Chapitre 44

Write by Myss StaDou

Chapitre 44


Un moment de silence est passé durant lequel je sens le cerveau de Jeanne tourner à mille à l’heure. Elle prend une petite inspiration avant de parler :

 

− Eh ma copine, ne parle pas comme ça. Je sais que tu aimes Victor et qu’il t’aime aussi. Ne laisse pas cette situation déteindre sur la relation que vous avez bâti tous les deux avec tant d’effort.

 

Je tchipe.

 

− Ne te braque pas ainsi. C’est une situation qui est encore fraîche. Je te comprends et…

− Non, justement. Tu ne me comprends pas ! J’ai été insultée, humiliée et chassée comme un chien galeux, Jeanne. Tout ça à cause de Victor !

− Oui, mais il n’y est sûrement pour rien dans l’attitude de sa mère. Pourquoi Tata Cathy a fait cela ? Je n’y comprends rien moi-même.

− Ouais, c’est ça !

− Calme-toi, ma chérie. Pose ton cœur. Ça va aller. Ok ?

− Ok.

− Je vais appeler Victor après toi et lui parler, comme tu m’as demandé. Il est sûrement inquiet. Je lui dirai de te laisser du temps pour toi-même.

− Ok.

− Mais il faut que tu lui parles. Vous devez mettre cette situation au clair. Rester chacun de votre côté ne vous aidera pas.

− Si tu le dis.

− Et connaissant Victor, il doit vraiment s’inquiéter.

− Ah, moi quoi ?

− Ne joue pas ta fière, se moque-t-elle. Je sais que tu ne penses pas ce que tu dis. Ne laisse pas la colère parler pour toi. Il peut quand même t’envoyer des messages ?

− Je ne sais pas.

− Toi aussi ! Ne lui barre pas alors tout ! Tu sais qu’il va maigrir par manque d’amour.

− Hum ! Ok. Mais qu’il ne m’étouffe pas. Je veux me concentrer sur mes exams. Ensuite je voyage pour Douala. Je ne veux plus de stress !

− Ok, ma copine. J’ai compris. Je vais lui parler. Mais calme-toi. Je ne comprends rien à ce qui s’est passé. Mais je sais que tout ça sera mis au clair le plus vite.

− Je l’espère aussi.

− Fais-moi juste confiance. Bon, je te laisse dormir. Ta journée n’était pas évidente. On se prend demain pour aller au combat. J’espère que tu es prête.

− Normalement, réponds-je en riant. J’ai encore révisé tout à l’heure. À demain alors.

− À demain. Bisous.

 

Je raccroche le téléphone et le mets sous l’oreiller. Juste à ce moment, j’entends la porte, qui était entrebâillée, couiner. La lumière de la chambre s’allume et je vois Carole entrer avec un petit sac de voyage accroché à son bras gauche, son sac à main rouge à la main gauche. Elle pose ses affaires sur la table et me regarde toute souriante, sans rien dire. Son comportement m’intrigue. Qu’est-ce qui la réjouit là maintenant ?

 

− Caro, c’est comment ? Tu as gagné au PMUC ?

 

Carole a un sourire mesquin :

 

− On peut dire ça.

− Pense aux pauvres.

 

Elle ne me répond pas, mais éclate de rire. Elle va ensuite dans l’armoire et sélectionne des vêtements, vide le sac de voyage. Elle refait le sac de voyage avec des vêtements propres, et change aussi de sac à main. Il se fait déjà bien tard et il faut que je dorme pour être en forme demain. Le sujet « Victor et sa mère » m’a assez occupé pour cette journée. Nouvelle semaine, nouvelles options. On passe à autre chose. Je m’endors dans toutes les montées et descentes de ma sœur. Je pense qu’elle a dû se changer et repartir dans ses routes. Pfff… Ce qu’elle fait ne m’intéresse pas le moins du monde. Si elle veut bousiller sa vie, ça la regarde.

 

Quand le réveil sonne le lundi matin, je me sens super lourde et j’ai la bouche pâteuse. J’espère que la journée sera plus douce que le réveil. En coupant le réveil, je vois un SMS qui s’affiche sur l’écran. C’est Victor qui m’a écrit tard dans la nuit, sûrement après avoir parlé avec Jeanne.

 

« Chou, suis désolé pour hier. Je ne peux pas vivre sans toi. Besoin de te parler. Je t’aime »

 

Hum… Ce message me sucre le cœur … Mon petit ami me manque, pensé-je, nostalgique. Mais je ne baisse pas la garde. Il doit se rendre compte que j’ai été profondément blessée et affectée par le comportement de sa mère. Si cette dernière ne veut vraiment pas de moi dans la vie de son fils, je ne sais pas quelle sera la suite de notre histoire. Victor sera le seul à décider. Mais je ne l’obligerais pas à choisir entre sa mère et moi. De toutes les manières, il n’a pas dit clairement qu’il voulait m’épouser hein. Peut-être je m’essouffle pour rien.

 

Tout se déroule plutôt bien au cours de cette journée. Je sors assez tôt de la maison, avec un esprit positif. Tout ira bien dans ma vie et surtout, je finirais mon année académique en beauté. Il faudrait que je cherche déjà une chambre pour l’année prochaine. Au moins, grâce à Victor… Non non. On a dit qu’on ne pense pas à lui aujourd’hui !

 

Mon premier examen est à 11h. Mais avant, j’ai un cours. J’arrive un peu en retard dans l’amphi et j’aperçois seulement Jeanne qui est assise dans les premières rangées. Nous nous croisons à la sortie de l’amphi pour courir dans la salle où notre exam aura lieu. Nous enchainons un deuxième exam juste après, pourtant ce dernier était prévu un peu plus tard dans l’après-midi. Nous composons comme cela, le ventre vide. Cela me donne d’horribles aigreurs d’estomac, car à part le koki avalé la veille et un morceau de manioc bouilli le soir, je n’ai pas mangé grand-chose.

 

Le temps de discuter avec d’autres camarades, et s’échanger quelques conseils pour les révisions de nos prochains exams, il est déjà presque 16h et la famine me torture et une fatigue cérébrale me rend confuse. Je laisse la bande continuer à réviser pour rentrer me reposer et manger. A cause de l’affluence et les heures de pointe, ce n’est presque vers 18h que j’arrive à la maison. Le temps de passer chez la vendeuse de beignets pas loin prendre un gros paquet de beignets-haricots avec de la bouillie, je rentre dans notre concession.

 

A peine entrée à la maison, je pose le plastique des beignets sur la table de la salle à manger et je fonce dans la chambre de Junior pour savoir comment il a passé sa journée. En venant, j’ai remarqué qu’il n’était pas dehors en train de traîner avec sa bande et ça me rassure. Je frappe à la porte de sa chambre et n’obtenant qu’un grognement comme réponse, j’ouvre la porte. Junior est allongé sur le lit, la tête dans l’oreiller.

 

− Papi ?

 

Il marmonne sans répondre.

 

− Papi, c’est comment ?

− Je suis là… Épuisé.

 

Il se lève sur ses coudes pour me regarder.

 

− Assia mon père, dis-je en compatissant. Tout s’est bien passé ?

− Oui. C’était juste l’informatique aujourd’hui. Mais ça m’a lessivé. Après j’ai révisé avec mes potes.

− Ok, c’est bien. Courage. J’ai aussi composé tout à l’heure. Les épreuves étaient cailloux. Mais j’ai écrit ma part. L’acteur n’est pas mort dans son film.

− Normalement.

− As-tu déjà mangé ?

− J’ai mangé le reste d’Okok avec le manioc d’hier. Ça a chatouillé mon ventre. Ta cuisine me manque.

− Oh mon frère chéri. Tu es le seul homme qui sait m’apprécier. Bon ! Jusqu’à ce qu’une petite vienne prendre ta tête et tu me renies.

− Non ! Comment ? La sœur de qui ?

− J’ai acheté les beignets en venant. Si tu veux, tu peux me rejoindre.

− Tu poses encore la réponse? J’arrive !

 

Je vais dans ma chambre me changer et je reviens au salon. Junior et moi mangeons en bavardant. Après deux heures de repos, on se retrouve en soirée pour réviser pour le lendemain. Il est encore bien tard ce jour-là quand je vais au lit. Victor m’a envoyé plusieurs messages, insistant sur le fait qu’il faut qu’on se parle. Je n’ai pas eu le courage de lui répondre. Je lui ferais un message le matin pour au moins qu’il sache que je le lis, juste que je n’ai pas envie de répondre.

   

La mardi matin, même processus que la veille. S’apprêter et courir pour la fac, penser aux dernières révisions pour les examens de la journée. Je ferme le portail de la maison quand j’aperçois une silhouette pas loin près du mur de notre concession. Je souris et me dirige vers la personne.

 

− Bonjour Stéphane.

− Bonjour Nicole, dit-il en souriant. Je t’attendais.

− Ah bon ? Pourquoi ?

− Je voulais prendre de tes nouvelles avant que tu ne partes en cours.

− Merci, c’est gentil de ta part.

− Comment tu vas alors ?

− Ça va  mieux que l’autre jour en tout cas, dis-je, un peu gênée. Désolée de m’être donné ainsi en spectacle devant toi. Ce n’était pas mon but.

− Ça peut  arriver à tout le monde, tu sais. Je comprends parfaitement. C’est juste vraiment dommage que ça t’arrive à toi.

− Comme tu dis.

 

Un moment de silence s’installe avant que Stéphane ne reprenne la parole. Il brille littéralement de bonheur.

 

− Je voulais aussi te dire merci.

− Pourquoi ?

− Tu as rapporté un peu de lumière dans ma vie. J’ai pu avoir des nouvelles de Jamila, ma copine. Elle va bien et je lui manque beaucoup.

− Eh bien. Je me réjouis d’avoir pu réunir un couple séparé.

− Tu ne sais pas comment je te suis reconnaissant.

− Tant mieux alors. On peut continuer cette conversation un autre jour ? Je dois courir à la fac. J’ai des exams ce matin.

− Ok, je t’accompagne en route pour que tu prennes ton taxi.

− Si tu veux.

 

Il m’accompagne et me met dans le taxi, en me souhaitant du courage pour mes examens. Je suis heureuse d’apprendre qu’il a pu reprendre contact avec sa copine. Vraiment ! Les parents nous font passer des sales moments juste parce qu’on est amoureux… C’est triste quand même. Dans le car pour Soa, je fais un SMS à Victor :

 

« Cc. Je te parlerais si tu es prêt à vraiment m’écouter. J’ai souffert. Suis très déçue ».

 

Je ne sais pas trop quoi lui dire. Mais j’espère qu’il comprendra ce que je veux dire par là.

Lui raconter la situation, c’est présenter ce qui s’est passé sous un angle compliqué: Ma parole contre celle de sa mère. Et je ne sais pas si notre relation est déjà assez mure pour que mon opinion fasse le poids.

 

À peine trois minutes plus tard, je reçois une réponse :

 

« C’est quand tu veux, comme tu veux. Mais fais vite STP. C’est dur sans toi. Je t’aime ».

 

Cet homme met toujours mes bonnes résolutions au sol ! L’amour n’est pas bien, je vous assure. Quand je suis décidée à jouer la dure comme ça, il veut venir gâter mes plans. Je lui donnerai rendez-vous peut-être jeudi ou la semaine prochaine. Ainsi j’aurais le temps d’ici là de décompresser.

 

La journée se passe comme la veille, entre cours, examen et révisions. Vers 17h, Jeanne et moi sortons de l’enceinte de la Fac quand je vois une voiture que je ne connais que trop bien garée pas loin. Je veux faire un mouvement de recul comme pour me cacher quand Jeanne me retient par le bras :

 

− Non, Madame. Tu as assez joué la belle. Tu vas rester là et lui parler.

− Quoi ? m’exclamé-je, étonnée. Donc tu savais ?

− Oui, je savais ! J’ai dit à Victor de venir s’il voulait vraiment te parler. Le pauvre n’arrête pas de se plaindre dans mes oreilles…. Oh tu lui manques… Oh il t’aime …. Pardon arrange vos problèmes et sortez de mes oreilles !

− Jeanne, toi aussi !

− Ah, viens parler à ton gars. Je ne serais pas loin. Au cas où tu as peur…

 

Elle rit tandis que mon estomac se tord d’anxiété. Un mot de travers et je peux dire adieu à ma relation avec Victor. La grande interrogation est : va-t-il me croire ou s’accrocher à ce que sa mère lui a dit ?

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