2 - Edinson

Ecrit par ACLIRL


Tout d'abord Bonne fête de l'indépendance (en retard)  aux Sénégalais. Veuillez excuser le fait que je ne poste pas fréquemment. Je suis en pleine période d'examen et j'essaierai de poster une fois par semaine. 

Ensuite, merci à ceux qui ont ajouté mon histoire, apprécié cette histoire et même commenté. Alors n'hésitez surtout pas (donnés moi les critiques qui vous traversent l'esprit, c'est toujours instructif). Il n'est rien de plus encourageant (je pense) pour une personne qui se met à partager ses écrits. Bonne lecture les amis ! 

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J’ai toujours pensé que maman exagérai en disant que j’avais beaucoup d’habits. Seul devant ma valise, cela fait déjà vingt bonnes minutes que je tente de la fermer. Il y a un dicton pour ce genre de trucs. Lequel déjà ?

Les positions que je prends sont on ne peut plus gênantes. Je me suis toujours dit, comme la quasi-totalité des personnes qui ayant vues des scènes du genre, que les actrices – car, oui cela n’arrive qu’aux femmes – étaient dans des situations totalement improbables. Franchement, se mettre dos à une valise pour la fermer pour de bon ? J’ai un scoop pour vous : c’est tout à fait probable. Vous pouvez le voir à ma position actuelle. Je ressemble à un hérisson qui se gratte le ventre contre une valise dont la fermeture a l’air au bout du rouleau. Tiens bon, papa a bientôt fini.

Je me cramponne ardemment au bas de la valise et emploies les dernières forces qu’il me reste pour achever de la fermer. Enfin ! Je peux me permettre de savourer ma musique. Je respire MJ. Sa musique accompagne toutes mes humeurs. Maintenant que cette valise est close, c’est le moment parfait pour me noyer dans Man In The Mirror. J’allume mon enceinte et m’affale sur mon lit, probablement pour la dernière fois. Les yeux au plafond, j’observe le fruit de ma stupidité. Mon poster d’Alicia Keys est encore bien fixé. Depuis quelques temps il est devenu une part du décor. Mais je peux vous assurer que ma main en a connues des belles à cause de cette photo. Mon sourire s’évanoui au moment où un bruit lointain me parvient.

Je tente de faire abstraction des cliquetis que forment les pas de la personne qui approche de ma chambre – mon père. C’est inutile puisqu’il approche de ma chambre. Lorsqu’il arrive à ma porte, il se racle la gorge. Je me redresse, par politesse et attend qu’il dise ce qui l’amène.

-       Ta tante ne va pas tarder. Tu es prêt ? me dit-il, le regard évasif.

-       Oui Baba.

Il émet un hochement de tête. Je sais quel genre de conversation nous allons avoir. Celle du genre que tout le monde fuit. Celles des conseils des aux revoir. Elles prétendent à ce que les conseils qui en sortent changent notre vie ou nous servent de base pour toutes les péripéties de notre vie. Mais en vérité, un seul discours, un seul conseil, une citation aussi parfaite soit-elle, ce n’est pas suffisant pour changer le cours de notre vie. C’est comme croire que comprendre un chapitre de cours suffisait à la réussite d’un examen. C’est être dans l’ignorance totale que la régularité n’a aucun rôle là-dedans, car elle est maîtresse de la situation.

Papa se rapproche et s’assoie à mes côtés. La proximité entre nous me rassure un peu sur la suite de notre conversation.

-       Quel que soit ce qui t’as poussé à prendre ta décision, je reste persuadé que d’autres alternatives s’offraient à toi.

C’est reparti pour un tour, le dernier, si Dieu le veut. Toujours par politesse, je me retiens de lever les yeux au ciel. Il met alors la main dans sa poche et manipule son portable quelques secondes avant de me montrer les derniers mouvements de son compte bancaire.

-       Je t’ai fait un virement. Si l’envie te prend de venir nous rejoindre, tu sais où trouver de l’argent.

Je hoche la tête et souffle un « merci » presque inaudible. Inutile Baba, je ne viendrai pas. Je n’ose pourtant pas dire ces paroles à voix haute. Je n’ai absolument aucune intention de me pointer ici de nouveau.

Demain, je serai juste, celui qui a donné de sa personne. Et cela me suffit. Je n’ai pas à être autour de quelqu’un qui n’a aucune connaissance de la valeur d’être sain et sauf. Il suffit d’être soi-même de nouveau pour savoir que l’on est allé de l’avant et pas à se prouver ou prouver à qui que ce soi que c’est le cas. Le cas échéant, nous sommes juste dans le déni.

 Mon père baisse la tête et ne regarde pas dans ma direction. Il reste focalisé sur le mur d’en face. Je me souviens comme il y peu encore il aimait passer du temps ici, à faire des parties de jeux ou simplement discuter avec son fils. Les relations évoluent avec le temps, et pas que les relations amoureuses. Aujourd’hui, nos ressemblances ne se limitent plus qu’au physique. Tata ne cesse de dire que je suis son portrait craché – ou plutôt le portrait craché de ce à quoi il ressemblait 20 ans plus tôt. Mais quelle importance maintenant que nous ne pouvons plus échanger, rire et nous chamailler comme nous aimions le faire ?

Il acquiesce silencieusement et me souhaite bon voyage.

-       Je t’appellerai en arrivant.

Voilà les dernières paroles qu’il me lance, dos à moi, avant de partir avec la bimbo qui lui sert de consolation. J’entends leurs pas s’éloigner, puis la voiture démarrer depuis ma fenêtre. Une fois que je ne l’entends plus, je relâche l’air que je retenais sans m’en rendre compte. Il y a quelques mois encore, je n’aurai jamais cru que notre relation s’en tiendrait à…ça. Comme si cette pression ne suffisait pas, j’aperçois mon tapis à l’autre bout de la pièce. Et dire que je pensais en avoir fini avec cette valise…

Ca y est, le dicton me revient : il faut le voir pour le croire.

 

*

- Enfin ! Ed t’en a mis un temps pour venir ! S’exprime ma cousine le sourire aux lèvres.

 Je la prends dans mes bras au moment où elle s’y jette avant de répliquer :

-       C’est pour mieux me faire accueillir.

J’entends presque ma tante lever les yeux au ciel au moment où elle souffle :

-       On était pris dans les embouteillages, Gilda. « Dinesonne » n’en pouvait plus de ne pas te voir.

Ça recommence. Rien ne peut m’agacer autant que ce stupide nom. Permettez-moi d’illustrer : lorsque vous dites à un enfant de s’écarter du four, c’est comme si cette chose devenait la chose la plus passionnante de la maison – peu importe que cet enfant ai absolument tous les jeux les plus captivants. Voyez-vous c’est ainsi que cela fonctionne dans ma famille. Vous demandez à quelqu’un de ne pas faire quelque chose, de ne pas vous donner un stupide surnom et quelques minutes plus tard le monde entier est au courant.

-       C’est ça continues Gilda. Je vais t’en faire voir des choses pendant mon séjour.

-       Eh ! Tu t’attaques sérieusement à moi ? me dit-elle l’air faussement offusqué. Maman !

Sa mère lève les mains comme pour déclarer son innocence.

Je lui lance des regards menaçants. Tante Zana interrompt la bataille de regard sur le point de commencer en m’indiquant ma chambre.

-       Poses y ta valise et lave toi les mains, je t’ai emballé à manger.

Je suis les ordres et m’empresse de déposer mes affaires.

   

Je dîne – accompagné de Zana et Gilda – sans évoquer de sujets qui fâchent. Après quoi, je me réfugie dans ma chambre. Cela me fait bizarre. Il est près de 23h. Zana n’est pas fan des sorties subite. Il faut dire que je lui en ai fait baver il y a quelque temps, « In my Dark Times ». Mais le passé est derrière nous. Je fini de ranger mes affaires et attrape mon portable. Une multitude de notifications apparaissent sur mon écran : Instagram, Facebook, Twitter. Je ne manque pas la moindre d’entre elles. Comme tout jeune de la génération X qui se respecte, je m’atèle à la tâche de les regarder toutes et de répondre ardument à tous ceux qui m’ont marqué et envoyé un message.

Affalé sur mon lit, je lève les yeux vers la montre une fois mon excursion sur les réseaux sociaux terminée. Ce n’est pas possible… ça fait que 30 putain de minutes que je suis sur mon portable ? Il faut que je m’occupe, on est vendredi soir, je dois prendre l’air. Je me lève et range le tapis qui traîne encore sur le sol. Je me dirige vers la salle de bain à l’arrière de la pièce. Lorsque je croise mon reflet, je sais qu’abandonner mes pratiques habituelles ne m’ont fait que du bien jusque-là. Il était une période où je revenais presque en permanence d’une bagarre. Ha ! Je me souviens que ma lèvre inférieure était dans un tel état que je ne pensais plus la revoir telle qu’elle était vraiment : rose, pulpeuse, douce – pour reprendre les arguments des filles. J’ai entendu dire que cela plaisait… Mais les raisons pour lesquelles je me suis redressé ne se limitent pas au sexe.

Je me brosse les dents et, en me dirigeant vers ma chambre une fois terminé, j’aperçois que mon portable luit dans la pénombre.

Je l’empoigne et reste perplexe devant le message qui s’affiche.

T : Ce n’est plus possible pour demain matin. J’ai un contre temps.

Depuis que j’ai décidé de venir, je n’avais pas prévu un tel changement de plan. Et si on ne parvenait pas à se voir ? J’écarte cette pensée et lui réponds immédiatement : Pas de soucis. Je suis aussi là dimanche et dans les jours à venir.

 

T : En réalité je pensais plutôt à ce soir. Je connais un bar assez tranquille.   

Mon cœur bas à la chamade. Sans réaction devant le message qu’il vient de m’envoyer je me pose la question la plus stupide dans la situation actuelle : qu’est-ce que je dois porter ?

Détrompez-vous si vous me voyez comme le frêle qui s’ébranle à la vue de tout individu. Mais pour gagner le respect des hommes et avoir la femme de mon choix auprès de moi, peu importe pour qu’elle durée, cela nécessite quelques efforts. Et croyez-moi, lorsque vous en voyez les résultats – une embauche rapide, une bombe au formes parfaites avec un soupçon d’intelligence, j’en passe et des meilleurs – vous vous y donnez à cœur joie.

J’en oublie presque de répondre. Mon portable s’illumine de nouveau pour me dire que ma batterie est déchargée cette fois-ci. Je réponds : Il me faut juste l’adresse.

Il me l’envoie et me donne rendez-vous dans 1h30.

Je mémorise l’adresse et enfile la seule tenue correcte que j’ai apportée : chemise et veste. Je repasse devant le miroir de la salle de bain et grimace en remarquant que ma barbe de trois jours est bien visible. Tant pis, je ferai avec.

Je quitte la chambre après avoir pulvérisé mon Hanae Mori, prêt à rencontrer la raison de ma venue à Villy.

                       


 
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