OTAGE

Write by princesse tia

Cela faisait déjà plus d'un mois que Véronique était en Côte d'Ivoire avec ses enfants. Elle s'amusait comme une folle, elle aimait le pays, la chaleur et l'hospitalité de ceux qui y vivaient, sans parler des plats qu'elle adorait littéralement. Ils logeaient dans le local à 2 pièces que Joseph avait louée dans une cour commune à 5 ménages. Véronique s'entendait bien avec tous leurs voisins et il n'y avait aucun problème. Joseph était plus adorable que jamais, il les gâtait elle et les gosses avec des sorties par ci, des cadeaux par là. Sa grand mère lui manquait bien évidemment, ses sœurs également, mais elle les appelaient quand elle pouvait, sur le téléphone de leur voisin. Elle avait supplié Joseph de leur envoyer de sa part une petite somme, quelques semaines après son arrivée. Encore deux semaines et ils rentreraient tous ensemble, définitivement. Elle était justement entrain de faire mentalement la liste de quelques trucs qu'elle voulait ramener au pays lorsqu'elle entendit Angela crier depuis la cour de sa petite voix aiguë :


_Papa, papa.


Elle comprit que Joseph était rentrée du boulot et elle sourit. Elle aimait bien leur petite vie tranquille, elle qui restait là à prendre soin de la maison et des enfants, à lui concocter de bons petits plats qu'il mangeait avec appétit à son retour le soir. Elle aimait leurs petites causeries jusqu'à tard le soir, blottis l'un dans les bras de l'autre, après avoir fait passionnément l'amour. Ils n'étaient peut être pas officiellement mariés mais elle se sentait la femme de Joseph à part entière. Elle en arrivait même à oublier l'existence d'Amivi et sa fille Julie. 


_Coucou la plus belle, s'écria un Joseph souriant à belles dents, en rentrant dans la chambre avec Angela dans les bras. 


_Bonne arrivée chéri, lui dit Véro en répondant à son sourire. 


Il s'approcha, lui donna un baiser sur les lèvres et fit redescendre Angela au sol avant de prendre Luc qui essayait par des babillages incompréhensibles d'attirer son attention, ce qui fit rire Véronique. 


_Tu as passé une belle journée ma chérie?


_Oui oui, j'ai fait une petite lessive et puis je suis allée au marché. 


_Toute seule ? Je t'ai dit de ne pas sortir seule.


_Mais non rassures toi. Tanti Nafissa y allait donc je l'ai accompagné. 


Tanti Nafissa était une femme d'âge mûr qui habitait la cour avec eux et qui avait prit Véro en grande affection depuis qu'elle était arrivée.


Ce soir là après avoir couché les enfants et s'être mis au lit à leur tour Véronique demanda à son homme :


_Chéri s'il te plaît je pourrai avoir un peu d'argent cette semaine pour aller acheter quelques affaires que je voudrais ramener au village s'il te plaît ? Il ne nous reste plus beaucoup de temps. 


_Euh! Justement j'allais te parler de quelque chose concernant le départ. 


_Ah! Bon? Quoi ça?


_Nous n'allons pas rentrer. Bon pas maintenant en tout cas.


_Ah! Mais pourquoi Jo? Tu avais dit deux mois et pas plus hein! 


_Calme toi chérie, calme toi. Il ya juste un travail que je dois terminer, il n'y a que moi seule qui puisse le faire, je ne peux pas partir comme cela chérie, il s'agit de la vie des gens. 


Véronique avait l'air vraiment mécontente, elle qui voulait rentrer retrouver sa grand mère. 


_Et nous allons devoir attendre combien de temps encore ? 


_Juste trois semaines encore chérie ensuite on rentre. 


_Quoi? Mais c'est long Jo, fit Véro d'une voix plaintive.


_Mais non ma chérie, allons trois semaines c'est vite passé, la rassura t elle en la renversa sur le lit pour l'embrasser. Elle ne put donc plus se plaindre et le laissa lui faire l'amour. 


Les trois semaines tiraient aussi à leur fin lorsque Joseph rentra un soir avec une nouvelle pour Véro. 


_Viens ma chérie, viens t'asseoir là, lui dit il en l'installant sur ses cuisses. 


Il se mit à l'embrasser dans le cou, à la naissance de la poitrine et en la caressant de partout. 


_Eh! Ben qu'est ce que tu as ce soir toi? Demanda Véro qui se plaisait bien au jeu. 


_En fait j'ai une nouvelle, répondit son homme sans cesser de l'embrasser.


_Bonne ou mauvaise ?


_Bonne chérie, très bonne. En fait la clinique dans laquelle j'ai effectué mon stage, m'a proposé de rester, de devenir employé à part entière. Ils sont vraiment contents de mon travail et ils me veulent à tout prix. 


Véronique sentit que ce qui allait suivre ne lui plairait pas du tout. Elle repoussa doucement Joseph des mains, afin qu'il arrête ses caresses et baisers. 


_Et tu as dit non je suppose Joseph. 


Il garda le silence. 


_Joseph, l'interpella Véro calmement. Tu as dit non, rassures moi.


_J'ai dit oui ma chérie. Si tu avais vu le salaire proposé, ça aurait été stupide de refuser. Je vais gagner énormément plus que ce salaire misérable du dispensaire. C'est vraiment une chance Véro.


Véronique essaya de quitter ses cuisses, mais il la retient.


_Laisses moi Joseph, laisses moi tout de suite sinon je crie et les gens vont nous voir, le menaça t elle. 


Il fut obligé de la lâcher. Elle arrangea sa camisole, renoua correctement son pagne et sortît terminer la cuisson du dîner, qu'elle avait commencé avant son arrivée. Elle ne lui adressa plus la parole de toute la soirée, malgré tous les efforts qu'il fit pour lui délier la langue. Au moment de se mettre au lit, elle le regarda droit dans les yeux et lui dit calmement :


_Si tu veux rester ici Joseph BOUSSOUNOU ça te regarde, moi je rentre chez moi avec mes enfants comme prévu. Je ne reste pas ici. 


Avant qu'il n'ait le temps de placer un mot, elle lui tourna le dos. 


_Vero, mon amour, ce salaire me permettra de prendre soin de toi comme une reine. Si c'est pour ta grand mère que tu t'inquiètes, nous lui enverrons de l'argent rassures toi. Allons chérie parles moi. Chérie ? Chérie ?


Véronique refusa de prêter attention à toute cette litanie d'arguments. 


Le lendemain Joseph passa toute la journée à la maison parce qu'étant de garde à la clinique la nuit. Véronique s'enferma dans son mutisme toute la journée. Lorsqu'elle parlait c'était uniquement pour s'adresser aux enfants. 


_Joseph s'il te plaît en rentrant demain matin, prends nous un ticket pour Lomé à la gare. Prends le sur un jour de cette semaine, lui dit elle au moment où il se préparait à partir, le soir. 


_D'accord, répondit il calmement avant de partir. 


Véronique fut soulager parce qu'elle ne savait pas que ça aurait été si facile de le le faire accepter. 


Le lendemain matin lorsque Joseph rentra, la mère de ses enfants était occupée à faire ses bagages et celles des enfants.


_Tu as pris les tickets s'il te plaît ? Demanda t elle aussitôt qu'elle le vit entrer dans la pièce.


_Non je n'ai pas pu y aller. Laisses moi me doucher et manger s'il te plaît, ensuite j'irai. Et s'il te plaît prépares les gamins, je veux y aller avec eux. 


Véro ne trouva pas d'inconvénients à sa demande parce qu'il sortait ainsi avec les enfants de temps à autre, pour la plus grande joie de ceux ci. Angela en tout cas, adorait son père et ne voulait jamais rater une occasion de lui coller aux basques. Luc par contre était un peu réticent parfois, lorsque sa maman ne venait pas avec eux, mais il suffisait que son père lui achète une sucrerie et il était aussitôt prêt à le suivre où il voulait. 


Véro prépara donc les enfants et autour de 10h30 Joseph partit avec eux. Véronique en profita pour vaquer à ses tâches ménagères librement et lorsqu'elle se posa enfin, elle se rendit compte qu'il était presque 15h et ces trois là n'était pas encore rentrés. Elle se demanda ce qui pouvait bien les retarder et si Luc n'était pas entrain de pleurer. N'ayant pas de téléphone portable, elle ne pouvait même pas les appeler. Elle alla causer un peu avec tanti Nafissa et les autres voisines pour faire passer le temps. Finalement Joseph rentra à 19h30, seul sans les enfants.


_Ah! Mais où sont les enfants Jo ? Demanda Véro lorsqu'il entra dans la chambre. 


Il sortit calmement un ticket de bus et le lui tendit :


_Voici ton ticket Véronique, si tu veux partir tu es libre mais que ce soit bien clair tu pars sans mes enfants. Soit tu restes et on vit comme une vraie famille, comme je veux ou alors tu pars rejoindre qui tu veux où tu veux mais sans mes gosses. 


La froideur dans ses yeux et sa voix pendant qu'il parlait, glaça le sang à Véronique jusqu'aux os. Cet homme là ce n'était pas son Joseph à elle, ce n'était pas le Joseph dont elle était tombée amoureuse, ce n'était pas le Joseph adorable qu'elle connaissait. Le Joseph devant elle semblait froid, vide et sans pitié. C'était une facette qu'elle ne lui avait jamais vue. 


_Me suis je bien fait comprendre Véronique ? Demanda t-il sèchement devant son air ébahi et sa bouche ouverte d'où ne sortait aucun son. 


Comme elle ne répondait pas, il jeta le ticket sur la table et rentra dans la chambre. Elle le suivi cinq minutes plus tard en larmes après avoir retrouvé ses esprits. 


_Joseph où sont mes enfants ? Où me les as tu laissés s'il te plaît ? 


Il ne prit pas la peine de lui répondre et ses larmes se mirent à couler de plus belle. Des larmes d'une mère inquiète de savoir où étaient ses petits, s'ils étaient en sécurité. Ils ne connaissaient réellement personne dans ce pays où ils étaient étrangers alors où Joseph avait il bien pu laisser ses enfants, se demandait la jeune Véronique. 


_Joseph, pourquoi tu me fais ça ? Joseph quel mal t'ai je donc fait pour que tu me fasses autant souffrir ? Joseph où sont mes enfants ? Pardon dis moi où ils sont ? Demanda t elle en se mettant à genoux au pied du lit où Joseph était couché. 


Elle resta là dans cette position à pleurer jusqu'à ce qu'elle n'en puisse plus, finalement elle tomba par terre épuisée et resta couchée jusqu'à ce que le sommeil ne l'emporte au petit matin. Joseph la laissa ainsi couchée et partit à son travail sans lui dire un seul mot. Lorsqu'elle se réveilla elle se remit à pleurer. Elle ne mangea ni ne prit de douche. Elle ne fit absolument rien d'autre que rester couchée au sol à pleurer et à parler toute seule. Autour de 14h, tanti Nafissa qui ne l'avait pas aperçue de la journée, vint cogner à sa porte. Au début elle voulut ignorer coups mais devant l'insistance de la dame, elle dû sortir. 


_Eh! Allah mais qu'est ce qui t'arrive ma fille, demanda tanti Nafissa choquée devant son air de déterrée. Elle avait les yeux rouges et tout boursouflés, des traces de larmes sèches qui lui balayaient les joues, ses cheveux crépus éparpillés sur la tête et tout son corps sale du fait qu'elle s'était couchée à même le sol.


_Viens viens viens, rentrons, dit tanti Nafissa en la faisant retourner dans la chambre. 


_Que t'arrive t-il ma fille ? On dirait un zombie, tu fais peur à voir. Je ne t'ai pas vue dehors de la journée et les enfants non plus mais la porte était ouverte c'est pourquoi je suis venue voir ce qu'il se passait. Apparemment j'ai bien fait. 


Véronique avait la gorge et la bouche tellement sèches qu'elle dû boire un gobelet d'eau avant de raconter à tanti Nafissa ce qui la torturait. 


_Tanti Nafi je vais mourir, dit elle d'une voix éteinte à la fin de son récit. Je ne sais pas où sont mes bébés. Je n'ai jamais été séparée d'eux plus de quelques heures depuis qu'ils sont nés, mais encore, je savais qu'ils étaient avec ma grand mère. Là je ne sais même pas avec qui ils sont et si on prend soin d'eux. Mes bébés, oh mon Dieu mes enfants.


_Calmes toi ma chérie, ce qui est sûr Joseph c'est leur père et il ne leur ferait pas de mal je suis sûre qu'ils sont en sécurité d'accord ? Mais maintenant dis moi que comptes tu faire ? Tu veux toujours partir ?


_Tanti je ne peux pas vivre sans mes enfants mais en même temps ma grand-mère m'attend. Je suis celle sur qui elle compte pour prendre soin d'elle. Mes petites sœurs ne sont pas assez grandes pour le moment. Je dois retourner près d'elle. 


La dame la regarda tristement. Elle faisait vraiment de la peine à voir. Elle n'était encore qu'une enfant pratiquement, mais devait déjà affronter un tel dilemme. 


_Ma chérie, je suis quand même un peu plus âgée que toi, je peux même te mettre au monde, ma fille aînée Aissata   est plus âgée que toi, elle a 23ans. Ce conseil que je vais te prodiguer est exactement ce que je lui dirai si elle avait ce problème dans son foyer alors écoutes moi bien. Tu ferais mieux de rester ici avec tes enfants Véro. Si tu pars, tu le regretteras toute ta vie crois moi. Si tu pars est ce que tu sais qui va venir prendre ta place et comment cette personne traitera tes enfants ? Je sais que ta grand mère est au pays, qu'elle t'attend et que tu comptes sur elle mais tu sais, tu pourrais te trouver une activité génératrice de revenus ici et lui envoyer de l'argent pour qu'elle prenne soin d'elle. Tu as appris la couture m'as tu dit, tu pourrais exercer ça ici. Pour le moment restes avec tes enfants ma chérie s'il te plaît. Tu entends Véro ? Restes. 


Véronique regardait la personne en face d'elle d'un air vide. Elle avait l'impression que tout le poids du monde s'abattait sur son épaule.


_D'accord tanti, j'ai compris ce que tu as dit. Merci, répondit elle après de longues minutes pendant lesquelles elle pensa à ce qu'elle allait dire à sa grand mère.


_C'est bien ma fille. Ça va aller d'accord ? Tout ira bien. Maintenant tu vas te doucher, changer tes vêtements et manger parce que je suppose que tu n'as rien mangé. 


_Oui c'est vrai. 


_Voila. Donc vas te doucher et pendant ce temps je réchauffe un peu de riz gras que j'avais préparé pour le déjeuner et je t'apporte à manger. Tu ne vas même pas protester, tu vas manger. Tu veux secouer la tête là, tu vas manger pian. 


Véronique eut un petit rire à ces paroles. 


_D'accord tanti je vais manger. 


Elle alla prendre sa douche comme l'avait demandé tanti Nafissa et à son retour son plat de riz gras au poulet l'attendait avec un verre de jus d'orange fraîchement pressé à côté. Elle bu la totalité du jus mais ne picora qu'un peu du riz. Après quoi elle se mit à faire des cent pas d'un bout à l'autre du salon. C'est ainsi que Joseph la trouva le soir à son retour du boulot. 


_Joseph je t'en supplie ramènes moi mes enfants, s'écria Véro en se jetant à genoux à ses pieds dès qu'elle le vit. Elle s'aggripa de toutes ses forces à ses jambes. 


_Tu ne veux plus rentrer retrouver ta Dada ? Demanda Joseph d'un ton sarcastique.


_Non je ne rentre plus Joseph, je suis là, je ferai tout ce que tu voudras, j'irai où tu voudras avec toi. Ramènes mes enfants s'il te plaît. 


_Tu es sûre que tu ne veux plus partir ? Vraiment sûre ?


_Sûre et certaine. 


_Si tu pars je te retrouverai où que tu ailles Véronique, je récupérerai mes enfants et tu ne les verras plus jamais c'est clair ?


_Oui Jo, c'est clair. 


_Ok maintenant lèves toi ma chérie, demanda t il en redevenant d'un coup le Joseph aimant et adorable d'antan. On eût cru qu'il était sous la domination d'un démon il y a quelques secondes. 


Véronique se releva toute tremblante et il la prit dans ses bras. Elle se mit à pleurer à chaudes larmes et essaya de se dégager mais il ressera son étreinte. 


_Chut bébé, chut ne pleure pas. Je te ramène les enfants bientôt d'accord ? Ne pleure plus.


Ses paroles faisaient encore plus pleurer Véronique et elle eut beaucoup de mal à s'arrêter. Il la fit asseoir et lui essuya les larmes.


_Je vais chercher les enfants. Ne me demandes pas où ils sont chérie je ne te le dirai pas. Je vais les chercher, c'est l'essentiel. Tu veux que je te rapporte quelque chose ? 


Véronique secoua la tête en signe de négation. 


_Tu es sûre ? Bon je te rapporte quand même des glaces, je sais que tu aimes bien ça depuis que tu les as découvert ici. 


Il sortit donc et revient une heure plus tard avec Angela, Luc et plusieurs glaces pour Véronique. 


_Mes bébés oh mon Dieu mes bébés, s'écria Véro en se ruant sur ses gamins pour les prendre dans ses bras. Vous allez bien ? Ça va mes anges ? Vous n'avez rien ? Oh vous m'avez manqué mes amours, vous êtes toute ma vie. 


Les enfants ne comprirent pas la cause du débordement de leur maman et de toutes façons ils s'en souciaient peu. Pour eux, ils étaient allés passer un peu de temps dans la famille d'un ami de papa qui avait des enfants du même âge, avec qui ils s'étaient bien amusé. 


_Maintenant nous vivrons ensemble en paix, comme une famille, murmura Joseph en souriant fièrement.

Véronique ou une vie...