Prologue

Write by aldoresfidele

Un soleil de plomb régnait en maître absolu sur Cotonou.

Les oiseaux les plus téméraires s’étaient réfugiés dans les feuillages les plus denses des rares arbres qui subsistaient à la modernisation de la ville. Comme à toutes les heures de pointe, la circulation était extrêmement dense autour du carrefour "La Vie". Il était midi et les bureaux se vidaient comme des fourmilières ; tout le monde était pressé. Il n’y avait que trois heures de temps de libre avant la reprise des activités.

Un policier essayait tant bien que mal de réglementer le trafic routier. Sur cet axe qui se voulait particulier en raison de la lugubre histoire sur son passé morbide, ce carrefour, autrefois appelé Carrefour La Mort, continuait de faire des victimes. 

 Et ce jour-là, le carrefour avait décidé que du sang coulerait. Les cris de nombreux passants attirèrent l’attention de l’agent de police. Lorsqu’il se retourna, la catastrophe était à une seconde de se produire. Il savait qu’il ne pourrait rien faire pour empêcher l’accident qui se dessinait sous son nez.

Un camion virait sur le côté droit de la route. Un conducteur de voiture qui n’avait pas pris le temps de laisser le gros porteur s’en aller bifurqua sur le côté et tenta dans une manœuvre malheureuse de passer avant le camion. C’est à ce moment que le drame se produisit. Le conducteur du camion qui ne vit le véhicule à côté de lui qu’au dernier moment tourna brusquement son volant pour ne pas l’écraser, parce que c’était ce qui arriverait. Il dérapa et s’écrasa lourdement tout le long de la route. La voiture, elle, réussit à s’en aller à toute vitesse.

Une dame était debout juste devant l’énorme camion qui venait de se renverser. La peur l’avait paralysée. Un pas de plus et elle se serait retrouvée sous lui, écrasée comme une crêpe. Elle remarqua soudain une main ensanglantée qui dépassait du dessous de la carcasse métallique. Elle hurla de toutes ses forces et s’évanouit sur-le-champ. Les badauds se rassemblaient en masse autour de l’accident, difficilement contenus par le seul policier sur les lieux.

- Accident sur le carrefour La Vie. Je répète, accident sur le carrefour La Vie. Une personne écrasée par un camion, envoyez de toute urgence une ambulance, cracha-t-il nerveusement dans le micro de sa radio portable.

La main qui dépassait du dessous du camion était apparemment celle d’un homme. Une montre noire serrait son poignet et une bague était à son auriculaire. Le policier demanda aux pompiers et à l’ambulance de se hâter, ce qu’ils firent. Une fois sur les lieux, les pompiers se chargèrent de dégager non sans peine la cabine de conduite du camion écrasé. C’est alors que l’effroi se saisit de toute la petite foule. Sous les débris de métal, l’homme avait du sang partout sur le corps. Il n’y avait aucun doute, il était mort.

Ou du moins, c’est ce que les passants affolés et ravagés par cette image attristante pensaient. Lorsque l’ambulancier hurla, de l’espoir revint dans certains cœurs.

BRANCARD, VITE ! UN SURVIVANT !

L’homme était vivant. Très vite, le véhicule hospitalier s’éloigna en lançant des coups de sirène stridents. Il pouvait être sauvé.

L’émotion était à son comble lorsque que le policier se rendit brusquement compte qu’il n’avait pas aperçu le conducteur du camion. Serait-ce le monsieur qui venait d’être embarqué ? Pas sûr, ce dernier n’y ressemblait pas le moins du monde. Il était trop chichement habillé pour conduire un camion. Le téléphone retrouvé écrasé à côté de lui était un haut de gamme. Le conducteur n’aurait pas pu fuir non plus, tout le monde l’aurait vu. Et avec la force de l’impact, il aurait dû être au moins blessé. Alors, où diable se trouvait-il ?

Le policier se souvint alors qu’il avait entendu de nombreuses histoires sur des gens ayant la capacité de se téléporter littéralement d’un endroit à un autre après un accident. Il resta coi, car il ne croyait pas en ces choses-là. Mais aucune trace du conducteur ne venait lui ôter ses doutes. Cela demeurera un mystère total pour lui.


Giovanni AGANI