Chapitre XIII

Write by imalado

------Belinda Ottawi------

Je rencontre Mrs Kodio à l’entrée qui comme prévu fait mine de ne pas me connaître ? Je suppose qu’il veut lui parler du rachat des parts.

Je referme la porte de mon bureau à clé avant de m’assoir à même le sol les pieds étendus… Je tremble de tout mon corps. Me retrouver de nouveau face à lui me met le moral dans les chaussettes. Cet homme n’a strictement aucun remord. Et ça se sent à des kilomètres à la ronde. Je suis dégoutée et je n’ai nullement envie de continuer à travailler.

Je ramasse mes affaires à la va vite, et récupère les clés de ma voiture. Direction l’appart, en laissant un mot à Amir si jamais ils me cherchent.

J’ai grillé un feu et manqué de me faire cogner par une autre voiture. Mon esprit se voulait loin… Je trouve les clés sous le paillasson. Je suis déjà venue de nombreuse fois mais il avait pris la peine de refaire la déco que je traitais de trop « masculine ». Il y a mis un peu de couleur et a joué avec la lumière en changeant les volets des fenêtres.

Je retrouve l’autre chambre devenue mienne. Les cartons y sont déposés et le lit est recouvert d’un drap blanc. Je jette mon sac, mon portable et mes clés à terre et retourne à la cuisine me chercher une bouteille de scotch, du Red Label que j’ouvre et prend place dans le canapé du salon avant d’y rester ivre morte…

Le soir

------Athan Akué------

Je suis rentré après la visite de Mrs Kodio. Cet imbécile vient de m’annoncer qu’il a obtenu une majorité de 5% par rapport à ma part d’actions de la société, cela ferait de lui l’actionnaire majoritaire. Quel con ! Pense-t-il sérieusement m’évincer de ma société ? Je regarde une dernière fois ma montre et il se fait assez tard. J’attends Noel que j’ai convoqué chez moi.

Son visage ne cesse de me revenir. Un visage que je n’ai pas vu depuis près de 23ans et qui m’a bien fallu une crise cardiaque. Sacrée Naya. J’espère seulement que ce n’est pas un de tes tours…

Dire que de voir cette jeune femme ne m’a pas troublé, c’est faux. Depuis cette note que je lui avais envoyée en guise d’explication le jour de notre mariage, silence radio. Elle avait fait la femme forte. Que devient-elle ? Est-elle toujours en vie ?

-                     Désolée du retard.

-                     Ce n’est pas grave je profitais de ce cigare.

-                     Et tu avais bien l’air ailleurs.

-                     Je l’étais… Je pensais à elle. A ce qu’elle devenait… ça fait si longtemps Noel. Revoir cette jeune femme…

-                     J’ai cru voir un fantôme… Je voulais te demander Athan. Naya. N’était-elle pas enceinte quand tu l’as quittée ?

C’est là que mon cœur fait un bond. Elle était enceinte, oui. Et ça avec les années je me suis efforcé de l’oublier et fini par y croire. Oui, le monstre que je suis a mis un trait sur ce qu’on pourrait appeler un enfant. N’est-ce pas la plus plausible des réponses ?

-                     Ce n’est pas possible. Elle n’aurait jamais voulu que cet enfant fasse partie de ma vie. Elle aurait tout fait pour l’éloigner de moi.

-                     Ça c’est tout elle.

-                     Mais n’empêche, je ne veux pas croiser ce visage chaque fois que je pars au boulot, sans en avoir le cœur net. Mets tes hommes sur le coup, le meilleur, qu’il me trouve tout ce qu’il y’a à savoir sur cette jeune femme, jusqu’aux plus profond de sa vie privée.

-                     Ce sera fait.

-                     Et puis il y’a cet imbécile de Kodio. Tu te souviens de sa maison ?

-                     Oui, tu voudrais que les hommes aillent lui rendre une petite visite ?

-                     Oui, il a besoin qu’on le remettre à sa place.

-          D’accord. Il faut que j’y aille là, je ne veux pas que Tania me fasse une autre crise de jalousie.

Belinda Ottawi. Si tu as le visage de mon passé, j’espère seulement pour toi ma petite que tu présages du bon dans le futur…

------Jonathan Baron------

Je suis épuisé de la journée et heureusement que je ne suis pas de garde. J’avais promis à Belinda de lui faire en grande pompe son déménagement. La pauvre, elle va surement m’en vouloir.

Je tente une seconde fois ma clé dans la serrure mais rien. La porte n’est pas fermée à clé, comment c’est possible ? Je lui ai pourtant dit d’être prudente… Je compris quand je la vis étendue à même le canapé, une bouteille de scotch vide. Si elle l’avait fini, je ne peux croire qu’elle est ivre morte. Il est minuit passé. Je dépose mes affaires devant la porte et ramasse la bouteille sur le tapis.

Endormie, elle est encore plus belle et si… innocente. Je ne suis pas pour cette histoire de vengeance. Elle mérite mieux. Elle mérite de connaître autre chose que la haine. Je la porte et tente de la ramener à son lit quand elle ouvre les yeux.

-                     Nathan… Tu es là. Je suis désolée…

-                     Ne dis rien, je vais te coucher dans ton lit.

Je fais le lit et l’y dépose en la couvrant d’une couverture. Elle sourit et me retient par le bras. Elle est réveillée…

-                     Reste s’il te plait… Je veux juste sentir quelqu’un près de moi. Je ne veux pas être seule…

-                     T’inquiètes pas je suis là.

Elle pose sa tête sur mes pieds pendant que ma main caresse ses cheveux. Je suis peiné de la voir dans cet état.

-                     C’est un monstre. Et je le hais Nathan de tout mon être… Mon Dieu, suis-je en train de devenir mauvaise comme lui en portant tant de haine dans mon cœur ?

-                     Tchuttttttttt. Ne dis pas quelque chose de ce genre. Tu es merveilleuse. Et si tu penses que tout ceci va te permettre de trouver la voie, tu dois rester forte Bel.

-                     Je l’ai regardé dans les yeux exactement comme je te vois là. Je n’y ai vu nulle trace quelconque de regret ! Pas une seule once de regret…

-                     Ça va aller princesse. Je t’apporte un verre d’eau et tu pourras t’endormir à nouveau. Je me demande bien comment tu as pu finir cette bouteille de scotch…

-                     Je voulais juste prendre un verre…

-                     Je vois bien ça oui…

Elle réussit à s’endormir quelques temps après et je la laisse donc dans sa chambre avant de regagner la mienne, le temps de fermer les yeux et de me reposer un moment avant le boulot. Je suis épuisé…

------Belinda Ottawi------

Ma tête est lourde et je sens qu’elle est à un pas d’exploser. La gueule de bois ne me réussit pas. C’est connu. Je me lève en mode ralenti et traîne des pieds en me préparant pour le boulot.

Jonathan est debout dans la cuisine, un journal à la main.

-                     Tiens, voilà que la belle au bois saoulant se réveille !

-                     Très drôle Nathan. Je suis morte de rire (En prenant sa tasse de café) Tu n’es pas parti à l’hôpital ? Mon Dieu c’est chaud ton café !

-                     C’est bien fait pour toi, petite chipeuse. Je les ai prévenus de mon retard, je voulais m’assurer que tu allais bien après avoir vidé une bouteille entière de scotch.

-                     Oh (En mettant mes mains au visage) J’ai honte si tu savais. Je ne sais pas ce qui m’a pris. J’ai vu Athan hier.

-                     Là je comprends mieux. Qu’est-ce qui s’est passé ? Tiens celui-là (en me tendant une autre tasse de café)

-                     Merci. J’ai découvert que je le hais vraiment.

-                     Très drôle aussi. Ce n’est pas tout nouveau ça. Comment ça s’est passé ?

-                     Il a fait une crise.

Jonathan se tord de rire et me prend au jeu. Je n’avais pas pu imaginer la situation de ce côté-ci.

-                     Tu aurais dû voir sa tête !

-                     Je l’imagine bien. T’es pas bien toi ! Je crois qu’il n’a encore rien vu.

-                     Je sais. Hélas pour lui. Aller je te laisse. Il faut que j’y aille. (en lui faisant une bise sur la joue)

Je viens juste de comprendre que c’était l’endroit parfait pour passer cette étape de ma vie. Jonathan est un ami extraordinaire et il sait comment me remonter le moral.

J’ai passé la matinée dans mon bureau. D’autres dossiers ont refaits surface depuis le salon des Energies, Amir a fait entrer beaucoup de projets rentables, mais pour que je puisse accéder à la moitié des parts, la plupart de ces dossiers ne doivent pas être validés. Je cherche par tous les moyens de les faire échouer et je suis sure d’y parvenir…

Mais l’appel de Maître Ayo me met hors de moi. Mrs Kodio aurait été agressé avec sa famille, dans sa maison, pour les parts que j’ai rachetés et dont il se porte garant devant Athan. Seigneur, cet homme est horrible et j’en suis toute enragée. Et j’ai l’impression que les heures me sont comptées. Si seulement Mrs Kodio pouvait me donner jusqu’à demain. Mais ce serait trop lui demander après ce qu’il a subit par ma faute.

Mais une idée me vient et je sens que Mira va m’en vouloir à mort. Je vous l’ai dit, elle est la fille unique d’un homme riche et cet homme n’est autre que le Ministre de l’Energie du pays, et il est celui qui signe les contrats entre Green Goal et le gouvernement. Et c’est là ma solution. Je retire mon portable de mon sac et tente de joindre Mira, qui me fait sa crise une bonne trentaine de minutes avant de céder :

-                     Bel, tu me fous la rage et j’ignore pourquoi je t’aime tant ! Papa voudra bien que tu lui trouves une bonne excuse surtout si le dossier est béton.

-                     Je m’occupe du dossier, t’inquiètes pas. Et puis je t’aime aussi la chérinou de Sofiane.

-                     Là tu veux m’acheter-là ? Ok, je vais lui en parler pendant le déjeuner, je passerais à son bureau.

-                     Merci ma chérie, je te revoudrais ça autour d’un diner ce soir ?

-         Parfait. Je passerais à l’appart.

Un point de réglé.

Je tiens en main une clé USB, et je me rappelle alors à quoi se tenaient les plans de cette journée. Je sors ma tête pour m’assurer que le bureau de Noel est vide, sa secrétaire Neissa n’est pas à son poste et j’ai bien l’intention d’aller y faire un tour.

J’ouvre la porte et me dirige vers l’ordinateur de bureau posé sur la table. A vue d’œil, il ne contient que des dossiers de la société mais je prends le risque de mettre une clé USB, qui contient un programme que Sofiane a pris soin d’installer. Un virus espion qui lui permettrait de retrouver les fichiers supprimés de l’ordinateur ainsi que ses mails. Le téléchargement du virus prend un temps fou, Sofiane m’avait promis pour une minute et ça la dépasse de trop. Neissa pourrait-être là à tout moment.

Je retire la clé et tente de regagner mon bureau, quand j’aperçois un coffre blindé, qui me présente un code à 5 chiffres… Je ne m’hasarde pas, le crédo est bon, puisque je tombe nez à nez avec Neissa dans le couloir. Cette fille ne m’aime pas vraiment, mais elle est une toute petite pièce de mon puzzle. Mission accomplie.

------Josué Akué------

Je suis à bout depuis quelques jours. Je me sens faible, et j’ai eu quelques épisodes de malaises hier. Et avec toute cette histoire autour de Belinda, je ne m’en sors pas vraiment. Je me dirige vers le bureau de mon père qui, depuis son arrivée, je n’ai pas vraiment eu l’occasion de lui parler.


-                     Je peux ?

-                     Rentre mon fils, je suis bien heureux de te voir. Comment tu vas ?

-                     Ça va. Et le voyage ?

-                     C’était bien merci. Adilé m’a dit qu’il y’a eu un petit froid entre Amir et toi. Tu veux m’en parler ?

-                     Non, ce n’est plus la peine. Je veux juste que tu comprennes que c’est moi ton fils, Amir c’est…

-                     Oui Josué c’est toi mon fils et ça je l’ai toujours su.

-                     Ah oui ? Parce que moi je crois que tu donnes des ailes à ce monsieur, il se croit tout permis parce que tu as marié sa mère ?

-                     Ça suffit. Je t’interdis de parler de cette façon-là d’Adilé. C’est compris ?

-                     Qui est Naya Oyoko, papa?

-                     Je ne vois pas de quoi tu parles Josué.

-                     S’il te plait papa. Oncle Noel a frôlé la crise en la voyant avant de l’appeler Naya, toi tu t’es écroulé à ses pieds. Je ne suis pas dupe.

-                     Tu n’es pas dupe Josué, et moi, je ne connais pas cette femme. Vas-donc demander ton oncle pourquoi il l’a appelé Naya.

-                     Je préfère demander celui qui a faiblit devant elle !

-                     Baisse d’un ton jeune homme, tu sais au moins à qui tu t’adresses petit insolant ! Qui traites-tu de faible ?! Sais-tu seulement tout ce que j’ai fait pour en arriver là. Sors de mon bureau avant que je ne te défigure à l’instant ! Ne me mets pas hors de moi, Josué Athan Akué ! Tu ne connais pas encore ton père ! Et tâche de ne pas claquer cette porte en sortant !

Je sors du bureau hors de moi. Jamais je n’ai vu mon père dans cet état. Tout me semble anormal. Je titube jusqu’au bureau de Belinda. Je rentre sans taper.

-                     Josué ? Est-ce que ça va ?

-                     C’est qui Naya Oyoko ? Que t’a dit mon père et oncle Josué ?

-                     Rien. Je ne sais pas qui c’est Josué. Et je peux savoir ce qui te prend ?

Rien. Je suis désolé…

------ Adilé Akué ------

Athan est à son bureau. J’en profite pour en savoir plus sur son voyage. La petite mallette est déposée sous mes yeux depuis plus d’une heure, j’ai les mains qui tremblent à l’idée de l’ouvrir. Tellement prévisible quand il s’agit de son fils, le code reste inchangé depuis des années, le prénom de Josué.

J’ouvre la mallette et la place au milieu du lit en prenant soin de refermer la porte à clé. Des tas de documents entreposés… Ce que j’y découvre, me plonge dans l’horreur.

Son réseau de prostitution auquel j’étais au courant, n’est encore que le décor. Athan engage des filles, des adolescentes pour qu’elles le servent « d’hôtesses » mais pas seulement, ces filles sont victimes de pratiques chirurgicales. Elles reçoivent en elle, des sachets de drogues qu’elles sont censées livrées à destination.

Il y’a celles qu’il nomme dans ses écrits : les perles de joie, pour la prostitution et d’autres : les poudres de joie pour la livraison de la cocaïne.

Je suis choquée. Et tout cet argent est blanchi à travers la société. Une société dans laquelle mon unique fils travaille et possède des actions. Mon Dieu me punis-tu pour mon passé ?

Je ne suis pas dupe, loin de là. Je sais qu’en bon malfaiteur, un jour il se fera prendre, raison pour laquelle j’assure mes arrières. Tout ce que je trouve contre Athan, j’en fais une copie et les dépose dans mon coffre à la banque. Je me hâte de passer dans la bibliothèque de la maison, me servir de la photocopieuse pour achever mon travail.

Mon cœur bat à la vitesse de la lumière, si jamais un jour il me surprenait, je suis une femme morte…

------ Belinda Ottawi------

La journée est finie et c’est l’heure de rentrer. Je me trouve au parking tentant de faire démarrer cette voiture depuis près d’une bonne heure déjà.

-         Je peux te raccompagner si tu veux ?

-         Non, je ne veux surtout pas te déranger Amir, je vais plutôt prendre un taxi.

-    Je le ferais avec plaisir. Je vais appeler le garage pour qu’il passe récupérer ta voiture, tu pourras l’avoir au propre demain.

Je ne me fais pas prier. Il m’ouvre la portière avant de faire le tour et démarrer la voiture. Il n’est pas trop bavard, pour ne pas dire muet. J’ai vu sa déception quant à l’annonce du refus du contrat et rien que pour ça, je m’en veux un peu. Il s’y était vraiment donné et avait travaillé dur pour que ça marche.

-         Ça te dit d’aller prendre un verre avant ?

-         (en souriant) Ce n’est pas vrai, tu me prends en pitié… Je suis désolé pour ce visage…

-         Ce n’est pas grave, je veux juste qu’on prenne un verre ensemble, tu peux toujours me déposer après, seulement si tu…

Les larmes des liens