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Ecrit par lpbk

Zoé n’avait jamais rêvé de mariage. Elle laissait ces douces illusions à Marie et Elsa qui en raffolaient. Aujourd’hui, pourtant, la donne avait changé. Elle languissait de voir Djibril s’agenouiller, lui promettant bonheur et fidélité, alors qu’au fond elle n’en avait jamais eu envie. Puis, elle lui en voulait terriblement de ne pas la choisir, de ne pas être assez bien à ses yeux pour lui faire balayer d’un revers sa première union chaotique. Il lui refusait le mariage comme on refuse à une gamine capricieuse la friandise qu’elle désire parce que la petite voisine l’a. Son souhait de robe blanche, de chignon, de bouquet était né de sa profonde angoisse de finir seule. Cette angoisse que la famille Sia nourrissait depuis quelques années maintenant. Le savoir ne la rassérénait pas pour autant. Son mariage, elle le voulait et elle l’aurait. 

Zoé, en tailleur sur son lit, enfonça son ordinateur portable dans le creux de ses jambes.  Elle tapa frénétiquement les mots-clés en les énonçant à haute voix. 

 « Je veux qu’il m’épouse ».  

La première page de résultats de recherches regorgeait d’articles et de témoignages de femmes qui désespéraient que leur conjoint fasse leur demande. Elle cliqua sur le premier article qui ne lui parut pas larmoyant. « Il ne veut pas s’engager avec vous, comment faire ? » 

— 1er point : s’aimer. Ok c’est bon. Le 2ème : communiquer. Fait aussi. Le 3ème : être sexy. Ouais c’est bon… 

Elle lâcha au bout du dixième point qui préconisait de montrer son affection par des gestes tendres après une série de conseils tout aussi clichés et débiles. A priori, « la vie de couple implique gestes de tendresse sinon quel intérêt ? » Elle continua de farfouiller sur internet le guide d’emploi pour vieilles filles en devenir, affligées par le non-engagement de leur homme. Elle se hasarda sur un autre site et déguerpit aussitôt dès qu’on l’avisa d’être douce et soumise. Il ne manquait plus que ces deux adjectifs qu’elle avait en horreur pour lui saper le moral. 

Elle referma son ordinateur de rage, énervée d’avoir pensé l’espace d’un instant qu’Internet lui trouverait la solution miracle pour faire plier, genou à terre, Djibril. 

Zoé s’élança sur son lit. Elle pensa aux mariages qui se faufilaient à l’horizon, Faty puis Elsa et dernièrement Bébé qui venait de se fiancer. Elle se souvint avec nostalgie des stratagèmes que son amie avait mis en place pour coincer son mec. Zoé pressentit qu’elle était la bonne personne pour l’aider à forcer la main de Djibril. Elle dégaina  alors son téléphone et lui passa un coup de fil. 

— J’ai besoin de toi, s’empressa d’ajouter Zoé quand Bébé décrocha. 

— Ok question de vie ou de mort ? 

— T’as tout compris ! 

— Allez dis-moi tout.  

— Bon tu sais que ça fait plus d’un an que je suis avec Djibril maintenant. Tout se passe bien sauf que j’aimerais qu’il fasse sa demande. 

— Mais je suis confuse mademoiselle Sia, n’était-ce pas vous qui me reprochiez d’être une control freak parce que je voulais absolument me marier ? Quel autre terme aviez-vous utilisé également une mala…

— Oui oui je sais, l’interrompit Zoé. C’est toi qui avais raison Bébé. Pour ma décharge, c’est Adjoua qui m’avait montée la tête. 

— Mouais, tu t’es pas laissée convaincre très longtemps non plus. Et maintenant tu viens ramper pour mes conseils. 

— Oui…minauda Zoé. 

— T’es consciente que je devrais te faire payer ? Non parce que ces conseils valent de l’or quand même. 

— Ouais allez donne-moi ton secret sorcière ! 

— Ok, c’est bien parce que c’est toi. Bon c’est très simple, ça tient en deux concepts : harcèlement et chantage affectif. 

— Euh… c’est pas un peu radical ? Le but n’est pas qu’il me quitte non plus hein. 

— Non non je t’assure méthode 100% efficace testée et approuvée par moi-même. 

— Ok je t’écoute…se résigna Zoé. 

— Premier point : tu fermes les cuisses. T’as la chance d’avoir un argument imparable que toutes les femmes n’ont pas : la religion. Pas de relations sexuelles avant le mariage même si je me doute que vous avez déjà franchi le cap.

— Euh… 

— Pas à moi s’il te plaît Zoé ! Je sais reconnaître quand une fille est passée à la casserole. 

— Donc plus de sexe ?! 

— Oui, ce qui veut dire terminé les soirées chez lui. Tu ne le vois que dans des zones neutres : restaurant, centre commercial, etc… Évite le cinéma ! On ne sait jamais ! Il faudra que tu lui expliques que vis-à-vis de tes croyances, tu te sens mal à l’aise dans ces relations. Il est croyant, il comprendra totalement. 

— Je ne vais même plus à l’église, pouffa Zoé qui trouvait le conseil absurde. 

— Bah essaye d’y retourner de temps en temps pour être crédible ou cache une mini bible dans ton sac à main que tu laisses en évidence pour qu’il voit que tu es sérieuse dans ta repentance spirituelle. 

— C’est de la folie ton truc Bébé. C’est carrément de l’hypocrisie. 

— Mais qu’est-ce que tu crois Zoé ? Tu crois que Paul s’est levé un bon matin et m’a fait sa demande ? Non, je l’ai travaillé au corps. Il faut parfois forcer le destin. 

— Ok très bien ! Après je fais quoi ? 

— Deuxième point : il te faut un allié proche de lui, une femme de préférence. Les mecs sont une catastrophe pour ce genre de choses. Idéalement ce serait sa mère ou une autre fille de sa famille, ça peut être aussi une amie mais bon j’ai tendance à me méfier des amies. 

— Je ne connais personne de sa famille. 

— Attends ! Tu veux te marier avec lui mais tu n’as jamais rencontré sa famille ? Il faut changer ça !

— Chez nous, ça ne se fait pas de présenter quelqu’un sans mariage ou au moins fiançailles. Jamais, il ne me présentera sa mère s’il n’envisage rien derrière. Et puis, ils n’habitent même pas en région parisienne. 

— Une amie, une sœur, une cousine dont il est proche ? 

— Ouais, il m’a parlé d’une sœur qui a juste deux ans de plus que lui. Peut-être mais je ne te garantis rien. 

— Très ! Fais tout pour l’avoir de ton côté. 

— Ok

— Dernier point : envoie des signes forts. Sur les réseaux sociaux, intéresse-toi à des demandes en mariage, des décos, robe de mariée, etc… Et de temps en temps, échange avec lui sur ce sujet. Vois comment les choses évoluent de son côté mais fais-lui bien comprendre que c’est ton désir le plus profond. 

— Ok ! dit Zoé tentant de se donner du courage. 

— Ne t’inquiète pas ça va le faire ! Madame… 

— Meite ! 

— Madame Meite. Zoé était à présent persuadée que d’ici la fin de l’année, Djibril la demanderait en mariage. Il ne lui restait plus que quatre mois pour se mettre à l’ouvrage. 

Marry me