rebondissement
Write by Fleur de l'ogouée
J’ai pris le petit frère de Thomas en aparté je voulais qu’il m’explique
encore une fois comment ce fait il que son grand frère ignorait cette
histoire de paternité. Oui je suis en colère, oui mon mari m’a trompé mais je
suis tellement triste pour cette gamine qui ne connaîtra jamais son père, c'était un père extraordinaire. Une chose est sure mon homme n’était pas un lâche, il aurait
assumé son rôle et aurait pris soin de sa fille. Maintenant que nous ne sommes
que tous les deux, je lui pose les questions qui me trottent dans la tête
-
Comment il a rencontré la mère de
la petite et combien de temps ils se sont fréquentés ?
-
Ma belle-sœur avant toute chose, je
tiens à m’excuser pour ce désagrément, je crois que personne n’aurait pu
prédire que le passé allait revenir nous hanter. La mère de la petite vivait à
Oyem à l’époque et pendant la période de vacances elle est descendue chez sa
tante dans notre quartier. On traînait avec elle souvent et quand tu étais en France
et qu’il a cru que c’était fini entre vous alors ils se sont un peu rapprochés...
-
Excuse-moi de te couper la parole, mais
je ne veux pas en entendre plus, je comprends déjà l’histoire, je veux juste savoir
si tu es sûr qu’il ne savait rien pour la petite ?
-
Mélanie, Thomas n’était pas seulement
mon frère c’était mon meilleur ami, il ne m’aurait jamais caché ce genre de
vérité.
Nous sommes
retournés avec les autres et le vrai problème s’est posé, qui va garder la petite,
elle a un acte de naissance, il y a le nom de Thomas dessus, je ne sais pas comment
s’est possible vu qu’il ne l’a pas reconnu officiellement, j’espère seulement
que c’est un document valide. La maman de Thomas sera là demain on a tous
décidé que c’est elle qui prendra la décision, pour ce soir la petite restera ici
avec son frère et sa sœur. Après le départ de ma belle- famille, les filles,
maman et moi discutons un peu, je leur fais part de ma déception par rapport à
Thomas, l’image que j’avais de lui a totalement disparu, il m’a menti pendant
toutes ces années
-
Maman : Arrête un peu de fatiguer
les gens, on a compris que c’est une nouvelle qui te perturbe mais est-ce une
raison pour remettre en question l’intégrité de ton défunt mari ?
-
Oui mais maman j’ai le droit d’être
troublée, j’ai toujours pensée que mon mari était l’homme idéal et qu’il n’était
jamais allé voir ailleurs
-
Lydia : On parle d’un week-end il
y a 12ans, c’est du passé, de toute façon tes jérémiades n’y changeront rien
-
Mais vous me parlez comme si c’est moi
qui ai mal agis, mon homme m’a trompé et m’a fait un enfant dans le dos, je dois
en rire
-
Sandra : Moi je comprends ta
douleur et ta déception, mais je comprends aussi Lydia et maman, Thomas n’était
pas que ton mari il était ton pilier et aussi l’homme de cette famille, donc
certes il t’a trompé un jour mais ça ne change pas l’homme qu’il a été, il a
fait une erreur, personne ne peut savoir s’il savait pour sa fille ou pas, de
toute façon il n’est pas là pour se défendre, accorde-lui le bénéfice du doute
-
Je sais
J’ai fondu
en larme, il me manque terriblement, j’aurais voulu qu’il soit là, qu’il m’explique
que ce n’était qu’une erreur, qu’il me prenne dans ses bras et me rassure, j’aurai
voulu crier ma déception puis me jeter dans le lit pour pleurer pendant qu’il
tenterait de me calmer, mais je me retrouves
seule à devoir gérer tout ça, seule à devoir annoncer aux jumeaux qu’ils ont
une sœur, qui n’est pas la fille de maman mais est celle de papa, je vais
devoir plus tard expliquer à mes enfants que dans notre jeunesse, leur père m’a
trompé et de cette relation est née leur sœur.
Les
filles proposent de m’emmener boire un verre, maman va garder les trois enfants,
j’ai vraiment besoin de changer d’air. J’enfile un jean et une chemise, et je
mets une vielle paire de tennis, je n’ai pas envie de trop en faire.
J’ai relevé
mes rastas dans un chignon haut un peu négligé, Sandra a réussi à me faire
mettre une paire d’escarpin, une fois prête nous nous dirigeons vers un nouveau
pub branché au quartier Glass. Le lieu est sublime, décoration assez baroque,
un style sorti tout droit d’un château ancien, avec mes tennis j’aurais été une
tâche dans le décor, les tenues sont bcbg. Le serveur nous installe à une table
pas loin de l’entrée, j’arrive enfin à me détendre, on passe nos commandes et
en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, notre table est remplie de
Booster, cette bière légère dont raffole Sandra, dommage qu’alcool et
médicaments ne fassent pas bon ménage, on espère qu’à son prochain rendez-vous
à la clinique, le médecin jugera que le traitement médicamenteux peut prendre
fin.
Au bout
de trois bouteilles je suis plus que détendue, je gigote dans tous les sens, je
veux mettre mes soucis de côté et profiter de la vie. Sentant ma vessie pleine
je me dirige dans les vestiaires, en revenant je le croise, Bradley. Il me sort
un bonsoir timide, je ne réponds pas, je le dépasse de quelques mètres avant de
revenir sur mes pas, nous sommes dans un couloir étroit, il n’y a personne et c’est
tant mieux, je vais pouvoir lui dire ce que j’ai sur le cœur
-
Bradley au-delà du fait que tu aies tenté
de me faire la cour, tu es un vieil ami d’un cousin que je chéris, j’ai eu du
respect et de la considération pour toi. Les choses entre nous ne ce sont pas
déroulés comme nous l’aurions voulu, mais cela ne te donnait pas le droit de monter
un plan machiavélique avec ton ami Jérôme, vous avez joués avec mes sentiments
et mon honneur, vous ne valez même pas mes larmes.
L’émotion
m’a submergée, j’ai préférée aller me rasseoir avant que des larmes n’envahissent
mon visage. Je me suis replongée dans l’alcool thérapeutique, boire pour
oublier, j’ai senti son regard sur moi pendant le reste de la soirée. Sa
présence ne m’a pas empêché de m’amuser, j’ai dansé et chanter dans la bonne
humeur, mes sœurs m’apportent un soutien indéfectible et avec elles j’irais mieux.
Après plusieurs tournées de bières nous sommes rentrées, nous avons dormis chez
maman, pour ne pas les déranger en rentrant.
Bradley Davis
C’est
vraiment agaçant cette manière qu’on a de se croiser tout le temps, j’étais juste
venu boire un verre avec des amis et ma soirée c’est transformé en règlement de
compte avec Mélanie, elle a cette habitude de faire son monologue et de se
barrer, elle ne veut pas écouter les autres et ce comportement me fatigue, il
est purement enfantin. J’ai passé l’âge des enfantillages, elle me parle d’une
histoire incompréhensible et au lieu de rester calme pour qu’on ait une
discussion elle préfère déverser toute sa haine, je ne sais pas pourquoi j’en
suis encore là à me poser des questions sur elle, j’ai trouvé celle qui me
correspond et avec qui je me vois faire des enfants, les élever et vieillir
ensemble, elle est parfaite. La soirée se poursuit, je n’arrête pas de la
regarder non pas que je suis obsédé par elle, mais elle me semble perdue, vide,
essoufflée, j’aimerai qu’elle sache qu’elle peut compter sur moi, mais avec ma
relation naissante je ne préfère pas prendre ce risque, ses sœurs le feront
pour elle, après peut-être que je me fais des films mais elle a perdue une
certaine étincelle dans le regard. Je termine ma sortie au petit matin, elles
sont parties 30minutes avant nous, leur petite sœur n’a pas bu j’espère que c’est
elle qui a conduit.
Après
une soirée agréable je retrouve ma douce et tendre à mon appart, à peine debout
elle a déjà la tête dans ses dossiers, je suis admirative, un petit bout de femme
qui ne se laisse pas intimidée, elle a le gout de l’effort, la première au
boulot et la dernière à en ressortir. Une femme battante. Je m’attache de plus
en plus et commence à songer au mariage, je veux me réveiller chaque matin à
ses côtés, les allers-retours entre ici et chez elle me fatigue.
Mélanie
Mbourou
Lydia et
moi nous sommes réveillées avec une terrible migraine, et moi j’ai vomi tout le
contenu de mon estomac. Une grosse gueule de bois, Sandra nous prépare un
bouillon de poisson bien pimenté histoire de prendre un peu de force et de
sortir la tête du brouillard. Quelques bouchées plus tard je reçois un appel de
maman qui m’annonce que mes beaux parents sont chez moi, je finis mon bol de
soupe à toute allure avant de me diriger vers la douche, le jet puissant me
fait du bien, je me sens un peu plus en forme. J’enfile un Kaba que Sandra me
donne. Nous déposons Lydia chez elle avant de retourner chez moi, j’ai acheté quelques
fruits et légumes, on pourrait croire que je reviens du marché et que je n’ai
pas du tout découché la nuit dernière. Je fais des bises à tout le monde, maman
les a installés au niveau du bungalow qui nous fait office de terrasse avant.
Je bricole un plateau avec des trucs à grignoter et ensuite je me pose encore
et toujours derrière maman. Les trois enfants jouent dans la salle de jeu, le
sang ne ment pas comme aurait dit ma défunte grande mère, ils sont comme des
triplés, avec son faible poids, elle a l’air d’avoir deux ou trois ans de
moins. Après les salutations et prise de nouvelles, très émue ma belle-mère
prend enfin la parole
- Ma fille, je ne sais même ce que je
vais te dire, je reviens de mes plantations comme me vois là, l’affaire là me
dépasse, un enfant qui apparaît 12ans plus tard, sans mère juste une tante. Ma
fille pardonne nous, notre fils a posé un mauvais acte dans le passé, mais ça
ne change rien en l’amour qu’il t’a toujours porté, il n’est pas là aujourd’hui pour se défendre, il n’est pas là pour nous dire ce qui lui était passé par la
tête, on ne peut que reconstituer l’histoire avec les éléments que nous avons. Une
chose est sûre dans tout ça, cet enfant est le nôtre, en arrivant quand je l’ai
vu demande à ta maman j’ai seulement crié que ‘’ wohhhh le portrait craché de Mâ Geneviève la grande sœur de mon mari’’ le nez oh, le front oh, elle a nos
trait, le test d’Adn ne peut rien, le sang a parlé à travers le visage.
-
Maman : Ma sœur moi-même quand j’ai vu la petite la ressemblance m’a
sauté aux yeux, quand elle est à côté de Maëlle, tu peux penser qu’elles sont
même mère, même père.
- Ah tu vu non ? En tout cas ça là
ce n’est pas un débat, le problème se situe ailleurs. Il faut qu’on trouve l’endroit
approprié pour elle. Tu as déjà les jumeaux on ne va pas te surcharger avec un
enfant qui n’est pas le tien. Mon fils et ma fille qui sont ici à Libreville
ne peuvent pas l’accueillir faute de moyen et de places donc elle va venir avec
nous au village, au moins il y a la maison et avec votre papa on va s’occuper d’elle
là-bas
Le frère de Thomas qui était perdu dans
ses pensées jusque-là, a pris la parole en mentionnant un point très important
- Mais maman tu oublies qu’elle est en
CM2 déjà et l’année prochaine elle doit entrer en sixième, au village il n’y a
que l’école primaire, après vous allez faire comment ?
-On va se débrouiller ce n’est pas un
problème. Encore merci pour l’accueil les femmes Mbourou, on vous attend au
village oh, faut souvent venir nous rendre visite. Donc je rentre après demain,
comme je dors chez ma rivale, il n’y a pas beaucoup de place, je viendrais la
récupérer le matin avant d’aller prendre la voiture.
Après l’assise on a un peu bavardé,
parlé de tout et de rien, je remercie Dieu pour cette belle famille qu’il m’a
donné, ils sont adorables, belle maman nous apporté un bon régime de bananes et
du manioc, elle a passé du temps avec les enfants, ensuite tout le monde est
parti. C’est la première fois que je me retrouve avec les trois enfants sans la
présence d’un autre adulte, il faut que je leur explique la situation, je
cherche les mots que des enfants de 8 et 11ans comprendront.
J’ai fais frire un peu de banane plantain avec
des nuggets de poulet, on s’est installé sur la table dans la cour, j’ai
beaucoup réfléchie avant de prendre la parole
-Maëlle et Yvan vous aimez Mélissa non ?
Ils répondent oui en chœur, de toute
façon les deux là aiment tout le monde
-Mélissa c’est votre grande sœur, l’enfant
de papa Thomas. Elle est gentille non ?
Encore un oui qui vient du cœur
-Donc faites un câlin à votre grande sœur.
Maëlle : Mélissa peut dormir avec
moi maman ?
- Oui elle peut dormir avec toi, aujourd’hui
et demain, ensuite elle ira habiter avec mamie et papi
- Maëlle : mais maman si c’est notre
sœur pourquoi elle ne vit pas avec nous ? C’est comme si Yvan allait vivre
avec tata Sandra pour toujours, c’est pas possible vu que c’est mon frère
Est-ce que je viens réellement de me
faire enguirlander par ma fille de 8ans, elle est trop mature pour son âge,
elle parle avec tant d’assurance et d’éloquence, je me remets en question, c’est
vrai que cette maison est celle que j’ai acheté, mais son père à laisser pas
mal de bien et de fonds bloqués sur un compte pour l’avenir des jumeaux. Il est
mort si jeune, on avait épargné pour faire un mini tour du monde, on n’a
malheureusement pas eu le temps de le faire, si la vie nous avait prévenu de
son départ si soudain on aurait arrêté de repousser nos voyages, cet argent je
pourrais en utiliser une partie pour elle, ça lui revient de droit. L’argent
oui mais vivre avec elle c’est une autre histoire, je ne veux pas les problèmes,
ce genre d’histoire fini toujours mal en générale.
Après le repas je les laisse à leurs jeux et je m’assois devant mon cahier des comptes, je vois comment je peux intégrer
la petite dans notre budget mensuel, je pourrais m’occuper d’elle s’il y a un
moyen de recevoir de l’argent dans le village ou pas loin. Je pense qu’un
engagement financier c’est mieux que rien, je veux que tout cela finisse pour
me replonger dans mes projets, déjà une semaine que je ne suis pas allé
travailler, il ne faut pas que je me laisse trop distraire. Si en amour je ne
suis pas très chanceuse, je vais compenser avec le boulot. Il n’y aura jamais
personne qui sera comme Thomas, c’était un être unique, il savait aimer, la vie
aurait dû nous laisser vieillir ensemble, ‘’toi mon cher et tendre qui a
rejoint les étoiles je t’aimerai toujours’’.