Partie 4

Write by labigsaphir

Partie 4 :

Je redresse de justesse, manquant rentrer dans une moto et soupire. Isa s’accroche à la portière et me jette un regard de biais.

-         Désolée, Isa. Parvins-je à murmurer.

-         Gare, je vais descendre.

-         Désolée, Isa.

-         Je suis encore jeune pour mourir.

-         Je sais, je suis désolée. Je bouts de l’intérieur.

-         Je l’ai remarqué. Raison pour laquelle, je suis calme depuis notre départ d’Ahala.

-         Pourquoi m’a-t-elle fait ça ?

-         Elle avait surement besoin d’argent.

-         Avec tout ce que je lui donne ?

-         Tu sais, c’est une maman, Mimi.

-         Si tu n’es pas pressée, on peut aller chez ma mère.

-         Non, je dois voir mon chéri.

-         Ok.

-         Dépose-moi au Carrefour Coron.

-         Je peux te déposer à destination, tu sais.

-         Je préfère là-bas. Je vais me débrouiller pour le reste.

-         On dirait que tu veux me cacher ton homme.

-         Comme la personne qui t’appelle généralement en numéro inconnu. Réplique-t-elle du tic au tac.

-         Ok.

Le silence s’installe dans le véhicule durant 20 minutes. Au carrefour Coron, avant de descendre, elle se tourne vers moi.

-         N’aurais-tu pas un petit 10 000 fcfa qui traine ?

-         Si, attends.

Je récupère mon sac-à-main, prends un billet de 10 000fcfa que je lui tends.

-         Je te demande 10 000fcfa et tu me donnes 10 000fcfa ?

-         C’est ce que tu as demandé, Isa.

-         Je dois faire les soins en institut, m’acheter des vêtements et chaussures.

-         Et c’est à moi de payer ?

-         C’est un investissement, ma chérie. Dis-toi que d’ici 3 mois, tu n’auras plus à me donner 5 francs.

-         3 mois ?

-         Disons un mois, tu verras.

-         Ok.

Je  compte 100 000 fcfa et les lui tends. Elle prend en souriant et et montre à nouveau sa main.

-         Quoi, encore ?

-         Les 50 000 fcfa de la réunion.

-         Ce n’est pas à moi de payer, Isa !

-         Tu savais en m’inscrivant que je n’aurais pas l’argent pour payer.

-         Et tes copains.

-         Mon étoile ne brille pas aussi fort que la tienne.

-         Isa, tu exagères.

Je vide mon portefeuille et lui donne les 75 000 fcfa qui restait.

-         Merci Mimi. Tu es une vraie sœur.

Elle descend en souriant et hèle rapidement un taxi. Je soupire et prends la direction du domicile de ma mère. En arrivant, je suis frappée par la jeune fille brune, assise sur la véranda. Elle a tout de la camerouineuse, faux teint couleur taxi, de faux ongles, une brésilienne longue jusqu’aux fesses, de fausses Zanetti  et maquillée comme si elle allait à un carnaval. Je gare, elle se tourne vers moi, enlève ses lunettes de soleil et sourit.

-         Bonjour Mimi.

-         Miranda, corrigeai-je automatiquement. Qui êtes-vous ?

-         C’est ma copine, intervient Jao  portant un plateau.

-         Ta copine ?

-         Mais oui. Ou bien tu voulais un frère homosexuel ?

-         Je n’ai rien dit de tel, Jao.

-         Alors, pourquoi tires-tu cette mine ?

-         Rien, rien.

-         Où est maman ?

-         Elle n’est pas là.

-         Ok. Je vais à l’intérieur.

-         Mais reste avec nous.

-         Non. J’ai besoin de souffler un peu.

-         Au fait, pense à laisser l’argent pour payer la bonne.

-         J’ai donné l’argent du mois à maman.

-         Les frigidaires et congélateurs sont vides. Il n’y a presque plus rien à la maison.

-         En plus des 250 000 fcfa du mois, j’ai donné un peu d’argent à maman.

-         Je ne sais pas ce qu’elle en a fait mais il n’y a plus rien.

-         As-tu trouvé un petit job en attendant le concours de l’ENAM ?

-         Non.

-         As-tu cherché ?

-         Mimi, s’énerve-t-il, ce n’est pas parce que tu finances tout dans cette maison que tu

-          vas me manquer de respect.

-         Où est le rapport ?

-         Je suis encore ton grand-frère !

-         Je ne t’ai pas manqué de respect, Jao.

-         Qui es-tu pour me demander si j’ai trouvé du travail ?

-         Et le concours de l’ENAM ?

-         Les 5 millions que tu as donnés, ne suffisent pas.

-         Quoi ?

-         Il faut plus ou je donne mon derrière.

Je tourne les talons et ai le temps d’entendre.

-         Chéri, n’oublie pas les 150 000 fcfa, pour ce soir.

-         Ne t’en fais pas, tu les auras.

-         Y a-t-il du vin blanc ?

-         Oui.

-         J’en veux.

Je soupire, rentre dans la maison et m’assieds dans le grand canapé. Mon mobile sonne. Je fouille mon sac-à-main et regarde l’écran, Edouard. Je décroche.

-         Où es-tu ?

-         Chez ma mère.

-         Mon diner est-il prêt ?

-         Oui.

-         Je n’aime pas manger seule.

-         J’ai des choses à régler avec ma mère.

-         Chérie, j’ai horreur des femmes têtues. N’oublie pas que vous êtes deux à être en compétition.

Il raccroche, je soupire. Le bruit de talons martelant le sol, attire mon attention. Je me lève et tombe nez à nez, avec Marina.

-         Bonjour la big. C’est comment ?

-         Je vais bien. Merci et toi ?

-         Heiheiiin comme tu es là, j’ai besoin de 50 000 fcfa.

-         Pourquoi ?

-         Pour acheter les bords. U

-         Quels bords ?

-         Mais pour l’école.

-         Tu m’as fait la même demande, il y a de cela 1 semaine.

-         Là, c’était pour une matière, l’économie et là, c’est pour les maths.

-         Et ils coutent 50 000fcfa ?

-         Oui.

-         Marina, j’ai saigné pour te payer le million demandé à l’ESSEC. Tu n’as pas validé l’année dernière et cette année, tes résultats ne sont pas meilleurs.

-         La big, j’irais au rattrapage.

-         Tu reprends une année et vas au rattrapage ?

-         C’est compliqué.

-         Qu’est-ce qui est compliqué ?

-         L’école  n’est plus comme avant.

-         J’aurais aimé pousser à l’école mais n’ai pas eu cette chance.  Toi au moins, tu as eu le bac.

-         Et c’est reparti.

-         Marina, tu n’as pas à me parler en grimaçant ou en faisant des gestes avec la main. Tu me dois du respect, je suis ton ainée. Je saigne pour vous mettre à l’aise.

-         Tu devrais moins la ramener, l’on sait tous ce que tu fais pour gagner ton argent.

-         Pardon ?

-         A la sueur de tes fesses !

PAF !

-         Dans ce cas, fais comme moi pour assurer tes dépenses ! Idiote !

-         Bordelle ! Tu as raté le BEPC, 3 fois et tu crois m’imposer quoi que ce soit !

-         Marina, si j’enlève mes chaussures, je vais te tuer avec les mains.

-         Sapack ! Que tu vas me faire quoi ? Tu ne vaux rien, ton mari est allé doter une autre femme.

PAF !

Je me jette sur elle et la roue de coups. Nous sommes séparés par JAO et sa copine. Dans ma main, quelques mèches de Marina. Elle se tient la tête et pleure en criant.

-         Mimi, tu arrives chez les gens, au lieu de rester calme, tu viens foutre le bordel !

-         Elle m’a insultée.

-         Et toi, que lui as-tu d’abord dit ?

-         Je lui ai rappelé qu’elle avait raté le BEPC 3 fois et qu’elle gagne son argent à la sueur de ses fesses. Elle n’a pas le droit de régenter nos vies.

-         Là, elle a raison. Appuie JAO.

-         Dans ce cas, faites sans moi.

-         C’est ça, c’est ça. Poursuit JAO. A la moindre contrariété, tu menaces de nous couper les vivres. Pour qui te prends-tu ?

-         Pour celle qui souffre pour vous offrir ce luxe. Vous vivez à Bastos,

-         A cause de toi. Oui, on sait. Me coupe Jao.

Le portail couine et maman, dans un gant en véritable WAX, fait son entrée.

-         Que se passe-t-il ici ? Demande ma mère.

-         Mimi m’a arraché le cuir chevelu, explique Marina en montrant les mèches arrachées.

-         De quel droit, viens-tu maltraiter mon enfant ? Quand je souffrais pour l’accoucher, étais-tu là ?

-         Elle m’a manqué de respect, maman.

-         Je lui dit qu’elle gagnait son argent à la sueur de ses fesses. Réplique Marina.

-         Tu m’as traitée de bordelle !

-         Marina, tu n’aurais pas dû ! Gronde ma mère.

-         Elle l’a cherchée aussi. Continue Marina.

-         Maman, embraie Jao, ta fille vient faire le bruit ici parce que nous vivons à ses crochets.

-         Je ne peux faire aucune économie. Le savez-vous ?

-         Ce n’est pas ton argent mais celui d’Edouard. Rebondit Jao, ulcéré.

-         Dans ce cas, allez-le lui demande vous-même !

-         Qui es-tu pour venir nous manquer de respect ? S’énerve maman.

-         Je m’en vais.  Fais-je en prenant mon sac-à-main. 

-         Pas avant d’avoir posé 300 000fcfa sur la table ! Balance ma mère.

-         Prends-les dans les 7 millions remis par maman Alice.

-         Tu es partie voir maman Alice ?

-         Il fallait bien. Tu avais dit qu’elle te tournait depuis deux mois pour le titre-foncier alors qu’elle t’avait remis l’argent.

-         Elle me prend pour qui maintenant ?  Sais-tu depuis quand, je la connais ?

-         Maman, je t’avais remis 10 millions alors que le terrain coutait 8 millions et tu n’as même pas pu mener à bien.

-         Tu te prends pour qui ? C’est pour des miettes que tu manques de respect à ta mère ? Tu sais ce que j’ai enduré pour toi ?

-         Oui, tu m’as mise au monde mais devrais aussi m’encourager.

-         C’est ce que je fais, Mimi. J’ai eu des soucis, entre temps.

-         Jusqu’à il y a de cela deux semaines, tu disais que je devais attendre le titre foncier.

-         Je cherchais l’argent pour aller lui remettre.

-         Je m’en vais !

-         Et l’argent de la popote ?

-         Je n’ai pas !

Je quitte la pièce en tremblant, récupère mon véhicule et prends la direction de mon domicile. J’espère qu’Edouard n’y est pas. Je suis capable dans cet état de tuer.          J’ai consenti à tellement de sacrifices que j’ai l’impression que ma famille est un frein pour moi. Que Dieu me pardonne. J’ai l’impression qu’ils ne sont que des parasites. Je gare sur le bas-côté, prends mon mobile, compose le numéro d’Isa qui ne décroche pas. Je raccroche, pose ma tête sur le volant et me souviens avoir la carte de Loulou. J’ai beau fouiller mon sac-à-main mais ne la retrouve pas. Je suis dans un tel état anxiogène que je vide mon sac sur le siège passager et tremble de tout mon corps.

-         Merde !

Je démarre, rentre à la maison où je trouve Edouard en pleine conversation téléphonique avec une femme. Il enlève automatiquement le haut-parleur, se lève et ferme la porte du salon. Je file prendre un douche, la  table devrait être mise.

 
DOULEUR ET PLAISIR