La rencontre

Write by Nadia.K

Vendredi 23H25 :

Ayabba entra dans sa maison le cœur vide, le visage défait et les yeux bouffis à force d’avoir trop pleurer. Pleurer et marcher, puis pleurer et marcher encore et encore jusqu’à ce que la source des larmes de son corps qu’elle croyait intarissable il n’y a pas si longtemps, se soit totalement asséchée.

Elle avait mal, atrocement mal et n’arrivait pas à l’exprimer. Il était donc sage celui qui a dit un jour que les grandes douleurs étaient muettes. Dans son cerveau, se bousculaient 10.000 questions à la fois, mais aucune d’elles n’acceptaient de se mouvoir en mot.

De toute façon, à qui aurait-elle pu se plaindre ? Qui donc aurait pu répondre à ses questions ? Personne !! Elle n’avait plus personne et cette pensée lui déchira son cœur déjà bien meurtri.

La maison était calme, plongée dans l’obscurité comme si elle aussi portait le deuil d’Ayabba. Oui elle en était sure la maison également pleurait Ismaïl. Elle était aussi triste que sa propriétaire parce qu’elle avait perdu en ce jour le seul espoir qui lui restait.

Ayabba dépassa le salon et pris les escaliers, elle passa sans un regard devant le portrait d’Ismaïl et elle le jour de leurs noces. Ce portrait qui d’habitude lui arrachait toujours un sourire, elle souffrait tellement qu’elle ne le vit même pas.

Elle poussa la porte de sa chambre à coucher, y pénétra et se mis au centre de la chambre, au pied de son majestueux lit et là sur le sol froid, elle se laissa glisser et se recroquevilla sur elle-même laissant son esprit remonter à une scène vieille de 13 ans…

 

Abidjan, 10 Septembre 2002, 12h30

 

Une jeune fille poussa la porte du luxueux restaurant la Croisette au plateau. Noir de teint, le mètre 75, les yeux en amande et la bouche pulpeuse, elle marchait d’une démarche assurée, arrogante même. Elle était sculptée comme une sirène et le savait ; elle attirait toujours l’attention dans les lieux publics et ne s’en plaignait guère. D’ailleurs, elle choisissait minutieusement ses vêtements et se maquillait avec soin chaque matin de sorte à ce que cela perdure. Elle se sentait comme une reine lorsqu’elle percevait l’envie dans le regard des femmes et le désir dans ceux de leurs hommes. Elle avait alors l’impression d’avoir la terre à ses pieds et la sensation était jouissive. Ayabba adorait également le jeu de séduction que les hommes entamaient quand elle se présentait quelque part. Ayabba aimait les faire tourner en bourrique et leur faire ravaler leur arrogance. Elle aimait tout cela et pourtant elle n’avait que 16 ans …

« - Bonjour Mademoiselle

-      La réservation au nom de mademoiselle AKA

-      Je vous prie de me suivre s’il vous plait

Une fois assise, je demandais un apéritif et commandais un plat sans avoir lu la carte

-      S’il vous plait …

-      Mademoiselle…

-      Ismaïl est-il là aujourd’hui ? Je ne le vois nulle part.

-      Non mademoiselle, lui répondit –il le regard fuyant avant de prendre ses jambes à son cou »

Son attitude sembla très louche à Ayabba mais elle ne dit rien. Elle qui avait passé plus de 2 heures à se préparer pour le voir ressentait une grande frustration. Décidément, ce misérable hôte de restaurant l’énervait au plus haut point.

Vous vous demandez surement ce que moi Ayabba AKA, héritière du ministre AKA peut bien avoir à faire avec un hôte de restaurant ? Qui plus est une personne qu’elle n’a rencontré que 3 fois ? C’est simple, Ismaïl Traoré sera mon nouveau petit ami. Il ne le sait pas encore mais ça viendra. Une femme comme moi, ça ne se refuse pas ? Je sais que sous ses airs arrogants il n’est pas insensible à mon charme, je l’ai perçu la semaine dernière quand nos regards se sont croisés après notre houleuse discussion et que je l’ai senti se gêner comme un enfant qu’on prend la main dans le sac. Il a immédiatement baissé ses yeux marrons et ses belles fossettes bien creusées ont disparu de son visage confus. Il s’est alors élancer vers la cuisine sans se retourner me permettant de mater son postérieur musclé. Hmmm, Je l’aurais cet homme, parole d’Ayabba !! Puis quand je l’aurais à mes pieds … je le jetterais comme une vieille chaussette.

Quoi ne faites pas de gros yeux, vous n’avez tout de même pas cru que j’étais tombée amoureuse de ce va-nu-pieds ! Ca jamais !! J’ai juste décidé qu’il méritait une leçon pour son audace et son trop plein de confiance. Figurez-vous que la première fois que je suis venue dans ce restaurant, il a eu le toupet de me dire qu’il n’y avait pas de table libre parce que je n’avais pas réservé !!! C’est vrai que j’étais en jogging ce jour-là et que je n’avais pas fait preuve d’une grande courtoisie envers lui mais ce n’était pas une raison. J’étais furieuse mais étant avec des « amis », je ne tenais pas à me donner en spectacle et je ne comptais pas non plus me faire refouler. Ce serait laisser le champ libre à ces commères qui m’accompagnaient pour raconter à qui voulait l’entendre que mon influence s’arrêtait à la porte de la Croisette. J’ai alors essayé de jouer de mon charme et le malotru me regardant droit dans les yeux m’a lancé :

« Vous êtes peut être belle mais pas assez pour moi. De plus je ne fais pas dans le vulgaire. Une femme décente serait partie sans faire d’histoire après que j’ai précisé que les tables ne sont disponibles que sous réservation. Votre attitude me prouve deux choses : en premier que vous êtes suffisamment imbue de vous-même pour vous croire irrésistible raison pour laquelle vous tentez votre manœuvre devant les 4 paires d’yeux avides de potins que j’ai derrière moi, et en second que vous ne savez pas à qui vous avez affaire. Je vous prie gentiment de vous en allez sans faire de scandale, le ministre des mines a un déjeuner d’affaire ce midi et nous le préparons activement. Si vous voulez bien… »

Je tombais des nues. Comment avait-il osé ??  Je m’apprêtais à faire un scandale digne de la situation quand une information importante a fait tilt dans mon cerveau : le ministre des mines … Je tournais les pas sans rien ajouter, sans même me soucier des rires de mes 4 suiveurs. Il me fallait m’en aller de cet endroit au plus vite. Je ne tenais pas à rencontrer mon géniteur …

Au delà des apparenc...