqu'à ce qu'on atteigne sa maison. Tant mieux...



Nous voici devant la porte qui mène dans le hall de la maison. J'hésite à entrer. Trop de mauvais souvenirs me reviennent à l'esprit. Monsieur Eliad ouvre la porte et regarde en arrière.

- PAGE, tu viens ?

J'aquiesce et refais un pas en avant, convaincue que la fillette qui m'attend impatiemment à l'intérieur en vaut vraiment la peine.


Je laisse tomber mon sac à main, tandis que je la vois accourir vers moi. C'est l'un des plus beaux jours de ma vie. Je ne pensais pas que revoir Milena me donnerait tant de joie au cœur.


- Tata Nadia ! Tu es enfin là !

- Oui, mon ange.

- Tu m'as tellement manqué.

- Toi aussi.

- Merci beaucoup, papa !


Toutes deux regardons en direction de son père qui hoche la tête.

- Madame Jeanne, vous aiderez la nounou à s'installer dans la chambre d'amie.

- La chambre d'amie ! m'étonné-je.

- Oui, PAGE.

- Je préfère rester avec Milena.

- Moi aussi, je veux que Tata Nadia reste avec moi ! renchérit Milena, en s'accrochant à moi.

- Ma chérie, ce ne sera pas possible parce que le petit lit qu'elle occupait dans ta chambre n'y est plus. Mais tu n'as pas à t'inquiéter. Sa chambre est juste en face de la tienne et elle pourra à loisir dormir avec toi…


Monsieur Eliad me fixe avant d'ajouter :

- Madame Jeanne s'est donné un mal fou pour apprêter la chambre d'amie. N'est-ce pas ?

- Oui monsieur ! répond la gouvernante en affichant une mine triste.

- Alors, je suis d'accord, papa ! Merci pour l'avoir ramenée. Tu es génial !


Elle va l'embrasser puis revient vers moi.

- Vous pouvez faire monter les valises de PAGE.

- Bien, monsieur.


Je laisse faire. D'ailleurs, aurais-je encore pu dire Non dans de pareilles circonstances ?


- Quant à vous deux, je vous laisse entre amies. Vous devez avoir beaucoup de choses à vous dire.


Sur ce point au moins, je suis d'accord avec cet homme. Milena et moi avons beaucoup de choses à nous raconter. Je me prépare déjà à l'interrogatoire qu'elle me fera subir tout à l'heure. Mais celui que j'appréhende le plus, c'est celui de Sarah la cuisinière (Rire).



************


Des semaines plus tard.


Eliad MONTEIRO


Je raccroche l'appel en souriant. Edric est tellement tombé amoureux de la Martinique qu'il veut définitivement s'installer là-bas. Il me suggère même de faire comme lui ou de venir y passer des vacances. Comme si tout le monde était aussi libre que lui !


Je viens de recevoir des notifications de WhatsApp. J'imagine que c'est encore lui. Exact. Il vient de m'envoyer plein de photos. Je les parcours en murmurant : "Sacré Edric" !

Au moins, je me réjouis d'une chose : il est très heureux.


Tandis que je fais défiler les photos d'Edric, mes doigts tombent sur une photo de Maëlly présente dans la mémoire du téléphone. Je soupire en pensant à elle. Ses parents l'ont contrainte à aller passer des vacances familiales quelque part en Europe. J'espère vraiment qu'elle a réussi à se sortir de l'état dépressif dans lequel elle plongeait. Sinon, j'aurai indéfiniment ce poids sur ma conscience...


Je dépose le mobile puis replonge dans mon travail. Avant de quitter le bureau, il me faut finaliser le plan architectural d'un restaurant quatre étoiles pour un client étranger.


Quelle heure fait-il ? 23 heures.

23 heures et je suis encore au cabinet ? Bizarre ! N'est-ce pas ?

Oui, je l'admets. Mais c'est ça mon quotidien depuis le retour de PAGE chez moi. Il m'arrive même de rentrer beaucoup plus tard ou de passer la nuit au bureau.


Pourquoi ? Parce que je veux me faire le plus rare possible chez moi. Et même quand j'y suis, je deviens Monsieur INVISIBLE. Pourtant, je suis le propriétaire des lieux. Ironique, n'est-ce pas ?


Oui, c'est ironique. Cependant, c'est mieux ainsi. Car plus je resterai loin de la nounou de ma fille, mieux ce sera.


Depuis combien de temps est-elle revenue ? Je n'en ai aucune idée. Je sais juste que cela ne date pas d'hier. Et jusqu'à quand continuerais-je de m'isoler ainsi ? A cela aussi, je n'ai aucune réponse concrète à donner.


J'ai assez cogité aujourd'hui ! Ça suffit ! Je range mes affaires et quitte le bureau. Tout est calme dans le couloir. Demain, ça grouillera encore de monde…


Des minutes plus tard.

Tandis que j'arrive au deuxième étage de ma maison, j'aperçois PAGE qui quitte la chambre de Milena pour la sienne. Cela n'a duré que quelques secondes, mais j'ai eu le temps de remarquer qu'elle portait une jolie nuisette.


Je secoue la tête à plusieurs reprises pour chasser cette image d'elle de mon esprit et rejoins rapidement ma chambre. J'ai chaud, très chaud. J'ôte à la hâte mes vêtements puis file à la douche. L'eau froide me remettra les idées en place. C'est sûr !


Peine perdue. Je décide de tenter une autre approche : m'efforcer de penser à autre chose qu'à elle. Je n'y arrive pas non plus. Diverses images de PAGE défilent en permanence dans ma tête. Et le pire, c'est que y'a Popol qui se lève.


Respire, Eliad ! Eliad ! Respire ! Respire à fond. 1,2,3,4,5…

Ça ne sert à rien. Là, Je n'en peux plus.


Je regarde en direction des photos de Camila puis lui murmure "PARDONNE-MOI" avant de quitter ma chambre.



***********


Nadia Page AKLE


Ce soir, je peine à dormir. Alors, j'ai décidé d'écrire un peu. Je suis concentrée dans mon activité quand la porte s'ouvre bruyamment. Qui vois-je ? Monsieur Eliad. Je me lève aussitôt.


- Que faites-vous ici ?

- J'ai besoin que tu me guérisses, PAGE !

Il me suffit de voir ses pupilles dilatées  et cette énorme bosse qu'il traîne devant lui pour comprendre de quelle guérison, il s'agit.

Ce serait mentir que de dire que cet homme ne me fait aucun effet, que tout en moi ne le désire pas. Cependant, je décide de jouer la carte de l'indifférence avec lui.


- Je ne suis pas la personne qu'il vous faut. A présent, veuillez vous retirer de ma chambre.


Il avance vers moi. Je recule.

- Tu es la seule à pouvoir le faire, PAGE ! La seule qui me fasse de l'effet au point de me retrouver dans un état pareil ! La seule qui hante mes pensées et que je désire depuis si longtemps. Oui, depuis ce jour où je t'ai vue toute nue dans la douche.

- Que dites-vous ? demandé-je intriguée.

- Ce détail n'est pas important. Tout ce que je veux, c'est faire UN avec toi.


Je secoue la tête et lui réponds sur un ton plein d'ironie.

- Avec moi la catin, l'impure, la sale, l'intouchable, l'ordure… ? Vous avez oublié ?

- Je …

- Sortez de ma chambre ou je crie !


Malgré ma menace, il continue d'avancer vers moi.

- Alors, crie parce que je ne sortirai pas d'ici tant que…

- Ne faites pas un pas de…


Le "plus" reste coincé dans ma gorge. Monsieur Eliad vient de me coller au mur et de s'emparer de mes lèvres avec fougue. Je résiste quelques secondes mais finis par m'abandonner à lui, trahie par mon cœur qui continue de battre intensément pour lui et par ce brasier dans mon bas-ventre qui me fait perdre mes sens...


Sans réagir, sinon frissonner, je le regarde me déposséder en quelques secondes de ma nuisette puis du carré de tissu qui couvre ma nudité. Ses mains se hasardent partout sur mon corps tandis que ses lèvres déposent des baisers suaves dans mon cou.


Comment résister à ces sensations nouvelles et agréables qui envahissent tout mon être ?



Il est là, sur le lit, au-dessus de moi.

Je commence à stresser un petit peu. J'ai peur de ne pas être à la hauteur de ses attentes : soit d'en faire moins que nécessaire, soit d'en faire plus que nécessaire. Car cela remonte à longtemps que je n'ai pas été avec un homme... Car c'est la première fois que je suis avec quelqu'un qui n'est pas un client, mais l'homme que j'aime.


- PAGE, arrête de stresser et détends-toi. Je ne te ferai aucun mal. Je te le promets.

J'acquiesce et m'abandonne à nouveau à ses caresses...



Nos yeux se fixent tandis que je l'accueille dans la douce moiteur de mon intimité. Au départ, je ressens une petite gêne, peut-être causée par le préservatif qu'il porte, mais finis par me sentir complètement à mon aise.

Je me sens si bien, je me sens si femme, je me sens si fière, je me sens si entière, je me sens si complète... avec cet homme.

 

Avant, je n'avais qu'une envie, que le client au-dessus de moi jouisse vite et fiche le camp. Mais aujourd'hui, c'est différent. Je veux que ce moment s'éternise.


- Tu aimes ?

- Oui, réponds-je faiblement en resserrant mes jambes autour de lui.

- Tu me… rends fou, PAGE ! Je suis tellement heureux que tu sois enfin mienne. Je...me sens si bien, si homme en étant en toi, dans cette fournaise si reconfortante.

Je lui souris et passe mes mains dans ses cheveux, puis caresse ses bras.


Nous poursuivons notre "corps-à-corps" plutôt hmmm. Je manque même de mot pour le qualifier, tellement je suis emportée. (Rire)


Je gémis intensément tandis qu'il titille mes tétons en se mouvant en moi, alternant lenteur et rapidité...


Il semble près de la jouissance finale. Ses mouvements sont désordonnés... Je l'entends grogner de plaisir avant de se laisser tomber près de moi. Avant ça aussi me répugnait mais pas aujourd'hui. Parce que "mon homme" vient de "guérir sexuellement", grâce à moi. Et puis le voir si vulnérable me fait l'aimer davantage. Je promène mes doigts dans ses cheveux, son visage avant de déposer un long baiser sur sa joue.


- Merci, PAGE.

Pour toute réponse, je lui souris.

Il reste ainsi quelques secondes puis se lève et va en direction de la salle de bain...



La magie vient de finir. Retour à la réalité, PAGE ! pensé-je au fond de moi.

Tout à l'heure, il viendra certainement me dire "Bonne nuit, PAGE. Nous avons passé un très bon moment ensemble. On remettra peut être ça une autre fois. En attendant, je vais dans ma chambre. Je dois me lever tôt pour me rendre au boulot demain".


Je descends du lit, enfile ma nuisette pour venir me rasseoir sur le lit. J'utiliserai la douche après son départ.

Il sort de la salle de bain et contre toute attente, revient se coucher près de moi. Ses bras se resserrent autour de mon corps.

- Une fois encore, je te remercie pour ce moment magique ! J'espère qu'il y en aura plein d'autres !


Je me dégage de ses bras.

- Vous devriez aller vous coucher, monsieur Eliad. Vous irez travailler demain matin et moi aussi !

Je tente de quitter le lit, mais il me retient.

- Ne te méprends pas sur mes intentions ! Je n'ai pas dit que je voulais que tu sois juste ma partenaire sexuelle...J'attends beaucoup plus de toi, PAGE... Je veux qu'on ait une relation sérieuse.

- Je n'ai pas envie d'être une fois encore désillusionnée ou pire de finir comme Maëlly !

- Avec toi, ce sera différent !

- Différent ! J'en doute beaucoup parce que vous êtes juste attiré par moi. Vous ne m'aimez pas, monsieur Eliad.

- Et toi, tu m'aimes ?

- Vous en doutez encore ?

- Je veux l'entendre, PAGE.

- Si je ne vous aimais pas, énormément d'ailleurs, vous pensez que je vous aurais laissé me toucher après toutes les horreurs que vous m'aviez dites ?


Il prend mes mains et les embrasse.

- Alors aime-moi pour deux, en attendant que je puisse véritablement répondre à tes sentiments.

- On ne force pas l'amour, monsieur Eliad. Ça vient et ça part comme ça veut. Et puis, les relations à sens unique sont toujours vouées à l'échec.

- Notre relation ne sera pas à sens unique PAGE. Certes, je ne suis pas en mesure de te dire que JE T'AIME mais il est certain que tu occupes une place importante dans mon coeur. Et tout peut changer demain.


Il me regarde intensément.

- Je te veux dans ma vie, PAGE ! Je ne veux plus le nier. C'est sincère.

- Malgré mon passé ?

- Je te veux telle que tu es. Es-tu convaincue, à présent ?

- Vous êtes si imprévisible que…

- Donne-moi une chance de te prouver que j'ai changé et que je peux réellement aimer une autre femme que Camila. Crois-moi. Cela me prendra un peu de temps, mais j'y arriverai. Pour toi. Pour moi. Pour nous.


Je m'entends dire OUI. Il prend ma main, l'embrasse puis fait pareil sur mon front, ma joue avant de s'emparer de mes lèvres. Ensuite, il me serre tout contre lui. J'esquisse un large sourire.


Je suis consciente que son entourage s'opposera peut-être à notre relation et que miss Maëlly, bien que loin, ne voudra pas renoncer à monsieur Eliad, mais je reste confiante que mon amour pour lui me donnera la force de tout supporter.


- Au fait, monsieur Eliad, vous faisiez tout à l'heure référence à moi sous la douche.

Il me pince le nez.

- Pourquoi tiens-tu à tout prix à connaître mon secret ?

- Je suis un peu curieuse, c'est tout.

- La curiosité est un très vilain défaut, je te rappelle.

- Mais…

- Non, je ne te dirai rien, PAGE. Point barre.

- D'accord ! Vous avez gagné.

- Quand est-ce que tu arrêteras enfin de me vouvoyer ? A chaque fois que tu le fais, j'ai l'impression d'avoir cinquante ans de plus que toi ! Imagine !


Je ne peux m'empêcher de rire, rien qu'en voyant la mine qu'il fait.

- D'accord, je ne vous…

- PAGE !

- Je m'excuse. C'est plus fort que moi !

 

Il est pris d'un fou rire. Moi aussi, je ne me prive pas de rire. C'est si beau de le voir rire ainsi. C'est si beau de le voir si heureux. Je l'aime tellement, cet homme-ci. Tellement !

















ÂMES SOLITAIRES