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Ecrit par Lilly Rose AGNOURET
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~~~Pendant ce temps à Port-Gentil, mardi soir,
19h 30 chez la mère de Tania~~~
Comme je suis heureuse. Tania vient de m'appeler
de Libreville ; elle a obtenu son visa pour les USA. Je peux enfin respirer. Je
lève les mains au ciel et m'écrie :
« Merci mon Dieu. Tu es grand ! »
Le sourire angélique de la petite Jade me ramène
sur terre. La pauvre petite doit sûrement se dire que sa mamie Bernadette a perdu
la boule !
Non, tout va bien pour moi, ma tête aussi. C'est
juste que la pression que je me suis mise est quelque peu retombée. Encore
quelques nuits à prier fermement et à la fin du mois, ma fille sera dans
l'avion pour le USA. Je pourrai alors mieux me reposer.
C'est que depuis le jour où Dieu m'a permis le
bonheur d'avoir cette enfant, ma vie n'a tourné qu'autour d'elle. Je suis
heureuse d'avoir réussi la part des choses en l'emmenant jusqu’à la réussite de
son baccalauréat. Et dans quelques jours, elle sera fiancée. Qu'est-ce qu'une
maman pourrait demander de plus ?
Je suis là en train de repenser au passé quand
Pupuce arrive en trombe.
« Hey ! Qu'est-ce qui t'arrive ? Où vas-tu en
courant ainsi ? », lui fais-je.
« Je viens juste changer de paire de chaussures.
Les autres m'attendent dans la voiture. »
« C'est maintenant comme ça, Pupuce ? Tu rentres
et tu n'embrasses plus tes filles ? »
« Je suis pressée tante Bernadette. »,
répond-elle en envoyant des baisers à la volée aux jumelles.
Je préfère ne rien dire, me contentant de la
regarder partir. Depuis dimanche, j'ai dû la voir deux heures à la maison. Elle
rentre quand je dors et elle sort quand j'ai la tête ailleurs. C'est en coup de
vent qu'elle me fait savoir qu'effectivement, elle vit encore dans cette
maison. Je me demande ce que tout cela va donner. Je préfère ne pas parler, car
elle risque à nouveau de se refermer comme une huître. En la motivant et en
l'aidant à reprendre de l'estime de soi, je ne savais pas qu'on en arriverait à
ce niveau !
C'est à peine si elle n'a pas oublié comment je
m'appelle ! Bref, les petites sont désormais à ma charge. Je suppose que c'est
ainsi quand on est grand-mère. J'ai la chance que les petites ne pleurent pas
trop. Heureusement que Julien est là chaque nuit.
J'ose quand même me demander ce qu'il adviendra
de Pupuce une fois que ce jeune homme sera reparti dans son pays. Elle sait
qu'il est là pour ses congés. Elle m'a semblé avoir assez de bon sens lorsque
nous avons discuté ensemble. Je prie que leurs au revoir se passent bien.
Je suis là dans mes divagations quand Jileska
arrive.
« Bonjour tantine Bernadette ! On dit quoi ? »
« C'est à toi que je dois poser la question. Tu
sembles de très bonne humeur. »
« Oh ! Moi ça va. Depuis que j'ai eu ce bac-là,
je respire. », répond-elle.
« Ok. Et que comptes-tu faire maintenant ? Tu
vas à Masuku ? »
« Jamais ! Y a pas d'avenir là-bas. Je compte
aller me chercher du côté de Libreville quitte à changer de voie et faire de la
comptabilité à l’Institut de Gestion, pour ne pas subir une année blanche. »
« Bien ! Je suis heureuse que tu aies des
pistes. Et Sunita ? », lui fais-je.
« Oh ! Je pense que c'est la faculté de Lettres
de l'UOB qui l'attend. Mais pour l'instant, il y a autre chose qui l’intéresse
plus. »
« Je vois. », lui fais-je avant de lui proposer
à boire.
« Oh, laisse tantine. Je vais aller chercher mon
verre d'eau moi-même. Faut pas que ces deux petites disent que je suis venue
embêter leur grand-mère. »
Elle se lève du fauteuil dans lequel elle est
assise et va chercher un verre et une bouteille d'eau dans la cuisine. Elle
boit deux verres et me lance.
« Tantine, n'est-ce pas Pupuce vit maintenant
ici, non ? »
« Euh, oui. Pourquoi ? »
« Non, sinon je n'aime pas parler des histoires
des autres, mais c'est quand même une bonne chose qu'elle habite ici. »
« Pourquoi dis-tu cela, Jileska ? »
« Ah ! Je...bon en fait, je voulais juste que tu
dises à Pupuce que si elle fait bien les choses, tout le monde aura pour lui. »
Je la regarde intriguée, ne sachant pas où elle
veut en venir. Et elle comprend que je suis perdue.
« En fait, tu vas redresser Pupuce, parce qu’elle
a trop la bouche tordue. », me fait-elle.
« Comment ça ? Que veux-tu dire ? », lui
fais-je.
« Ah, je n'aime pas trop parler des choses des
autres moi-même j'ai des problèmes sans solutions, mais quand même il faut que
je te dise. Hier, j'étais dans la cuisine. Sunita et Pupuce étaient dans le
salon en train de se maquiller pour sortir. Elles racontaient aussi. Ce n'est
pas bon la manière dont Pupuce parle de Tania. Quand on aime sa sœur, on ne
parle pas comme ça. J'ai failli la baffer grave. Elle ose carrément dire que
Tania suit Miro à cause de son argent. Elle dit que s'il n'était pas le fils
d'un DG, sa sœur n'allait pas le regarder ! »
« Elle a dit ça ? », fais-je vraiment surprise.
« Elle a dit ça et beaucoup d'autres mauvaises
choses. Elle parle mal ! Ce n'est pas bon. Chacun a son moment dans la vie.
Moi-même j'étais là quand Tania a commencé avec Miro. On est resté là dans le
flou pendant 3 mois. Le type nous sortait sous le soleil ou sous la pluie, dans
les taxis que tu vois là. Quand on collait le wagon avec Tania, c'était là au
Copa Cabana que le gars l'invitait manger les brochettes. On était que debout
debout avec lui. Il mangeait le tchèp là avec nous là au grand-village là !
C'est quand il a vu que la fille de Bernadette tenait la route et que c'est une
vraie go, qu'il nous a montré la réalité. Quand il est venu la première fois
avec son chauffeur, la chercher pour l'emmener chez lui pour manger avec ses
parents, on était là Sharonna, Gaëlle et moi ; on a ri en disant qu'il avait
peut-être volé cette voiture. Pourquoi ? Parce que le gars s'habillait en
destroy et puis qu'il mangeait le pain aux haricots avec nous et buvait le
djino avec nous, là debout chez le malien. Maintenant, la petite go de la cité
rose là, vient se mettre dans une situation de concurrence avec sa sœur !!! »
« C'est vrai ce que tu me dis là !? », fais-je
étonner.
« Hummm ! Pardon, je ne veux pas trop parler, oh
! Mais la fille de Mr Mbeng dit qu'elle va montrer qu’elle aussi elle peut !
Mais qui a dit qu'elle ne peut pas ? », fait Jileska au comble de
l'incrédulité. « Je ne vais pas tarder avec elle si elle continue. Je la
démarre si elle dit encore des conneries ! C'est comme ça que le vampire
commence. »
« Ah, c'est vous-même là-bas. Tout ce que je
fais aujourd'hui, je le fais en espérant que chacun réussira tranquillement.
Elle rentre, elle sort, je m’occupe des enfants, parce que je me dis que cela
lui donne la chance de vivre une aventure heureuse. Si ça peut lui ouvrir les
portes du bonheur, tant mieux. Ce que je veux qu'elle comprenne et cela je le
lui répète tout le temps, c'est qu'il n'y a pas de fatalité. Ce n'est pas parce
qu'elle a eu une expérience malheureuse avec Peter que la vie s'arrête. Je lui
ai demandé de garder l'esprit positif parce qu'il le faut pour avancer.
J'espère qu'elle m'écoute, parce que tous les conseils que je lui donne sont
les mêmes que je donnais à Tania. »
« Ah ! J'espère que ça ira. Je n'aime pas le son
de sa voix quand elle commence à se plaindre et dire que sa chance a été
détournée... », fait Jileska avant de se rattraper très vite en mettant la main
devant la bouche comme si elle regrettait d'avoir trop parlé.
« Que viens-tu de dire Jileska ! Qu'a t-elle
dit. »
« Oh, tantine Bernadette ! je...je...Je n'ai
rien dit, pardon. »
« Parle, je t'écoute. Qu'a dit Pupuce ? »,
fais-je en insistant.
« En fait, j'ai voulu la baffer parce que je
l'ai entendu dire à Sunita que sa chance a été détournée quand elle était
enfant. »
« QU'EST-CE QUE TU ME RACONTES LA !? », fais-je
survoltée.
« Ah ! Gaëlle dit toujours qu'il faut que
j'apprenne à fermer ma bouche ! Je comprends pourquoi. », fait-elle.
« Excuse-moi d'avoir crier. Je ne m'attendais
pas à entendre ce genre de chose. Ça prouve bien que cette fille-là est sotte.
Comment peut-on raconter ce genre de bêtises. Sa chance a été détournée par qui
? »
« Ah, elle dit que c'est la grand-mère qui a
détourné sa chance quand elles étaient petites pour la donner à Tania. Elle dit
que c'est pour ça que Tania a toujours été la préférée de tout le monde dans la
famille. »
« Tania est la préférée de tout le monde parce
que je l'ai bien élevée et qu'elle écoute quand on lui parle. Je n'ai jamais
entendu des bêtises pareilles. Je te donne l'autorisation de la baffer la
prochaine fois qu'elle racontera ce genre de chose. Ça lui donnera un peu de
bon sens. »
« Sinon, je ne vais rien dire à Tania. Je ne
veux pas gâcher l'affaire entre les deux sœurs, oh ! »
« Je ne lui dirai rien non plus. Je prie tous
les soirs pour que la fin de ce mois arrive et que Pupuce prenne tranquillement
son avion pour la France. Au moins, on aura réussi quelque chose en la
soutenant et en la supportant pendant cette année scolaire. »
« Bien, je vais un peu rester pour discuter avec
ces deux petites là. De toute manière, je n'ai rien d’intéressant à faire avec
ma vie ! », fait-elle en prenant Ruby dans les bras.
« Tu réussiras dans la vie Jileska. Et tu sais
pourquoi ? », lui fais-je.
« Euh, pourquoi ? », demande-t-elle. Sceptique.
« Parce que tu arrives à prendre du recul et à
rire de toi-même. C'est bien de pouvoir à chaque fois se remettre en question.
Ça veut dire que ton cœur est bon. Dieu t'ouvrira les portes. », lui dis-je.
« Pardon, qu'Il les ouvre bien grand parce que
là, je me trouve dans une souricière. », conclut-elle.
Cette fille et son sens de l'humour ! Elle a
toujours le mot et l'attitude pour faire rire !