Chapitre 8 : La vengeance aux deux visages

Write by pretoryad

Masala


Je m’éveillai doucement, lesprit embrumé. Javais limpression de revenir de loin, comme si javais fait un voyage dans une autre dimension. Je jetai un regard circulaire autour de moi. Jeus du mal à reconnaître la chambre dans laquelle je me trouvais. Seule la lumière du crépuscule pénétrait à travers la fenêtre pour mapporter un peu de réconfort dans cet univers brumeux.

         Je me levai lentement du lit et me dirigeai vers la porte qui souvrit subitement pour laisser apparaître Kalé Dagary. Mon cœur se mit à tressauter. Que faisait-il ici ? 

         – Tu tes enfin réveillée ?

Sa voix était douce et agréable. Je ne répondis pas tout de suite, réfléchissant rapidement à ce que je devais dire ou faire. Mon cœur battait à tout rompre. Dans quelle situation me trouvais-je ? Moi et Kalé ? Cela devait être une erreur, car léquation était plutôt : Nélia et Kalé. Nélia ? Oh mon Dieu ! Jécarquillai les yeux, comme si javais aperçu un fantôme.

         – Nélia, ça va ?

Sa voix était beaucoup trop suave à mon goût, presque sensuelle. Il s’approcha de moi tandis que je prenais conscience de ce qui avait bien pu m’arriver. Lorsque je levai les yeux vers lui, il était trop tard pour reculer. Il simposait devant moi, dans sa tenue de nuit — un caleçon imprimé et un débardeur noir qui dévoilait son corps naturellement musclé. Il avait une beauté sulfureuse.

         Cette proximité me donna des frissons de plaisir. Quest-ce qui marrivait ? Mon cœur saffolait de plus en plus, et mon corps était dans un état fébrile. Jaurais tant voulu reprendre le contrôle de ce dernier, mais il nen faisait quà sa tête.

Kalé plongea son regard pénétrant dans le mien affolé. Il fallait que je me reprenne au plus vite. Il posa sa main sur ma joue, le regard empreint de passion et de désir. Une chaleur délicieuse se répandit sur mon visage. Je fus prise de panique, mais je n’osai pas réagir. Mon esprit fut embrouillé par les émotions que mon corps subissait. Que marrivait-il ?

Sans préavis, Kalé posa doucement ses lèvres voluptueuses sur les miennes tremblantes. Je ressentis une sensation de brûlure qui me transperça. Ma réaction alla de la surprise à la curiosité, et au désir qui montait doucement en moi. Mon corps réagit au baiser. Je le maudissais d’être aussi faible.

Kalé ne put se contenir plus longtemps, il me pressa fermement contre lui et dévora ma bouche avec une telle passion que je laissai échapper un gémissement de plaisir. Je sentis des picotements dans le creux de mon ventre. Cétait une sensation étrange. Je navais jamais éprouvé un tel sentiment auparavant.

Sans abandonner ma bouche, Kalé me prit délicatement dans ses bras et me déposa sur le lit. Puis il libéra mes lèvres un instant pour plonger son regard noir corbeau dans le mien. J’étouffai un soupir. Je ne voulais pas me séparer de lui aussi vite. Mon Dieu, était-ce ça lamour ?

         Il se mit à genoux contre le lit, les yeux fixés sur moi. Son visage me parut énigmatique. Hyper détendue, je soutins son regard, comme si lui et moi étions intimement liés. Mon malaise avait complètement disparu, et un sourire radieux épanouit mon visage. Kalé se pencha sur moi pour me murmurer à loreille :  

         – Tu viens de recevoir un baiser mortel. Tu as trente secondes pour me dire qui est lapprenti sorcier qui sest servi de toi pour ce sort de transfert. Tic, tac, tic, tac…

         Je crus défaillir en entendant ses propos. Mes oreilles se mirent à bourdonner. Un baiser mortel ? Un frisson glacé parcourut mon dos. Je ne voulais pas y croire. Comment pouvait-on passer du plaisir à la douleur aussi instantanément ?

Le baiser mortel était un poison quun Myste pouvait instiller dans le corps dune personne par le baiser. Seuls les Mystes avaient ce pouvoir qui navait aucun effet sur leurs pairs, les Fidlos ou les Mixtes.

Kalé se redressa, le visage empreint dun mélange de colère et de méchanceté. Il me décocha un regard de mauvais augure. Jamais je navais eu aussi peur pour ma vie ! Trente secondes ? Je sentis soudain mes poumons manquer dair. Ma poitrine était tellement serrée que je ne parvenais pas à mobiliser mon diaphragme.

Combien de temps me restait-il avant la fin ? Je fermai les yeux pour demander de laide à Dieu. Cest alors que limage de Belga simposa dans mon esprit. Jouvris les yeux, me rendant soudain compte de mon erreur. Kalé avait réussi à soutirer l’information qu’il recherchait en lisant dans mes pensées. 

         – Sage décision, Masala. La prochaine fois, nessaie plus jamais de te mettre en travers de mon chemin ! Je me suis bien fait comprendre ?

         J’avais oublié le ton autoritaire de sa voix qui me fit l’effet d’une douche froide. Jacquiesçai, les yeux larmoyants. Il avait découvert mon identité assez aisément. Jaurais dû savoir quil était un sorcier assez puissant ! 

         – Nélia mappartient, je lai imprégnée dans mon astre. Ce qui veut dire quelle est désormais liée à moi pour léternité. Je vais te donner une seconde chance. Dans trois heures, je veux voir Nélia ici, autrement elle aura ta mort sur la conscience ! Maintenant, retourne dans ton corps légitime. Et dis à Belga de se préparer à ma visite. 

         Il posa ses lèvres sur les miennes, mouillées de larmes. Cette fois, je ne ressentis aucune douceur ni aucune chaleur. Juste un courant glacial qui engourdit mes lèvres. Je sentis aussitôt mes paupières se fermer, puis ce fut le trou noir.

         – … Jannule ce sortilège par la puissance de Mamissi… répétait Belga avec insistance.

         Sa voix imposante me ramena à moi. Je rouvris les yeux en aspirant l’air avec force. Après une quinte de toux, je sentis la pression dans ma poitrine se relâcher doucement. Je pus enfin reprendre mon souffle et régulariser mon rythme cardiaque.

         Japerçus alors Belga, le visage soulagé de me voir revenir à la vie. Où était passé Kalé ? J’inspectai la pièce du regard, les sourcils froncés. Je voulais m’assurer que j’étais bel et bien de retour dans la chambre de l’apprentie sorcière.

         – Masala, tu es de retour ! Jai bien cru quil ne te laisserait jamais revenir.

         Pas très rassurée, je me redressai doucement, la tête encore un peu dans le brouillard.

         – Quest-ce qui sest passé là-bas ?

         Je lécoutai à peine. Une seule pensée mobsédait : prévenir Nélia. Je me levai vivement du lit, memparai de mon sac à main et me dirigeai vers la sortie, sous l’œil détaché de Belga. Je me tournai enfin vers elle et lui lançai, sans aucune émotion :

         – Il a découvert que tu es derrière tout ça. Et il ma demandé de te prévenir de sa visite. Je te conseille fortement de te tourner vers ta mère. Tu auras besoin de toute laide nécessaire pour faire face à sa colère. Bonne chance à toi, Belga !

         Je sortis de la chambre sans un dernier regard pour elle. Javais trois heures pour essayer de réparer mon erreur. Je devais tout d’abord me rendre à la maison pour voir ma grand-mère. Javais besoin de me tourner vers Dieu pour obtenir son pardon et laide de son esprit saint. Javais péché doublement : je métais tournée vers la magie, et javais succombé à la tentation charnelle. Ensuite, je me rendrais chez Nélia.


Femmes de pouvoir :...