- Calme toi Ahmed, pas besoin de te mettre dans un état pareil.

- Comment veux-tu que je me calme avec ce qu'il a dit sur toi? Je peux tout accepter tant que c'est sur moi mais il ne faut pas attaquer les gens que j'aime.

- Regarde moi-même qui suis concerné je suis très zen Ahmed.

Ahmed tourna sa tête vers lui. C'était vrai ça. Il était beaucoup trop calme a son goût.

- Je ne peux pas comprendre que tu puisses être autant serein. Oh gros je sais que tu n'es pas partisan de la violence mais réagis bordel ! Réagis enfin !

- Pourquoi ? A quoi ça va me servir Ahmed ? De toutes les façons ce n'est pas la première fois. Je suis habitué avec lui. Quand vous êtes là il fait semblant mais quand je me retrouve seul avec lui il me maudit de la pire des manières. Aujourd'hui il a juste laissé éclater sa haine au grand jour.

Ahmed ouvrit la bouche de surprise et dévia ses yeux de Karim pour les poser sur Khelti Kafaya qui était très mal. Elle n'arrivait même pas a le cacher.

- Tu le savais khelti ?

- Je le savais wouldi. On a longtemps subi ses mauvais propos. Mais tu sais ce n'est pas bien grave. Il ne dit que la vérité,c'est juste qu'il n'a pas les bons mots et les bonnes manières de le faire c'est tout. Ne lui en veut pas.

- Maman a raison,il ne dit que la vérité,oui que la vérité. Je suis ce que je suis. Je me suis fait a cette image de bâtard depuis ma jeunesse. Et quand il prenait un malin plaisir a me le rappeler je ne disais rien, pas un seul écart de langage. Je ne me suis jamais énervé,je n'ai jamais tapé du poing ni lui proférer une quelconque insulte.. Il pouvait être blessant comme il voulait je n'oubliais pas qu'il était mon aîné et que je lui devais le respect. Alors j'ai fait avec pendant de longues années. Tout ce que je pouvais faire c'était lui demander d'arrêter et tu devines bien qu'il n'arrêtait pas. Khali Khalid que la terre lui soit douce et qu'il repose auprès d'Allah, l'avait surpris une fois et le lui avait interdit. Une dispute véhémente s'était éclatée entre eux deux et ça a cause de moi, depuis ce jour je me faisais petit et j'évitais juste une altercation entre lui et moi. Ma tranquillité d'esprit avant tout Ahmed. Tu devrais apprendre a ne pas considérer les ondes négatives, a ne pas faire attention à tous les mauvais mots que tu entendras dans la vie. Tu veux aller où si tu te laisses émouvoir comme ça ? Tu veux aller où si tu dévoiles tes points faibles a l'ennemi ?

Simple mais efficace. Voilà comment il qualifierait le discours de Karim.

Les gens pouvaient se demander et se demandaient d'ailleurs, comment ils avaient pu être amis Karim et lui un jour. Ils étaient tellement opposés. Bien sûr le dicton les opposés s'attirent leur convenait parfaitement. Mais leur différence était tellement criarde.

Karim était la tête pensante, le calme, la mer qui dormait. C'était la douceur, la réflexion,la remise en cause.

Lui était la tête en l'air, la brute, la mer enragée. C'était la violence, les actes irréfléchies,la suffisance.

Karim conciliait, lui il tapait. C'était comme ça. Et pourtant ils arrivaient a si bien s'entendre. C'était son frère, s'il avait un jour besoin d'un rein ou d'un coeur, il n'hésiterait pas a deux fois avant de le lui offrir. Même la pensée de laisser sa mère et sa famille seuls ne pourrait pas l'arrêter.

Il s'en voulait de ne pas avoir remarqué quoi que ce soit. Lui dès qu'il avait un problème il venait le dire immédiatement a Karim parce qu'il aimait bien quand Karim portait ses poids avec lui. Souvent il en portait même plus que lui. C'était très plaisant de se reposer sur lui. Alors que lui,qui était là pour lui a part sa mère ? Personne d'autre et pourtant il ne s'était jamais plaint.

Malgré ce beau discours, Ahmed savait que cela lui avait pesé, il savait que les mots que son oncle lui répétait lui faisait atrocement mal. Et pourtant ! Pas une seule plainte ! Pas une seule réflexion ! Rien qui pouvait laisser penser a une chose pareille.

On pourrait penser que Karim est introverti alors que ce n'était absolument pas le cas. Karim avait une joie de vivre que très peu de personnes possédaient.

La chose qui différenciait Karim de tout le monde c'était qu'il n'avait pas une partie entêtée dans son esprit. Et ça c'était grâce a sa mère. Il lui vouait un respect sans norme. Il faisait tout pour qu'elle soit fière de lui. Tout ce qu'il faisait il se demandait si sa mère serait content de ça.

Il ne voulait pas que sa mère ai honte par sa faute. Et il faisait tout pour que cela n'arrive pas.

Même quand Ahmed avait commencé a vendre de la drogue, a avoir des mauvaises fréquentations, en gros a partir en vrille, il l'avait appelé plusieurs fois et lui avait fait la morale. Ahmed au lieu de l'écouter lui proposait plutôt de le rejoindre mais il n'avait jamais flanché, pas une seule fois.

- Ahmed wouldi tu sais Karim a raison. Ne manque pas de respect a ton oncle a cause de nous, même Dieu ne sera pas content. Laisse le donc se charger de son' jugement, c'est lui notre meilleur défenseur ! Et si tu le regardes dans les yeux a cause de nous, sa haine envers nous n'en serait que plus forte. C'est ce que tu veux ? demanda khelti Kafaya d'une petite voix

- Non khelti répondit-il comme un petit enfant

- Alors ne le laisse plus te contrôler avec les mots comme ça. Fais comme nous, ignore tout simplement. Tu imagines si nous tous l'avions ignoré quand il disait ça, tu imagines la honte qu'il se saurait pris ? C'est comme ça qu'il faut faire avec ce genre de personne wouldi tu as compris inh ?

- Oui khelti.

Ahmed posa ses yeux sur sa mère qui était restée silencieuse depuis le début de leur conversation. Elle ne disait rien. Bien au contraire, elle paraissait plongée dans ses pensées. elle était très loin.

- Mama dit Ahmed une première fois mais sans réponse.

Il réitèra une deuxième fois puis une troisième. C'est seulement quand khelti Kafaya lui touchait le bras qu'elle réagit et revint parmi eux.

- Tu étais plongée loin dans tes pensées gemma déclara Ahmed

- Oui oui tu as raison. Mais tu voulais quelque chose ?

- Non rien de particulier. Comme tu ne disais rien depuis le début.

- Oh c'est parce que je suis dépassée par ce qui se passe mon fils.

- Ça c'est de l'acharnement. Je ne sais pas ce que vous en pensez mais j'ai analysé de tous les côtés et je n'ai trouvé que ça comme raison. D'abord Ahmed, mais comme Ahmed ne le veut pas maintenant c'est Soli, la petite dernière de la famille. Il veut quelque chose de cette famille, moi je vous le dis.

- Karim ça ne peut pas être ça. Selon' toi il voudrait quoi hein ?

- C'est ça que je ne sais pas Ahmed

- Non tu dois sûrement te tromper. Tu sais je ne suis pas le premier a qui il fait ça, il a déjà marié pleins de nos cousins de cette façon la. C'est sûrement parce qu'il s'est confronté a un refus de ma part que son ego a pris un coup et a voulu tomber sur Soli en pensant que comme elle est trop jeune pour se défendre et facilement manipulable, il réussira. Je suis sûr qu'il ne s'arrêtera pas avant d'avoir trouvé une sorte de compensation.

- Et d'ailleurs puisqu'on on parle, ces histoires de mariage forcé existent encore ? Mais on a dépassé tout ça. Laissez les gens se marier avec qui ils veulent. Et moi je continue a soutenir qu'il fait tout ça dans un but précis Ahmed. Fies toi a mon instinct comme toujours et creusons de ce côté la.

- Karim en ce qui concerne les mariages forcés ou arrangés, ça duraient du temps de nos ancêtres et ce n'est pas prêt de s'arrêter a cette heure. Ceux qui sont forts pour s'imposer jusqu'à la fin malgré la pression psychologique qui vient de tous les côtés s'en sortent mais les plus faibles et les pacifiques pour la plupart acceptent leur sort et se soumettent. Ça va sûrement vous faire bizarre mais le nombre de mariage forcé a atteint un point où c'est devenu tout a fait normal. Ta mère et moi Ahmed, avions même entendu un homme se plaindre de ne pas avoir trouver quelqu'un a qui donné la main de sa fille et que les gens aux alentours de lui allaient le pointer du doigt. Vous vous en rendez compte ? On donne même en mariage juste pour prouver sa supériorité dans la famille et aux gens. A croire que c'est devenu une compétition de celui qui réussit à marier son enfant contre son gré.

- Je suis d'accord avec ce que dit Kafaya. C'est tellement dégoûtant ce qui se passe actuellement ici. Et comme vous avez entendu Al-Amine le dire, on vous demandera ce que vous en savez du bonheur. Que vous êtes jeunes et que c'est aux anciens de vous montrer le chemin. J'avoue que moi-même j'ai été tenté d'accepter que tu te maries mon fils,j'étais dérangée de partout. On me rappelait des choses, me faisait du lavage de cerveau de tous les côtés. En a peine cinq jours j'ai vécu l'enfer, émotionnellement parlant. Alors que je ne désirais pas le moins du monde que tu te maries contre ton gré mon' fils.

- Ne t'en fais pas yemma je peux comprendre. L'effet de masse et les mots de ces psychopathes joueraient sur n'importe qui. Mais a présent moi même je suis là. Tant que cette histoire n'est pas définitivement résolue je ne compte pas te laisser a leur main. C'est sûrement l'erreur qu'ils attendent que je fasse mais ils seront surpris. De toutes les façons ils ne peuvent marier personne ici sans le consentement de celle-ci devant l'imam. Alors moi je suis tranquille.

- Mais pourquoi personne ne prend en compte ce que je dis ? s'offensa Karim. N'oubliez pas que je suis la tête pensante ici et même s'il n'y a personne pour me le dire,je sais que ce n'est pas bête ce que j'avance.

- Je ne dis pas que c'est dénué de sens gros c'est juste qu'il n'a aucune raison de faire ça.  On ne peut pas dire que c'est l'argent qui le pousse a faire ça, tu sais qu'il est dix fois plus riche que nous. C'est quoi alors selon' toi ? En plus tu as vu comment il avait l'air de me détester a cause de mon passé et comment Soliath l'insupporte juste parce qu'elle ne s'est pas encore décidée à porter le voile, honnêtetement je ne vois pas ce qui peut le pousser.

Karim se prit la tête entre les mains et secoua la tête comme si n'en revenait pas qu'Ahmed puisse dire de pareille chose. Il le vit regarder sa mère.

- Yemma toi tu as compris non ? demanda-t-il

Elle hocha la tête puis prit la parole.

- Écoute Ahmed l'erreur se trouve au niveau de ce que toi même tu viens de dire. S'il vous déteste autant Subhan'Allah pourquoi vouloir a tout prix vous unir a ses enfants ? On le sait, chaque parent veut ce qu'il y'a de mieux pour ses enfants,alors s'il n'y avait effectivement rien derrière pourquoi se tuerait-il pour que ses enfants chéris, ses enfants parfaits et modèles s'unissent a vous qui selon lui n'en valez pas la peine ? Réfléchis Ahmed mon fils.

- Voilà exactement mama, c'est ce que je me disais aussi s'exclama Karim en se levant et en tapant dans les mains de sa mère. On est trop connectés inh yemma

- Je sais mon fils je sais répondit-elle en roulant malicieusement des yeux.

Maintenant qu'ils le disaient, Ahmed remarqua que ce n'était pas faux. Ce n'était pas du tout bête, alors là pas du tout bête.

En venant leur rappeler combien de fois il était dégouté d'eux, ne venait-il pas de faire une grave erreur ? Il venait de susciter des interrogations qui n'allaient pas rester longtemps sans réponse.

- Mais si nous sommes tous d'accord qu'il ne le fait pas pour l'argent alors pourquoi ? On ne lui a jamais rien fait que je sache lança Ahmed en creusant dans ses méninges.

Il se rappela des mots de son oncle quand il était là. Il les ressassait encore dans sa tête quand quelque chose retint son attention.

- Attendez une minute, quand il parlait il faisait souvent référence a toi mama déclara Ahmed en fronçant les sourcils. Oui a chaque fois il appelait ton prénom.

Tous les regards convergeaient vers elle. Sa mère paraissait mal a l'aise d'être le centre de l'attention et Ahmed s'en voulu de la mettre dans une position inconfortable.

Elle poussa un très long soupir puis prit la parole

- J'ai des choses a vous dire declara-t-elle