Chapitre 1

Ecrit par Lilly Rose AGNOURET

DEUX ANS PLUS TARD.

 
   

Chapitre 1.

 

*** Idéale.

   

Cela fait pratiquement une demi-heure que je suis là, une tasse de thé en main, en train d’observer l’homme de ma vie à travers la baie vitrée du salon. Mark est là à la terrasse, au bord de la piscine, en pleine méditation avec Laïka. Ils sont dans la posture du lotus. Je peux sentir le calme qui se dégage d’eux à cet instant. Cela, jusqu’au moment où Laïka s’effondre en riant. Mark la regarde et la reprend. Elle retrouve son calme et la séance de méditation reprend. Ils sont tous les deux adeptes de cette pratique depuis deux ans. Mark a convaincu Laïka de se joindre à lui lors de ses séances de Yoga dans un club de la ville. Il a pensé que cela l’aiderait beaucoup, car il la trouvait de plus en plus nerveuse et renfermée. Il a supposé qu’elle avait été profondément choquée par sa rupture avec Pierre, ce jeune homme qu’elle m’avait emmené à la maison, un samedi matin. Mark a pensé que le Yoga et la méditation lui permettraient de se libérer de toute cette tension.

Laïka a accueilli la proposition avec beaucoup d’entrain. Elle apprécie les moments qu’elle passe seule avec Mark, car, me dit-elle, elle peut discuter avec lui. Je les regarde. Je sais d’avance que tout ce qu’elle lui confie, elle ne me le dira pas. Contrairement à Annélie et Irma qui me font partager leurs petits soucis du quotidien, Laïka est plus secrète et plus ouverte envers Mark. Cela ne me dérange pas. Au moins, il aura trouvé sa place de père dans la vie de mes enfants.

J’avale une tasse de thé tout en continuant de les observer. Nous sommes samedi. Il est 9h. Le ciel de Pointe Noire est calme et doux. La météo prévoit du soleil pendant toute la journée.

Nous sommes en mai. Cela fait deux ans que nous avons atterri à Pointe Noire. Mon chef, François, m’a mis dans ses bagages. Il a insisté pour que Marjorie Bouvier une collaboratrice, et moi-même, le suivons ici pour un projet majeur, mis en place par la compagnie. J’ai sauté sur l’occasion, car cela me permettait d’être enfin en permanence avec Mark qui est à la tête d’une compagnie pétrolière ici.

Nous avons pensé Mark et moi, laisser les filles en France sous la supervision d’une de mes amies. Nous comptions mettre Annélie, Laïka à l’internat. Elles seraient sorties le week-end pour aller chez mon amie Amélie Rodinger. Les deux filles ont décliné l’idée, préférant nous suivre à Pointe Noire.

Laïka a ainsi pu garder l’affection et l’attention de Mark qui veut s’assurer qu’elle sera au tableau d’honneur au baccalauréat, car, d’après lui, c’est une championne. Annélie a pu, en venant à Pointe Noire, garder intacte son amitié avec Bianca, la fille de François. Quant à mon petit Max, peu lui importe l’endroit où nous vivons dès lors qu’il peut jouer au football, comme cet après-midi où toute la famille doit aller suivre le match de demi-finale de son équipe du collège.

C’est ainsi que nous nous retrouvons ici avec Laïka, Annélie et Max. mes autres enfants viennent nous retrouver ici pendant les vacances de Noël et de Pâques et les grandes vacances.

 

Irma, ma fille aînée, est à la fac à Bordeaux. Elle étudie le droit et veut plus tard, se spécialiser dans le droit des affaires et finir juriste en entreprise. Elle est toujours en couple avec Pascal, son petit ami de toujours. Mark a insisté pour qu’elle ait son appartement à elle plutôt qu’en partager un avec Pascal. Va savoir les arrangements qu’ils ont trouvés pour se faciliter la vie. Irma est une grande fille. Elle fait toujours les choses impeccablement et plus que tout, elle est très focalisée sur la réussite de ses études. Et comme elle a toujours cet instinct de petite maman, comme je la taquine, elle prend des nouvelles tous les week-ends.

- Bonjour maman ! me fait Annélie en arrivant dans la cuisine.

- Bonjour Idéale. Comment vas-tu ? me fait Bianca en venant me poser un bisou sur les joues.

- Tout va bien pour moi, lui dis-je.

Toutes les deux regardent alors dans la même direction que moi. Annélie dit alors :

- Laïka est en train de parler. Si tu sors maintenant et lui demandes « de quoi parles-vous ? » elle répondra : de rien.

- Pourtant, elle parle ! fait Bianca en riant.

- Soit elle répond qu’elle ne parlait de rien, soit elle répond que ce n’est pas important, fais-je en terminant ma tasse de thé.

Nous restons longtemps en silence. Bientôt, la séance de méditation se termine. Laïka et Mark se lèvent, enroulent leur tapis et se racontent on ne sait quoi.

- C’est à ce moment-là que Laïka demande si Mark a assez d’énergie pour l’accompagner courir, dit Bianca.

- Et là, Mark dira que le jogging, c’est pour dimanche matin, avant d’aller à la messe, finit Annélie !

- Vous pourriez écrire un film là-dessus ! leur fais-je en riant. Alors, que comptez-vous faire aujourd’hui ?

- Nous allons à notre cours de danse. Ensuite, on rentre manger et cet après-midi, on sera avec vous pour le match de Max. il est capable de nous étrangler si nous ne venons pas le voir.

- C’est clair ! Vous avez intérêt à être là ! leur dis-je. Voulez-vous que je vous dépose à la danse ?

- Merci, maman, mais Marcel nous attend déjà.

Les deux filles m’embrassent et disparaissent retrouver le chauffeur qui doit les conduire à la danse. Je reviens m’asseoir dans le canapé et décide de me détendre en regardant un feuilleton télévisé. Je peux respirer vu que l’année scolaire tire à sa fin et que mes enfants ont eu de bons résultats. Les premières épreuves du bac scientifique de Laïka, c’est la semaine prochaine.  Annélie est assurée d’aller en terminale scientifique, et passe le bac de français en juin. Max a réussi ses deux premiers trimestres et sera en 5ème l’an prochain.

Quant aux jumeaux, Joël et Joseph, ils sont en 2nde à Raponda, à Port-Gentil et je sais qu’ils vont en classe supérieure. Ce sont les littéraires de la famille. L’un veut faire des études de commerce international. L’autre veut étudier les langues étrangères appliquées et devenir traducteur-interprète.

Van, quant à lui, vit toujours avec son père et s’apprête à passer les épreuves du Brevet au Collège français Victor Hugo, de Port-Gentil. Mon fils Van veut devenir Pilote. Quand il me parle de ce rêve, je lui réponds qu’il a la chance d’être l’unique fils de son père. Ce dernier peut l’encourager à rêver grand, tellement il en est fier.

 

- Bonjour chérie ! me fait Mark en me posant un baiser sur la joue.

- Bonjour, chéri ! dis-je en lui souriant. Marie-Paule Makanga a appelé il y a une heure. Elle veut que nous confirmions notre présence à son barbecue ce soir à 18h.

Il me répond :

- We went out every night this week. I want to spend the weekend in peace at home. (Nous sommes sortis tous les soirs cette semaine. Je veux passer le week-end au calme à la maison.)

- D’accord. Je l’appellerai pour lui dire que nous avons prévu autre chose.

Ses fonctions l’obligent à répondre à diverses invitations. Nous nageons dans les mondanités. J’aime l’idée de rencontrer de gens. J’aime l’idée que les enfants se fassent des amis. Mais j’avoue que cette semaine a été lourde en sourire, repas et rencontres diverses.

Je fais toujours de mon mieux, apprenant encore et encore, diverses méthodes de maîtrise de soi, pour dire non à l’alcool. Plus une goutte n’est entrée dans ma bouche. Même pas pour les célébrations de Noël et du Nouvel An. Si j’ai encore de nombreuses années à vivre, je veux les vivres sobre et lucide.

J’ai toujours des bonbons à la menthe sur moi quand je vais à tous ces dîners. Le fait d’en avoir dans la bouche me garde de toute tentation et me donne la force de décliner le moindre verre de vin, la moindre coupe de champagne. Pour ne pas attirer l’attention des gens, je prends très souvent une flûte e champagne que je garde en main toute la soirée, évitant ainsi que les propositions qui pourraient m’être faites.

Je me lève du canapé et suis mon époux dans la chambre. Il se dirige vers la salle de bain. Je le suis et vais lui faire couler un bain. Il est en train de se raser devant la glace, quand je lui dis :

- À quel moment allons-nous parler à Annélie.

Il me sourit et me répond que rien ne presse et qu’on l’emmènera dîner mardi, pour lui parler. De toute façon, cet homme ne sera à Pointe Noire que dans deux semaines.

- D’accord. Bon, je retourne au lit. Rien ne m’oblige à rester debout.

- D’accord. Je vais faire un tour au bureau et je serai de retour à midi.

Je l’embrasse sur le bout des lèvres. Il sourit et me dit :

- I love you !

   

*** Annélie

 

Il est midi quand Bianca et moi terminons nos deux heures de cours de danse. Nous avons choisi de continuer nos cours de hip hop commencé à Pau. Nous sommes chanceuses de pouvoir faire la même chose à pointe Noire.

Ici, nous avons des copines différentes. Il y a beaucoup de métis, surtout. Des mélanges improbables. Tout ça parce que l’industrie du pétrole permet aux gens de se déplacer, de vivre en expatriation, ci et là.

Quoiqu’il en soit, Bianca reste ma « best for ever ! ». S’il n’y avait pas cette histoire en son père et Laïka, je pourrais tranquillement dire que c’est ma sœur. Mais, bref ! Son père est toujours amoureux de Laïka. Ma sœur fait la belle une semaine. La semaine d’après, elle me montre les petits cadeaux que François lui offre. La semaine suivante, elle est folle amoureuse de lui. Et la semaine qui vient après, elle ne veut plus entendre parler de lui pour telle ou telle raison. J’avoue que je ne comprends pas bien ce qui se passe entre eux. Je sais simplement qu’ils continuent de faire l’amour à l’insu de tous, quand Bianca est avec moi, le week-end. Bref, les histoires de Laïka, je préfère ne pas m’en mêler. Elle est tellement forte qu’elle arrive à détourner l’attention de maman et mark en faisant croire qu’elle a un petit ami. Ce dernier n’est qu’un pion, que ma sœur paie chaque mois pour jouer au preux chevalier en l’invitant au cinéma le mercredi après-midi ou en l’accompagnant à la piscine le samedi après-midi.

Mark et maman n’y voient que dalle. En même temps, vu que les notes de ma grande sœur sont très bonnes et qu’elle a été au tableau d’honneur depuis notre arrivée à Pointe Noire, Mark est tout miel avec elle. Pour maman tant que personne ne ramène de grossesse précoce, tout va bien. La hantise de maman est que l’on ne puisse pas faire de brillantes études ou découvrir le monde, à cause d’une grossesse précoce.

- Bon, je suppose que Laïka est encore dans la chambre à coucher de mon père. Donc, je suis obligée de m’accrocher à toi pour ne pas les embarrasser en arrivant maintenant à la maison, me fait Bianca en me passant un bras autour du cou.

- Hum ! Je suppose que cette semaine, c’est la phase « grand amour », de Laïka. Bref, on rentre à la maison, ma belle ! Je me demande jusqu’à quand ton père va penser que tu n’es au courant de rien.

- Je suppose qu’il le pensera tant que je n’aurais pas crevé l’abcès. Je sais qu’ils ont arrêté leur relation pendant une année. Il déprimait et me parlait de finir sa vie vieux et seul.

- Hum ! Laïka dit que ton père est l’amour de sa vie.

Bianca s’arrête de marcher et me dit :

- Ils ont 22 ans de différence, ma louloute. Où crois-tu que cette histoire les mènera ?

- Je n’en ai aucune idée ! Vraiment aucune idée, lui fais-je.

- C’est bien ce que je pense. Ça va leur passer.

- Bianca, ça fait combien d’années qu’on dit que ça leur passera ? lui dis-je.

Elle sourit et me dit :

- Changeons de sujet. Nous avons le bac de français dans quelques semaines. Il vaudrait mieux rester concentrées.

Nous avançons tranquillement et allons retrouver la voiture avec chauffeur qui nous attend non loin de l’école de danse.

Il est midi et demi quand nous arrivons à la maison. Laïka n’est pas rentrée. Maman m’explique que ma sœur est allée faire un tour avec des amis de classe. Ils ont décidé d’un repas entre amis, dans un restaurant pour se motiver avant les épreuves du bac qui commence la semaine prochaine.

Hum ! Bianca et moi allons tranquillement nous laver les mains pour passer à table. Là, nous rigolons pendant que Max nous raconte comment la femme de ménage a eu peur d’une souris au point de se jeter dans la piscine :

- Ce n’était même pas une souris vivante ! Je voulais juste lui faire une farce avec un jouet en plastique, dit-il.

- C’est comme ta farce avec le serpent en plastique qui a poussé Bakary à faire pipi dans son pantalon, lui dit maman en se souvenant de cet épisode avec le gardien.

Mon petit frère éclate de rire et dit :

- Comment peut-on avoir peur d’une souris ?

- Heureusement que tu sais nager, mon toto ! je te signale qu’Hermine (la femme de ménage) se serait noyé. Elle ne sait pas nager.

- T’inquiète ! Je lui ai lancé une bouée et je l’ai sortie de l’eau, me fait-il.

- On arrête avec les blagues, monsieur l’humoriste ! lui fait maman.

Quand Marck arrive, n peut commencer à manger. Là, à tour de rôle, chacun expose ses petits soucis et ses réussites de la semaine. Mark écoute et analyse. Il a toujours de très bonnes solutions à nous proposer. J’avoue que j’aime le voir réfléchir et sortir les bonnes paroles que nous attendons tous. Ma copine Bianca le trouve trop cool ! Autant que je trouverais son père hyper cool s’il n’était pas dans cette aventure avec ma sœur.

Le repas terminé, nous débarrassons, pendant que Mark et maman vont s’installer dehors, pour prendre un thé. Une fois la table débarrassée et l’aspirateur passés, je laisse la femme de ménage faire la vaisselle. Bianca et moi allons dans ma chambre. Je suis heureuse d’en avoir une pour moi seule. Au moins, Laïka est obligée de cogner avant de venir me raconter ses conneries.

Je dois quand même avouer que le comportement de Laïka a changé en mieux. Même si elle continue à faire ses conneries avec le père de Bianca, elle est plus réservée quand elle vient se confier à moi. Elle évite de me raconter les détails de leurs ébats sexuels. Elle parle plus de leurs sentiments l’un envers l’autre. Je ne sais pas d’où vient le changement. Je sais simplement ma grande sœur Irma y est pour quelque chose. Laïka et elle se sont rapprochées. Elles se parlent plus souvent au téléphone. Laïka n’hésite pas à lui parler de François. Ma grande sœur, qui cherche toujours à comprendre tout le monde et à faire en sorte d’éviter les problèmes à ses frères, écoute et la conseille beaucoup.

Bref, Laïka a grandi, comme je le lui dis tout le temps. Par contre, il y a une chose qui n’a pas changé avec elle. Elle me fatigue toujours autant en déformant mon nom. Bref !

Nous faisons une sieste Bianca et moi. Nous devons quitter la maison à 15h, pour aller au stade assister au match de football de max. le match commence à 15h 30.

Les fille d'Idéale M...