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Ecrit par Lilly Rose AGNOURET
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Maman est tellement inquiète
et frustrée qu'elle me demande d'aller acheter des unités Airtel pour appeler
toutes les amies. La voilà dix minutes après, au téléphone avec de la grand-mère
Ziza pour savoir si ma sœur est passée par le quartier balise. La vieille au
téléphone répond non. C'est vrai que ma sœur ne va pratiquement jamais chez ma
grand-mère. Elle n'aime pas s'enfoncer dans le sable de Port-Gentil. Même pas
pour aller voir la grand-mère. Voilà que cette dernière aussi se met à paniquer
:
"Ah Bernadette, c'est
comment. L'enfant est où?"
Hulmmm! Je vois que maman ne
sais pas quoi dire. Je prends le téléphone et je dis quelques mots à ma
grand-mère, histoire de la calmer.
Ensuite, j'appelle ma combi,
Jileska pour savoir si sa petite sœur Sunita, qui est la confidente de Pupuce,
est au courant de quelque chose.
Elle me répond:
"Attends que j'aille
secouer les puces à ma sœur. Elle va me cracher le morceau."
Ma combi me rappelle dix minutes
plus tard et me balance:
"Vas faire un tour du
côté de Ntchenguà badamier. Tu y trouveras la frangine. Parait qu'elle est chez
le typo."
Oh! Mais qu'est-ce que Pupuce
est allée foutre à Ntchenguè badamier, alors qu'elle doit être en classe!?
"Où est-elle?", me
demande maman.
"Parait qu'elle est chez
une copine du côté de Ntchenguè."
"Ne me mens pas, s'il te
plaît. Chez qui est-elle?"
"J'te dis, la vieille.
Elle est chez une copine."
"Tania, ta sœur, a des
copines de ce côté-ci de la ville. Que va t-elle faire si loin de
Ntchenguè?"
"Euh! Je ne sais quoi te
dire, maman. Je n'en sais rien."
Sceptique, maman me regarde,
l'air de me dire qu'elle n'est pas dupe du tout.
Alors, que je n'ai pas encore
mangé, je demande à Julien qui vient d'arriver, de m'accompagner à ntchenguè.
Je sais même que badamier, c'est quel endroit de La ville !?
"Qu'est-elle allée foutre
là-bas?"
"Elle est allée rejoindre
Peter. Il habite là-bas."
"Vous aussi, les filles!
L'amour va vous mener très loin. Voilà qu'on est obligé de miser 2 mille de
taxi pour aller la chercher ! Elle va me rembourser mon gain."
"Ah, papa, on va discuter
après. Cette affaire-là commence à me dépasser.
Nous voilà dans un taxi en
direction de l'extrémité de la ville. Un endroit que je ne connais même pas. On
dépasse l'hôpital, et je rappelle au chauffeur de nous laisser au bon endroit
parce que nous ne savons pas où nous allons. Là, il me répond avec son accent
béninois :
"Tu viens chercher quoi
ici?"
Obligée de rire.
Nous descendons du taxi.
Julien à le réflexe d'aller vers deux jeunes filles qui discutent en bordure de
route. Il leur demande si elles connaissent Big wave, qui n'est autre que
Peter.
"Pardon, oh! Qui ne
connait pas Big Wave ici. Tu vois, après la poubelle là-bas, tu vas tout droit.
Tu vas arriver chez un malien avec une boutique rouge, tu prends le petit
chemin à gauche du malien. Tu vas tout droit jusqu'au container abandonné
là-bas. Tu demandes seulement. On va te montrer la maison."
C'est si bien indiqué, que
l'on se dit qu'on y arrivera vite. Tu parles. Il y a tellement de sable,
d'herbe et de chemins, qu'à la fin, mon frère se demande si l'on doit continuer
;
"Écoute, Tania, je t'aime
beaucoup Frangine, mais là, mes baskets sont vraiment traumatisées. Qu'est-ce
que la frangine est venue foutre ici? Le sable la décourage quand il s'agit
d'aller voir la grand-mère à la balise ; là, ni le sable, ni l'herbe ne l'ont arrêtée
!!!"
"Je sais que tu es
dépassé. Mais ne m'abandonne pas maintenant."
Lorsque l'on arrive à
destination, mes chaussures ont rendu l'âme. J'ai les pieds tout sale et mal
aux jambes. Le vent venant de l'océan tout proche, me fait frissonner.
On demande à une petite fille
où habite Big Wave. Elle nous répond :
"Mon papa n'est pas là.
Je suis seule avec Grand-Ma et tantine Marjorie."
Donc, ne voici t-il pas que
nous découvrons la tantine Marjorie en question, en train de laver des jeans et
des tee-shirt, là, dans la cour de cette maison inachevée!!!
Laissez-moi vous planter le
décor.
Les murs de la maison ne sont
pas crépis. Des fils électriques se promènent au-dessus de nos têtes. Il n'y a
pas de vitres aux fenêtres ; ce sont des planches de contreplaqués qui servent
de fenêtres et de portes. En fait, tout est en chantier. Et notre sœur est là,
dans un coin, debout devant une table branlante, en train de frotter avec une
brosse, un pantalon plein d'eau mousseuse ! Et elle ose se plaindre quand il
faut faire la vaisselle à la maison, avant d'aller à l'école le matin!!!???
Elle sourit quand elle nous
remarque.
"Oh! Que faites-vous
là?"
"C'est à toi que nous
devons poser la question !" lui lance Julien plein d'incompréhension.
"Qu'est-ce qui ne va pas, Pupuce. Tu deviens maintenant femme de ménage
!"
"Oh, qu'est-ce que tu
racontes! Je suis juste venue laver le linge sale de Peter, c'est tout."
"C'est tout! Dis-moi,
depuis quand, sais-tu laver le linge à la main. Chez ta mère, là-bas, même tes
chemises pour Raponda passent à la machine, alors que Tania et moi lavons à la
main tous les samedis! Donc, tu sais le faire."
"Mais, oh! Ca s'apprend
non!"
"Ecoute, ma grande, je te
respecte, tu comprends. Donc, laisse seulement ce que tu es en train de faire
et on rentre à la maison tout de suite."
"Mais quoi? Partez, je
vous rejoins. Je n'ai pas encore fini. Et j'ai mis une marmite de riz au
feu."
"Tania, attrape-moi sinon
je vais commettre un crime. Depuis quand Akendengue Marjorie sait-elle faire à
manger!!!!!!!" Nous sommes tous les jours à la maison et c'est Tania et
moi qui nous tapons tout le boulot! Et comme par hasard, ici, tu viens faire la
cuisine!!!!! Tu te fous de qui."
"Calme-toi, julien.
Calme-toi."
Mon frère est tellement furax,
qu'il a du mal à se retenir.
"Qu'est-ce qui ne va pas
chez cette fille. On te cherche partout en ville et tu es ici au lieu d'être à
l'école ! Tu es devenue maboule ou tu as oublié que tu es en terminale!? Madame
sèche les cours pour venir laver les caleçons de Big wave!!! Qu'est-ce qui ne
va pas dans ta tête, Pupuce. Qu'est ce qui ne va pas? Tu sais combien de filles
défilent dans le lit de ce gars! Tania, s'il te plaît, dis à ta sœur de se
rincer tranquillement les mains et de me suivre. Sinon, je lui fends le crâne
tout de suite. Si les autres n'ont pas de frères pour les remettre sur les
rails, moi mes sœurs ne lavent pas les caleçons des imbéciles!""
Là, je sens que la situation
est tendue. Mon frère est tellement touché dans son orgueil qu'à tout moment il
peut exploser et rosser Pupuce en oubliant que c'est sa grande sœur.
"Pupuce, pardon. Allons
tranquillement à la maison. Laisse les pantalons de Peter. Une autre fille
viendra les laver."
"Mais, laissez-moi au
moins finir ce que j'ai commencé. Je vous suis après. La marmite va brûler,
sinon."
"Que cette marmite brule
! On y va, Pupuce. N'envenime pas plus l'affaire !"
Yooooo! Je suis moi-même que
dépassée! Me voilà ballotée entre mes deux frères. Je m'attendais à tout sauf à
ça.
"Ah Pupuce, on y va.
Laisse-moi tout ça, tu n'es pas chez toi, ici."
Elle consent enfin à se rincer
les mains. Avant de nous suivre, elle court rapidement dans la maison et crie:
"Grand-ma, je suis
partie, oh!"
Et la Grand-Ma en question de
répondre:
"A demain, ma
fille."
Yoooooo!!!! Voir moins