Partie XXVI
Write by Ornelia de SOUZA
Safi longeait sa chambre de long en large se frottant les mains et soupirant de temps en temps. L'attente était en train de la tuer. Un rapide coup d'œil à l'horloge lui indiqua qu'il sonnait 23h30. Elle se demandait pourquoi Oumar n'était pas encore là. Les parents de Dine dormaient pourtant tôt alors pourquoi n'était-il pas encore venu la chercher. Viendrait-il tout au moins?
Le cœur de Safi se consumait. Il fallait qu'elle voit Dine et ce soir elle le verrait avec ou sans l'aide d'Oumar. Elle l'avait décidé. Elle se sentait mal physiquement mais elle ne se décourageait pas. Elle ne pouvait encore accepté cette situation longtemps. Un dernier soupir et comme une prière à laquelle le seigneur aurait répondu, la porte s'ouvrit dans un mouvement lent. Oumar était là.
-Safi! murmura l'homme sans entrer dans la pièce pour être sûr qu'elle était éveillé
-Je suis là! répondit Safi se dirigeant vers la porte. Pourquoi as-tu tant tardé?
-Je voulais t'epargner une certaine souffrance mais je crois que je ne le peux plus. Il vaut mieux faire face à ton propre destin.
Plus un mot ne sortit de la bouche d'Oumar. Il avait accompli sa mission, la prévenir que toute la maison était endormie. Il se retira donc après une petite tape sur l'épaule de Safi. À cette heure ci, la jeune femme n'avait plus à craindre les représailles de Maman Dine. D'un pas décidé, elle se dirigea vers son ancienne chambre. Longeant le couloir, son cœur s'emballait. Elle avait un mauvais pressentiment mais bon il était trop tard maintenant pour reculer. Elle devait s'entretenir avec Dine et reprendre sa vie en main. S'il ne voulait plus d'elle, elle s'en irait mais elle ne passerait plus une seule minute enfermée dans cette maudite chambre pour son égoïsme et pour son plaisir.
À l'autre bout du couloir, la porte de la chambre de Dine était entrouverte. La lumière était allumé. Il était éveillé mais au moment même où Safi voulut pousser la porte, un rire aigu s'éleva dans l'air. Une femme! Le sang de Safi se glaça. Dine était avec une femme. Elle hésita. Que devait-elle faire?
Sa colère et son impulsion ne lui laissèrent pas énormément de marge pour l'hésitation. Elle poussa la porte d'un grand mouvement pour découvrir Candie blottie dans les bras de Dine dans le lit qui était le sien auparavant. À sa vue, les deux personnages sursautèrent. Candie s'élança du lit vers la porte comme si elle connaissait d'avance la réaction de Safi. Malgré son énorme ventre, celle ci ne la laissa pas s'échapper de la chambre. Elle lui saisit immédiatement la chevelure et la ramena en arrière arrachant un hurlement à Candie.
-C'est donc ça Dine? questionna Safi un regard sévère adressé au père de son enfant. C'est donc ça la raison pour laquelle tu m'as enfermée ? C'est ça la raison pour laquelle tu m'as battue malgré le fait que je porte tes enfants?
De grosses larmes s'échappaient des yeux de Safi. Elles embuèrent son regard et inondèrent ses joues. Elle souffrait au plus profont de son âme. Son regard bien qu'embué était perçant et ne se déviait pas de Dine, sa cible. Comment avait-il pu?
-Safi, calme toi et lâche Candie. Tu oublies que tu es enceinte?
-Maintenant je suis enceinte? Je ne l'étais pas lorsque ta mère me séquestrait pour ton plaisir? Pour que tu puisses coucher à ta guise avec cette poufiasse?
-Safi, ce n'est pas ce que tu crois; tenta de justifier Dine
-Ce n'est pas ce que je crois; répéta ironiquement Safi. Je ne tiens pas en ce moment même une fille que j'ai surpris dans ton lit.
Candie avait mal. Safi la tenait fortement par les cheveux mais elle ne faisait pas un bruit. Elle ne voulait pas que cette furie se concentre sur sa personne. Elle savait pertinemment de quoi cette impulsive était capable alors elle restait silencieuse malgré la douleur suppliant Dine du regard pour qu'il la sorte de là.
-Safi, tu lui fais mal! cria Dine après un énième regard de supplication de Candie
-Elle, elle et elle. Et moi Dine? Je ne t'intéresse pas? La souffrance que tu viens de m'infliger ne t'intéresse pas?
-Safi, je te répète que ce n'est pas ce que tu penses. C'est à cause de tes manières que j'ai dû laisser maman te punir. Regarde comme tu te comportes. Comme une sauvage. Lâche Candie maintenant ! ordonna Dine
Safi s'exécuta et pas parce qu'elle avait peur, ni parce qu'elle répondait à l'ordre de Dine mais uniquement parce qu'une violente douleur venait de lui saisir le ventre. Elle avait mal d'une douleur qu'elle n'avait jamais connu. Elle avait des contractions. Elle le savait parce ces derniers temps ci, depuis que Dine avait levé la main sur elle, elle ressentait de petites douleurs. Mais cette fois ci, elle savait que c'était bien plus grave. Elle n'arrivait plus à bouger. Un cri perçant fut la seule réaction que son corps pût émettre.
Dine sauta par dessus le lit pour rejoindre la mère de ses enfants qu'il attrapa par la hanche. Candie sortit de la chambre presqu'en courant comme un coupable qui fuyait le lieu du crime.
-Safi, qu'est-ce qu'il y a ? criait Dine. Dis moi Safi! Parles moi je t'en supplie !
-J'ai mal; déglutis Safi difficilement
Les cris alertèrent très rapidement les parents de Dine. Maman Dine fut la première dans la pièce et elle fut fidèle à elle même.
-Qu'est-ce que tu fais là ? Tu as osé sortir de ta chambre sans ma permission?
-Maman ce n'est pas le moment ; siffla Dine pris de panique. Elle souffre, ne le vois-tu pas?
-Je vais accoucher Dine! Je vais accoucher!
-Ne dis pas des bêtises ; continua Maman Dine. Tu n'es qu'à 7mois de grossesse.
-C'est toi qui raconte des bêtises maman. Aide moi plutôt à la porter vers la voiture pour la conduire à l'hôpital.
-As t-elle perdu ces jambes? lâcha ironiquement Maman Dine avant de sortir de la pièce
Bien entendu, le père de Dine se hâta d'apporter son aide à son fils. Ils installèrent Safi sur la banquette arrière de la 4*4 familiale. Le père de Dine prit le volant car son fils était bien trop nerveux. Celui s'installa près de Safi et se contenta de la serrer dans ses bras en lui disant des mots d'encouragement. Safi qui se sentait de plus en plus mal tomba dans les pommes bien avant leur arrivée à l'hôpital.
*****
-Nous n'avons pas d'autres choix que de procéder à une césarienne. Elle a perdu les eaux en route et elle est bien trop faible pour qu'on procède à un accouchement par voix basse. Que s'est-il passé Monsieur ? Cette femme a visiblement été mal nourris et mal traité. À ces dernières visites tout allait bien.
-Maltraiter ? Non non! nia Dine. Elle avait juste perdu l'appétit ces derniers jours.
-Très bien ; fit le médecin d'un regard suspicieux. Je m'en vais tout préparer pour l'accouchement.
Safi s'était réveillé et suivait la discussion entre le docteur et Dine.
-Pourquoi mens-tu Dine?
-Quoi ? fit Dine sursautant car n'ayant pas remarqué que Safi était éveillé.
-Tu aurais dû lui dire que tu m'avais battu et garder enfermer dans cette chambre ces derniers jours. Pour moi, cela ressemble à de la maltraitance.
-Tu ne comprends pas Safi! Tu te comportais mal. Je devais laisser maman te punir et t'éduquer pour que tu sois parfaite. Je faisais tout ce qu'il y a de mieux pour nous.
-En batifolant avec Candie?
-Je...
-Me frapper et me maltraiter, c'est ce qu'il y a de mieux pour moi?
-Non, Safi! Non! Il faut que tu comprennes que tu agis mal. Tu me mets hors de moi et tu m'obliges à me comporter d'une certaine manière avec toi. Je te jure sur la tête de nos enfants que j'ai pris de tes nouvelles tout les jours sans exception. Je t'aime et jamais je ne te ferais de mal. Jamais !
Une infirmière entra dans la pièce coupant cour aux explications de Dine.
-Excusez moi Mr mais nous devons la préparer pour la salle d'accouchement.
Dine soupira et se dirigea vers la porte une forte expression d'inquiétude accrochée à son visage. Juste avant de sortir de la pièce, il se retourna vers Safi une dernière fois.
-Il n'y a rien entre Candie et moi! Tu es la seule et l'unique que j'ai toujours aimé et je suis désolé d'avoir pris de mauvaises décisions ces jours ci. Sois forte s'il te plaît. Pour moi et pour nos enfants.
Safi souffla non seulement pour les moments douloureux qu'elle vivait mais surtout parce qu'elle venait de retrouver l'homme qu'elle aimait.