Partie VII

Write by Ornelia de SOUZA

Une petite fille jouait dans le sable. Elle jouait à la cuisinière avec des petites boites de conserves vides. Au loin une femme au teint cuivré assise sur un petit tabouret observait la petite fille d'un regard bienveillant. Un laps de temps plus tard,elle se leva et marcha d'un pas lent vers la petite fille. Arrivé à son niveau, elle s'abaissa et l'appela.


-Inès ! Inès ! Arrête de jouer et viens manger.


La petite fille leva les yeux et regarda sa mère. Elle voyait ce visage qui lui sembla si étranger et elle tendit la main pour toucher ses traits si fins mais une autre main agrippa sa main la faisant tressaillir. Elle ouvrit les yeux et se rendit compte qu'elle était en plein rêve. Devant elle se tenait une femme très couverte qui semblait lui parler mais elle n'entendait rien et sa vision était si floue qu'elle ne percevait pas clairement son visage. Elle avait la main tendue et cette femme lui tenait fermement cette main qu'elle tendait vers l'infini. Une douleur indescriptible la saisit. Le côté gauche de son visage était très douloureux et elle se rendit compte qu'elle ne voyait que de l'œil droit. Un cri de tourmente lui échappa. Sa vision s'éclaircit aussitôt. Auprès d'elle était une religieuse,une vieille dame à la peau toute flétrie mais à la bonté percevable au premier coup d'œil. Inès faisait de tout son possible mais elle n'arrivait toujours pas à ouvrir son œil gauche. 


-À l'aide! Mon œil ne s'ouvre pas...

-Calme toi mon enfant ; murmura la nonne. Calme toi! Ne fais pas d'efforts!

-Mais je ne vois pas... Ma sœur, mon œil gauche ne voit pas. Je ne vois pas de cet œil. Aidez-moi je vous en prie!

-Regarde moi ma fille! hurla la sœur pour calmer la jeune femme. Il faut que tu te calmes. Le Seigneur est avec toi. Ton œil est sous bandage et c'est pour cela que tu ne voies pas.

-Où suis-je ? demanda Inès

-Tu es à l'hôpital et je suis la soeur Mina. Je suis là pour toi. On t'a recueillis après l'acte d'horreur qui a été commis contre toi.


Les images défilèrent semblablement à un film rafraîchissant la mémoire d'Inès. La tante Adéossi,ce oncle maudit et...


-Safi! cria Inès à plein poumons

-Qui est Safi? demanda la sœur Mina

-C'est ma fille,répondis Inès en se redressant et en haletant... La tante Adéossi a prit ma fille... S'il vous plaît, ramenez moi ma fille.

-Tu auras ta fille près de toi bientôt ; tenta de la rassurer la sœur Mina. Ne t'inquiète pas. Il faut que tu te remettes un peu d'abord.

-Non,vous ne semblez pas comprendre...

-Je comprendrai mieux si tu m'expliques et pour ça,il faut que tu te calmes. Allonge toi je t'en prie!


Inès s'exécuta. Elle ne s'était jamais éloigné de sa fille durant ces cinq(05)dernières années et de la savoir seule... Mais lorsqu'elle repensa à la tante Adéossi, son inquiétude s'apaisa. Elle aimait profondément Safi et elle prendrait sûrement énormément soin d'elle. Même après ce qu'elle lui avait fait,Inès voyait en cette femme,une grande femme. Une femme d'amour et de bravoure. Elle la comprenait. Elle se disait que si elle avait aimé un homme comme la tante Adéossi aimait son époux, elle n'aurait pas non plus supporté ce qui était arrivé.


La sœur Mina posa un verre d'eau sur une petite table de chevet près du lit où Inès était étendue.


-Mon enfant, maintenant raconte moi. Tu as un enfant c'est cela?

-Oui...


Inès narra toute l'histoire de ces cinq dernières années à la sœur. L'expression très rassurante de la sœur se transforma peu à peu en une expression horrifié. Elle avait du mal à accepter toute la souffrance qu'on avait infligé à cette jeune âme qui était devant elle. Elle savait que le monde était cruel mais elle ne pouvait accepter que le monde soit cruel envers les âmes innocentes. Une jeune fille aussi douce sans grande expérience de la vie qui se retrouvait avec la moitié du visage brûlé et un œil en moins à cause de la bestialité d'autres individus.


-Cette tante doit se retrouver enfermé. Elle doit payer pour ce qu'elle t'a fait. Si tu es dans cet état,c'est uniquement par sa faute.

-Mais non,la tante Adéossi est une femme formidable. Elle a prit soin de moi et de ma petite durant toutes ces années alors...

-Ça n'excuse pas son acte; rétorqua brutalement la sœur Mina. Tu as un œil en moins ma chère. Est-ce le prix que tu as convenu de payer à cette tante pour son hospitalité?


Inès s'était tut et la sœur venait de se rendre compte qu'elle avait un peu trop parlé. La jeune fille ne savait pas qu'elle avait perdu un œil. Elle n'avait aucune idée du chantier en ruine qu'était devenu son visage. La sœur Mina s'en voulut tout de suite d'avoir trop parlé car une larme embua l'œil restant de la jeune Inès. Mais d'autre part,elle aurait finit par le savoir. Il valait mieux tôt que tard.


-Je suis désolée Inès mais ton œil gauche a été touché par le bout de bois enflammé que tu as reçu sur la tête. Les docteurs m'ont dit que tu n'es plus entre la vie et la mort mais que par contre,tu as perdu une grande part de toi même. Une grande part de ta beauté. Tu dois être forte.


Inès ne pipait mot. Pour la faire réagir, la sœur Mina lui toucha la main. Elle la retira aussitôt.


-Je veux rentrer chez moi ! finit par crier Inès. Je veux rentrer chez moi maintenant. Ce que vous dites n'est pas vrai. Cela ne peut pas être vrai. Les dieux ne m'auraient pas abandonné jusqu'à ce point.

-Je suis désolée Inès mais tu ne peux pas rentrer chez toi. Tu viens à peine de te réveiller. Il faut que le docteur t'ausculte et...

-Non! J'ai dit non. Vous n'en avez pas assez? Vous m'avez enlever un œil et maintenant vous me voulez quoi? Une jambe ?


La réaction d'Inès était très violente. La sœur ne s'y attendait pas. Elle tenta de la calmer mais la jeune femme se leva, arracha sa perfusion et sortit de la chambre d'hôpital suivi par la nonne très affolée. Elle bousculait tout le monde sur son chemin. Certaines infirmières essayaient de l'arrêter mais elles n'y arrivèrent pas. Elle courait à toute vitesse,traversant le hall d'entrée du centre de santé.


Elle voyait le trottoir mais avant qu'elle ne puisse l'atteindre des bras masculins,forts et musclés la stoppèrent net. Elle se retrouva contre le torse d'un homme.


-Eh bien ma petite patiente a très vite recouvré des forces à ce que je vois! murmura l'homme

-Lâchez moi! protesta Inès en regardant derrière.


La sœur Mina approchait à grand pas. L'air frais lui coupait la respiration. Elle respirait à grande peine. Sa vision se brouillait.


-Lâchez moi! souffla t-elle avant de s'évanouir dans les bras du médecin.


Cris de femmes