Thiofel

Write by Shayanna225


 ¬Thiofel¬ 


Sénégal, Dakar 


Nia GAYE 


En face du miroir paré d'or que me vaut l'honneur de la chambre de m'y contempler au travers d'elle, je reporte soigneusement mes boucles d'oreilles, ma chaîne, ma montre et enroule d'un foulard de nuit mes cheveux. Derrière, la baie vitrée, il y a Aladji qui passe un coup de fil. Je passe une main sur le lit et retire ma robe volante que je porte en restant assise. C'est un djellaba que j'ai fait concevoir lors de mon voyage au Maroc. Il recouvre l'essentiel de mon corps et me tient au respect face aux mauvaises langues des autres. Le temps est vite parti. Nous aurions dû jouer avec. Cependant, nous avons profité du mieux que nous pouvions. C'est ce que font les amants n'est-ce pas ? De tout ce que j'ai pu lire des adoras, des harlequins et des livres en anglais que je m'efforçais de traduire, l'idéal était peint. Aucun n'a jamais osé dire les choses telles qu'elles étaient. Comme quoi, la femme attend son prince charmant pendant que le prince charmant joue au crapaud en retirant le calba de toutes les femmes sur son passage. Puis, épuisé de tant de plaisir, ce même crapaud, redorait son blason en se reconvertissant en un prince à la recherche d'une femme pure. La pureté ? J'en ai toujours ris. Car il me semble que les hommes se souillent inlassablement en cherchant la pureté chez une femme tout comme l'enfant recherche le sein de sa mère. J'aurai voulu être ce genre de femme. Et pourtant, cet aspect ne cadrait pas avec mes principes. Les gens ont tendance à me traiter de souillon. (Heureusement que cela n'a pas encore atterri dans les oreilles de mon père). Mais pour ma part, je suis une femme de la nouvelle génération, libre dans son corps et dans ses actes. Je ne veux pas être l'exemple de quiconque. Je veux juste être moi. 


Aladji : (posant un fin baiser sur mon cou) Tu es parfaite Nia. 


Je retiens un sourire en affichant un aspect neutre. Je me reluque dans le miroir en levant le menton droit. C'est clair que je suis parfaite. Halpular 100%, visage perfect, un teint noir des plus ciré (ah oui, les Halpular sont très noir quand ils ne sont pas clair). J'ai l'impression d'avoir des yeux écarlates, tellement qu'ils brillent. Une taille assez conséquente et respectable, un corps moulé et pétri comme l'argile mais taillé finement. Je suis pulpeuse et sucré comme le fruit de la passion. C'est sans doute la raison pour laquelle, ils craquent tous sous mon charme iconique. Sans plus tarder, je prends mon sac à main et en sort mon parfum. J'asperge quelque gouttes derrière mes oreilles et le remet à sa place. En levant les yeux, Aladji glisse un chèque sur la table. Je lève un œil vers lui afin de contrôler mes ardeurs. 


Nia : Tu m'expliques ? 


Aladji : J'espère te revoir dans ta plus belle tenue Nia la prochaine fois. 


Je prends une profonde inspiration et me lève. Le chèque ne me flashe pas. 


Nia : Ce fut un plaisir mais sache le, je ne fais pas ça pour de l'argent. 


Aladji : Tu m'étonnes! As-tu jeté un coup d'œil sur la somme écrite sur ce chèque ? 


Nia : (sourire en coin) Je le fais par pure plaisir. J'ai un travail qui me satisfait financièrement. Je n'ai pas besoin de chèque pour couvrir mes fins du mois. 


Aladji : Nia j'ai l'impression qu'on ne se comprend pas. Je désirais juste te gâter un tout petit peu. 


Nia : (rire coquin) Tu m'as déjà gâté essentiellement avec tes fines prouesses. Alors sois gentil et fais-moi de l'espace. Il est l'heure pour moi de m'en aller. 


Il est assommé mais décale d'un centimètre. Je retourne vers le miroir et mastique mes lèvres puis le refaisant face, je lui dis bye. 


Nia : Aladji retient que ce fut un plaisir. 


Je joins mon index et mon majeur sur mes lèvres en y apposant un smack que je pose en retour sur sa chemise. 


Nia : Bien de chose à ta femme… ma demi sœur. 


Aladji : Nia ! Je souhaite te prendre pour deuxième femme. 


Je marque un arrêt et serre les dents afin de ne pas exploser de rire. 


Nia : Par pitié, rentre dormir sur les grosses fesses de ta femme. 


Aladji : (me ramenant à lui) Je suis sérieux. 


Nia : Aladji, tu es bel homme, tu es riche, tu sais tenir une femme mais tu ne m'intéresses pas plus que ça croit le. En plus, je ne me vois pas finir ma vie dans un mariage polygamique. Nos jeux t'ont plu ? C'est enchantant pour ma personne car cela me prouve que ma sœur n'est pas à la hauteur mais vais-je me créer d'autres problème ? Non ! 


Je me retire de son étreinte et me dirige vers la porte. Je l'ouvre à peine qu'en l'espace de quelques secondes, je me trouve saisis durement par quelqu'un. Je mobilise mes forces, repousse la personne et lui inflige une grosse gifle avant de remarquer qu'il ne s'agit que de la petite sœur de Youmé. 


Nia : Bintou ? 


Le fait de le dire, met déjà la puce à l'oreille d'Aladji. La petite m'a sans doute suivi sous les ordres de sa sœur. C'est tellement puéril de leurs parts. Car, elles ne savent pas à qui, elles s'attaquent. Elle se remet de la gifle et se dresse devant moi comme un buffle. 


Bintou: Nia tu es le cheytan incarné. Tu es vraiment mauvaise. Comment tu peux entretenir une relation avec le mari de ta sœur. 


Nia : Stop! Bintou tu ne devrais pas être en train d'étudier ? Qu'est-ce que tu fais dans un hôtel à cette heure ? (malicieusement) Ah, tu as suivi un homme jusqu'ici n'est-ce pas ? 


Bintou : Arrête de retourner… 


Je sors juste mon téléphone de mon sac et compose le numéro de mon père. Bintou me regarde, les yeux rougis par sa découverte. Elle devrait prendre la fuite si elle possède un pécan de sagesse. Elle ne me connaît pas assez ? Il décroche à peine que je joue mon meilleur rôle. 


Nia : Papa ! Est-ce que Bintou est dans sa chambre en ce moment ? Parce que je me frotte les paupières sans croire que la fille que j'ai trouvée dans l'hôtel de mon patron est Bintou. 


Papa : Astafiroulah ! Bintou dans l'hôtel ? 


Nia : Papa je t'envoie juste une photo. Les enfants de nos jours. Va savoir ce qu'elle est venue faire ici ? Je suis sûre qu'elle a un amant.


Mon père s'affole. Et c'est seulement à ce moment qu'elle comprend l'ampleur de sa bêtise. Je persiste à l'enfoncer. 


Nia : J'ai terminé la réunion avec le patron. Je te la ramène en lui tirant les oreilles. 


Papa : Dis-moi qu'Aladji n'a pas été témoin de cela Nia ? 


Nia : Non ! Je suis la seule à la voir mais je la ramène papa. Cependant, il va falloir lui parler. Je n'aime pas la honte. Je ne veux surtout pas que notre famille soit la risée de tout le quartier à cause de sa légèreté. 


Papa : Le débat est clos. Le fils de ton oncle Oumar rentre bientôt, Bintou va se marier. 


Je serre les dents et met le haut-parleur afin qu'elle entende. 


Nia : Tu disais papa? Il y a trop d'interférence ici. 


Papa : Je dis que Bintou ne nous salira pas. J'étais sceptique à cause de ses études mais c'est fini. Dès demain, j'accepte leur proposition. 


Bintou se tient la poitrine et me fusille du regard. 


Nia : Très bonne décision papa ! Nous sommes en chemin. 


Je n'ai même pas raccroché qu'il a hurlé le nom de leur mère. J'ai quand même raccroché à cause de Bintou qui voulait coûte que coûte entrer pour se confirmer qu'elle n'avait pas tort. Elle sort même le téléphone pour prendre des photos. Je la tire par les cheveux jusqu'à la sortie. Je m'arrange à la sermonner le temps qu’Aladji quitte l'hôtel puis nous regagnons un taxi pour la maison. 


Bintou : Tu es vraiment une sorcière Nia. J'allais avoir ma licence mais à cause de ta sale bouche… 


Bam ! 


Ah oui, je l'ai giflé avec mon coup de poing. Elle se croit qui pour m'insulter ? J'ai 25 ans. Ce n'est pas pour ses 20 et 1 ans qu'elle se croira mon égale. Si Youmé est assez sotte pour boire toutes les cochonneries que lui dit son mari, moi j'ai bien la preuve que je ne me suis pas trompée sur lui. Elle pensait retourner ce profit contre moi mais elle doit encore s'entraîner. Je me penche vers la vilaine du nom de Bintou pour lui dire le fond de ma pensée. À part le teint clair qu'elle a hérité de sa mère, la beauté fuit devant le laidron que s’est approprié chaque molécule de gène qui a mené à sa création. 


Nia : Bintou je me fiche pas mal de tes états d'âme. Enfin, regarde-toi avec ton vilain visage, ta forme en v et tes grosses lèvres à récurer les toilettes, tu crois mériter le fils d'oncle Oumar ? 


Bintou : Espèce de sorcière. 


Nia : Oui je suis une sorcière. Je suis même diplômée de la sorcellerie physique. Entraînez-vous toi et ta sœur. Vous avez cru me piéger ? Oh non ! Moi Nia j'assure toujours mes arrières. Tout à l'heure, nous allons rentrer et tu vas devoir t'expliquer après les nombreux coups de fouet. Mais moi, j'irai directement dormir parce que ce que vous avez oublié ? C'est qu’Aladji est mon patron et nous avions réunion. Du moins, c’est ce qui est présumé. 


Bintou : Mensonge ! 


Nia : C'est toi qui le dis. Quels en sont les preuves ? 


Bintou : Depuis quand les réunions se passent dans des chambres d'hôtel ? 


Nia : Ça c'est ta parole contre la mienne. Chauffeur accéléré… 


Bintou : Je ne vais pas me marier. Après la licence ce devrait être le voyage en France ? 


Nia : (ricanant) Avec le fils d'Oumar, tes diplômes ne te seront pas d'une très grande utilité. Ils sont si extrémistes que tu seras uniquement ménagère à plein temps. Et mère (Explosant de rire) non d’une pipe, à quoi tu ressembleras après un enfant ? Je te plains Wally. L’avantage est que tu peux te refaire les lèvres et la forme.


Bintou : Sorcière ! 


Nia : C'est ça ! Tu n'as que ce mot à la bouche. Libère mon périmètre !


Elle tire la tronche. Je dirige mes yeux vers mon téléphone qui sonne depuis un bref moment. 


Nia : (décrochant) Allo ! 


Pedro : Mon saphir noire! 


Nia : Ce n'est pas une heure pour appeler, tu ne crois pas Pépé ! 


Pedro : Tu me manquais ! 


Nia : Je ne dirai pas que c'est partagé mais mon cœur a ressenti une certaine animosité quand tu l'as dit. 


Pedro : Seychelles! 


Nia : C'est une invitation ? 


Pedro : Ce week-end ! 


Nia : Ça me tente bien. Je te ferai part de ma décision demain soir au plus tard. 


Pedro : Nia remet l'épisode du bogolan.


J'aime tellement ça. Ce sentiment de domination. Je souris en me mordant les lèvres. En tant qu'amant principal, Pepe est monumentale. Il me fait vibrer et me perds de plaisir plus que Aladji et consort.


Nia : Il y a même mieux que ça. Il se fait tard. On se parle demain. 


Il acquiesce, je raccroche. La vilaine tronche de Bintou se pose sur moi. Elle me fixe avec dédain. 


Bintou : Aladji n'est même pas ton seul amant. (Se mordant l'index) et ça parle de souiller la famille par moi ? 


Nia : petite, mêle-toi de ta vie. 


Bintou : Tu feras honte à papa. Toi ? Quel homme t'épousera?


Nia : (sourire mielleux) L'homme qui reconnaitra ma valeur en tant que femme et non en tant que soumise. Chauffeur garez la ! 


Il se gare ! Bintou ne fait plus la bouche. Elle a l'air d'avoir des fourmis dans les pieds. Je la devance alors qu'elle marche à pas neutre. Je foule le seuil du salon. Mon père est assis, son coran en main. Il égrène son chapelet. Je peux voir du côté de sa chaise, le fouet noué attendant soigneusement que Bintou entre. 


Nia : Bonsoir papa! 


Il ne me répond pas. Il fait juste un geste de la main et me demande de quitter le périmètre. Je le dépasse et traverse à peine le couloir que j'entends les cris de Bintou dont le fouet a sans doute atterri sur son dos. J'ai pitié pour elle mais il fallait qu'elle reste à sa place comme une fille sage. Je marche lentement pour atteindre ma chambre mais je bute sur maman Bineta. Elle allait me gifler n'eut été l'intervention de ma charmante maman. 


Marème : Tu voulais faire quoi ? 


Binta : C'est à cause de ta sorcière de fille que ma fille est en train de se faire chicoter ? Son mariage avec Wally se retrouve précipité. 


Marème : (me ramenant vers elle) C'est vrai ça Nia ? 


Nia : Non maman ! Je me suis rendue à la réunion comme je te l'avais dit. En quittant la réunion, j'ai retrouvé Bintou dans les coulisses des chambres de l'hôtel maman. J'en fus choquée. Vu qu'elle refusait de venir avec moi, j'ai dû appeler papa. Regarde (lui montrant mon bras) C'est Bintou même qui m'a fait ce bleu. Elle était hors d'elle. Il faut vérifier si elle n'a pas bu maman Bineta. 


Binta : Lahila ! Bintou ! Elle m'a dit qu'elle sortait étudier avec son amie. Ah ! 


Maman Bineta se dépêche de retrouver mon père au salon qui ne s'arrête pas malgré le nombre de coup. Ma mère me reluque en levant mon menton. 


Marème : Ça va ? Elle ne t'a pas blessé ? 


Nia : Non maman. 


Marème : (me prenant sous son bras) As-tu réfléchi à ce que je t'ai dit ? Aladji est amoureux de toi. Il ne le cache plus. Il le démontre par plusieurs gestes que ce soit à ton père ou à ta mère que je suis. Ma chérie je sais ce que tu penses mais essaie de comprendre ses gestes. 


Nia : Maman j'ai déjà dit non. 


Marème : Nia tu as 25 ans. Tu as dépassé l'âge de te marier. 


Nia : C'est vrai ! Mais ce ne sera plus pour longtemps. 


Marème : (yeux illuminés) Vraiment ? Tu as trouvé quelqu'un ? 


Nia : J'ai des prétendants maman. Mais celui pour qui je penche n'est pas sénégalais et pas musulman. 


Marème : Ah ça non ! Ton père ne l'acceptera jamais. Un sénégalais peut-être mais un Halpular est encore mieux. 


Nia : Je ne veux pas te causer du tort maman alors je vais me pencher sur les sénégalais désormais. 


Marème : À commencer par Aladji. Je suis sûre qu'il saura te rendre heureuse. 


Je lui souris en réprimant son vœu. Ma mère et son affaire d'Aladji. Il est mieux que je trouve un prétexte pour fuir. 


Nia : Maman, demain je me lève tôt. 


Marème : Bien sûr ! N'oublie pas que c'est ton tour pour le petit déjeuner. 


Nia : Je n'oublierai pas maman. 


Marème : Tu es mon petit bonheur Nia. 


Je lui souris et l'enlace. J'aime tellement ma mère. Malheureusement elle ne sait rien de toutes mes petites combines. Elle a un cœur en or mais qui est fragile. Je quitte ses bras et retire de mon sac une enveloppe. C'est mon salaire. Je lui remets le tout. 


Marème : (repoussant l'enveloppe) Nia ! Il faut que tu t'offres des choses en retour. 


Nia : Maman je connais les difficultés de la maison. Prend cet argent, achète-toi des nouveaux tissus et garde en pour ton tour de cuisine. Ne t'inquiète pas pour moi. 


Marème : C'est pourquoi tu fais tant la fierté de ton père. Tu penses aux autres avant de penser à toi. C'est un cœur noble que tu as dans la poitrine. Je ferai comme à mon habitude. Je prendrai la moitié et je garderai la moitié pour quand tu en auras besoin. 


Nia : (souriant) Merci maman ! 


Marème : Que Allah te bénisse


Nia : Amine! 



Aladji 


Je laisse la voiture sur le parking externe afin de ne pas réveiller Youmé. À l'aide de mes clés, j'entre dans la cours externe puis dans la salle de séjour. Je monte les marches des escaliers, contourne le couloir des chambres et me terre enfin dans ma chambre. Elle dort à poing fermé. C'était elle à l'appareil. Elle s'inquiétait. Je n'ai fait que la rassurer. Je file prendre un bain. À mon retour, ses yeux sont ouverts. Ses paupières sont mouillées. Je me pose sur le lit et soulève le drap afin de me mettre au chaud. Je pose la tête sur l'oreiller et ferme les yeux. 


Youmé : Qu'est-ce que tu gagnes à t'amouracher de ma sœur ? 


Je lui donne dos et éteint la lampe de chevet. J'ai sommeil. 


Youmé : Répudie-moi Aladji ! 


Elle est trop défaitiste cette femme. Je me bouche les oreilles et m'endort malgré ses soupirs. 


(...) 


Il est encore tôt quand je me réveille. Je reprends un bain matinal. Youmé a les yeux rougis. Elle donne à peine des instructions pour le petit déjeuner. Assise à son siège, une tasse de thé à la main, je m'adosse sur elle et pose un baiser sur sa joue. Elle se gratouille le cou et pose la tasse de thé. 


Youmé : Bien dormi ? 


Aladji : Oui et toi ? 


Youmé : Tu peux le constater par toi-même. 


Aladji : Youmé tu te fais du mauvais sang. Je ne m'amourache pas de ta sœur. C'est mon employé. Hier nous étions en réunion avec le reste du personnel, rien de plus. 


Youmé : Les bruits courent… 


Aladji : Tu devrais apprendre à me faire confiance Youmé. 


Youmé : Comment te croire Aladji quand tes yeux te trahissent? 


Aladji : C'est toi ma femme ! Je ne m'amourache pas de ta sœur. 


Je m'assois près d'elle et lui tient la main. 


Aladji : Tu doutes si vite de moi en seulement 6 mois de mariage. Nous n'en sommes qu'à nos débuts. 


Youmé : Et un matin, ma sœur sera ma coépouse. 


Aladji : Non ! Cela n'arrivera pas. 


Youmé : C'est tant mieux car je suis enceinte. 


Assommé, je le suis. Je gratouille mon front et secoue l'index. 


Aladji : Je pensais que nous nous étions donné 1 an pour concevoir. 


Youmé : C'est arrivé je n'y peux rien. 


Aladji : Et comment ? Tu n'y peux rien comment ? Tu m'as piégé encore une fois ? 


Youmé : C'était ça ou te perdre ! 


Aladji : Me perdre ? Parce que tu m'as déjà eu ? Tu m'as fait croire que tu préparais mon mariage avec ta sœur alors qu'au fond tu préparais le nôtre. 


Youmé : Tu avais le choix de refuser le jour où ils m'ont présenté. 


Aladji : Pour honnir qui ? Ma famille ? 


Youmé : Si nous sommes mariés c'est parce que d'une part tu m'as voulu. Le contraire m'aurait frappé si seulement tu m'avais repoussé lors des noces. Mais gourmand que tu es, tu as sauté sur la marchandise. 


Aladji : heureusement que tu étais vierge ! 


Youmé : Par contre, ça ne t'a pas servi. En vrai. Tu n'as pas arrêté de courtiser ma sœur. Tu n'arrêtes pas non plus de coucher avec. 


Aladji : Si tu sais ces choses, pourquoi joues-tu au théâtre avec moi ? Youmé, tu es tombée enceinte uniquement pour me sceller dans ce mariage.


Youmé : Et j'y arrive ! Ma sœur ne te voulait pas comme époux de toute façon.


Aladji : C'est la jalousie qui te fait parler. 


Youmé : Étais-tu son premier homme ? 


Aladji : Qui s'en soucie de nos jours ? 


Youmé : Tu préfères te traîner sur une marchandise que sur une femme pieuse et pure comme moi, une femme qui t'aime sincèrement et qui n'a de vœu que de faire ton bonheur. 


Aladji : garde tes vœux Youmé. Un mensonge reste un mensonge. 


Youmé : Je n’avorterai pas de cet enfant. 


Aladji : Tu peux le garder. Après tout, cet enfant est aussi de moi. 


Je serre la tronche et me lève. J'aimerai m'évader. Je passe à peine une soirée de bonheur avec Nia pour me retrouver assommer par la sorcière du nom de Youmé. Dire non ce jour-là aurait fait croire à ma famille et à sa famille qu'en plus d'elle, je courtisais sa sœur. Et pire, j'aurai mis en lumière ma relation avec Nia. Pour sa mère, Nia m'aurait tué. Je ne sais pas comment elle pense, ni comment elle tient mais nos relations restent ce qu'elles sont. Elle sait se montrer professionnelle et fidèle amante. Néanmoins, elle refuse encore de devenir ma femme. Je la comprends. Ça ne sonne pas non seulement comme une trahison, ça l’est. Pourtant, si ça ne tenait qu'à moi, j'aurai répudié Youmé. 

C'est étant embarrassé que je foule le seuil de mon entreprise. Je travaille en collaboration avec mes meilleurs amis. Nous sommes trois à diriger cette entreprise. Mais je suis le seul à être sur place. Les deux autres sont à l'étranger pour selon eux, des affaires. Je repense à la conversation avec Youmé et je me fatigue instantanément. Heureusement, le magnifique sourire de Nia fait tomber toute la pression. Elle travaille au département marketing. C'est une excellente menteuse et vendeuse. Je passe lui faire un coucou à son bureau avant de dépasser le bureau de ma secrétaire qui se met sur le qui-vive. 


Elle : Monsieur! Quelqu'un vous attends à l'intérieur. J'ai voulu le faire patienter ici mais il a insisté en disant qu'il était vitre associé. 


Aladji : Associé ? Okay ! Ne t'inquiète pas. Ramène-nous du thé. 


Elle : C'est compris ! 


Je pose une main sur la poignée de porte et l'ouvre. Je renferme derrière moi en le regardant scruter les meubles, les tissus, la décoration. 


Aladji : C'est ma directrice marketing qui a fait la décoration. 


Lui : Elle sera disponible pour mon bureau ? 


Aladji : Ça dépend ! 


Lui : (me faisant face) De quoi ? 


Aladji : De si tu reviens t'installer ici définitivement ? 


Lui : (s'avançant) Déjà, c'est monsieur MBOUP. 


Aladji :(claquant des doigts) Monsieur Karim MBOUP! 


Karim : En chair et en os ! 


Aladji :( accolade) je suis heureux de te revoir. 


Karim : Plaisir partagé ! 


Aladji : Prends place ! 


Je le suis. Je prends place en face de lui. 


Aladji : Les USA te réussissent. 


Karim : Apparemment ! Je suis revenu en chair et en os. Mon père souhaite que je prenne sa place. Je ne lui ai pas encore donné de réponse vu que je compte y retourner. 


Aladji : Tu sais ce qui te manque pour rester au Sénégal ? Une femme ! 


Karim : Elle t'a bien accroché en tout cas ? 


Je feins un sourire. Si seulement il savait ma mésaventure. Youmé n'est pas laide mais elle n'était pas mon choix. Finalement, ce doit être le destin qui nous veut ensemble. J'aimerai juste qu'elle fasse le quart de Nia. Mais, connaissant Youmé, impossible de rêver plus. 


Karim : Tu sembles vivre un cauchemar. 


Aladji : (émergeant) Disons que la vie réserve des surprises. 


La secrétaire pose les tasses de café. 


Karim : (prenant sa tasse) Merci ! 


Aladji : Karim, c'est votre patrimoine familial. Tu devrais écouter ton père. 


Karim : Mon père n'est pas le problème. Tu le connais, il est compréhensif. C'est ma mère qui le contraint. 


Aladji : Si elle le fait c'est sans doute parce qu'elle cherche à t'accrocher avec une sénégalaise.


Karim : (soupirant) c'est possible que je consulte les documents financiers. 


Aladji : C'est très possible. C'est juste qu'il se trouve en ce moment chez la directrice marketing. Je l'appelle. 


Karim : tu n'es pas obligé de troubler sa quiétude. 


Aladji : (prenant le combiné) Ne t'inquiète pas.  


Il attend donc. Nia accepte de me ramener le document après 10 secondes de conversation. Elle se présente une minute plus tard. Elle est simple comme à son habitude en privilégiant les boubous demi saison. Sa tête est nouée mais ses cheveux sont visibles.


Nia : (s'adressant à Tidiane) Bonjour ! 


Karim la reluque en se positionnant comme il faut dans son siège. 


Nia : J'ai fait aussi vite que j'ai pu. Je te ramène tous les documents en même temps. Tu as sur ces dossiers l'inventaire de toutes les ventes. Le département des finances attendent toujours ta signature pour le salaire des employés. 


Karim : Je suis celui qui l'a demandé. 


Nia : (suspicieuse) Euh! Avons-nous été présentés ? 


Karim me fixe puis fixe Nia en étant outré. Nia n'est pas impoli. Elle m'étonne. D'habitude elle s'adresse aux gens avec respect. 


Karim : Ah ! C'était-vous au parking ? 


Nia : (serrant les lèvres) Vous dites ? 


Karim : Je pensais que vous étiez une employée quelconque. 


Nia : (croisant les bras) Ça vous va ? 


Karim : Excusez-moi ?


Elle soupire et reporte son regard sur moi. 


Nia : Je disais que tous les documents sont désormais à ta portée. Aussi, j'aimerai avoir ton accord pour m'absenter un peu plus tôt aujourd'hui. 


Aladji : Tu veux prendre ton après-midi ? 


Nia : Effectivement ! Je serai également absente le lundi. Mais je rattraperai cette absence le samedi toute la journée et le samedi d'après en matinée. 


Aladji : Il y a un problème ? Tu t’absentes si longtemps ?


Nia : C'est personnel ! 


Je suis indécis face à sa demande mais je m'y plie. Il est rare qu'elle formule ce genre de demande. 


Aladji : C'est compris Nia! 


Karim : Nia ? Vous avez des gènes externes à ce pays ? 


Nia : Si c'est tout, je souhaite m'en aller. Bonne journée à vous. 


Elle tourne les talons sur ces mots. À sa sortie, je reprends Karim. Qu'est-ce qu'il a encore fait ? 


Karim : Elle a la haine tenace ! 


Aladji : (parcourant les documents) Tu l'as connais ? 


Karim : Disons qu'on s'est un peu frotté avant mon départ. 


Aladji : (suspendant mon geste) Karim ! 


Karim : Elle me déteste!


Aladji : Monsieur MBOUP. 


Karim : Très bon choix de directrice. Canon et pulpeuse comme la sénégalaise authentique. Elle ressemblait à une baguette à mon départ. 


La pression monte d'un cran. 


Aladji : Tu as couché avec ? 


Karim : Non ! Loin de là. Je l'ai traité de séchoir. 


La pression redescend d'un cran. J'active l'air conditionné pour contenir ma transpiration. 


Karim : Par contre, elle s'est trop embellie. Tu sais quoi ? Je vais rester encore un peu. 


Je lui passe le document qu'il demandait puis reporte mon attention sur ma montre. En la regardant, je fixe également le regard de Karim. Il semble être occupé à rêvasser car il n'a pas encore pris connaissance du dossier. Il ne manquerait plus qu'il se présente comme un ultime amant… 



Mwanamke wa Saba awa...