trente-et-un
Write by Pegglinsay
(Mère de Denise)
Je viens de faire un tour à l’hôpital et l’état de de ma fille est toujours pareil ; comme c’est Djamal qui paie donc je ne me stresse pas. Le seul problème c’est que notre plan est retardé. Je reviens de l’Artibonite chez mon bokor (féticheur) habituel pour savoir si le coma de ma fille était naturel. Ma fille couchée ne me sert à grand-chose parce qu’elle est la seule qui peut bien mener le plan, moi je suis tapis dans l’ombre et place mes pions. Je suis celle qui se salisse les mains pour que notre avenir soit assurée.
- Je ne vois pas pourquoi il doit tomber malade si je suis déjà enceinte et qu’on va se marier !!!!! s’exclame-t-elle.
- Mais quelle tête de linotte !!
- Il sera mon époux et tout ce qui est à lui sera à moi !
- L’argent de ton mari n’est pas ton ARGENT, criai-je.
- C’est pour cela que tu veux qu’il soit malade mère ? J’aime Djamal et je voudrais fonder une famille avec lui…
- Qui t’en empêche ? lui demandai-je. Notre plan était de mettre hors jeu ta soit disant cousine et c’est fait donc profites-en !!!
Malgré ses jérémiades je suis partie voir mon bokor, sans lui dire quoique ce soit. Mais le hic c’est que le processus a commencé trop tôt ; il devrait être malade après le mariage, non pas avant. Malheureusement le processus enclenché ne pouvait s’arrêter. Le pire, Denise était hors jeu. Je dois voir coute que coute ce que je peux faire ; on ne peut pas faire tout ceci en vain. Non je ne vais pas laisser tomber cette occasion de sortir de la misère dans laquelle je suis depuis une décennie ; rien ne m’arrêtera.
Kara
Ma bible est ouverte sur mon lit, je suis à genoux et je lis des psaumes avant de dormir. Je tourne les pages et m’arrête sur le psaume 91. Je le lis trois fois de suite et commence ma prière. Je voudrais que mon Dieu opère un miracle dans la vie de Djamal et qu’il reconnaisse enfin que c’est L’Eternel, le Dieu puissant qui protège et vient toujours au secours de ses enfants.
Cela faisait plus de trente minutes que j’étais à genoux, et je continuais à prier, je sentais la présence du Saint-Esprit dans la pièce et je me suis sentie remplie de grâce et de force. « Seigneur, Toi qui as toujours écouté les prières de ta servante, qui m’as toujours soutenue dans les moments difficiles je t’implore Seigneur de délivrer Djamal, de le guérir et de le mettre sur pied. Je sais que si cela fait partie de ta volonté, Djamal renaitra de ses cendres… »
Je continuais à prier parce que je sais que la prière peut tout là où l'homme a des limites. Vingt minutes plus tard, j’étais dans mon lit quand j’ai entendu cogner à la porte du studio. Je sors rapidement en passant une robe de chambre pour trouver l’infirmière devant la porte.
- Djamal va mal…
- J’arrive.
Je prends mon téléphone et pars avec elle. On rentre dans la maison et se dirige droit vers la chambre pour trouver Djamal près de son lit assis par terre entrain de vomir dans un grand pot. Moi et l’infirmière l’aide à se mettre à l’aise. Le contenu du pot dégageait une odeur nauséabonde , chose qui laissait moi et l’infirmière perplexe. Je prends le pot en me bouchant le nez et vais jeter le contenu, qui était de couleur jaune, dans le WC. Puis Norly l’aide à prendre un bain pendant que je change les draps qui étaient sur le lit, je prie dans mon coeur. je ramasse les bouteilles d’eau vides qui étaient sur l’une des tables de nuit de la chambre mais l’une m’échappe des mains et tombe sous le lit. je m’agenouille pour la prendre mais n’y arrive pas. Je prends mon tel et allume l’application torche, c’est en éclairant sous le lit que j’ai vu une petite bouteille jusqu’au fond à un endroit où on pourrait rarement tomber dessus. Je me mets à plat ventre pour rentrer sous le lit. je rentre difficilement et allonge un bras pour me saisir de la bouteille. Je tombe sur une bouteille affreuse et autour il y avait un ruban rouge. Tout de suite j’ai su qu’il s’agissait de l’un de ses vieux trucs de sorcellerie. Djamal et Norly étaient dans la salle de bain. Je m’éclipse et sors sur la petite cours qui était à l’arrière de la maison. Trois minutes après, j’étais près d’un ravin et prends la bouteille, la lève et la jette sur une pierre en récitant des versets :
- « je ne crains rien car tu es avec moi et toutes armes forgées contre moi ou quiconque faisant partie de ma vie sera sans effets au nom de notre Seigneur Jésus-Christ.
Je retourne à la maison et vais voir si tout va bien ; Djamal est déjà dans son lit quand je rentre dans sa chambre. Norly sort de la salle de bain et demande à Djamal s’il a besoin d’autre chose. Il répond par la négation. Je me préparais à sortir de la chambre avec Norly quand celui-ci cite mon nom. Je me retourne lentement et il me demande :
- Pourrais-tu rester cette nuit avec moi ?
- (je restais un moment sans dire un mot)…
- Juste pour cette nuit Kara !
- Bien sur, réussis-je à dire. Je…je reviens.
Je laisse la chambre toute chamboulée. Cela fait dix jours que je suis ici et Djamal m'adresse rarement la parole à part pour m’ironiser ou parler en mal de ma nourriture. Je prends mon matelas gonflable et direction chambre de monsieur Djamal avec un sourire sur les lèvres.
***
Douze jours depuis que je suis là et Djamal reprends du poil de la bête. Il est moins maigre et moins grincheux. Sa mère est sortie de l’hôpital et est tout droit venue voir son fils.
- Je ne te remercierai jamais assez ma chérie pour tout ce que tu as fait (me dit-elle en me prenant dans ses bras)
- C’est le moindre que je puisse faire. Djamal a été bon envers moi donc ce n’est que partie remise.
- De plus j’ai remarqué qu’il allait beaucoup mieux, qu’il avait pris du poids.
- Dieu peut tout donc Il est entrain de guérir son fils…
- Même si celui-ci est récalcitrant envers Lui !!!
- Loll, c’est vrai. Djamal ne va à l’église que rarement. (je soupire) j’espère que cette expérience va lui permettre de voir la vie d’une autre façon.
- C’est mon plus grand souhait ! Et j’aimerais également que tu sois dans sa vie. Tu lui apportes tellement, hmmmmm
- Malheureusement il a fait son choix et…
- Arrête avec ça Kara. Djamal est fait pour toi. Tu dois reconquérir ton homme…
- Et Denise ?
- Tu la vois où ça ? Denise n’est plus d’actualité. Ce n’est pas que je suis heureuse de son malheur mais je me dis que tout ce qui arrive à un but.
- (je souris) Je comprends parfaitement.
- Et comment vont les filles ? me demande-t-elle.
- Leur mère leur manque mais elles vont bien. Elles sont entre les mains de quelqu’un de confiance.
- Très bientôt elles vont pouvoir revoir leur mère adorée.
- Oui elles me manquent beaucoup.
***
Je ferme mon sac et va rejoindre le père de Djamal qui m’attend sur la cour. Je rentre chez moi aujourd’hui et Djamal part pour les Etats- unis avec sa mère ; son père les rejoindra la semaine prochaine. Comme le station de bus se retrouve sur la route de l’aéroport alors il me dépose avant de s’y rendre. Sa mère me tend un paquet.
- Un petit quelque chose pour les filles et ça (elle me tend un deuxième paquet plus grand) c’est pour toi.
- Je te remercie Man Louis !
- Je t’en prie ma fille.
Puis on a pris la route tout en discutant. Djamal était assis à l’arrière avec moi mais ne m’accordait pas la parole.
- Ça va ? lui demandai-je.
- Ouais ça va.
Ça été les seuls mots qu’on s’est dit durant le parcours de vingt-cinq minutes. Arrivée au station je descends de la voiture et salue tout le monde. Sa mère et son père sont descendu pour me faire un dernier câlin avant de partir.
- Au revoir Djamal et bon voyage !
- Merci ! rentre bien et...et embrasse les filles de ma part, murmure-t-il.
- Je n'y manquerai pas, dis-je en souriant.
Je reste un moment avant que la voiture démarre et pense à ce que Man Louis m’avait dit « il faut reconquérir ton homme ! » Je sais que si il l’est vraiment, on sera ensemble et ceci contre vents et marrées