Au bord de la crise
Ecrit par Farida IB
Khalil…
Jemal (me montrant une page du journal qu’il me tend) : ton alibi ne peut plus tenir, la presse à scandale s’est saisie de l’affaire.
Mes poings se serrent et ma mâchoire se
crispe à la vue d’une photo de Yumna illustrant un article
sur sa fausse couche.
Moi grinçant : merdeeee !! Qui a fait ça
?????
Jemal : j’ai lancé des pistes pour le découvrir. Le problème, c’est que ça ce n’est qu’un journal parmi tant d’autres et les
commentaires vont bon train. Tout ce qu’il y a de plus désobligeant.
Je lis quelques lignes et relève ma tête
dans sa direction. J’étais assis à ruminer ma colère contre
Nahia, lorsqu’il a débarqué en catastrophe avec cette
nouvelle. Il devait normalement veiller à ce que l’information ne fuite pas, nous avons par ailleurs fait signer des
clauses de confidentialité au personnel de l’hôpital où Yumna a été admise. Mais il me semble que quelqu’un n’a pas tenu parole. Là, il me regarde avec
un sourcil interrogateur en espérant que je dise quelque chose. Je me passe
nerveusement la main sur le visage et prends une grande inspiration pour calmer
ma colère naissante.
Jemal : il faut qu’on fasse une déclaration, je leur dis quoi ?
Moi : que tu considères ces allégations
comme une affaire privée.
Jemal : mais encore ?
Moi soupirant : renseigne-toi voir ce qui
se dit, comment les journalistes et l’opinion publique présentent l’affaire.
Jemal : déjà fait ! Le peuple a le regard
tourné vers toi, ils se demandent ce que tu comptes faire.
Je m’adosse à mon fauteuil les mains jointes derrière la nuque.
Moi : je n’en ai fichtrement aucune idée bro.
Jemal : une chose dont je suis sûre, c’est qu’en aucun cas tu les laisseras enfermer ta
sœur !
Je
lui lance un coup d'œil.
Jemal : quoi ? Ne me dis pas que tu comptes
le faire !!?
Moi : je n’ai pas dit ça (soupir) j’ai la tête pleine,
j’ai besoin de réfléchir au calme à cette situation. (soupir lasse) Depuis
hier j’ai l’impression que la terre s’est ouverte sous mes pieds, que je suis en train de couler.
Jemal : c’est exactement ce qui est en train de se passer, ton règne commence mal
?
Moi : à qui le dis-tu ?
Jemal : ça va aller, nous allons vite
trouver une solution pour rétablir ta réputation et celle de ta famille.
Moi sourire désabusé : si le shadow cabinet
(le collège des conseillers de mon père que je garde pour le moment) ne m’évince pas avant.
Jemal : ces vieux ronchons en sont capables
en plus ! Avez-vous pu convenir d’une date pour l’arbitrage royal ?
Moi : oui oui dans deux jours (me frottant
le bras) et je dois dire que j’appréhende beaucoup
ce qui va se passer à cette rencontre.
Jemal : il y a de quoi type (me fixant) tu
peux tout de même te consoler avec la nouvelle de la grossesse de madame.
Je hoche la tête sans aucun commentaire, ce
qui le fait plisser les yeux.
Jemal : qu’est-ce qu’il y a ? Tu n’es pas content de savoir que tu seras papa ?
Moi : si, c’est le seul point positif dans tout ce chaos.
Jemal sourire ravi : ça c’est sûr, tu as fait fort sur ce coup ! (sourire narquois) Il faut que tu
me montres ta technique pour viser si juste.
Moi secouant la tête amusé : lol tu es trop
con toi !
Il rit.
Jemal : ça ne pouvait pas mieux tomber, tu
te rends compte que nos enfants se succéderont à quelques mois d’intervalles comme nous ? Et à notre instar, le fils de Salim en tête de
liste et le tien en dernière position. Le futur trio ?
Moi répondant à son sourire : je crois que
oui !
Il y a un blanc pendant lequel je suis
plongé dans mes pensées.
Moi (reprenant la parole) : il faut que je
me penche sur le cas d’Elias, je dois le voir. Tu m'accompagnes ?
Jemal : avec les journalistes qui vous
traquent en ce moment ce n'est pas une bonne idée. Il a même fallu que je
vienne à la rescousse d’Ussama tout à l’heure (je lève le sourcil) vous devez tous faire profil bas jusqu’à ce qu’on trouve une issue.
Moi :tu as raison.
Je reprends ma posture lorsqu'il me vient
une idée.
Moi : nous pouvons toutefois nous y rendre
incognito.
Jemal arquant le sourcil : en faisant
?
Moi mystérieux : tu verras bien (me levant)
donne moi quelques minutes, je reviens.
Je fais quelques pas vers la porte lorsqu’il m’arrête.
Jemal : au fait si tout se passe bien
demain et ça va le faire inch’Allah, nous devons
enclencher les préparatifs pour la fête en l’honneur de ta succession (j’arque un sourcil en le fixant) tu sais bien, la fête du trône !
Moi pas intéressé : Jemal, je suis encore
en lune de miel
Jemal : peut-être, mais on doit l’inclure dans ton programme.
Moi (cherchant une échappatoire) : au vu de
ce qui se passe, je ne pense pas qu’une fête soit opportune.
Jemal : à contrario ça va leur permettre d’oublier un tant soit peu l’affaire Yumna.
Moi (soupire résigné) : c’est toi qui vois.
Jemal : cool !
Moi secouant la tête dépité : man change un
peu ! Il n’y a que toi pour penser à une fête dans
cette situation de crise.
Il se gratte la tête pendant que je referme
la porte.
Alors comme vous pouvez vous en douter,
Jemal est officiellement mon conseiller direct et officieusement le nouveau
directeur du cabinet d’architecture de mon père. En théorie, je n’ai pas encore nommé mes vizirs. J’avais prévu prendre tout mon temps pour le faire parce qu’il est plus qu’urgent de faire la mue de ces conseillers «
à la papa ». Je voudrais non seulement réduire considérablement leur nombre,
mais aussi les remplacer par des profils plus pointus et plus dynamiques. L’idée, c’est d’apporter un souffle de modernité et de légèreté pour briser les codes de
ce système ultra conservateur. Ça me tenait vraiment à cœur parce que je m’aperçois qu’Abu-Dhabi est tellement en avance sous
plusieurs aspects, mais sérieusement limité quant à la condition féminine et
certainement arriéré quand il s’agit de sexe. Voilà
pourquoi le scandale impliquant Yumna m’agace au plus haut point. Ça
entrave tous mes plans. Soit ils me contraignent de démissionner et la
réputation de ma famille est ternie à tout jamais, soit je garde mon titre et
mes réformes seront perçues comme du favoritisme vis-à-vis de ma famille.
Encore faut-il qu’ils l’acceptent! (soupir) Alors que Dieu seul sait combien j’ai envie de faire les choses bien.
Non pas que la situation qu’elle traverse ne me touche pas, mais je trouve qu’elle a été trop imprudente. C’est plus de la déception mêlée à la culpabilité que de la colère que je
ressens par rapport à cette histoire. Je sais que je ne suis pas le mieux placé
pour la fustiger étant donné que je n’ai pas eu un passé glorieux. Néanmoins, je ne peux pas compter le nombre
de fois où je me suis mis notre père à dos pour lui offrir un avenir qui lui
était inaccessible à Abu-Dhabi. Elle avait juste deux choses à faire en retour
1) Réussir ses études et 2) Conserver sa dignité et celle de la famille par ricochet.
Elle était libre de ses choix amoureux, tant que ça n’empiète pas sur ces deux facteurs et que cet homme la traite comme cela
se doit. (soupir dégouté) Là, elle m’a mis dans un sacré embarras vis-à-vis de papa. Il se voile la face
certes, mais on peut lire dans son regard qu’il partage les mêmes sentiments que moi en ce moment en plus de la
honte.
Je viens de rentrer dans notre chambre où
il y a Nahia profondément endormie sur le lit. Je passe ma route vers le
dressing en pensant tant mieux ! Votre copine il vaut mieux que je l’évite en ce moment sinon, c’est sur elle que je risque de mettre ma mauvaise humeur. Je ne sais pas
ce qu’elle complote encore avec son ex et ça ne m’intéresse pas de le savoir, j’ai ma dose de problèmes !
Seulement que l’entendre dire son prénom au téléphone m’a mis devant le fait que je ne réussirai jamais à la libérer de ce
fantôme du passé. J’ai beau l’aimé démesurément, faire l’impossible pour elle. Cela ne sera jamais assez pour combler le vide que
ce pingouin a laissé dans son cœur. C’est tout à fait évident parce que je ne peux pas comprendre qu’elle me promette à chaque fois de s’en débarrasser mais qu’on le traîne dans
nos pattes jusque là. (secouant la tête) Non ! C’est tout simplement inadmissible, et dire que ça me vexe est un
euphémisme.
Je prends deux coiffes bédouines (le
keffieh plus précisément) dans une penderie et ressort furtivement de l’appartement en prenant le soin de régler le thermostat à la température
qu’elle supporte. Je traverse le couloir pour retourner
dans mon bureau lorsque je tombe sur ma mère qui refermait la porte de l’appartement de Yumna.
Maman : je croyais que tu dormais.
Moi : non, je suis sur le point de sortir.
Maman : tu devrais essayer de dormir un
peu, la nuit a été longue.
Moi : ça ira maman (lorgnant la porte)
comment va-t-elle ?
Maman : elle n’a pas dit un mot depuis que vous êtes rentrés, elle a l’air effondrée (sur le ton de la confidence) mais pas autant que moi
Khalil. C’est une situation qui me bouleverse
profondément, ça m’a pris de court.
Moi : cela va de soi.
Elle met une minute de trop avant d’ajouter autre chose.
Maman : billahil azim de toute ma vie je n’ai jamais vécu de déception aussi grande que celle là.
Je relève brusquement la tête pour la
fixer, elle hoche la tête l’air torturé.
Moi (me voulant conciliant) : oumiii nous
avons fait des erreurs chacun à notre niveau à un moment donné de nos vies.
Maman (secouant la tête la voix tremblante)
: je le sais, c’est peut-être injuste et sexiste de
ressentir ça vis-à-vis d’elle… (elle s’interrompt et ferme les yeux pour retenir
ses larmes) Peut-être parce que je m’attendais à mieux de
sa part. Parce que j’estime lui avoir inculqué toutes les
valeurs qu’une mère puisse transmettre à sa fille dans
la mesure du possible…
Elle s’interrompt et fond en larmes. Je m’approche d’elle peiné et l’entoure de mes bras.
Moi : oumi ne te met pas dans un pareil
état.
Oumi : tu ne peux pas comprendre Khalil,
elle a jeté la honte et le déshonneur sur moi. C’est moi qui suis à blâmer, j’ai failli à mon rôle de mère.
Elle pose sa tête sur mon torse et pleure
de plus belle sous le regard intrigué du personnel.
Moi lui tapotant le dos : permets-tu qu’on aille dans un endroit plus privée ?
Elle acquiesce, je l’emmène dans leur chambre et la fait asseoir sur le lit. Je lui apporte
ensuite un verre d’eau qu’elle boit d’un trait. Je reprends la parole lorsqu’elle se calme un peu.
Moi : ça va aller ? (oui de la tête) Ok, je
vais trouver un plan digne susceptible de la tirer d'affaire.
Maman cinglante : La’a !! Il faut qu’elle assume les conséquences de ses actes.
Moi coupant court : on en reparlera lorsque
tu seras plus calme.
Mon père arrive un moment après et nous
regarde tour à tour avec les yeux plissés.
Papa : qu’est-ce qui se passe ici ? (Il avise les larmes de maman) Koulsoum
pourquoi tu pleures ?
En suivant son regard, j’intercepte l’heure sur la montre murale.
Moi au tac : papa, tu peux t’occuper d’elle s’il te plaît ? J’ai une urgence à régler.
Papa (me fixant perplexe) : hmmm oui vas-y.
Il s’abaisse devant elle et pose ses deux mains à plats sur ses genoux au
moment où je me lève pour sortir de la pièce. Je lance un dernier regard de
compassion à maman qui a recommencé à pleurer doucement avant de passer la porte.
Je retrouve un Jemal trépignant d’impatience. Nous avons prestement la coiffe pour cacher la moitié de nos
visages et attendons que Salim se gare sur le parking intérieur pour nous
engouffrer dans sa voiture à vitres teintées. Il nous dépose devant le
commissariat où Elias est provisoirement incarcéré. C’est une fois dans l’enceinte qu’on enlève nos déguisements. Je vais voir le commissaire qui me donne
sans plus attendre son aval pour entrer dans sa cellule.
(bruit des barreaux qui s’ouvrent)
Elias
relève la tête et nous regarde tout sourire.
Elias : salam aleyk !
Je le regarde étonné m'approchant de lui.
Moi (lorsque j’arrive à son niveau) : Aleyk salam
C’est Jemal qui demande la clé de ses menottes à un officier et vient lui
libérer les mains. Il les frotte ensuite lui-même.
Jemal : salam bad boy, je vois qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter. La prison te fait du bien.
Elias (souriant en répondant) : je m’adapte.
Nous : lol !
Jemal le chambre un peu puis nous laisse
discuter en tête à tête. Je m’assois au bout de
la table posée devant lui.
Moi : comment tu vas ?
Elias : je me maintiens, comment va Yumna ?
Moi : honnêtement ? (oui de la tête) Pas
terrible !
Il soupire profondément.
Elias : je nous ai mis dans un merdier (se
confiant) c’est moi qui aie tué ce bébé sans le faire
exprès.
Moi perplexe : comment ça ?
Elias : il y a quelques jours je lui ai
donné un coup de poing dans le ventre alors qu’on révisait quelques techniques d’auto-défenses. En fait…
Il me raconte en quelques lignes tout ce qu’ils ont fait pendant le séjour de Yumna à New York, leur intention en
venant ici puis l’incident dans les détails.
Elias : je conclus donc que c’est ce que coup qui lui a été fatal (il s’arrête et soupire) j’ignorais qu’elle était enceinte et elle aussi semble t-il (je hoche la tête pendant
qu’il me lance un regard désarçonné) je ne
sais pas si j’arriverai un jour à me pardonner d’avoir tué mon enfant et d’avoir fait du tort à Yumna indirectement.
Moi : c’était un malheureux concours de circonstances (maugréant) même s’il faut reconnaître que vous l’avez bien cherché !
Elias (me lançant un regard contrit) :
touché !
Moi : anyway, je te conseille de ne surtout
pas répéter tout ça devant les autorités. J’ai l’intention de lancer un trafic d’influence pour qu’on te relâche.
Elias : merci c’est gentil à toi, mais ça ne sera pas nécessaire. Je mérite d’être enfermé.
Moi : tout compte fait je le ferai si ça
peut soulager ma sœur.
Il acquiesce doucement.
Moi (scrutant les lieux) : est-ce qu’ils te traitent bien par ici ?
Elias : pas mal, enfin depuis que j’ai demandé le nécessaire pour prier ils sont moins stricts.
Moi : je vois, tu as besoin de quelque
chose ?
Elias : oui, je voudrais pouvoir contacter
ma mère pour la rassurer et si possible voir Yumna.
Moi : appeler ta mère, possible. Par contre
Yumna, ce sera un peu compliqué. En fait, elle est assignée à résidence.
Il me regarde un moment interdit pendant
que j’acquiesce, ses épaules s’affaissent puis ses traits se défont complètement.
Moi : c’était ça ou la prison.
Elias : est-ce qu’il y a un moyen pour moi de purger la peine à sa place ? Je veux dire
derrière les barreaux.
Moi : ça ne se passe pas ainsi dans nos
juridictions. (argumentant) Tu vois, toi dans le pire des cas soit ils t’expulsent soit ils t’interdisent du
territoire. Par contre elle sa tête doit tomber pour que ça serve de leçon aux
autres aspirantes, d’autant plus qu’elle vient d’une famille royale.
Il se passe la main sur le visage et
soupire bruyamment.
Elias : quelle histoire ! J’ai perdu sans aucun doute toutes mes chances de faire ma vie avec elle,
et c’est ce qui me tue le plus.
Moi (ne voulant pas étendre) : joker.
Enfin si ça ne tenait qu’à moi, on précipiterait leur mariage pour sauver l’honneur de la famille tout au moins. D’autant qu’ils aspiraient eux-mêmes à ce mariage. Mais
vous le savez comme moi qu’Al-Amine Ben Zayid
ne leur fera pas ce cadeau. Quoique je compte en parler avec lui, j’attends juste que la tension s’apaise un peu pour le confronter.
Elias : j’ai une petite doléance que j’ai oublié de te soumettre.
Moi : vas-y !
Elias : parmi mes affaires qu’ils ont saisies à notre arrivée, il y a un pendentif en diamant avec la
photo de Yumna que j’aimerais bien récupérer.
Moi : ok.
C’est après m’être assuré qu’on le lui rende et qu’il soit détenu dans
de bonnes conditions que nous retournons au palais en taxi cette fois. On se
faufile dans la masse des touristes jusqu’au point de départ afin que Jemal puisse récupérer sa voiture et c’est là qu’on se sépare. Je passe par les appartements
de mes parents et les trouve qui font la sieste. Je décide d’aller informer Yumna de ce qui se passe et la retrouve dans sa chambre
en compagnie d’Ussama. Elle est assise la tête baissée, les
mains croisés au niveau de ses jambes fléchies. Ussama quand à lui est allongé
dans le sens inverse les mains derrière la tête avec les yeux mi-clos.
Moi brute : Sama laisse nous seuls quelques
minutes.
Il se relève brusquement, Yumna tique et me
regarde craintive pendant que je m’approche d’elle.
Ussama inquiet : euh qu’est-ce qui se passe ?
Moi : rien qui ne te concerne !
Il descend du lit et se lève en me
regardant le sourcil arqué, regard que je soutiens simplement. Il soupire avant
de se décider à s’en aller pas sans avoir lancé un regard
désolé à Yumna qui m’évite maintenant du regard.
Moi d’un trait : je suis parti voir Elias, il va bien. Je verrai comment le
sortir d’affaire. En ce qui te concerne, il est
préférable que tu restes ici jusqu’à ce qu’on trouve une issue au problème. (lui
tournant le dos) C’est tout ce que tu dois savoir pour l’instant.
Elle reste sans parler, je me dirige vers
la porte et atteins le cadre lorsque je l’entends m’appeler. Je m’arrête sans me retourner.
Yumna : tu crois qu’ils vont te désavouer ? (commençant à pleurer) Est-ce que tu vas être
obligé de démissionner ?
Moi :…
Yumna : snifff je n’ai jamais voulu impliquer la famille dans ce genre de scandale.
Moi méprisant : ah ouais ?
Yumna : Khalil, je suis désolée (pleurant à
chaudes larmes) je suis vraiment désolée. Je t’ai déçu, et papa (snifff) et maman aussi. Je venais te rendre fière avec
mon diplôme (hoquetant) j’ai tout fait foirer…
Elle se met à pleurer des cordes en
hoquetant et en reniflant, ce qui finit par m’émouvoir. Je retourne la prendre dans mes bras et entreprends de la
bercer.
Moi : hallass, ça suffit. Tout va bien
aller.
Elle pleure un bon coup avant de se calmer,
je discute un moment avec elle pour la rassurer. Lorsque je sors de là, c’est pour aller plonger direct dans la piscine sur le toit de l'étage
supérieure histoire d’évacuer toutes ces tensions. Après
plusieurs allers retours, je regagne notre appartement quelque peu requinqué.
Je m’habille et vais effectuer mes prières, je
fais tout ça alors que Nahia dort toujours. Je m’enferme par la suite dans mon bureau pour cogiter.
En dépit de cette situation, ma mère donne
ce soir là un festin en notre honneur. Un dîner avec un show en sons et
lumières à la belle étoile en présence des Singh et des Rachid (la famille de
Salim). Ce sont eux qui favorisent l’échange et qui dérident l’atmosphère tout le long. Dès qu’ils prennent congé, Nahia m’informe qu’elle passe la soirée avec Cartia et Yumna a
qui elles font monter un plateau. J’en profite pour m’enfermer à nouveau dans mon bureau, mais cette fois pour boucler différents
dossiers. Je travaille sans cesse jusqu’au moment où elle toque et ouvre la porte en lançant un salam avec
enthousiasme et me demande si elle peut entrer. Je hoche simplement la tête.
Elle entre et se plante au beau milieu de la pièce.
Nahia : houbi je vais dormir, tu viens ?
Moi (sans un regard) : ne m’attends pas cette nuit, j’ai encore une tonne de travail à terminer.
Nahia : tu n’as pas dormi depuis hier et tu as passé la journée à travailler. À cette
allure, tu vas craquer.
Moi avec humeur : ça c’est mon problème pas le tien !
Nahia : heppepp ! Je me fais simplement du
souci pour toi pas besoin d’être désagréable
avec moi.
Moi : c’est ce que je disais, tu n’as pas à te soucier de mon sort. Tu as sûrement des choses plus
intéressantes à faire.
Nahia (fronçant les sourcils) : Ben Zayid
pourquoi j’ai l’impression que tu as une dent contre moi ?
Moi regard amer : je devrais ?
Nahia : en tout cas, c’est ce que ton air hostile, le ton condescendant de ta voix et les
éclairs dans tes yeux que tu me lances à chaque fois que tu me parles dénote.
Je lève la tête et la regarde simplement.
Nahia : je vois, tu sais où me trouver
lorsque tu voudras en parler.
Sur ce, elle quitte la pièce le dos droit,
menton relevé. Je me laisse aller contre le dossier de mon fauteuil en
soupirant de frustration.