La douleur
Write by Les Chroniques de Naty
Chapitre 35
—Pouvez-vous répéter s’il vous plait ?
Surement que mon imagination me joue des tours et que je
n’ai pas bien entendu ce qu’a dit le docteur. Oui disons que mon oreille n’a
pas bien capté l’information. Parce que je ne peux pas croire ce qu’il me dit,
je ne veux pas croire ce qu’il me dit. C’est tout simplement impossible que mes
enfants soient décédés avant même d’avoir vécus ; ils n’ont pas eu le
temps de respirer, ils n’ont pas poussé leurs premiers cris comme tous les
nouveaux nés à la naissance.
J’ai besoin que le médecin me dise qu’il plaisante, qu’il
s’est trompé, ou je ne sais quoi d’autre. Mais il faut qu’il me rassure.
—Je suis vraiment désolé pour vous monsieur Diakité. Je sais
à quel point cela doit vous affliger mais ils n’ont pas survécu. Votre épouse
est arrivée ici dans un état assez…
Je ne lui laisse pas le temps de finir sa phrase que je me
jette sur lui pour le rouer de coups.
—C’est de votre faute si mes enfants sont morts, et ma femme
se retrouve dans le coma parce que vous ne l’avez pas vite pris en charge. Vous
n’êtes que des assassins ; vous avez laissé mourir mes enfants. Mes
enfants… mes pauvres bébés…
Tout le monde essayait de nous séparer en vain. Je ne lâchais
pas prise ; je voulais en découdre avec lui. Je suis tellement aveuglé par
la colère et la tristesse que je n’avais pas remarque qu’il saignait du nez.
—Aly lâche le ! Intima mon père ; tu vas finir par
le tuer.
Quand enfin je le lâchais, il dandinait tel un ivrogne. Je
voulais lui refaire son sale portrait, car je le tiens responsable de tout ce
qui leur ait arrivé. S’il avait daigné s’occuper d’Ayana dès son admission ici,
rien de tout ça ne serait arrivé. A l’heure qu’il est je serais surement
entrain de prendre mes jumeaux et embrasser ma femme pour ce beau cadeau. Mais
en lieu et place, c’est leur corps inertes et sans vie que je prendrais, et je
serai au chevet de ma femme qui ne sais même pas ce qui se passe.
Comment réagira-t-elle à son réveil ? Je n’ose même pas
imaginer.
Mon Dieu quel coup dur !!!
Le médecin s’essuya le nez en pestant.
—Non mais ça ne va pas chez vous ; cria-t-il. Espèce de
pauvre fou, je porterai plainte contre vous pour coups et blessures. Menaça-t-il.
—Imbécile ! Vous pensez me faire peur avec vos menaces
sans fondement ? Je peux vous accompagner au commissariat si cela peut
vous faire plaisir. Mais sachez que vous aurez des comptes à rendre pour avoir refusé
d’exercer votre métier, sous prétexte qu’une caution n’a pas été au préalable versée.
Vous pourrez par ailleurs leur expliquer comment vous avez laissé mourir de
pauvres êtres innocents pour une histoire d’argent. A croire que votre serment
d’Hippocrate n’était que du vent et qu’il ne vous sert à rien.
—Ça suffit Aly. Tu en as assez fait ; ce n’est pas la
faute de ce monsieur. Je sais que tu as mal mon fils, mais le mal est déjà fait
alors calme toi. Rien ne sert de chercher un coupable à ce qui t’arrive, c’est
la volonté de Dieu alors accepte la et reprends toi. Tu es un homme et tu dois
agir comme tel ; tes jumeaux sont peut être retournés auprès du Créateur,
mais ta femme est encore parmi nous. Cela dit tu ferais mieux de te focaliser
sur elle pour qu’elle puisse sortir de son coma au plus vite. Tu m’entends Aly ?
Je n’écoute pas tout ce que me dis mon père ; j’ai les
idées bien trop embrouiller pour saisir tout ce qu’il me dit. J’ai tellement
mal que j’ai l’impression que mon cœur sortira de ma poitrine d’un moment à
l’autre. Cette douleur qui vous oppresse et peut vous empêcher de respirer,
elle peut même vous rendre paralytique pendant un court instant. Je ne voyais
plus rien à côté de moi ; j’entendais les vois des gens aux alentours,
mais je ne les voyais pas. Ma vue est brouillée par les larmes.
Je pleure pour mes enfants, je pleure pour mon rêve de père
avorté ; je pleure ma femme qui n’a pas pu voir nos enfants. Elle les a porté
durant sept mois dans son ventre et n’a pas eu le privilège de les voir. Elle
ne saura jamais à quoi ou à qui ils ressemblaient.
Je laissais tout le monde en plan et me dirigeais vers le
bloc opératoire, il faut que je puisse les voir. Ils ne peuvent pas être
enterrés sans que je n’ai pu au moins les toucher ne serais ce qu’un court
instant. Juste le temps d’un battement de cil ; peut-être qu’en les
voyant, cette plaie béante qui s’est ouverte dans ma poitrine se refermerait à
moitié. Parce que le vide qu’ils laissent en moi est innommable ; cette
plaie ne cicatrisera pas de sitôt.
Ayana n’était plus dans la salle d’opération, surement
qu’elle a dû être emmené en salle de réanimation, vue l’état dans lequel elle
se trouve. L’infirmier avait fini de les nettoyer, il les avait mis dans un
drap blanc, le visage recouvert par un autre morceau de drap.
Je respirai un bon coup, sachant que ce que je verrai me
hanterais pendant encore longtemps ; mais il le faut. Il faut que je
puisse les voir. Je soulevais un pan du drap qui leur recouvrait le
visage ; j’eus un mouvement de recul, non parce que j’ai peur ! Non
c’est plutôt une autre émotion que je ne saurais décrire. Une sorte de joie prématurément
avortée, comme ces deux corps sans vie ; ces deux petits être au corps mou
et frêle. A la peau exagérément blanche. Je les touchais et les caressaient
doucement ; mes larmes se remirent à couler tel le flot d’une rivière au préalable
aride.
—Je suis vraiment désolée pour vous monsieur. Compatis
l’infirmier, Je n’ose imaginer votre peine. Soyez fort !!! C’est une fille
et un garçon… ou du moins c’était.
Je ne répondis pas ; cette dernière nouvelle eu don de
me briser encore plus le cœur. Une petite fille et un petit garçon ; maman
avait raison quand elle me disait que Dieu nous a fait une grâce énorme. Je me
rends compte qu’elle n’aurait pas su bien dire.
Ils sont tellement
beaux malgré le fait qu’ils ne soient âgés que de sept mois. Je sens qu’ils
auraient été grands et fort ; j’ai l’impression qu’ils dorment et j’ai
juste envie de les prendre et les ramener avec moi à la maison pour les faire
coucher dans leur chambre, Dans leur berceau. Leur mère a décoré la chambre à côté
de la nôtre, elle l’a fait repeindre en bleu. Parce que dans son entendement
ils s’agissant de deux garçons, vue qu’elle n’a jamais voulu savoir le sexe des
bébés ; mais je pense qu’au fond elle espérait des garçons ; raison
pour laquelle toute la layette est de couleur bleu.
Je pense qu’elle aurait été agréablement surprise, et on
aurait couru au magasin acheter encore des affaires de bébés mais cette fois ci
de couleur rose. Pour notre petite princesse. J’essuyais mes larmes ; il
faut que je me ressaisisse pour ma femme, elle aura besoin de tout mon soutient
et ma disponibilité quand elle se réveillera et voudra voir ses enfants.
Mais mon Dieu comment fait-on pour annoncer ce genre de
nouvelle à une mère ?
Je ne me sens pas capable de le lui dire. Je n’en ait ni la
force ni le courage nécessaire. Tout ça est bien au-delà de mes forces. Je caressais
une dernière leur visage et donnais dos. Je sors de la salle d’opération le
cœur lourd. Lourd de tristesse, de rêve brisé ; mais surtout lourd d’amour
manqué et d’affection qu’on ne puisse pas donner. J’avais tellement d’amour à
leur donner, tellement de chose à leur apprendre. Mais rien de tout ça n’est
plus possible.
Je retourne auprès de ma femme, elle aussi semble endormie
comme nos enfants. A part son visage pâle, elle n’a vraiment pas l’air d’être
malade. Cela doit surement être dû à la perte abondante de sang.
Je tire la chaise pour m’asseoir. Elle a un tuyau dans les
narines, une perfusion au niveau du poignet ; et à chaque bip du moniteur,
mon angoisse se fait grandissante .Cela me fait penser à la scène qui s’est
produite le lendemain de notre nuit de noces. Je me souviens que je me suis tailladé
le poignet afin que mon sang atteste de sa pureté ; je souri à cette
pensée. On en a fait du chemin jusqu’ici ! C’est vrai qu’on a plus pleuré
que rit, mais bon tout ça fait partir de la vie. Et j’espérais au fond de moi
qu’avec la naissance de nos enfants, nos rapports seraient plus tranquilles,
sans prise de tête. Mais le destin en a décidé autrement.
Je lui prends sa main droite que j’embrasse tendrement. Je voulais
lui transmettre ma chaleur pour qu’elle puisse se réveiller ; je veux
plonger mon regard dans le sien, je veux revoir ce petit sourire espiègle.
Qu’elle me fasse la tête ; et surtout sa petite moue boudeuse de petite
fille gâtée dont elle seule a le secret. J’aime ma femme et la voir dans cet état
me fend le cœur. Je veux souffler juste un peu ; ça fait trop de coups à
encaisser.
Mon Dieu ne me reprend pas ma femme ! Je t’en prie, redonne-lui
le souffle de vie. Je saurai être un bon époux, je lui ferrai oublier ces
derniers mois de souffrance. Je le jure !!!
—Réveille-toi ma douce ! Tu sais bien que je peux ne
pas vivre sans toi. Tu es le petit rayon de soleil qui réchauffe et mon cœur et
mes nuits. J’ai peut-être été dur envers toi ces derniers temps, je n’ai pas
été présent pour toi et nos petits et je suis tellement désolé pour toutes ces
souffrances inutiles. Pour toutes ces larmes, tous ces sanglots étouffés ;
toutes ces humiliation dont tu as fait l’objet par ma faute. Je veux que tu
sache que je t’aime ma puce et je te pardonne ; il ya bien longtemps que
je ne pense plus à cette histoire et je te promets de ne plus jamais en
reparler.
Je jouais avec ses doigts tout en lui parlant. J’ai vu dans
les films que lorsqu’une personne est dans le coma, nous devons lui parler. Car
cette dernière peut nous entendre ; nous devons lui rappeler nos meilleurs
souvenirs afin que son cerveau puisse assimiler et se remettre à fonctionner
normalement. Même si je n’avais pas beaucoup de bon souvenir avec elle, je lui
parlais néanmoins de mon amour pour elle. Certes notre passé n’est pas
reluisant, mais je fais le serment de rendre notre futur lumineux.
—Aly ? Aly ?
Je n’avais pas entendu Zhoura arrivée. Je suis si plongé dans mes pensées que j’étais complètement
déconnecté de la réalité.
—Que se passe-t-il Zhoura ? Tu veux rentrer déjà ?
—Non, mais il est l’heure. Je veux dire que les visites sont
terminées. Nous devons la laisser se reposer. Viens on y va, nous reviendront
demain.
—Tu sais, je me demande si j’arriverai à vivre sans
elle ; commençais je. La perte de nos enfants m’est certes insupportable,
mais ce qui me tuerai encore plus serai de perdre Ayana. Tu penses qu’il est
possible d’aimer quelqu’un jusqu’à ce point ? De vouloir vivre rien que
pour cette personne, et si celle-ci n’est pas avec vous, alors vous préférer
tout simplement arrêter de vivre. As-tu déjà ressenti ça ?
Elle devient tout à coup mélancolique et baissa la tête,
elle semblait fuir mon regard. Je crus percevoir une onde de tristesse, aussi
fugace soit elle assombrir son regard.
—Oui mon ami j’ai déjà ressenti ça. Et je peux te dire que
je te comprends parfaitement. Je sais ce que ça fait de vivre sans l’être aimée
et de ne pas être vue par la personne pour qui votre cœur bat. Ce genre d’amour
qui vous consume au point de vouloir vous rendre fou ; je le sais mieux
que quiconque… murmura-t-elle pour elle-même.
—Il faut qu’elle s’en sorte, il le faut absolument. Sinon je
ne sais pas ce qui adviendra de moi ; je veux passer le reste de ma vie à
lui faire oublier la perte que nous venons de subir. Je veux combler le vide laissé
par les jumeaux.
Nous méritons tous les deux une seconde chance ; disons
que notre union mérite une seconde chance. Apprendre à mieux se connaitre et
mieux s’apprécier. Oublier tous ces douloureuses épreuves ; c’est la vie
et c’est arrivé, nous ne pouvons pas changer ce qui est déjà passée ; néanmoins
nous pouvons faire de sorte à ce que le reste de notre vie soit meilleur.
Nous rejoignons les autres dans la salle d’attente, on se séparait
en se promettant de se relayer auprès d’Ayana. Je pense que son père n’est plus
en colère contre elle ; comme on le dit à quelque chose malheur est bon.
Il aura fallu de ce malheur pour que ses rapports avec son père reviennent au
beau fixe. Elle a perdu ses enfants, mais a quand même récupérer son père.
Les jours qui suivi furent assez éprouvant pour chacun
d’entre nous ; Ayana ne semblait pas vouloir se réveiller. Tout le monde
se retrouvait à son chevet, nous essayons de lui rappeler les bons moments
qu’elle a partagé avec chacun d’entre nous. Même son père s’était prêter au
jeu ; en temps normal j’aurai ri de la situation. Parce que la scène avait
l’air assez cocasse. Un homme aussi sévère et impérieux que l’Imam Sy Savané
parlant doucement à sa fille de sa tendre enfance où elle gambadait partout et
ne passait le clair de son temps qu’à faire des bêtises. Toujours est-il que
nous espérions qu’elle puisse vite sortir de ce coma. La voir ainsi n’était
vraiment pas facile à encaisser, mais ce que je craignais par-dessus tout c’était
la manière dont on lui annoncerait cette triste nouvelle.
Et par une matinée pluvieuse, elle ouvrit les yeux. Je m’étais
assoupi la tête posée sur son lit et ma main enserrant sa taille. J’ai d’abord sentis
qu’elle bougeait, mais j’ai cru que c’est encore un de mes nombreux cauchemars.
Sauf que là elle a légèrement bougée les bras et le premier mot qu’elle souffla
fut mon nom. J’étais envahi d’une joie sans nom.
Je couru appeler le médecin ; ce n’était plus celui de
l’accouchement. Je ne voulais plus jamais le voir roder autour de ma femme
sinon je risquais de le tuer. Docteur Dia n’est pas encore revenu, à cause du décès
de sa mère. Alors c’est un autre spécialiste qui s’occupe d’elle. Cette dernière
vient accompagnée d’une infirmière. Elle l’ausculta et lui posa plusieurs
questions auxquelles elle répondit. Celle-ci semblait heureuse des réponses ;
mais elle préconisa d’autres examens approfondi afin d’être rassurer quant à
son état de santé. Je suis heureux de retrouver ma femme ; et encore plus
heureux parce qu’à son réveil c’était mon tour de la veiller.
Je la prends dans mes bras lorsque le médecin sorti de la
chambre. Elle semblait surprise par mon geste et se braqua. Mais se laissa vite
aller à mon étreinte.
Seigneur comme elle m’a manquée ! Je ne pensais pas la
serrer encore dans mes bras.
—Tu m’as tellement manquée ma douce, dis-je la voix étreint
par l’émotion.
Je la serrai si fort qu’elle grimaça de douleur ; j’ai complètement
oublié qu’elle vient de subir une importante opération. En plus elle est encore
faible, alors il faut vraiment que je la manage physiquement. Je me détachais
d’elle à contrecœur et la fixait. Je la trouve encore plus belle.
—Où sont-ils ? demanda-t-elle d’une petite voix, les
yeux brillant d’excitation.
Mon cœur rata un battement. J’avais complètement zappé la
partie où je serai obligé de lui dire la vérité. Mais je ne peux pas le faire,
je ne peux pas gérer ça tout seul. Je risque de craquer.
—Aly tu m’écoutes où sont les enfants ?
Elle a l’air tellement heureuse comme ça que je ne veux pas
lui gâcher sa joie. Mais je ne peux pas lui mentir non plus ; cette option
serait encore pire que de lui dire la vérité. Au moins elle pourra faire son
deuil ; elle pourra pleurer tout son désarroi et sa peine et ensuite
passer à autre chose. Parce que la vie c’est ça, on ne s’attarde pas sur une
seule épreuve difficile ; on encaisse et on avance en tirant des leçons.
Nos erreurs deviennent des expériences. Et dans notre cas, notre tristesse
commune viendra plus renforcer notre union.
—Ma chérie, faut que tu sois forte. Son visage changea
aussitôt d’expression ; et ma voix se brisa. Nos bébés n’ont pas survécu ;
ils étaient déjà morts avant que tu ne te fasses opérer.
Elle poussa un long cri d’agonie à s’en fendre l’âme ;
je ressentis sa douleur jusqu’au tréfonds de mon être. Je la pris à nouveau dans
mes bras et la couvrir de baiser comme pour soulager sa souffrance… oui pleure
mon amour, pleure autant que tu veux et après ça tout ira mieux… parce que je
suis là avec toi et je ne t’abandonnerai jamais… parce que je t’aime…
FIN…
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Je blague bien sûr. Mais bon n’empêche que nous sommes déjà
à la fin de cette aventure… Et il ne reste pas plus de deux chapitres.
Commençons à faire nos adieux à nos personnages…