Richard venait de lui remettre dans la main une carte sur laquelle il était mentionné « Le Phénicien ». Et sans attendre la réaction de Chantal, il tourna sur ses talons et rejoignit ses amis de l’autre côté de la piste de danse. Il but une dernière gorgée d’un verre de whisky, salua ses amis à qui il glissa des liasses de billets de dix-milles pour terminer la soirée et se retira. Elle le regarda s’éloigner tel un prince fier d’avoir accroché un autre gibier à son tableau de chasse. Il ne savait pas encore qui elle était réellement et lui ferait voir de toutes les couleurs. Elle ne remarqua pas que le temps était si avancé et demanda au serveur de lui conserver la bouteille de champagne au frais. Elle comptait revenir fêter dans une semaine sa victoire sur ce coureur de jupons avec son propre champagne. Elle régla l’addition également et prit congé de ses copines. Son sommeil fut agité ce soir car elle se posait mille et une questions : fallait-il aller à ce dîner ? Qu’attendait-il d’elle ? Si elle n’y allait pas, ne penserait-on pas qu’elle jouait juste à la dure mais était une peureuse ? Elle ne s’était même pas rendu compte qu’elle s’était envolée dans les bras de Morphée. Ce fut la sonnerie du réveil qui la tira du lit. Il sonnait déjà sept heures du matin. Une dure journée s’annonçait.

Elle passa la journée à penser à quelle tenue mettre pour faire bonne impression tout en restant simple. Elle faisait tellement de combinaisons que toute sa garde-robe s’était retrouvée éparpillée sur le lit. Malgré cela, elle avait l’embarras du choix. Elle dût appeler son amie Josiane pour lui donner un coup de main. C’était sa conseillère en matière d’habillement. En plus des cours qu’elles suivaient ensemble, Josiane apprenait la couture chez un styliste de la ville et était donc habituée à concocter des modèles et à faire de très bons choix en matière de sape. Dès qu’elle se présenta chez Chantal, le choix fut fait en moins de cinq minutes après que Chantal expliqua le contexte de l’invitation. Josiane lui indiqua que ce modèle permettait de mettre en valeur ses jambes fines et si ce fameux Richard s’attardait dessus, alors elle aura certainement un avantage sur lui. Elle devait donc s’arranger pour capter son attention de sorte à le marquer.

Les cheveux ne posaient pas trop de problème. Elle s’était tressée il y a juste deux jours et il lui suffisait de passer un peu de pommade pour redonner vie à une coiffure qui n’était même pas encore fanée. La petite pochette lui servant de sac à main était de la même couleur que ses ballerines. Elle remercia Josiane et promit de lui raconter dans les moindres détails la soirée qu’elle passera.

La nuit de Richard aussi avait été agitée. Il n’avait réussi à s’endormir que vers deux heures du matin en pensant et repensant à l’invitation à dîner : « était-ce une bonne chose ? Qu’est-ce qu’il allait lui dire ? Et si elle ne venait pas au RDV et aller raconter à ses fans clubs ? ». La décision est prise : qui ne risque rien n’a rien. Il irait à ce rendez-vous-même s’il n’avait rien de particulier à lui dire. Il ne pouvait s’empêcher de la redessiner dans sa tête et de la dénuder déjà. Il se mit à rêver et fut réveillé par la sonnerie de son téléphone vers onze heures de la matinée. La journée était déjà presque terminée. Il passa un coup de fil rapide au directeur du Phénicien pour réserver une table sur la terrasse. D’habitude, pour impressionner les filles, il réservait tout l’espace. Mais cette fois-ci, il ne réserva qu’une table. Il devait s’assurer qu’il y avait des témoins. Contrairement à Chantal, Richard n’était pas préoccupé par quelle tenue mettre mais plutôt par la stratégie à utiliser pour séduire la charmante demoiselle.

Il fit donc un tour sur Facebook et Instagram afin d’en apprendre un peu plus sur Chantal. Jusque-là tout ce qu’il savait d’elle était son caractère difficile quand il s’agit de la drague. Il pouvait maintenant deviner qu’elle aimait tellement de choses qu’il confirma son hypothèse suivant laquelle les filles sont vraiment bizarres. Pour se rassurer qu’il disposera d’informations suffisantes, il envoya un sms à ses plus proches amis pour lui glaner le maximum d’informations. En moins d’une heure de temps, il avait déjà des informations qui pouvaient remplir un cahier de cent pages sur Chantal. Il se retira dans sa chambre en prenant soin de mixer un jus d’ananas naturel et se mit à explorer les éléments qui lui avaient été fournis.

-          Faites comme chez vous mais ne vous saoulez surtout pas, leur lança Richard en quittant le salon.

On dit souvent que la meilleure attaque, c’était l’attaque. Il allait pratiquer cette assertion pour une première fois dans sa vie. Car toutes les autres filles qu’il avait séduites, c’était à cause de son argent. Il n’avait même pas besoin d’aligner plus de trois phrases que les filles l’appelaient déjà « chéri », « bébé », « chou ». Aujourd’hui, les choses ont changé. Les informations qu’il lisait le faisaient déjà réfléchir. Elle semblait indomptable cette Chantal. Il se mit donc à réfléchir encore et encore et ne remarqua même pas qu’il venait de s’endormir. Il se voyait déjà en train de discuter avec elle et même de lui caresser les jambes puis la poitrine sur le parking du restaurant quand soudain l’alarme de son téléphone le rappela à l’ordre. Il regarda l’heure et vit qu’il était déjà dix-huit heures. Il avait donc dormi pendant pratiquement deux heures de temps. Il se leva paresseusement et s’engouffra dans la douche pour prendre un bon bain et se parfumer.