Chapitre 1: Semblant de liberté
Ecrit par Alexa KEAS
Fabrice AGBOSSOU
A l’instar des deux centaines de personnes présentes dans cette salle, je me lève pour accueillir les mariés. D’une démarche rythmée sur la musique douce que diffusent les haut-parleurs placés aux quatre coins de l’église, le couple avance, le sourire aux lèvres. Leur bonheur se sent et se répand sur des kilomètres à la ronde. Les voir ainsi, donne envie d’être à leur place. Ça sent le véritable amour que nous n’avons pas tous la chance de connaitre.
Je n’aurais jamais pensé pouvoir assister à une telle scène un jour. Dieudonné qui se marie ! Il faut le vivre pour le croire. Dieudonné n’ayant plus ses parents, Armelle n’a pas voulu léser son fiancé en se faisant accompagner à l’autel par son père. Ils ont donc décidé de faire une entrée unique. Ils prennent tout leur temps pour longer l’allée de l’église, majestueusement décorée avec des fleurs et des rubans dorés. La musique cesse de retentir quand les élus du jour atteignent l’autel. Le prêtre fait un signe de mains à l’assemblée de s’asseoir. Sa voix plutôt grave, résonne à travers le micro, donnant le ton du début de la cérémonie. De ma place, à quelques mètres à peine des heureux du jour, j’admire avec frénésie, leurs échanges de regards complices et m’introduis un tant soit peu, dans la bulle d’amour dans laquelle ils sont enfermés. Une légère caresse, si je peux qualifier ce contact physique ainsi, sur mon bras, me ramène à la réalité. Je tourne mon regard et croise celui de celle que j’appelle ma femme. Ce n’est que sa main parfaitement manucurée qui vient de m’effleurer, et ce par mégarde, certainement.
Je me suis marié, non pas pour les mêmes raisons que Dieudonné. Vu de l’extérieur, ma femme et moi formons un couple digne de célèbres acteurs de Hollywood. D’ailleurs, tous les deux sommes de parfaits acteurs et nous aurions été retenu à un casting pour tournage d’un film qui s’intitulerait ‘’Hypocrisie’’.
La cérémonie suis paisiblement son cours jusqu’au moment fatidique d’échange de vœux. J’entends mon ami de toujours, prononcer des phrases, tel un fidèle disciple de Shakespeare. A une époque, j’en aurais rigolé mais tout mon être réagit autrement à l’ambiance de cet après-midi. J’ai ce sentiment de manque intense, qui me hante d’un coup. Si la mort devait me faucher à l’instant T, je pense que je m’en irais avec le sentiment de n’avoir pas vécu. Ma devise a toujours été l’argent et rien que ça, jusqu’à ce que la vie m’apprenne à mes dépens, que l’argent n’achète pas tout.
Je joins mes mains, en guise d’applaudissements pour accompagner le baiser langoureux qu’échangent les nouveaux mariés. En tant que témoins, ma femme et moi avançons à la demande du prêtre, pour procéder à la signature du registre de mariage. Elle et moi comme témoins, la belle blague !
Main dans la main, nous faisons ce que nous savons faire le mieux, c'est-à-dire, tromper les apparences par notre image de couple parfait.
A la sortie de l’église, chacun prend sa voiture pour se rendre au lieu de la réception. Ce n’est pas si étrange, toute la ville sait que la profession de madame oblige.
Mon compte est garni de centaines de millions, frôlant le milliard, ne me servant à grand-chose alors, j’ai tenu à offrir une somptueuse réception à Dieudonné et sa bien-aimée. C’est la salle climatisée de l’hôtel mercure Sarakawa de Lomé qui accueille les deux-cent invités que nous sommes. Le service est de taille, bien évidemment c’est la crème de la crème.
Ma femme et moi sommes installés à la table d’honneur. De là, j’ai une vue imprenable sur la salle. En baladant mon regard, je repère une jeune gazelle aux allures de sirène qui se déhanche, sûrement avec l’intention de faire des victimes. Tous les mâles bien portants ont leurs regards posés sur elle.
-Comment oses-tu ?rugit ma femme.
-Quoi donc ?
-Me manquer ainsi de respect devant tout le monde ?
-Même mes yeux ne m’appartiennent plus ?
-Tu as intérêt à les garder posés sur moi, jusqu’à ce que nous quittions cette salle !
Je veux donner une énième réplique mais la voix du chairman, annonçant l’entrée des mariés, m’en empêche. Nous les accueillons avec des ovations dignes de ce nom. Ils font le tour de la salle en danse avant de venir se poser à côté de nous, à la table d’honneur.
J’enchaine les coupes de champagne, sans me préoccuper du regard incendiaire de madame ma femme. Je touche à peine aux repas, qui sont pourtant si bons.
Les mariés ouvrent la piste sur un slow qui me fait presque pleurer. Quand il est demandé aux invités de rejoindre la piste de danse, je me lève de mon siège et traverse la salle, à la recherche de la gazelle qui captivait mon attention. Dès que je la retrouve, je l’invite à danser, ce qu’elle accepte avec grand plaisir. Ma main posée autour de sa taille, comme si elle m’appartenait, je la conduis sur la piste. De loin, je peux voir de la fumée sortir des oreilles de ma femme. Elle se retrouve seule à la table d’honneur et ça c’est l’humiliation de trop. Comme je m’en fiche !
J’oublie elle et le monde autour un instant, ferme les yeux et me plonge dans les bras de cette inconnue qui ne semble pas être si intriguée que ça. Tant mieux, me dis-je !
J’entends une voix exécrable prononcer mon prénom, m’obligeant ainsi à ouvrir les yeux.
-Excusez-moi ! dit l’inconnue en se dérobant à mes bras.
Comme je la comprends, elle ne peut que prendre ses jambes à son cou, face au regard menaçant de ma femme. Je plante cette dernière sur la piste et retourne m’asseoir à table. Je me saisis d’une des bouteilles de champagnes sur la table et la porte à ma bouche.
-Puis-je savoir ce qui t’arrive ? Je vois que tu es décidé à m’humilier ! Tu n’as pas intérêt à…
-Fiche-moi la paix !
-Pardon ?
-Tu m’as bien entendu, fiche-moi la paix.
-C’est le champagne qui te donne des ailes ou tu as oublié à qui tu avais affaire ?
-Que vas-tu me faire, me tuer ? Me faire fouetter par des esprits invisibles ? Ne te gène surtout pas, je suis déjà mort de toutes les façons.
Je me lance dans un fou-rire, pour mieux l’agacer. Son téléphone posé sur la table émet des vibrations. Elle s’en saisit et décroche aussitôt.
-J’arrive, l’entends-je dire avant de raccrocher.
Elle me lorgne, se saisit de sa pochette et s’éloigne en mode furie. Je lève la bouteille à son honneur et souris, quand je la vois bousculer un pauvre serveur, dont le plateau et le contenu se retrouvent au sol, dans un bruit que la musique n’arrive pas à totalement couvrir. Les regards se concentrent sur la scène, tout ce que madame n’aime pas. Elle aurait giflé le pauvre serveur, si nous étions dans un endroit moins peuplé. Le Dj balance un son plus dansant et tendance, c’est l’euphorie dans la salle. Je repose la bouteille et me lève pour aller danser.
Dieudonné vient vers moi et demande ce qui se passe.
-Pourquoi ta femme est partie ?
-Le boulot !
Je cherche la belle gazelle du regard et la repère à trois tables plus loin, souriant à belle dents, aux propos, sans doute flatteurs, d’un jeune homme…
-C’est qui cette fille ?
-Oublie, mon pote ! répond Dieudonné, avant de s’éloigner vers sa femme.
Je me mêle à la foule et essaie de m’amuser autant que possible. Deux heures plus tard, alors que la fête bat encore son plein, je sens mon téléphone vibrer. Je le sors de ma poche et vérifie le numéro appelant. Il m’est inconnu mais je décroche quand même, oubliant qu’il y a trop de bruit autour de moi. Bien sûr, je n’arrive à rien piger. Je m’éloigne en maintenant la communication, par une répétition ininterrompue d’ «allô». Je sors de la salle et perçois enfin la voix de l’appelant. Une voix tout aussi inconnue que le numéro. La personne cherche à confirmer mon identité.
-Oui, c’est bien moi, la rassuré-je.
-Service des sapeurs pompiers...
Mon cœur ratte un battement.
-Votre femme a été victime d’un accident mortel sur le boulevard circulaire…
-Quoi, comment ? Elle va bien ?
-Nous sommes sincèrement désolés monsieur. Veuillez vous présenter à la morgue du CHU de Lomé-Tokoin pour identifier le corps.
Je laisse tomber le téléphone et l’accompagne dans sa chute. Les agents de sécurité se précipitent vers moi, s’imaginant peut-être que je fais une crise.
-Monsieur, vous allez bien ?
Je retire mon nœud papillon et le balance au loin. J’ai bien envie de répondre aux questions qui me sont posées, mais je suis submergé d’émotions.
Après quelques secondes, j’arrive à les rassurer sur mon bien-être et me relève. Je vérifie que ma clé de voiture est bien dans ma poche et éloigne mes pas, en direction du parking. Je pense à Dieudonné qui s’inquiétera de ma soudaine disparition, mais ne veux en aucun cas, aller l’informer de ce qui se passe. Je n’ai pas le droit de troubler sa joie.
Je conduis lentement, me posant mille et une questions, jusqu’à la morgue du CHU. Je décline mon identité au gardien et l’informe de mon appel pour venir identifier le corps de ma femme, impliquée dans un accident de voiture.
-Ce fut un grave accident, ne peut s’empêcher de commenter, le gardien. Toutes mes condoléances monsieur. Une si belle femme !
La beauté du diable, pensé-je. Il appelle un agent et lui demande de me conduire à la chambre froide. Je suis l’agent, qui se déplace dans cet endroit, comme s’il s’agissait de sa propre maison. Il siffle même un air, qu’il semble énormément apprécier.
-C’est bien votre femme ? demande-t-il, en enlevant le drap blanc qui couvre le corps, que je découvre, bien amoché .
-Bon Dieu ! hurlé-je, en acquiesçant de la tête.
-Veuillez me suivre pour les formalités, s’il vous plait, déclare l’agent, sans se soucier de mon état d’âme.
Une fois à l’extérieur, j’appelle ma belle-famille et leur fais part de la triste nouvelle. Aucun d’eux ne se trouve à Lomé à cet instant. Je m’occupe de la paperasse et fais transférer le corps, à la morgue de la clinique de la défunte. C’est le chaos et la consternation totale sur les lieux. Sa mort est des plus inattendues et brusques. Une fois son corps sans vie placé dans un de ces casiers aussi froid que l’était son cœur, je rentre chez nous, enfin chez moi, puisqu’elle n’est plus et que la maison me revient de droit. C’est debout dans la cour, que j’appelle les employés de maison et les informe de la situation. Je leur donne un congé dans l’immédiat, pour besoin de rester seul un moment. Seul le gardien reste en poste, car il faut quand même quelqu’un pour ouvrir le portail aux éventuels visiteurs.
Je franchis à peine le seuil du salon, tout en blanc, contrastant avec l’âme noir de celle qui l’a fait décorer, quand mon téléphone se met de nouveau à sonner. En réalité, il n’a pas arrêté de sonner depuis la morgue. La nouvelle, s’est sans doute aussi vite propagée, qu’un feu de paille.
Je sors le téléphone de la poche, quand je vois le nom de Dieudonné. Je coupe l’appel et lui envoie un message rapide. Je le rassure que je vais bien, m’excuse pour mon départ précipité et lui promets que nous en parlerons demain.
S’il insiste, c’est qu’il aurait appris la nouvelle, dans le cas contraire, ça ne sert à rien de gâcher sa lune de miel. Tant mieux, il n’insiste plus.
Je me dépouille de mes chaussures, de ma veste et de ma chemise et mets en marche la climatisation. Je me dirige ensuite vers le bar et me sers une bonne rasade de whisky. Je lève le verre en la direction de l’immense portrait de ma défunte épouse, et le vide d’un trait.
Quelques instants plus tard, la porte s’ouvre et laisse passer une personne que j’aurais préféré ne pas voir ce soir. Juste un instant de répit, est-ce trop demandé ? Je dois avouer qu’elle s’est surpassée ce soir, dans la mise en valeur de son corps. Elle brille littéralement, dans sa longue robe de couleur blanche. A son cou et ses poignets, scintillent des bijoux en diamant. Elle s’arrête au pas de la porte et plante son regard dans le mien. Elle arbore un sourire machiavélique. Je lui fais un sourire en coin et lève mon verre en son honneur. Elle avance d’une démarche chaloupée. Les talons de ses chaussures se perdent dans l’immense moquette.
Je me saisis d’un autre verre et y verse un peu de liqueur, le temps qu’elle atteigne mon niveau. Je le lui tends.
-Ne penses-tu pas que le champagne serait mieux adapté à la circonstance ?
Elle vide quand même le verre.
-Tu as raison, je vais en chercher.
Elle sourit. Les rides de son visage, cachés sous une énorme couche de fond de teint, s’accentuent. Elle caresse mon torse, le temps d’une seconde, quand je passe à côté d’elle.
-J’ai hâte, dit-elle.
Je me contente de sourire et avance vers la cuisine. Pour me débarrasser de la diablesse qu’était ma femme, j’ai dû faire alliance avec une autre diablesse. Cette dernière n’a même pas daigné me laisser quelques heures de répit, avant de passer réclamer son dû. Cette alliance sera-t-elle de tout repos ? J’ai quand même plusieurs cartes à jouer. Cette fois, je serai le maitre du jeu.
J’ouvre le frigo et prends une bouteille de champagne. Il y en a toujours au frais, dans cette maison. Je rejoins Clémence qui s’est déjà dépouillé de sa robe. Elle me laisse le temps de déboucher le champagne et de remplir deux coupes, avant de me sauter dessus.
Je n’éprouve aucun désir pour cette femme, mais le simple fait de sentir mon membre se lever aux contacts de ses caresses maladroites, me remplit de joie. Ça faisait longtemps, dis-donc ! Nalida avait finit par faire de moi son esclave. Je n’appartenais qu’à elle et à personne d’autres. Elle a su me punir de la meilleure des façons. M’obliger à lui être fidèle. Les années passées, ont été terribles. Elle m’en a fait voir de toutes les couleurs. Même les membres de sa secte n’avaient plus le droit de goûter à mon corps. Ce côté-là au moins, n’était pas pour me déplaire. Ces séances de partouses qui m’envoyaient dans les vapes pour des temps indéterminés, m’irritaient au plus haut point. Je me rappelle du jour où j’ai eu une fracture du pénis. J’avais presque souhaité qu’il me soit arraché. Malheureusement pour moi, je fus guérit.
Quand l’occasion de m’allier à Clémence, une des membres de la secte de Nalida, s’est présentée, je l’ai saisi à deux mains. En effet, Clémence est tombée amoureuse de moi. Elle haïssait Nalida de me garder pour elle toute seule. Envoyer Nalida de l’autre côté, représentait la seule solution pour me libérer de son envoûtement. Autrement, j’étais condamné à ne visiter que sa chatte, tout le long de ma vie, en plus d’alimenter son énergie spirituelle. Ça n’a pas été facile mais nous y sommes arrivés. Son accident n’était pas fortuit. Mon comportement à la soirée était prémédité. Il fallait que je l’énerve et qu’elle éclate de colère devant tout le monde. L’appel qu’elle a reçu ne provenait pas de sa clinique. Clémence s’est occupée de l’attirer dans le piège.
Tenant sur ses genoux, Clémence s’attèlent à prodiguer une fellation phénoménale à mon membre, qui le lui rend bien. Qu’elle en profite car, ça ne va pas durer. Mon but n’est pas de changer de maitresse et rester esclave. J’aspire à la liberté. Moi Fabrice AGBOSSOU, j’ai un autre plan pour ma vie