Épisode 11

Write by Mona Lys

Episode 11



KENDRICK KALAMBAY


Flash-back cinq ans plus tôt


Je ne sais comment s’est arrivé mais je suis dingue de cette fille. Cindy ! C’est fou comme je l’aime. Juste deux mois et je l’ai dans la peau. Je n’arrive plus à passer une journée sans la voir. Je passe la chercher chaque soir à son travail. Je l’aime ce n’est pas possible. Qui l’aurait cru ? Moi Kendrick KALAMBAY amoureux d’une fille ? Même moi je ne l’aurais imaginé. Mais j’en suis heureux parce que je suis amoureux d’une fille exceptionnelle. Pour une fois je suis heureux d’un coup foireux de mon frère. Même si nous jouons à un jeu dangereux et très méchant, je suis heureux de connaitre cette fille. Kennedy m’a bien eu avec son discours de nous devons resserrer nos liens après toutes ces années. Il n’a pas cessé de me parler de nos liens, et blabla si bien qu’il a fini par me convaincre d’accepter de séduire Cindy. C’est vrai que des fois j’ai des remords mais je préfère profiter de chaque instant maintenant avec elle parce que lorsqu’elle saura tout elle me jettera sans hésiter. 


Comme chaque samedi je passe la journée avec elle. Tantôt nous sortons tourner en ville tantôt nous restons simplement chez elle à cuisiner, manger, regarder des films et jouer à des jeux. Je ne peux pas l’emmener à l’appart parce que je vis avec Kennedy et si elle y va, elle risque de tout découvrir. Aujourd’hui nous avons décidé de rester chez elle. À peine je cogne à sa porte qu’elle m’ouvre.


– Mwasi kitoko (Jolie femme). Dis-je

– Mobali ya ngebu ngebu (Beau gosse). Répond-t-elle.


Nous nous sourions et quand j’entre je capture ses lèvres. Je me permets de l’embrasser, de la chouchouter parce que Kennedy ne le fait pas avec elle. Tout ce qui l’intéresse chez elle c’est le sexe. Dès que je libère ses lèvres elle me prend ma casquette qu’elle porte.


– Dois-je encore dire adieu à cette casquette ? Demandé-je en allant m’asseoir.

– Oui. Répond-t-elle en faisant de même.

– Je vois que tu apprends vite le Lingala.

– Oui et d’ici le mois prochain je serai plus Congolaise que toi. J’adore le ngebu ngebu.


J’éclate de rire


– Je n’aurai jamais dû te le dire. Tu ne veux plus lâcher le mot.

– Je ne le lâcherai plus. Alors on fait quoi aujourd’hui ?

–Jouons au poker. 


Nous passons une merveilleuse journée entre les jeux et les fous rires. Je l’aime encore plus chaque jour. J’adore son sourire et son rire me réchauffe toujours le cœur. Je suis tellement occupé  à la regarder que je me déconcentre sur mon jeu et elle gagne. Elle se lève et se met danser.


– Pff tricheuse va.

– C’est toi le nul. Je suis ta chef.

– Même pas en rêve.

– Viens danser avec moi. Dit-elle en mettant de la musique.

– Je t’ai déjà dit que je ne sais pas danser.

– Un Congolais qui ne sait pas danser ? Tu as vu ça où ? Viens ici.


Elle me tire et commence à danser devant moi. C’est pas que je ne sache pas danser, c’est juste que j’en ai honte. J’ai toujours été très réservé et la danse c’est l’une des dernières choses que je ferai au monde. Je réussi à lui échapper et retourne m’asseoir. Elle continue de danser et moi je la regarde. Elle est tellement belle. C’est vraiment dingue ce que je ressens pour cette fille. Comme pousser par une force je me lève et la tire contre moi pour l’embrasser. J’ai envie de la sentir contre moi.


– J’aime tellement quand tu es comme ça. Souffle-t-elle contre mes lèvres.


Pour toute réponse je la serre encore plus à moi. Elle glisse ses mains sous mon tricot et commence à parcourir mon corps. Je frissonne. D’agréables frissons.


– J’ai envie de toi Ken. Je veux que ce Ken me fasse l’amour.


Je la soulève aussitôt et nous nous rendons dans sa chambre en nous embrassant. Nous nous couchons sur son lit moi au-dessus d’elle sans détacher nos lèvres. J’ai envie d’elle. Très  envie.


– Fais-moi l’amour Kennedy KALAMBAY.


Cette phrase me ramène illico sur terre et me pousse à mettre fin à ce moment. Je ne suis pas Kennedy ce qui veut dire que je n’ai pas le droit de la toucher. Mon rôle était juste de la faire succomber à mon frère jumeau et c’est ce que j’ai fait. Je devrais maintenant m’éloigner d’elle.


– Je ne peux pas.

– Quoi ?


Je retourne m’asseoir sur le bord du lit. J’ai envie d’elle mais je ne dois pas la toucher. Elle est à Kennedy, pas à moi. Elle vient s’accroupir devant moi pendant que je lutte contre moi-même.


– Qu’est-ce qui se passe Ken ?

– Je ne peux pas te toucher.

– Pourquoi ?

– Je… je ne crois pas que ce soit une bonne idée.

– Je sais que tu as un problème de bipolarité et je t’ai dit que je suis avec toi. J’ai déjà fait l’amour avec ta deuxième personnalité au cas où tu ne t’en souviens pas et ça n’a pas toujours été agréable. Aujourd’hui je veux que le vrai toi me fasse l’amour. Je veux partager un merveilleux moment avec le Ken doux, attentionné, réservé. Je veux que tu prennes soin de moi.

– Je ne sais pas si je serai à la hauteur.

– Ce Ken n’a jamais fait l’amour ?


Je fronce les sourcils.


– J’ai lu que chaque personnalité d’un bipolaire a sa vie et son caractère. L’autre Ken est un homme à femme tandis que celui que tu es là maintenant est un homme qui fuit les femmes.


Je ne sais vraiment pas d’où Ken a sorti cette histoire de bipolarité et comment il a réussi à lui faire gober cela. Il aurait pu trouver autre chose à dire non !? Quel enfoiré !


– Viens je vais te montrer comment faire. Détends-toi !


Sans me laisser la peine de répondre elle reprend possession de mes lèvres et s’assoit sur moi. Elle retire mon tee-shirt et le sien. À la vue de ses seins dans ce soutient mon envie décuple. Je décide de prendre les rênes, j’active le lecteur musical dans mon portable et la renverse sur le lit un son de « Fally Ipupa » orgasy se fait entendre. Je commence à parcourir tout son corps de baisers jusqu’à ce qu’elle m’invite à la posséder. J’en meure aussi tellement d’envie que je me déshabille et sans me protéger, la pénètre, bouge des reins sensuellement au son de la musique qui m’accompagne. Je me sens merveilleusement bien en elle, j’essaie de rythmer mes gestes aux paroles de la Chamson. Tout mon être est embrasé et mon amour pour elle prend encore plus de la place dans mon cœur quand j’entends :


 « Kota na kati na ngai bongo yo téla miso (X2)

mpo o comprendre besoin o ngai nazo yoka eh après okobima na yo "

 (Pénètre-moi, pour qu’enfin tes yeux deviennent rouges de sensation (2x)

Ainsi tu comprendras mon plaisir, et après tu pourras te retirer) »


Je n’arrive plus à bouger en elle tellement je suis dans un autre état quand le refrain suivant rempli la pièce :


« Nazo yoka bien, nazo yoka motema eh 

Yo'zo koma bien cheri bandela lecon 

Memoire efungwama nga po'ezo sala ng'elengui 

Nazo yoka bien nazo yoka lolemu eh 

Elenguisé nga » 

(Je me sens bien, je sens mon cœur battre ee

Tu es entrain de bien écrire toute les lettre de l’alphabet avec tes coups de rein chérie recommence encore ta leçon 

Pour que ma mémoire s’active parce que cela me procure du plaisir

Je me sens bien, je sens ta langue ee, fait de moi le mot plaisir) ». 

 

C’est ma première fois de toucher une femme et je le fais aujourd’hui avec la seule femme qui a réussi à prendre mon cœur. Je passe mon bras sous elle et la serre fortement contre moi et là j’entends :


« Pardon chéri bandela lisusu je t'aime encore 

Encore un peu balola ngai biloko'katia libumu 

Tango ango oyebisaki nga ke olingaka nga 

Mosapi na yo na matoyi na nga caresse papa 

Maboko na yo na loketo na nga motiver nga eh 

Yoka mongongo ya mwana ngani ya moke (ya moke) 

Azolela tonga ya vaccin na ye 

Yoka mongongo ya mwana ngani ya bébé (ya bébé) 

Azolela tonga ya vaccin na ye »

« Pardon chérie recommence encore, je t’aime encore,

Encore un peu, tourne tout ce qui se trouve dans mes entrailles,

Quand tu m’avais déclaré ton amour, 

Tes doigts sur mes oreilles étaient que caresse,

Tes mains sur mes hanches me motivaient,

Entends les pleurs de l’enfant d’autrui, qui pleure après avoir reçu son vaccin, sur sa hanche…Maman sur la hanche.


– Naku penda Cindy. Naku penda. (Je t’aime en Swahili)

– Je t’aime aussi Ken. De tout mon cœur.


Je me remets à bouger lentement en elle. Je me demande si elle ressent du plaisir mais j’ai la réponse quand je sens ses ongles s’enfoncer dans mon dos. Je n’ai plus envie d’arrêter. Et ça me détruira certainement mais tant qu’elle ne saura pas le jeu dans lequel nous l’avons mis je vais profiter de chaque seconde avec elle et lui montrer à quel point je l’aime.


Deux mois plus tard


Mon monde vient de s’écrouler. Cindy porte les enfants de Kennedy et maintenant je dois m’éloigner d’elle. Je dois retourner à Kin et l’oublier. Je l’aime mais je suis obligé de mettre fin à cet amour. Je sais qu’elle aussi m’aime parce qu’elle n’a cessé de me dire qu’elle aime le Ken doux, c’est-à-dire moi et non Kennedy. Mais je vais devoir la lui laisser à cause des enfants. Elle attend des jumeaux. J’aurai donné tout et n’importe quoi pour qu’ils soient de moi. Mon vol c’est pour ce soir et là maintenant il ne me reste plus qu’à lui dire adieu. 


Dès que j’entre chez elle, elle me saute dessus et m’embrasse langoureusement. Ça va me manquer, ses baisers et ses lèvres. Son sourire, son rire, ses caresses, sa voix, tout. Absolument tout d’elle va me manquer. Pourquoi diable ne suis-je pas le père des enfants qu’elle porte ? Je l’aurai direct demandé en mariage et épouser. Je veux l’épouser. Quand elle me lâche elle se met à parler de l’organisation du mariage. Sur le coup je ne capte pas mais quand je regarde son annuaire,  je comprends. Je vois que Ken n’a pas perdu de temps. Il va donc vraiment l’épouser. J’avais prévu passer la journée avec elle mais là je ne le peux plus. Je n’ai pas envie de l’entendre me parler de leur mariage. Je sors juste de ma poche un coffret et l’ouvre devant elle.


– Oh elles sont magnifiques.

– Comme toi.


Elle me regarde les yeux brillants. Elle adore les compliments. Je prends les deux chaines de la boite et colle les médailles. C’est un demi-cœur et l’autre partie du cœur est collée à une clé. Les deux collés font une médaille. Ça donne un cœur et sa clé. Je la retourne pour lui montrer ce qui est écrit derrière. Elle se met à lire à haute voix.


– Nili ku pendaka mara ya kwanza nili ku onaka, nta ku pendaka tu ata kama siku one tena. (Elle me regarde) Qu’est-ce que ça veut dire ?


Je divise la médaille et lui enfile une moitié. Je lui tends la deuxième et lui demande de me la porter. Une fois fait,  je la rapproche de moi en passant mon bras autour de sa taille. Je me rapproche de son oreille.


– Je t'ai aimé au premier regard mais je t'aime même quand je ne te vois pas et je t'aimerai toujours même si je ne te vois plus.


Elle détache sa tête et me regarde les yeux brillants.


– C’est magnifique.

– Je t’aime Cindy. Na lingi yo makasi (Je t’aime très fort).

– Na lingi yo Ken.


Nous nous embrassons pendant un moment et sentant une envie pointer je mets fin au baiser et la serre très fortement dans mes bras.


– N’oublie jamais que je t’aime Cindy. Quel que soit la distance mon cœur sera toujours à toi et il ne battra que pour toi.

– Bébé qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi parles-tu comme si tu t’en allais loin de moi pourtant nous allons nous marier le mois prochain ?

– N’oublie juste jamais ces paroles.

– D’accord.


Un dernier baiser et je sors de chez elle sans me retourner au risque de revenir sur mes pas pour lui faire l’amour une dernière fois. Je pars et je laisse ici mon premier et mon dernier amour.


Retour dans le présent


Je caresse ma chaine que j’ai au cou depuis ces cinq années en regardant les photos de Cindy défiler sur mon ordi. Cinq ans et je l’aime toujours autant. Mais comment puis-je l’oublier quand elle a été ma première fois en tout. Celle qui m’a dépucelé, la seule avec qui j’ai aimé passer du temps, mais surtout la seule à avoir conquis mon cœur. Je n’avais jamais regardé une femme avant avec du désir. Pas que j’étais gai ou insensible à la beauté féminine. Juste que j’avais mieux à faire que de tomber amoureux. Ado, ma seule priorité c’était être le meilleur à l’école ce qui m’a toujours valu le premier rang durant tout mon cursus scolaire. J’ai été premier même dans toute l’école. Mon seul but dans la vie c’était de faire la fierté de mes parents et devenir quelqu’un de grand. J’évitais donc toute distraction à savoir les filles, les bars, l’alcool et tout. À l’Université,  tout le monde me prenait pour un gai si bien qu’à deux reprises mes potes m’ont poussé à embrasser une fille pour leur prouver le contraire. Je l’ai fait et je n’ai rien ressenti. Les filles me faisaient des yeux doux mais je ne leur prêtais aucune attention. La seule fois que j’ai ressenti quelque chose en embrassant une fille c’est avec Cindy. Je l’aime et c’est toujours au-dessus de mes forces.  


Je sors de ma rêverie et regarde dans le miroir de la salle de bain si ma casquette est bien mise. Je sors retrouver Aurélie dans la chambre. Aurélie c’est ma femme. Nous sommes mariés depuis trois ans maintenant. C’est ma mère qui me l’a présentée un an après ce qui s’est passé avec Cindy. Je me suis marié juste pour lui faire plaisir. Aurélie est la fille d’un partenaire très important de l’entreprise familial qui est en Côte d’Ivoire. À l’époque, Kennedy a fait une gaffe et on avait urgemment besoin du financement du père d’Aurélie pour compenser avant que Luzolo ne l’apprenne sinon il aurait fait des victimes. Ma mère a donc conclu que pour convaincre M YEO le père d’Aurélie je devais l’épouser, c’était, selon elle, le seul moyen de resserrer les liens de nos deux familles. Bien entendu je ne le voulais pas mais elle s’est mise à pleurer en disant que moi je ne l’ai jamais considéré comme ma mère et patati et patata. Comme toujours, j’ai cédé face à ses pleurs. J’ai fréquenté Aurélie pendant un an et après nous nous sommes mariés. Je n’ai pas besoin de signifier que je ne l’aime pas. Et je crois que c’est aussi son cas. Je crois qu’elle a aussi accepté de m’épouser pour faire plaisir à ses parents. Elle a accepté de venir vivre ici au Congo avec moi pour justement être loin d’eux et être plus indépendante. Même si nous ne sommes pas un couple à 100%, nous nous traitons bien, ou du moins notre cohabitation se passe bien. Chacun vit sa vie de son côté et le soir nous nous retrouvons pour diner et nous mettre au lit. Nous faisons l’amour la plus part du temps quand c’est elle qui en a envie. Oui elle me donne du plaisir mais pas comme Cindy. Je n’ai jamais désiré le corps d’une autre femme à part le sien.


– Tu viens avec moi chez mes parents ? Demandé-je en enfilant ma montre.

– Non. Tu sais très bien qu’ils ne m’aiment pas.

– Tu ne peux pas dire qu’ils ne t’aiment pas alors qu’ils n’ont jamais eu de mot déplacé envers toi.

– Même si. Mais par leur manière de me regarder ça se sent. Je sors avec mes copines.

– Ok c’est comme tu veux.


Elle prend sa pochette et pars. Je finis de me préparer et prends aussi la route pour chez mes parents. Je dîne chez eux presque tout le temps. Ma femme ne sait pas cuisiner et la vie de femme au foyer elle n’y connait rien. Tout ce qu’elle sait faire c’est le shopping, les sorties et le mannequinat. Aurélie est mannequin et je crois que c’est ça son amour. Elle passe tout son temps à voyager et c’est tant mieux. Au moins je ne l’ai pas tout le temps dans mon dos. C’est épuisant de faire semblant d’aimer quelqu’un. Je fais néanmoins le minimum qui est celui de prendre soin d’elle et Dieu merci, j’ai de l’argent parce que Dieu seul sait combien elle est dépensière. J’arrive dans la villa KALAMBAY où toute la famille est assise au salon. Il y a mon père Luzolo, ma belle-mère Sonia que j’appelle affectueusement Mama So et ses deux filles Parfaite et Charlène. Elle et mon père sont mariés depuis trois ans aussi, avant mon mariage, et ils n’ont pas d’enfant ensemble. Mama So a perdu son mari avec qui elle vivait en France il y a six ans. Elle est donc revenue dans son pays avec ses deux filles. C’est là qu’elle a rencontré mon père.  


– Mbote. (Bonsoir)


Ils me répondent tous et je prends place dans l’un des fauteuils près des filles.


– Boni Ken (Comment vas-tu Ken) ? Me demande Mama So.

– Je vais bien mama So et ici ?

– Tout le monde va bien. On t’attendait pour passer à table.

– Ah si tu ne venais pas on allait tout manger. Me dit Charlène.

– Comme si tu pouvais manger le quart de la nourriture. Je lui réponds en souriant. 

– Laisse-moi ton plat et tu verras si je ne finirai pas tout.


Je souris. Charlène qui a 23 ans est mannequin et elle mange à peine pour éviter de prendre un kilo. Je les aime bien mes deux petites sœurs. Elles sont très attachantes et me font par la même occasion chier à chaque fois que nous sommes ensemble. Nous nous mettons à table et après le bénédicité commençons à manger.


– Ta femme est encore à une de ses soirées avec ses copines je suppose ? Me lance mon père.

– Oui papa.

– Je me demande souvent comment toi, un homme aussi brillant, tu as pu épouser une fille aussi tête en l’air.

– Luzolo arrête ! L’interpelle sa femme. S’ils sont mariés c’est parce qu’ils s’aiment.


Charlène tord sa bouche.


– S’aimer mon œil. Lance-t-elle.


Je lui donne un coup de pied sous la table. Toutes les trois femmes savent toute mon histoire, que ce soit avec Cindy et aussi ce mariage arrangé, sauf mon père. Il me truciderait s’il apprenait tout.


– Quand je pense à comment elle gaspille ton argent ezo swa nga na motema (ça me fait mal au cœur). Lance à son tour Parfaite.

– Je suis son mari donc c’est normal qu’elle dépense mon argent.

– Bilorbish ! (N’importe quoi).

– Les filles laissez votre frère tranquille.


Elles tirent encore la bouche. Le problème ce n’est pas qu’ils n’aiment pas ma femme, c’est juste qu’ils la trouvent trop tête en l’air et qu’elle ne fait pas une bonne épouse. Quelle femme laisse son homme manger dehors ? Aurélie ne sait même pas cuire un œuf. Mais moi je l’ai dit, ça ne me dit absolument rien.


– Ken tu m’accompagnes ce week-end à Brazza ? Me demande Charlène.

– Qu’il y a-t-il là-bas ?

– J’ai été sélectionnée pour un défilé. Nous devons présenter une marque de chaussure d’une créatrice ivoirienne. 

– C’est pour combien de jour ?

– Bon le défilé c’est sur une soirée mais on aura un shooting photo le lendemain et le jour d’après on nous donne notre paie donc trois jours maxi et nous sommes de retour.

– D’accord. Mais je ne te servirai pas de Huber. Chacun louera une voiture.

– Arrête de faire ton grand-frère sévère. On sait très bien que tu me conduiras. Tu es trop gentil.


Je lui souris. Le diner terminé papa s’éclipse dans son bureau, les filles dans leurs chambres et je reste avec Mama So. J’aime bien rester discuter avec elle après le diner. Avec ma mère je n’ai jamais eu de complicité. Son chouchou a toujours été Kennedy ce qui créait tous les jours des disputes surtout quand papa me félicitait pour mes bonnes notes. Quand ils ont divorcés ça a été un coup dur pour moi parce que j’ai toujours voulu avoir une famille unie. Kennedy apparemment ça ne lui faisait ni chaud ni froid, tant que sa mère était avec lui, ça lui allait. Après le divorce papa est venu s’installer au Congo son pays d’origine. Moi j’étais resté avec ma mère et mon frère mais me sentant délaissé par ma mère,  j’ai décidé de rejoindre mon père.


– Tu sais ton père se pose beaucoup de question à ton sujet. M’informe Mama So.

– À propos de quoi ?

– Ton mariage subit avec Aurélie, le fait que tu ne parles plus à ton frère,  que tu n’aies pas été à son mariage. Enfin toutes les questions qui ont pour réponse ce qui s’est passé il y a cinq ans. Tu devrais peut-être tout lui dire avant qu’il ne le découvre lui-même.

– Ça n’en vaut pas la peine. C’est le passé et le passé ça reste derrière.

– Mais tes sentiments eux ne sont pas restés derrière. Cinq ans et tu es toujours autant amoureux de cette femme. Y a qu’à voir comment tu chéris cette chaine.

– C’est la seule chose que je partage avec elle. Elle croit que Kennedy c’est moi et ils doivent être heureux.

– D’après ce que ton père m’a raconté après son dernier voyage en Côte d’Ivoire cette femme est tout sauf  heureuse.

– Tu sais très bien qu’entre papa et Ken ce n’est pas le grand amour. Il a certainement dû tomber à un moment de dispute et en a déduit qu’elle souffrait. Je n’ai pas envie de me mêler de leur couple. Le mieux c’est que je reste dans l’ombre.

– Tu penses qu’elle va ignorer toute sa vie que son mari a un frère jumeau ?

– Je n’ai pas envie d’y penser.


Je jette un coup d’œil sur ma montre.


– Il se fait tard je vais rentrer. J’ai du boulot.

– Dis plutôt que tu vas lui écrire. Hein Drick !?


Elle me fait un sourire narquois. 


– Je suppose que ce sont les filles qui m’ont balancé ?

– Le même jour où tu le leur as confié. Fais gaffe à ce que Ken ne découvre pas que tu contactes sa femme.

– J’y veillerai. Bonne nuit.

– Bonne nuit mon garçon.


Je l’embrasse sur la joue et prends congé. Dès que je monte dans ma voiture j’active ma connexion et envoie une note vocale à Cindy. Elle me répond aussitôt.


– Je ne te dérange pas ?

– « Non Drick. Je surfais sur le net. Je n’arrive pas à dormir. »

– Et ton époux ?

– « En voyage. Mes enfants sont en bas devant la télé. Ils sont en congés donc je leur permets de dormir un peu tard. Quoi de neuf chez toi ? »

– En dehors du fait que je ressente encore la fatigue du voyage il n’y a rien de neuf. Tu veux que je t’envoie une musique pour t’aider à dormir ?

– « Non. J’ai pas envie de dormir. Je veux juste discuter avec toi. »


Cette phrase me met du baume au cœur. C’est la première fois qu’elle accepte qu’on cause après 20h même quand Ken est en voyage. Elle est l’exemple même de la femme parfaite. Elle refuse de discuter la nuit de surcroit avec un homme. Je discute avec elle jusqu’à ce que j’arrive à la maison. Aurélie est en pleine conversation téléphonique. Je monte dans notre chambre pour continuer ma discussion avec Cindy. Ayant marre des notes vocales je lui demande la permission de l’appeler. Elle accepte et décroche à la deuxième sonnerie. 


– « Je peux te dire une chose ? »

– Vas-y.

– « Des fois quand je discute avec toi j’ai l’impression de parler à mon mari, enfin mon mari avant notre mariage. Vous avez certaines manières en commun. Même au niveau de la voix »

– Dois-je m’en réjouir ?

– « Je ne sais pas. Mais moi ça me rend nostalgique. Je sais que je ne devrais pas te parler de ça mais bon vu comme nous sommes devenus si proches en une année je me le permets. Mon mari, depuis notre mariage, n’est plus le même. Il me traitait comme toi tu le fais mais depuis notre mariage tout a changé. Comment crois-tu que je puisse le faire redevenir cet homme ? »


Qu’est-ce que je peux lui répondre quand je connais la raison de ce “changement’’ ?


– Continue à être cette femme douce et joviale. Peut-être que ça le fera redevenir lui-même.

– « Peut-être. J’ai tellement envie qu’on retrouve cette complicité qui nous liait. Avec toi que je ne connais ni d’Adam ni d’Eve ça passe mais avec lui non. Bref ne parlons plus de ça. Je n’ai pas envie de t’embêter avec mes histoires de couple. »

– Tu ne m’as jamais embêté. Mwasi kitoko (Jolie femme).


Je l’entends éclater de rire. Je souris.


– C’est comme ça que mon mari m’appelait avant et moi je lui répondais mobali ya ngebu ngebu (beau gosse).


Elle éclate encore de rire. J’ai envie de l’entendre rire toute la nuit.


– Na lela esekeli na yo (J’adore ton rire).

– « Gros charmeur.»

– Je ne fais que dire la vérité.

– « J’ai sommeil mais je n’ai pas envie d’arrêter de causer. »

–  Veux-tu que je te raconte une anecdote de ma salle de sport ?


Elle se met à nouveau à rire.


– « Toi et tes admiratrices aussi folles les unes que les autres. Oui vas y. »


Je commence à lui raconter une histoire drôle que j’ai vécu avec une vieille dame qui n’a pas manqué de me faire des yeux doux à ma salle de sport. Au début je l’entends rire puis après plus rien. Je crois qu’elle s’est endormie.


– Ndji muku nanga mwana (Je t’aime princesse en tshiluba autre langue du Congo).


Je peux me permettre le lui dire que je l’aime en Tshiluba parce que ça elle ne le comprend pas. Dès que je raccroche Aurélie fait son entrée.


– Avant que je n’oublie, commence-t-elle, je dois voyager après-demain. Je vais en France.

– Ok. Moi je dois accompagner Charlène à Brazzaville pour un défilé.

– D’accord.


Elle va se changer avant de se coucher. Je fais de même et c’est dos à dos que nous dormons. 

 

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