Chapitre 38 : À chacun son mérite
Write by Fleurie
°°° Laure °°°
Depuis ce jour où il m’avait ramené à la maison, nous avons gardé le contact. Chaque jour que Dieu faisait, il m’attendait au puits. C’était un plaisir pour moi de cheminer avec lui, au retour. Nous parlions de tout et de rien, tout en marchant. Plus les jours passaient, et j’ai commencé par développer des sentiments à son égard. J’avais tellement peur, car c’était la première fois, qu’une telle chose m’arrivait. Honteuse et timide que j’étais, je ne pouvais lui faire part de mes sentiments. Et pourtant, il ne cessait de me dire les siens, toutes les fois que l’occasion se présentait. Chacun de ses gestes le prouvait. Il était le premier homme à mettre tous mes sens en éveil, quand j’étais en sa compagnie. C’était juste magique.
Ismael m’avait offert un petit portable. Connaissant le genre de mère que j’avais, j’étais tout le temps prudente. De fil en aiguille, Ismael et moi avions entamé une relation amoureuse. Après des mois, notre relation allait pour le mieux. J’avais découvert ce qu’était l’amour. Il voyageait souvent sur Cotonou et Abomey. Puis un samedi, il devait repartir à Cotonou. C’était le jour le plus triste de ma vie. Il allait une fois de plus me laisser. J’ai eu trop peur de ne plus le revoir.
Moi ( triste ) : Reste avec moi, ne pars pas.
Lui ( prenant mes mains ) : Laure je rentre pour mes affaires. Je ne peux jamais t’abandonner. Tu sais très bien combien je tiens à toi. Tu n’as pas à t’en faire. Fais moi juste confiance.
Avec tout cet amour et cette journée de vivre, je ne pouvais que lui faire confiance.
Moi ( baissant les yeux ) : ...
Lui ( soulevant mon menton ) : Regarde moi ma chérie. Je reviendrai te voir. Je te le promets, je t’aime tu sais bien.
Moi ( d’une petite voix ) : Oui moi aussi. Je compte bien te revoir Ismo.
C’était un diminutif par lequel j’adorais appeler. Au début, il le trouvait débile.
Lui : Il est temps que je parte Laure.
Il m’avait fait un bisou sur la tempe. J’avais fermé les yeux, pour immortaliser cet instant dans ma mémoire. Je l’imaginais chaque fois que je ressens son vide.
P
Moi ( hésitant ) : Un instant s’il te plaît.
Lui : Oui ma chère ?
Moi : Épouse moi.
Que vouliez vous ? C’était mon seul espoir qu’il n’allait pas m’abandonner. Je ne savais pas d’où venait cette idée. Mais ce qui était sûr, je le désirais tant. Je ne savais même pas ce qui m’était passé par la tête. Une femme qui demande à un homme de l’épouser. Il fallait être vraiment folle, pour le faire. Et je croyais l’être.
Lui : Tout ce qui fera plaisir à ma chérie. Je t’aime et je vais t’épouser.
J’avais sauté à son cou, oubliant ainsi le monde qui nous entourait. Ce n’était que nous qui comptions à mes yeux.
[ ... ]
Ma mère avait difficilement accepté ce mariage. Malgré ses doutes, je m’étais quand même mariée à lui. Après la célébration, il était reparti à Cotonou. A son retour, il avait pris toutes ces dispositions et je l’avais suivi pour la ville.
Arrivée en ville, j’avais découvert le vrai de Ismael. Monsieur était déjà marié à une autre. Ce qui m’avais amené à être la deuxième épouse. J’étais très jeune pour divorcer. Et quand je pensais à comment tour cela était arrivé, je n’avais que la rage au coeur.
Dans la maison, je n’avais pas ma place. Sa première femme me prenait pour une domestique. Elle me traitait de villageoise et j’en passais. Ismael me défendait toujours car il m’aimait. Un jour, j’étais dépassée par les événements et je m’étais battue avec elle. Cela avait duré des mois, il fallait réagir. J’en avais assez de me laisser malmener de la sorte. Mais cette bagarre s’était mal terminée. Je m’étais retrouvée à l’hôpital, le corps brûlé par l’eau chaude. À ma sortie, il m’avait loué une chambre au centre ville. C’était à Porto-Novo. C’était le calvaire que je vivais. Sa femme m’envoyait des sorts mystiques. Fatiguée un jour de toutes ces souffrances, j’avais pris mes jambes à mon cou. Malheureusement je ne pouvais retourner au village. Ma mère m’aurait chassé, car elle m’avait prévenu. Et la connaissant, j’avais préféré éviter son humiliation. Mais j’étais aveuglée par l’amour de cet homme.
[ ... ]
Ismael ne cessait de m’appeler et de m’envoyer des textos. J’avais fini par changer de carte sim. Le seigneur m’avait aidé et j’ai rencontré madame Léontine. C’était ainsi que j’avais été embauchée. Et ma vie allait mieux.
[ ... ]
Depuis ce jour, je n’ai plus jamais revu cet homme. Et le voilà qui est assis aujourd’hui à mes côtés. Que le monde est petit.
J’ai gardé le silence, malgré tout ce qu’il me disait. Une fois à destination, il m’a suivi. Je suis descendue sans regarder derrière. Depuis que je fuis les palabres, il fait maintenant qu’ils viennent me trouver.
Moi : Nous n’avons rien à nous dire Ismael.
Lui : Tiens, c’est ma carte de visite. J’aimerais tellement te revoir, j’ai trop de choses à te dire.
J’ai fini par lui arracher la carte des mains. Je ne sais pas encore ce que je ferai de lui. Après tout, trente bonnes années sont déjà passées. Mon esprit est embrouillé.
°°° Basta °°°
Je ne vous dis pas tout ce que je traverse. J’ai été incarcérée et c’est la galère totale, tsuiiip. Je fais des corvées pas possible. Je ne sais pas si je vais m’en sortir. Et pourtant je n’ai tué personne. On me bastonne régulièrement. Ce n’est vraiment pas la joie ici. Je souhaite tellement que tous ceux qui me détestent viennent croupir ici. D’abord j’ai eu droit à un welcome très dégoûtant. J’ai empiré ma situation la dernière fois. Lors d’une bagarre, j’ai par accident poignardé une femme. Elle est gravement blessée. Je voulais juste me défendre. Je ne sais pas si elle va survivre. C’est l’enfer ici. Je ne sais plus quoi faire. C’est dur sniffff.
Personne n’est venu me rendre visite. Ronan a comme disparu de la surface de la terre. Je n’ai aucun signe de lui, je suis toute seule dans cet endroit. Je suis toute seule à payer pour mes crimes, pendant qu’il se pavane dans la ville. S’il pense s’en sortir de cette manière, il se fout le doigt dans l’oeil. C’est la faute à cet idiot de Sylvain et son allié. S’ils avaient gardé leur silence, je, ne serais pas ici. Et pourtant, j’ai toujours été très généreuse envers eux. Comme quoi, l’être humain est toujours ingrat.
J’ai paresseusement pris le linge sale. Après avoir pris la bassine et mon détergent, je me suis mise au travail.
Splashhh !
Moi ( me tournant ) : Quelle pute vient de me faire ça ?
Elle : Ose ouvrir ta seule gueule et je te fais ton portrait.
Ce n’est qu’à ce moment que j’ai su de qui il s’agit. C’est la doyenne de ma cellule.
Elle : Qui t’a autorisé à prendre ça ( désignant le petit seau à côté ) ?
Moi : Euh personne je
Elle s’est dangereusement approchée de moi. Elle m’a attrapée par le menton.
Elle ( d’un oeil sévère ) : Que ce soit la première et la dernière fois, que tu touches à mes effets. La prochaine ( caressant ma joue ), je m’occuperai de ce joli visage.
J’ai avalé ma saliver, marquant ma frayeur. Cette femme m’effraie au plus haut point. Elle m’a lâché avant de partir. Et voilà comment je passe mes jours dans ce trou à rat.
Une heure plus tard
Garde ( tapant sur la cellule ) : Tu as de la visite meurtrière.
Je vous jure que parfois, j’ai envie de cogner ces gardes de merde ou de les étrangler. Je me suis précipitée pour me lever. C’est la première fois qu’on me rend visite. Comprenez ma joie.
°°° Nora °°°
Je ne sais même pas ce qui m’a pris de venir ici. J’ai eu une soudaine envie ce matin, de rendre visite à cette vipère. Je sais qu’elle ne le mérite pas. Mais néanmoins je dois la voir. L’envie de lui crier ma joie à la figure me démange depuis.
J’ai fait mon entrée dans la prison civile de Cotonou. Cet endroit est vraiment morose. Je me demande souvent s’il est humain de laisser ses semblables là. Mais quand j’y pense aussi, je réalise que certains le méritent vraiment. Après que l’un des gardes m’ait annoncé, j’ai pris place. J’ai regardé autour de moi. Au moment de détourner mon regard, Basta a fait son irruption dans la salle. Rien qu’à voir l’expression de son visage, je peux dire que je suis venue au mauvais moment. On dirait qui a perdu sa joie. Mais je n’ai rien à cirer de son humeur. Le garde nous a toutes les deux regardées avant de sortir de la pièce.
Moi : Alors comment se porte ma chère Basta ?
Elle m’a bien regardé avec un mauvais oeil avant de poser ses fesses.
Elle ( d’un regard rempli de haine ) : Que fouts tu ici ?
Moi ( souriant ) : Je suis venue te dire combien ça me fait plaisir de te voir ici.
Je me suis mise à rire à gorge déployée. Ce qui l’énerve au plus haut point. J’ai aperçu une marque de blessure sur son avant bras. C’est sûrement un coup reçu lors d’une bagarre. L’une des conséquences de ce trou.
Elle : Si tu as finis de te moquer de moi, bah tu peux te barrer.
Moi : Ce n’est que le début de ton calvaire. Tu as pensé me détruire. Mais regarde moi, ton plan a échoué. Je plains ton cas. Voici où ta jalousie et ton envie démesurée t’ont conduit.
Elle : Ferme la et dégage, sinon.
Moi ( soutenant son regard ) : Tu ne peux rien me faire, figure toi que j’y suis passée avant toi. Alors ne me sous estime pas.
Elle ( hurlant ) : Garde.
Moi ( riant ) : Tu me fais de la peine. Mais je ne peux rien pour toi.
Elle s’est subitement mise à ma hauteur. Nous nous sommes affrontées du regard. J’allais lui en coller une. Mais le garde est apparu derrière elle. Mieux je me calme.
Moi : Je préfère ne pas me souiller les mains.
Elle : Je reviendrai Nora, ne chante pas si vite ta victoire.
Moi ( criant ) : Si ça te pique saute et bois de l’eau, vipère.
Le garde l’a entraînée. J’avoue que j’ai réagi comme une gamine. Mais cela m’a permis de libérer cette haine que je ressentais pour elle.
C’est avec le coeur rempli de joie, que j’ai quitté ces lieux. J’ai mis mes lunettes de soleil avant de m’installer dans la voiture.
[ Sonnerie téléphone ]
Le nom du bel homme aux yeux marrons s’est affiché.
Moi : Allô Dylan !
Lui : Bonjour Nora,
Moi ( directe ) : À quoi dois je cet appel ?
Lui : Euh au fait c’est pour une urgence. Je vais t’envoyer l’adresse par kiff.
Moi : Euh Okay.
Lui : Merci
Clic.
Je me demande bien ce qu’il a de si urgent qui nécessite ma présence. Je vois bien dans son jeu. Il suffit qu’il soit dans les parages, et je me sens déstabilisée.
[ .... ]
Comme convenu, je me suis rendue à l’adresse indiquée. Je suis descendue de ma voiture. Après avoir ôté mes verres, j’ai aperçu notre monsieur adossé à sa voiture. Il porte un jean slim noir avec un polo blanc. Les mains enfouis dans les poches, il a son regard rivé dans ma direction. Il est tellement séduisant et craquant, avec ses jolis bras musclés. Je me suis rapprochée de lui avec un large sourire aux lèvres.
Lui ( répondant à mon sourire ) : Bienvenue Nora.
Moi : Merci.
Lui ( désignant la voie ) : Alors on y va ?
Moi ( ne comprenant rien ) : Où allons nous Dylan ?
Lui : C’est une surprise. Suis moi et tu verras.
Il a ouvert la portière du côté non chauffeur de sa voiture.
Moi : Et la mienne ?
Lui : Je m’en charge. Tu n’as pas à t’en faire.
Je m’y suis engouffrée sans demander mon reste. Il a contourné pour en faire autant. Il a mis le contact et nous sommes partis. Durant le trajet, je garde mes yeux rivés sur la route. C’est la première fois que je suis toute seule avec lui. Je ne sais plus quoi dire. Ayant remarqué ma gêne, il a mis la musique. Ce qui a un peu détendu l’atmosphère.
Moi : Tu aimes le jazz ?
Lui : Oui je l’adore.
Moi : Okay.
Ça été la seule question que je lui ai posée. Nous sommes enfin arrivés à destination.
[ ... ]
Devant nous, se trouve un jet privé.
Lui : Nora, voici mon jet privé. Je t’offre le plaisir de te le faire découvrir.
Je suis fascinée par sa manière de dire les choses. Et surtout ce ton spécial qu’il a d’appeler mon nom.
Moi ( étonnée ) : Je ne te savais pas pilote.
Il a longuement souri, ensuite il a plongé son regard dans le mien.
Lui : Il y a pleines de choses que tu ignores de moi. Si tu me permets, tu les découvriras davantage. Mais pour l’instant, laisse moi te montrer mes talents de pilote.
Moi : Okay.
Nous sommes montés à bord. Il m’a aidé à mettre ma ceinture de sécurité...
Quelque part à Cotonou
Des bruits de pas se font entendre. Un homme est poursuivi par un groupe de personnes. Malgré les paroles et les cris de ces derniers, il s’est entêté et continue son chemin. Dans son élan, un coup de feu s’est fait entendre...