15. La vérité rougit les yeux
Ecrit par Samensa
ELA
-Heureusement que cette histoire
a pu être rapidement réglée.
-…
-C’est vrai qu’Api a fait fort
mais tu ne trouves pas que Raïssa le méritait ?
-…
-Eric ?
-…
-Mon cœur ?
-Humm. Me répond t-il du fond de
la gorge.
-C’est à toi que je parle là.
-Excuse-moi mais je suis
concentré sur la route. Dit-il le regard fixé devant lui.
Depuis que nous avons quitté la
réunion, il est très froid. A peine répond t -il à mes questions. Et cela est
loin de me plaire. Même s’il était derrière la porte de la cuisine, je ne pense
pas qu’il ait entendu quoi que ce soit. Car il aurait fait un scandale. En tout
cas, ce serait le plus logique. N’est-ce pas ? J’impute sa mauvaise humeur
à un éventuel problème tout autre.
Lorsque nous arrivons à la
maison, il s’enferme dans son bureau. Moi je monte dans notre chambre pour
faire une sieste, chose dont j’ai vraiment besoin.
Je suis réveillée par la sonnerie
de mon téléphone. Eric, assis dans le lit un livre à la main me regarde prendre
mon téléphone. Les battements de mon cœur s’accélèrent lorsque je vois le nom
affiché : David. Rapidement je me rends à la salle de bain, sous le regard
insistant d’Eric, pour décrocher.
-David ? Tu es fou ?
Pourquoi tu m’appelles ? Imagine qu’Eric ait vu ton nom sur le
téléphone ?
-Je me fiche pas mal de ce qu’il
puisse voir ou pas ! Et calme-toi, il ne sait rien donc il n’y a aucun mal
à ce que je te passe un coup de fil.
-Tu es décidément malade !
D’ailleurs pourquoi tu m’appelles ? Je t’avais dit de ne plus le faire.
Fous-moi la paix nom de Dieu !
-Ela, je veux te voir. Il faut
qu’on parle.
-Si tu as quelque chose à me
dire, c’est le moment sinon basta !
-Pas au téléphone… non.
-Ne m’appelle plus ! Tu mets
mon mariage en danger. Déjà ma sœur sait pour nous deux, imagine que quelqu’un
d’autre soit au courant et que ça arrive aux oreilles de ton frère.
-Rodrigue est au courant.
Je manque de m’étrangler en
étouffant un cri tellement le choc est grand.
-Quoi ?
-Il le sait. Je ne sais pas
comment il a fait mais il sait.
-Oh mon Dieu, non. Ce n’est pas
possible.
-C’est pour tout cela qu’on doit
se voir Ayehla. C’est urgent.
-…
-Ayehla ?
-Ok. Je te ferai signe pour fixer
un rendez-vous. Néanmoins évite de m’appeler.
-Bien… Prends soin de toi Ela.
-Aurevoir.
Je raccroche avant de m’adosser contre
le mur pour répondre mes esprits. La situation m’échappe à un tel point que je
perds ma sérénité. Deux personnes qui savent que j’ai couché avec mon
beau-frère. Deux ! Comment je vais bien pouvoir gérer tout cela ?
Le plus urgent à présent c’est de
rencontrer David pour trouver une solution. Et têtu comme il est, je sais qu’il
me rappellera. Je change donc rapidement son nom dans mon répertoire.
Désormais, David dans mon téléphone, c’est « Mme Soro ». Ça vaut
mieux ainsi.
-C’était qui ? Me demande Eric
alors que je sors de la salle de bain.
-Oh rien de grave. Juste une dame
avec qui je traite pour les magasins de pagne de maman.
-Ah bon ?
-Oui. Pourquoi ?
-Je m’interrogeais car ça m’a
surpris que tu doives t’isoler pour répondre… Mais si ce n’est rien de grave,
c’est tant mieux.
Juste après sa phrase, il me
gratifie d’un petit sourire en coin en prenant le soin de me regarder
longuement avant de se lever. Un sourire qui m’a l’air plutôt moqueur.
Je le regarde se rafraichir et se
vêtir. Il m’a tout l’air de quelqu’un qui sort.
-Ou est-ce que tu vas ?
-Je n’en ai pas pour longtemps.
Est-ce une réponse à ma
question ?
ERIC
Ce que je déteste par-dessus
tout ? Me faire traiter comme un idiot.
Quand je regarde Ela, je n’arrive
pas à croire qu’elle ait le toupet de me mentir comme ça. Ce matin, j’ai été
refroidie lorsqu’elle a dit qu’elle avait perdu son pendentif depuis longtemps.
N’est-ce pas celui qu’elle portait il n’y a même pas un mois ?
Elle n’a plus remis les pieds
dans mon appartement depuis le mariage alors qu’elle avait toujours le
pendentif après. Comment est-il arrivé entre les mains de Raïssa ?
Le plus troublant, c’est cet
appel qu’elle vient de recevoir. Elle m’a vraiment pris pour un imbécile. J’ai
bien vu que c’était David qui lui téléphonait alors pourquoi elle me
ment ?
De toute façon, je sais
maintenant qu’elle me cache quelque chose. Quoi ? Je ne saurais exactement
le dire, ou plutôt, mon cœur refuse d’accepter ce que ma raison me montre et
que je trouve incroyable.
C’est pourquoi, j’ai décidé d’en
parler à mon ami Rodrigue. Il a toujours été une oreille attentive et bon
conseiller. Je le rejoins donc à Dabou,
une banlieue d’Abidjan. Sa mère y a un espace au bord de la lagune. On pourra
parler tranquillement.
J’ai besoin de réponse.
RODRIGUE
C’est triste mais c’est la vie.
Je regarde mon ami tomber à
genoux à mes pieds en train de pleurer comme une madeleine. Voir un homme
exprimé sa peine ainsi est vraiment rare. Néanmoins, c’est compréhensible.
C’est dur de réaliser qu’on s’est trompé sur la personne qu’on aime le plus au
monde.
C’est vrai qu’au début Eric
venait me voir pour me faire part de ses soupçons et moi j’étais censé lui
donner des conseils. Cependant, vu la façon dont elle se foutait de lui, je
n’ai pas pu le retenir de lui dire ce que je sais. Et c’est à mon grand
étonnement qu’il n’a pas fait objection à mes affirmations. Ce qui veut dire
qu’au fond il savait mais refusait de l’admettre.
Maintenant, le voici là, devant
moi, en train de verser des larmes pour une femme qui je pense ne le mérite
pas.
Je m’accroupis devant mon ami
pour essayer de le calmer.
-Eric, calme toi s’il te plait,
calme toi.
-J’ai mal Rodrigue ! J’ai
mal… Je suis en train de mourir. Dit-il en sanglotant.
-Arrête, elle ne le mérite pas.
-Ela qu’est-ce que je t’ai
fait ? (Il s’assoit à même le sol et se prend la tête dans les mains) Qu’est
ce j’ai fait à David ? Rodrigue, dis-moi qu’est-ce que je leur ai
fait ?
-Eric, lève-toi.
-Non ! Je veux mourir. Je
veux mourir. Répète-t-il incessamment.
Il s’étend carrément dans le
sable, les yeux levés au ciel. Le spectacle est tristement incroyable. Un si
grand gaillard en train de se lamenter pour une femme.
-Je lui ai tout donné. Je fais
tout pour qu’elle soit heureuse. Où ai-je failli à ma mission d’époux ?
-Ce n’est pas de ta faute ce qui
est arrivé, crois-moi.
-Mais alors quoi ? Ela sait
que je ferai tout pour elle. Décrocher la lune, j’aurais fait. Lui apporter le
soleil, toutes les étoiles de notre univers, Rodrigue, pour ma femme, je l’aurais
fait !
-...
-Rodrigue, pourquoi ils me font
ça ? Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter cela ?
Il se remet à pleurer, cette fois
face contre terre. Je me contente de lui toucher l’épaule pour le consoler.
Bientôt, les sanglots cessent.
Et la peine fait place à la
colère.
Mon ami se lève rapidement pour
se diriger vers sa voiture.
-Je vais la tuer ! Je vais
la tuer aujourd’hui même !
Je lui cours après pour
l’arrêter.
-Rodrigue, laisse-moi !
Aujourd’hui, soit je la tue, soit c’est moi qui meurs.
-Je ne te laisserai pas faire.
Il regarde mon bras poser sur lui
avant de me pousser violemment. Heureusement que j’ai une bonne condition physique
le sol m’aurait aussi accueilli. J’accuse donc le coup sans broncher tout en le
maintenant en place. S’il monte dans cette voiture, quelqu’un va mourir.
-Tu vas me laisser ? Ôte tes
mains de là. Laisse-moi aller la tuer.
-Tu vas la tuer et après
quoi ?
-David… Je vais le tuer aussi. Je
vais me faire un plaisir de le découper en morceaux.
-Tu ne penses pas ce que tu dis.
-Tu crois ? Hein ? Tu
crois ?
Il enlève les clés de la poche de
son pantalon.
-Oui ! Crie-t-il.
-Rodrigue ! (Il essaie de me
contourner sans succès) Merde ! Laisse-moi passer !
D’un geste rapide, je lui arrache
les clés de sa voiture que j’empoche.
-Espèce de… ! Rends-moi mes
clés !
-…
-Ah bon ? Ok ! Va pour
un mini car alors !
-Tu n’iras nulle part !
Dis-je en le saisissant par le bras.
-Rodrigue ! Est-ce que tu te
rends compte de ce qu’ils m’ont fait ?... Sous mon nez… et moi, j’étais là.
Je n’ai rien vu. Je…
Incrédule, je regarde mon ami
commencer à rire. Au fur et à mesure qu’il rit, les larmes inondent son visage.
Il finit par se rassoir dans le
sable, tout tremblant, le regard dans le vide en murmurant « Ils sont
forts ».
Malgré tout ce que je fais ou
dis, il reste immobile. Redoutant un autre accès de colère, je demande à des
jeunes gens du village de m’aider à le faire coucher dans la chambre d’ami de
la maison de maman.
ELA
Je raccroche mon téléphone en soupirant.
Apparemment, Eric s’amuse tellement bien avec Rodrigue qu’il a décidé de
terminer le week-end avec lui. Ça ne me gêne aucunement mais quand même, il
aurait pu prendre la peine de prendre son téléphone pour m’informer.
Peu importe !
Au moins, je tiens une occasion
de rencontrer David. Je lui envoie rapidement un texto pour l’informer du lieu
et de l’heure de la rencontre.
Promis, juré ! Aujourd’hui,
je mets les points sur les « i » avec David !
Ensuite, je consacrerai mon être
entier à faire revivre la flamme dans mon foyer.
Tout va pour le mieux, n’est-ce
pas ?
Sorry pour la longue absence, un peu chargée ces temps-ci. Merci de me suivre. Pluie de bisous à vous.