Grandir
Write by RIIMDAMOUR
J'ai raconté à Amine ce que ma belle-mère avait fait dans mon resto, je n'ai pas omis de lui dire que Taloula était avec elle.
Il a été choqué, très choqué. Il se demandait comment elles s'étaient connues ? Je me le demandait aussi
Que faisaient-elles ensemble?
Voilà la question.
Il resta silencieux toute cette journée là, la main sous le menton, les yeux dans le vague, la tête ailleurs.
Moi aussi je méditais, ce dimanche là.
- Milouda, fais très attention. Me dit-il en fin de journée.
Je lisais " Banti Mame Yalla" les bouts de bois de Dieu" de Ousmane Sembene.
Mon moment de détente de la semaine.
J'ai levé les yeux de mon livre, je ne comprenais pas.
- Viens, viens t'asseoir. Dit-il en tapotant la place à côté de lui.
J'obéis, comme je le faisais toujours, mais je ne lui avais jamais vu un air aussi sérieux.
- Je voulais juste te dire de faire attention, plus que d'habitude.
C’était bizarre mais je lisais de l'inquiétude dans son regard.
- Il se passe quoi? Amine?
Il se passa la main sur la tête en me fixant intensément.
- C'est rien, juste que... Tu viens de me parler de ta belle-mère et de Tal et je... Je ne sais pas... J'ai comme un mauvais pressentiment...
Il se tut et soupira.
Il n'a jamais été doué pour expliquer clairement ses sentiments et ressentiments, mais j'avais compris.
Moi, j'étais perdue et inquiète.
J'avais eu un mauvais pressentiment dès que Safietou était venue me provoquer dans mon restaurant.
Car oui c'était de la provoc' pur et dure.
Le soir même, je louais de nouveaux les services de Banina.
Cette dernière s'énerva contre moi en m'accusant de ne pas savoir ce que je voulais.
Quand j'ai perdu le bébé
elle a insisté pour mener une enquête et elle ne pouvait l'entreprendre
sans mon aval, mais j'ai dit niet.
Je ne voulais pas savoir qui avait fait ça.
Je suppose que c'est le chagrin qui m'a fait agir comme . Tala avait bien sur déposé une plainte contre X,mais bien sûr, ça n'a pas donné de suite.
- Tu devrais vraiment te réveiller Milouda. Je ne sais pas si tu t'en tends vraiment comptes mais tu as des ennemis. La ou les personnes qui te droguent, détruisent ta réputation où qui tuent ton bébé, elles sont toujours dans la nature dé. Tchip. M'avait reproché Banina.
Elle avait carrément raison.
Je crois que j'avais tendance à oublier le passé, tout le mal qu'on m'avait fait, dès que j'avais un petit moment de bonheur.
J'oubliais tout.
Je pardonnais trop facilement, j'étais beaucoup trop naïve.
Mon petit doigt me disait que ma belle-mère avait quelque chose à avoir dans tous mes malheurs, quels qu'ils soient.
Mais une partie de moi se disait que Safietou n'avait certainement pas de temps à perdre avec moi.
Je changeais d'avis dès le lendemain.
Le lundi matin.
J'avais
décidé de faire une grasse mat jusqu'à 11h pour me rendre au travail
plus tard ( j'étais la boss, j'avais bien le droit d'arriver en
retard).
Mais un coup de téléphone troubla mon sommeil vers 8h30, je m'étais recouché après le départ de mon mari.
Ce coup de fil était de Ma Djouma, elle me disait de venir rapidement, qu'il y avait un problème à l'Amel.
Je me pris même pas une douche. Je m'habillai hâtivement priant que mon chauffeur soit prêt.
Oui j'avais un chauffeur personnel qui faisait aussi office de garde du corps. Une précaution de mon mari.
J’atterris devant l'Amel une demi heure plus tard et je poussai les portes de mon restaurant plus qu'angoissée.
Ma Djouma se tenait à l'accueil, la mine sévère, entourée par toute l'équipe et quatre hommes que je ne connaissais pas. De gros gaillards ma foi.
Je m'approchai doucement d'eux.
- Ah! Voilà la propriétaire dès lieux ! S'exclama Ma Djouma dès qu'elle m’aperçut
.
- Bonjour! Fis-je à l'Assemblée.
Je ne reçus aucune réponse.
- Madame Milouda Aïdir Kâ? Demanda l'un des inconnus, le plus grand.
- Oui c'est bien moi. Répondis.
- Service d'hygiène ! Annonça t-il en me tendant un papier, une sorte d'attestation. Nous avons reçu, tout au long de cette semaine des coups de fils de client de votre restaurant, nous signalant des cas d'intoxication alimentaire au niveau de vos clients.
J'étais... Waouh.
Vraiment, sur le cul quoi.
Des intoxications?
Chez moi ?
À l'amel?
J'étais tellement choquée que je ne pus lire la feuille que le monsieur m'avait tendu. Je la donnai à Alain et Djouma qui l'étudièrent.
- Intoxication? Ici? Bafouillais-je. Je vous assure qu'il n'y en a jamais eu.
Tout le monde acquiesça, d'un commun accord.
Non, personne ne s'était jamais plaint.
Qui avait pu passer ses appels?
- Nous devons faire un contrôle sanitaire dans vos locaux pour en avoir le coeur net. Expliqua l'homme.
Quoi ? Contrôle quoi ?
Je n'avais jamais entendu parler d'un quelconque contrôle sanitaire dans un restaurant de ce pays.
Ç'etait quoi cette merde.
Je pris au moins deux minutes pour accuser le choc puis, je leur demandais un instant pour parler à Djouma et Alain.
Étant les doyens de l'équipe, il était naturel que je me tourne vers eux quand il me fallait des conseils.
Il me conseillèrent d'appeler l'avocat.
Ce que je fis et monsieur Gaye, l'homme de loi, me dit de les laisser procéder au contrôle en attendant son arrivée.
Je dirigeais donc ces monsieurs, vers mes cuisine.
Je
n'étais pas inquiète quand à la propreté, Djouma veillait à ce que tout
soit recuré de fond en comble tous les matins et je passais toujours
faire une vérification dans l'après midi.
Rien n'était jamais laissé
au hasard, je ne cuisinais jamais des produits ayant été conservé plus
d'une semaine et la date d'expiration des conserves était tout le temps
vérifiée.
Je traquais la moindre tache de graisse sur les cuisinières, le plus petit grain de poussière...
Ce qui m’inquiétais, c'était que quelqu'un ait pu être méchant au point de...
Leur contrôle dura au moins trente minutes pendant lesquels on retint tous notre souffle.
Ils vérifièrent les placards, les murs, les sols, même les plafonds.
Tout était nickel.
Les casseroles, les tiroirs à couteaux, l'intérieur des fours, des micro ondes... Nada.
Ils me dirent à la fin de leur visite que ces coups de fil devaient provenir de personnes mal intentionnées et me donnèrent la note de...
Devinez...
Allez...
18/20
J'étais tellement contente et je reçu même les félicitations de ces monsieur
Quel retournement de situation. Non?
- Je crois qu'il n'y a aucun risque que quelqu'un trouve un cheveux dans sa soupe par Ici. Plaisanta l'un des hommes.
Je tiquai.
- Comment ça? Demandais-je
- Quelqu'un nous a signalé la présence d'un poil dans sa nourriture, hier. C'est d'ailleurs ce qui nous a d'ailleurs décidé à faire cette visite.
Tiens tiens...
Là, il n'y avait plus aucun doute sur la personne qui avait fait cela.
Je bouillonnais de rage, littéralement.
Il ne manquait plus que de la fumée sorte de mes narines et mes oreilles.
Djouma me fit signe de
me calmer et des que les contrôleurs du service d'hygiène partirent je
me ruais en dehors du restaurant, ignorant la voix de Djouma qui
m'appelait.
Elle savait ce que j'allais faire.
Je montai rapidement dans la voiture et demandait à Alpha de me conduire chez ma belle-mère.
En cours de route je me souviens que Safietou ne vivait plus dans notre ancienne maison, normal puisque je l'avais virée.
J'enrageais. Je ne rêvais que de lui refaire le portrait à cette vieille salope.
Je dus appeler Banina pour qu'elle me trouve sa nouvelle adresse.
Elle me la donna avant de me demander ce que j'allais faire là-bas. Je lui expliquait et elle tenta de me dissuader d'y aller.
Moh, je l'ai même pas écoute me faire la morale.
Ainsi, on changea de direction pour l'un des beaux quartier de la ville, un quartier à l'image de ma belle-mère. Luxueux et prétentieux à souhait.
Je martelai la sonnerie de la maison une fois devant.
Une
grande villa, trois fois plus grande que notre maison en apparence.
Heureusement qu'il n'y avait pas de gardien devant, sinon il m'aurait
renvoyée.
Je me demandais où cette vieille harpie trouvait l'argent pour cette maison, et pour toutes les excentricités qu'elle affichait.
Elle ne travaillait pas, enfin, pas que je sache.
Alors...
C'est Anastasie qui m'ouvrit la porte.
Elle écarquilla les yeux quand elle me reconnut.
- Elle est où ? Hurlai-je en pénétrant la maison.
Cette maison était vraiment... Un truc de ouf!
La porte d'entrée donnait sur une énorme véranda avec devant un immense jardin.
Mais où est-ce qu'elle trouvait tout cet argent?
Anastasia essaya de m'empêcher de pénétrer à l'intérieur de la maison.
- Safietou n'est pas là. Prétexta t-elle
Moi, je la connaissais très bien pour savoir qu'elle était toujours dans sa chambre le matin, elle ne dormait que pendant le jour et avait ses activités la nuit, comme le parfait vampire qu'elle était.
- Laisses moi entrer la lèche-cul! Lui répondis-je
Cette petite chieuse se mit pile devant l'entrée du vestibule. J'apercevai derrière elle et malgré le pénombre des silhouettes de femmes.
J'allais enfin réussir a entrer quand Safietou entra dans mon champs de vision.
Elle portait une chemise
de nuit en soie. Ça se voyait qu'elle venait toit juste de se
réveiller. Les cheveux en pétard, les yeux rouges et gonflés, entourés
par des résidus de mascara.
Un tableau vraiment pas plaisant à regarder.
- C'est quoi tout ce raffut putain! Aboya t-elle en s'adressant à Anastasie .
Ses yeux se posèrent sur moi et son expression changea de furieux à satisfait.
- Tiens donc, ce n'est pas la petite princesses à son papa? Ricana t-elle. Que me vaut cette visite?
Cette femme avait le don de susciter en moi des envies de meurtre.
Dire qu'à un moment de ma vie je l'adorais...
- J'ai juste une question à te poser Safietou.
Elle me sortit son rire d'hyène là...
- Mais je t'écoute ma chérie. Tu ne veux pas que je te fasse visiter ma charmante baraque d'abord. Répondit-elle.
Rien à foutre de ta baraque ma vieille.
- Quand est-ce que tu me fouttra la paix? Hein, Safietou ?
Là encore, elle ricana.
Je comptais jusqu'à dix pour me calmer.
À dix, elle riait toujours , à vingt elle se foutait carrément de ma tronche et à trente... À trente je ne pus plus me retenir.
Je lui foncai dessus avec une vitesse qui me surprit moi-même.
Elle n'avait rien vu venir.
Et bam, un coup sur la joue droite, un autre dans le ventre et deux autres dans les côtes.
J'allais lui arracher les cheveux définitivement quand je sentis deux bras très forts me tirer vers l'arrière.
Je crus que c'était cette idiote d'Anas et j'allai me retourner pour lui mettre mon poing dans la figure mais là, surprise.
C'était Amine.
Et à l'expression de son visage, il n'était pas content.
- Calmes toi. Souffla t-il avant de me faire passer derrière lui.
Safietou hurlai de rage.
Elle voulut se jeter sur moi mais Amine lui barra le chemin.
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Il avait gardé le silence tout le chemin. Il semblait en colère. Ça m'inquiétait bien sûr mais je ne regrettais pas ce que j'avais fait, et il était hors de question que je m'en veuille pour avoir donné une correction a Safietou.
Il y avait un embouteillage monstre dans le centre ville.
On fut bloqués une trentaine de minutes vers Front de Terre.
- Qu'est ce qui t'a pris? Demanda t-il de but en blanc.
Il ne me regardait pas, il avait la tête tournée vers la vitre, les mâchoires contractées.
Je lui expliquai ce que la folle m'avait fait.
- Et tu as cru que tu pouvais te rendre justice toute seule?
Bah oui c'est que je me suis dit.
- Tu voulais quoi? Que je me laisse faire?
Il se tourna vers moi. Ses pupilles étaient plus sombres que d'habitude.
- Il ne s'agit pas de ça, de se laisser faire, mais de ne pas répondre à une provocation puérile. Ça n'empêchera pas ta belle-mère de te refaire ce genre de coups. Tu le sais n'est-ce pas?
Je ne répondis pas.
Je me suis emportée, je suis allée me venger sans réfléchir mais il était vrai que cela n'arrêtera pas Safietou.
Je n'avais pas vu les choses sous cet angle.
- Et puis , certaines choses, certaines attitudes ne sont plus de ton âge. Tu es adulte, Milouda. Est-ce que tu en es consciente?
Bien sûr. Me dis-je.
- Des fois tu réagis vraiment comme une ado irréfléchie. Qu'est ce qui t'as pris? Tu aurais pu blesser cette femme et on sait tous les deux qu'elle ne serait pas privée pour te créer des problèmes. Qu'est-ce que les gens diront quand ils sauront que tu as battu la femme de ton père? Tu as pensé à ton oncle? Tu as pensé aux soeurs de ton père ?
Silence.
Je ne sus que répondre.
Eh bien non,je n'avais pas pensé à tout ça.
La circulation redevint fluide et il reprit le volant.
En silence.
Il avait la mine toujours aussi serrée.
Je n'osai pas le déranger dans son silence.
Et puis je lui aurait dit quoi?
Il se gara enfin devant la maison au bout de trente longues minutes.
J'allai descendre quand je remarquai qu'il restait dans la voiture.
- Tu ne viens pas? Demandai-je hésitante.
- Non je retourne au bureau. Répondit-il sans me regarder. Je crois qu'il vaudrait mieux que tu n'ailles pas travailler aujourd'hui. Le temps que tu te calmes un peu.
Il attendit que je rentres dans la maison avant de démarrer.
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Hello la famille!