CHAPITRE 55: ADIEUX PAPA.

Write by L'UNIVERS DE JOLA

CHAPITRE 55 : ADIEUX PAPA

DEUX SEMAINES PLUS TARD

**LUCIA MANGA MFOULA**

Je me sens épuisée à la fois physiquement mais aussi émotionnellement. J’essaye de tenir face à tout le stress que nous vivons depuis deux semaines maintenant. Quand je repense à la conversation que j’avais eue avec papa Euloge sur la position de Bhernie dans la famille, je ne savais pas ce que ça voulait dire mais maintenant je constate que Bhernie est sollicité pour tout. On le tire à gauche et à droite afin de prendre des décisions sur plusieurs démarches. Dans ça, il doit gérer les stages qu’il a récemment eu et sa famille directe. Dans tous ça, il ne mange pas correctement, ne dort pas correctement et ne s’assoit même pas plus de 20 minutes. Il a considérablement maigri et a pris un gros coup de vieux en seulement deux semaines. J’essaye autant que faire se peut de l’épauler mais je ne vais pas me mentir, je suis complètement dépassée par tout ceci. Heureusement que le corps de papa va sortir aujourd’hui même et qu’après la réunion de famille qui aura lieu demain, il y aura moins d’affluence et on pourra un tout petit peu se reposer. 


Orlane : (Une cousine à lui) Lucia on fait comment pour la nourriture ? Les femmes sont revenues du marché.

Moi : J’arrive. Mettez ça derrière on va nettoyer. Le bois pour le feu est déjà venu ?

 Orlane : Pas encore.

Moi : Pardon surveille moi ça, dès qu’ils viendront fait moi signe.

Orlane : D’accord.

Winnie : (Nièce) Tantine Lucia ?

Moi : (Me retournant pour la regarder) Oui ?

Winnie : Le paquet d’allumettes est fini et puis on veut aussi des markers pour mettre les signes sur les gobelets du café.

Moi : Tu peux aller chercher ça chez le boutiquier ?

Winnie : Oui.

Moi : (Fouillant ma sacoche) D’accord. Tu prends même 4 ou 5 paquets de boîtes d’allumettes et 5 markers.

Winnie : (Prenant l’argent) D’accord.

Une autre : Tantine Lucia on demande l’argent des choses du café.

Moi : C’est vous qui allez acheter ça ?

Elle : Oui.

Moi : (Sortant l’argent) Ok. 


Je lui ai remis l’argent et elle est partie avant d’être remplacée par Lucrèce qui m’a prise par la main et m’a entraînée dans la chambre d’Erine.


Moi : Qu’est-ce qui se passe ?

 Lucrèce : (Fermant la porte à clé) Assieds-toi une minute.

Moi : Lucrèce j’ai beaucoup de choses à faire, je n’ai pas de temps à perdre.

Lucrèce : (Me poussant de force pour me faire asseoir sur le lit) Justement tu as trop de choses à faire. C’est parce que je ne veux pas que tu tombes ici que tu dois t’asseoir une minute. Même le robot se fatigue alors qui es-tu toi pour ne pas le faire ?

Moi : (Tenant mon front en soupirant) Je suis fatiguée Lucre.

Lucrèce : Je sais. C’est pourquoi je t’ai demandé de t’asseoir. Je ne comprends même pas pourquoi avec toutes les grandes personnes qu’il y a dans ces deux familles c’est sur Bhernie et toi que tout le monde s’appuie. Depuis quand dans les décès ou dans les cérémonies de familles ce sont les enfants qui prennent des décisions devant les aînés ?

Moi : (Silence) 

Lucrèce : Regarde comment Bhernie et toi êtes maintenant comme deux zombies. Heureusement même que le corps va sortir aujourd’hui pour un peu vous reposer. À ce rythme là vous allez tomber malade. 

Moi : (Silence)

Lucrèce : En tout cas repose toi d’abord même 20 minutes. Je suis venue avec les filles là, elles sont dehors là-bas et nous allons te prêter main forte. Maman et les autres viendront un peu plus tard, elles s’arrangent d’abord avec les enfants.

Moi : D’accord. Merci.

Lucrèce : L’heure de la sortie du corps n’a pas changé non ?

Moi : Non, c’est toujours 15h30.

Lucrèce : Il est encore 8h, on a le temps.

Moi : D’accord.


Elle m’a tirée dans ses bras pour me réconforter et au bout de 30 minutes, nous sommes sorties. J’ai trouvé Sasha, Daphnée, Ariane, la petite sœur de Mélodie, la copine de Pierredelin et la cousine de Maurice. Il y avait aussi quelques cousines à moi et elles se sont déployées pour m’aider. Ya Reine est arrivée avec ses gens un peu plus tard et elles ont toutes mis la main à la pâte. J’étais déjà plus rassurée en ayant les miens autour de moi, non pas que les parents de Bhernie m’avaient fait quelque chose mais c’était difficile pour moi de donner des instructions à des papas et des mamans sur des tâches à effectuer du coup c’était un coup de stress supplémentaire pour moi. Nous avons travaillé en équipe et autour de 12h tout était prêt. Nous avons reçu les t-shirts que nous avons commandés à l’effigie de papa et nous sommes allés nous apprêter. J’ai veillé à ce que maman Aubierge ait toute sa tenue avant d’aller trouver Bhernie à la chambre qui était assis à même le sol visiblement fatigué. Je suis venue m’agenouillée en face de lui et j’ai pris sa tête que j’ai serrée contre ma poitrine, il s’est mis à respirer fortement en encerclant ma taille avec ses bras. Nous sommes restés ainsi quelques minutes avant qu’il ne prenne la parole.


Bhernie : Je ne sais pas ce que j’aurais fait si tu n’étais pas là Lumière. Merci.

Moi : Tu n’as pas besoin de me remercier. Tu sais que je suis avec toi pour tout, ta famille est la mienne. Allons-nous apprêter pour recevoir papa une dernière fois dans sa maison.

Bhernie : D’accord. 


Je me suis levée et l’ai aidé à le faire. Nous sommes allés nous laver l’un à la suite de l’autre puis nous avons enfilé nos vêtements en pagnes qui étaient différents de ceux des autres. Nous sommes sortis main dans la main. Nous avons fait un tour pour régler les derniers détails puis nous avons attendu les agents de Saaf qui n’ont pas tardé à arriver avec le corps de papa. Les gens ont commencé à pleurer les uns à la suite des autres jusqu’à ce qu’il soit installé dans la maison à l’endroit où on avait posé la chapelle. Les agents se sont retirés en nous donnant rendez-vous le lendemain à 10h. Un des points positifs que nous ayons c’est que le père de Bhernie était fang de l’Estuaire, nous n’aurions donc pas à voyager à l’intérieur du pays pour l’enterrer. Ça se fera à Cocobeach d’où il était originaire. 

Il y a eu un concert de pleurs pendant près d’une heure, moi y compris avant que la salle se calme. La suite des pleurs s’est fait par intervalles jusqu’à la tombée de la nuit où j’ai dû sortir de la maison pour aller superviser le service. Notamment le partage des bouteilles d’eau à boire, des bonbons et des chewing-gums, des petits cupcakes et autres. À la fin je suis venue m’asseoir avec les miens. Erine était avec moi dans le service ainsi que ses amies. Stella était en train de parler avec ses copines sous une tente. Depuis que le décès avait commencé jusqu’à aujourd’hui, même une cuillère elle n’avait pas rincé. Je n’ai pas parlé ses choses et je me suis gérée avec Erine et les garçons sans compter les autres membres de la famille qui ont prêté main-forte. 


Papa : Après tout ça il faudra tous les deux vous reposer hein sinon vous risquez de tomber malade Bhernie et toi. 

Moi : On va le faire.

Maman : Regarde comment tu as maigri ? Tu as même mangé quelque chose depuis le matin ?


C’est à ce moment que je me suis rendue compte que je ne l’avais pas fait à proprement parler. J’ai partagé 4 gâteaux bedoumes avec Ciel le matin avant que les occupations nous rappellent et jusqu’alors rien.


Moi : Seulement le matin. 

Maman : Tu vois les choses comme ça ? Quand tu vas tomber ici on va dire quoi ? Va me prendre quelque chose à manger là-bas. Vous avez quand même préparé aujourd’hui non ?

Moi : Oui. 

Maman : Alors vas-y. 


Je me suis levée et je suis allée me servir la nourriture que l’on stockait dans la chambre que nous occupons et j’ai fait appeler Bhernie par sa sœur. Il est venu me trouver et je l’ai forcé à avaler quelques morceaux de nourriture puis nous sommes retournés au décès. Le papa de Bhernie n’était pas chrétien mais plutôt traditionaliste du coup nous avons quand même pris une chorale qui nous a entretenu jusqu’à 23h puis il y a eu une première assise jusqu’à 2h du matin. Après cela, des groupes de danses traditionnelles jusqu’au petit matin. Entre 4h et 5h ils ont fait une petite cérémonie par rapport à qui il était dans la famille. Nous l’avons honoré jusqu’à 10h30 heure à laquelle les gens de Saaf sont revenus le récupérer sous une autre vague de pleurs intenses. Ceux qui voulaient partir à l’enterrement se sont gérés dans les voitures que nous avons mis à disposition. Comme je devais être à côté de Bhernie pour l’enterrement j’ai délégué la supervision des tâches à une de ses tantes en mon absence. Nous avons roulé jusqu’à Cocobeach puis une fois à l’entrée de son village, nous avons garé et sommes descendus à pieds. Un groupe de danseurs traditionnels étaient en train de danser devant nous pour nous montrer le chemin puis ce fut moi qui les suivais avec un pagne, un chasse-mouche et une peau de bête, celle de la panthère. Derrière moi Stella et Erine suivis de Bhernie et ses frères soulevant le cercueil de leur père sur leur épaules. Derrière eux leur mère puis les parents de papa Eugène en ligne directe enfin le reste de la famille, amis et connaissances derrière. Nous avons marché ainsi jusqu’au terrain familiale où les danseurs ont continué à danser jusqu’à la maison. Nous nous sommes arrêtés devant l’endroit aménagé pour l’enterrement et il y a eu un petit rituel durant lequel Bhernie et moi avons tourné main dans la main le cercueil avant de déposer les articles que j’avais en main puis ils ont fait descendre le cercueil dans la tombe. Le chef du village a fait un discours, le petit frère de papa Euloge l’a aussi fait et enfin Bhernie a clôturé.


Bhernie : Papa, dire que ton départ ne m’a pas surpris serait ne pas dire la vérité car tu le sais, je ne m’y attendais pas. J’avais énormément de projet pour toi et pour cette famille que ton départ soudain pour moi me laisse désemparé. Dès mon plus jeune âge tu m’as enseigné la vie et a essayé autant que faire se peut de me transmettre les valeurs qui étaient les tiennes afin de faire de moi un homme droit. Tu m’as accompagné sur ce chemin en me tenant par la main et aujourd’hui tu t’en vas en me demandant de me diriger tout seul car tu es arrivé au bout de ton périple. Tu laisses avec moi femme et enfants mais aussi une grande famille dont j’ai maintenant la charge. J’espère être digne de ce sacerdoce légué et avoir les épaules assez larges pour assumer désormais les responsabilités qui sont les miennes sans pour autant te décevoir. Je chéris dans mon cœur tous les moments que nous avions partagés ensemble et je garde particulièrement de toi cette merveilleuse image que tu m’as laissé quelques jours avant ta mort en montrant une joie non feinte et une paix intérieure contagieuse. Ta vie n’a pas été facile mais tu t’es efforcé à la vivre de façon digne. C’est pourquoi je prie que tu ailles en paix sur ce chemin où désormais tu nous as précédé. Puisse ton chemin être dégagé tout le long jusqu’à destination. La mort n’efface pas l’amour alors sache que tu as et auras toujours une place particulière dans le cœur de tous ceux qui t’ont aimé et dans le mien en premier. Au nom de toute cette famille et en mon nom propre nous te disons adieux papa OBIANG ELLO Euloge et que la terre te soit légère.


Il s’est courbé, a ramassé la terre avec sa main qu’il a lancé sur le cercueil. Tous ceux qui étaient présents en ont fait de même puis les hommes ont pris leurs dispositions pour pouvoir refermer la tombe, faire le caveau, le carrelage et tout le nécessaire prévu. Il y a eu une minute de silence puis un dernier petit rituel et nous sommes partis de là pour la maison. Nous sommes arrivés autour de 14h30 et s’en est suivi une longue réunion de famille qui s’est clôturé par un repas autour de 19h. Normalement la cérémonie devait se prolonger sur une semaine supplémentaire avec les danses et autres mais la famille et Bhernie en particulier n’ont pas voulu. La cérémonie s’est donc arrêtée là. Certains membres de la famille ont commencé à rentrer chez eux et les autres ont dit qu’ils partiraient le lendemain et les jours d’après. Bhernie a dit au revoir à tous ceux qui l’ont assisté et notamment les miens. Quand tous ceux qui devaient partir l’ont fait, il s’est adressé à moi. 


Bhernie : Tantine Reine a récupéré la voiture ?

Moi : Non, c’est toujours là.

Bhernie : J’ai besoin de faire un tour.

Moi : Je peux venir avec toi ?

 Bhernie : Tu devrais chercher à aller te reposer Lucia.

Moi : Je le ferai que si tu le fais avec moi et présentement j’ai aussi envie de faire un tour.

Bhernie : (Silence)

Moi : On y va ensemble ?

 Bhernie : D’accord.


Je suis allée signaler à ses frères que nous étions en train de faire une course tous les deux et qu’ils devaient veiller sur maman et les autres avant de partir. Nous sommes montés dans le véhicule et il a pris le volant. Le trajet s’est fait en silence et c’est au bout d’un certain temps que je me suis rendue compte que nous étions en train de nous rendre à Cocobeach. Il a garé non loin de la tombe de son père avant de rester un moment là les mains fixées sur le volant. Il a fini par descendre et est allé se mettre debout devant la tombe. Je suis restée assise dans la voiture à le regarder. Au bout d’un moment il est tombé à genoux et a éclaté en sanglots. Il n’avait plus pleuré depuis le lundi où il avait appris la maladie de son père. Ce n’était que maintenant qu’il le refaisait. J’ai moi aussi pleuré dans la voiture en le regardant pleurer et frapper contre le sol dehors avec sa main. Il l’a fait pendant un bon moment jusqu’à être surpris par la pluie mais il n’a pas bougé. Je me suis dit que je devais le laisser là car il en avait besoin. Au bout d’un moment, il s’est mis à bouger frénétiquement.


Moi : (Inquiète) Qu’est-ce qui se passe ?


Je suis descendue de la voiture pour aller voir et je me suis rendue compte qu’il faisait une crise. 


Moi : (Paniquant) Bhernie ? 


J’ai fait demi-tour pour fouiller dans ma sacoche et voir si j’avais une injection sur moi mais ce n’était pas le cas. J’avais utilisé celle que j’avais l’autre fois et avec tous les tiraillements là, je n’ai pas eu le temps d’y mettre une autre. J’ai à nouveau couru jusqu’à lui et me suis efforcé à le tirer jusqu’à près de la voiture où je l’ai soulevé comme j’ai pu pour le faire monter. J’ai grimpé à mon tour et j’ai démarré les mains tremblantes à la recherche d’une pharmacie dans les environs 


Moi : (Jetant un coup d’œil à l’arrière où il était) Ciel pardon, tiens bon, je vais trouver une pharmacie je te le promets. 


J’ai conduit comme une folle sous la pluie avant de voir l’insigne d’une pharmacie devant laquelle j’ai garé. Je suis descendue rapidement avant de courir à l’intérieur avec ma sacoche en main. J’ai dit ce que je voulais et elle m’a dit qu’il me fallait une ordonnance pour ça.


Moi : (M’agenouillant en pleurant devant elle) Madame svp je sais que vous avez raison mais mon fiancé est dans la voiture en train de convulser il lui faut impérativement cette injection sinon il va mourir. Je vous en prie. Si vous voulez vous pouvez venir avec moi pour vérifier. Pardon. 


Elle a tapé à la machine et m’a dit le prix j’ai dit que c’était bon. Elle est allée chercher les produits et voulait les donner à la caissière pour l’enregistrement. 


Moi : (Déposant l’argent sur le comptoir) Tenez pardon et donnez, je dois vite réagir vous allez faire l’enregistrement derrière. C’est urgent. 


Elle m’a remis les produits et je suis sortie en courant. J’ai vu qu’il était allongé sur la banquette et avait perdu connaissance. 


Moi : (Pleurant davantage) Ciel stp ne me fait pas ça pour l’amour de Dieu. 


J’ai préparé l’injection et je l’ai piqué. 


Moi : (Soutenant sa tête et caressant son visage en lui mettant de petites tapes) Ciel stp réagit, mon cœur pardon. Reste avec moi.


Après plusieurs minutes il a parlé avec les yeux fermés.


Bhernie : (Voix faible) J’ai froid. J’ai froid.


J’ai retiré les vêtements mouillé qu’il avait et il s’est retrouvé tout nu en train de grelotter. J’ai retiré mes vêtements et j’ai collé mon corps contre le sien en nous recouvrant avec le pagne du décès que j’avais par-dessus mes vêtements et que j’avais retiré quand on partait de son quartier.


Bhernie : (Grelottant) J’ai froid.

Moi : Mon Dieu, que faire ?


Je l’ai redressé et mis en position assise avant de prendre son sexe pour le masturber. Dès que j’ai eu une petite érection, j’ai frotté ma salive dessus avant de m’empaler. Je l’ai serré contre moi et je me suis mise à légèrement bouger sur lui. En d’autres termes j’aurais certainement pris du plaisir mais là ce n’est pas le cas. J’ai peur et je suis stressée alors le plaisir est la dernière chose à laquelle je pense. Au bout de quelques minutes, j’ai senti son corps s’humidifier. Il a légèrement ouvert les yeux pour me regarder.


Bhernie : (Petite voix) Lucia ?

Moi : (Saisissant sa tête pour la maintenir en face de moi) Oui Ciel, je suis là. Regarde-moi (Il a fixé son regard sur moi) Je suis là.


Il a ramené sa tête sur mon épaule en tournant son visage au creux de mon cou puis il m’a encerclée la taille avec ses mains avant de s’assoupir. Sa respiration était stable signe qu’il s’était endormi. Je suis restée éveillée un bon moment encore avant moi aussi de m’endormir le corps plein de toutes les émotions auxquelles j’ai fait face aujourd’hui …


L'AMOUR SUFFIT-IL ?1