Épisode 1

Write by Mona Lys

Episode 1



TERRY YOUL


Mon cerveau s’arrête de fonctionner à l’entente du dernier mot du docteur. Ma vue devient floue, mes mains se mettent à trembler, mon cœur s’arrête de battre et tout mon être rejette l’information qu’on vient de me donner.


Ça ne peut pas être possible. Non !


Il y a une erreur. Il y a forcément une erreur. Il ne s’agit pas d’elle.


– Nous sommes… désolés M YOUL ! Nous avons fait…


Mon esprit commence à me quitter et les bruits autour de moi me semblent lointains. Je ne vois plus personne. Je n’entends plus rien. J’entends son rire à elle, je l’entends me dire qu’elle m’aime, je la vois s’accrocher à mon cou pour ne pas qu’on se sépare. Je nous vois rigoler, jouer, manger du gâteau au chocolat devant un film comique. Je baisse les yeux sur mes mains rougies par son sang. Il y a son sang sur ma chemise. Son sang. Des flashs défilent sous mes yeux. Des flashs de nos habitudes, des habitudes qu’elle m’a obligé à avoir.


« « « Comme chaque matin j’entends la porte de ma chambre s’ouvrir à la même heure. Je sais déjà que j’aurai droit à mon réveil habituel mais je ne m’en plains pas. J’aime ça. Elle se met à sautiller sur le lit.


– C’est l’heure de se lever, c’est l’heure de se lever.


Elle intensifie ses cris et ses sauts face à mon silence.


– C’EST L’HEURE DE SE LEVER, C’EST L’HEURE DE SE LEVER.


Je lui lance un oreiller par surprise ce qui a le don de calmer ses sauts. Elle en prend un et là commence une bataille de polochon. Au moment où elle s’y attend le moins je lui fais un tacle puis quand elle tombe sur le lit, je me place sur elle et commence à lui faire des guilis.


– Non arrête. Teyo non je t’en prie.

– Ça t’apprendra à me réveiller de la sorte. Dis-je en continuant de la chatouiller.

– Arrêêête. Teyo non. Je te donnerai mon bacon.


Je m’arrête de la chatouiller et la regarde.


– Tout ton bacon ?

– Non juste un peuuu.


Je reprends les guilis pour la faire craquer.


– D’accord c’est compris, je te donnerai tout mon bacon. 

– Promis juré craché ?

– Promis juré craché.


Ensemble nous faisons mine de cracher dans nos mains et nous nous saluons pour signer l’accord.


– À la douche maintenant.


Nous nous rendons ensemble dans nos cabines. Quand nous finissons, nos tailles entourées de serviette, nous nous rendons chacun devant son lavabo où nous nous brossons les dents. Quand nous finissons nous nous faisons face pour une inspection.


– Langue !


Nous nous montrons chacun nos langues.


– Dents !


Nous montrons nos dents. Je me baisse pour taper sur ses dents et elle fait de même.


– Haleine !


Chacun souffle pour que l’autre sente son haleine. Tout est ok. Je sors en premier de la salle de bain pour enfiler mon pantalon et vais toquer à la porte de la salle de bain. Elle me rejoint dans la chambre et nous finissons de nous habiller avant de descendre.


– C’est moi qui fais le petit déjeuner. S’écrit-elle en dévalant les escaliers.


Je la rejoins dans la cuisine et salue Matou la servante.


– Bonjour monsieur comment allez-vous ?

– Ca va. C’est Inès qui se charge du petit déjeuner aujourd’hui.

– Oui et Teyo toi tu es mon assistant.

– D’accord chef.

– Je vais donc aller ranger vos chambres.


Inès et moi enfilons nos tabliers et commençons à faire la cuisine. Du moins c’est elle qui le fait et moi je l’aide en faisant les choses qu’elle ne peut pas faire ou prendre des choses qui sont plus hauts qu’elle. Quand nous finissons nous allons nous mettre à table chacun devant son assiette.


– Mon bacon !

– Rêve toujours Teyo.


Je me lève et fais mine de m’avancer vers elle.


– Non c’est bon, c’est bon tiens.


Elle me tend son assiette et j’y pique une tranche de bacon. Je lui fais un clin d’œil et elle tire sa bouche pour me faire un bisou. C’est toujours une joie pour moi de passer du temps avec elle. Le petit déjeuner terminé chacun prend son sac et nous sortons de la maison retrouver Rico mon chauffeur, garde et bras droit près de la voiture.


– Bonjour Rico. Le salut Inès.

– Bonjour princesse.


Ils se tapent dans les mains avant de tous monter dans la voiture. » » »


C’était ça notre quotidien. Quand je reviens à moi et que je vois le docteur là en face de moi une colère me monte au nez. Je lui envoie direct mon poing dans sa gueule. Il s’écroule et je le relève par les colles.


– Comment a-t-elle pu mourir dans vos mains alors que vous êtes un docteur ?

– Monsieur YOUL…

– FERMEZ-LA !!! Vous n’êtes qu’une bande d’incapable. Je vais faire fermer ce putain d’hôpital et on verra à qui vous ôterez la vie.


Je le jette par terre et me dirige dans la salle d’opération. Tout le monde s’écarte à mon passage. Quand j’entre dans la salle tous ceux qui s’y trouvent sortent me laissant seul avec le corps. Mes mains se mettent à trembler de nouveau. J’avance un pas après l’autre. Quand je vois son petit visage si innocent je serre les dents pour ne pas craquer. Mais quand la scène de son accident me revient je craque. Je laisse mes larmes couler à flot sur mes joues. Je la prends dans mes bras puis au contact de son corps frigide et inerte, je me mets à hurler toute ma haine. Je hurle à m’en casser les cordes vocales avant d’éclater en sanglots.


– Réveille-toi mon amour je t’en supplie. J’ai besoin de toi. Je t’en prie ne me laisse pas ! Je vais t’acheter autant de bacon que tu veux mais ouvre les yeux mon amour je t’en conjure. Ne me laisse pas chérie !


Je pleure et pleure et pleure toujours en la serrant dans mes bras. Je veux lui communiquer la vie. Je veux qu’elle se réveille. Elle ne peut pas partir aussi subitement. Ce n’est pas possible. Je sens quelqu’un poser ses mains sur moi.


– Boss, dit Rico avec un peu d’hésitation dans la voix, vous devez être fort… pour elle.


Je la redépose tout doucement après l’avoir serré encore quelque minute contre mon cœur. Je pose sur ses lèvres un baiser et sors comme un automate. Je continue de marcher jusqu’à l’extérieur de l’hôpital sans vraiment voir les gens autour de moi. Il pleut des cordes et c’est de ça dont j’ai besoin, de sentir l’eau sur moi pour enlever cette sensation d’échec, de nullité que j’aie sur le corps. Je continue de marcher sous cette pluie sans savoir où je vais. Je suis trempé jusqu’aux os mais ça ne me dérange pas moi qui aie une sainte horreur de ne pas être présentable. Je me sens vide, complètement vide. Je viens de perdre l’autre moitié de mon cœur. La première moitié je l’ai perdu il y 7 ans et aujourd’hui je perds l’autre. Que vais-je faire maintenant qu’elle n’est plus là ? C’était pour elle que je vivais, c’était pour elle que je me battais jour et nuit pour être le meilleur afin qu’elle soit fière, c’est pour elle que je suis en train de construire ce putain de palace pour qu’elle y vive comme la princesse qu’elle est, ou qu’elle… était. J’étais son Teyo à elle toute seule et elle était mon poussin à moi. Je ne débutais jamais la journée sans son câlin et ne la terminais pas sans.


« « «  – Ta journée s’est bien passé ? Me demande Inès alors que je monte le drap sur elle.

– Oui. Et la tienne ?

– Super. Tu as été gentil ? Tu as souri ?

– Oui.

– Oui pour quoi ?

– Les deux mon poussin.

– C’est vrai ?

– Bon un tout petit peu.

– Tu devrais sourire et être plus gentil souvent. Je n’aime pas quand tu te fâche.

– Je ne me fâcherai plus.

– Promis juré craché ?

– Promis juré craché.


Nous faisons mine de cracher dans nos mains et sous saluons.


– Je t’aime Teyo.

– Je t’aime poussin. Allez dors maintenant.

– Notre tchèck-bisou-câlin.


Nous nous cognons les poings, faisons un smack sur les lèvres et nous enlaçons. Elle se recouche et je me dirige vers la porte


– Teyo ?

– Hum ?

– Je t’aime. » » »


Une voiture m’éclabousse d’eau me ramenant ainsi à la réalité. Je ne réagis pas et continues de marcher le long de la route. En d’autres circonstances ce chauffeur aurait déjà sa voiture bousillée et lui soit à l’hôpital soit en prison pour y passer la nuit. Oui je règle toujours mes affaires à la manière forte mais là qu’on me fasse ce qu’on veut, qu’on me donne des coups, qu’on me frappe à sang, qu’on me percute avec une voiture, je ne réagirai pas parce que là présentement je ne suis plus moi-même. Je ne sais plus qui je suis présentement mais une chose est sûre, je ne suis pas Terry YOUL. Le Terry YOUL que tout le monde craint.


– TERRY !


Ce matin encore elle me disait que j’étais le meilleur et qu’elle avait de la chance de m’avoir. Mais c’est faux, c’est elle qui était la meilleure et j’avais de la chance de l’avoir. Moi je suis nul. Je ne suis qu’un pauvre type. Je n’ai pas pu la protéger, je n’ai pas pu empêcher ce chauffard de la renverser et de lui rouler dessus. J’ai failli à mon rôle, j’ai failli à ma mission.


– Terry ! Chéri !


Ma mère se poste devant moi et me tient les épaules pour m’obliger à m’arrêter. Je la regarde sans vraiment la voir, elle me regarde aussi. Malgré la pluie qui s’abat sur nous je peux voir ses larmes couler.


– Chéri. Dit-elle la voix tremblante.


Là je craque à nouveau et tombe dans ses bras. Tous les deux sommes submergés d’émotions et nous nous retrouvons à genoux par terre dans une flaque d’eau. Elle me tient serrer dans ses bras comme si elle voulait m’empêcher de fuir.


– Je n’ai pas su la protéger maman. Je l’ai tué.

– Ne dis pas ça chéri. Ce n’est pas ta faute.

– Elle est morte maman. Mon bébé.

– Je suis désolée ! Je suis tellement désolée !


Toujours assis par terre et sous la forte pluie nous continuons à pleurer malgré ses tentatives à me calmer. J’ai mal, affreusement mal. J’ai perdu mon bébé, ma meilleure amie, ma fille. Elle n’avait que 7 ans bon sang !


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