Chapitre 10 : Le fantôme du passé
Ecrit par Auby88
"En amour, on court après une ombre ou un fantôme. Une ombre impossible à attraper ou un fantôme surgi du passé. L'ombre persiste à rester toujours inaccessible. Quant au fantôme, il vous a déjà appartenu.
Emmanuel Bodin, Tout reste à faire (2014)"
Cica est endormie. La chambre qu'elle occupe est éclairée par une veilleuse, qui repose sur un tabouret, tout près de son lit. Un crucifix en bois pend sur l'un des murs. Dans l'un des coins, se trouvent deux grands sacs en plastique, dont les fermetures zip sont entrouvertes. A l'intérieur, on distingue des vêtements.
Cica s'éveille en hurlant un prénom. La postulante religieuse, dont elle partage la chambre, se réveille, affolée par les cris. Elle voit Cica qui tremble et se lève précipitamment de son lit. Près d'elle, elle vient s'asseoir pour s'enquérir de ce qui la trouble tant. Cica demeure muette, paralysée par une peur que l'autre ne comprend pas. Elle tente à nouveau de la faire parler, sans succès. Alors, elle l'asperge d'eau bénite pour éloigner ce fantôme qui hante son sommeil. Cela remonte à bien longtemps qu'elle l'a vue ainsi, ses nuits s'étant apaisées après des séances d'exorcisme.
La postulante court cogner contre la porte de soeur Anne, qui savait comment agir dans ces circonstances. La religieuse ne dormait point, encore occupée à réciter le rosaire. Au début, elle continue sa prière sans se préoccuper de cette impertinente qui perturbe sa quiétude au beau milieu de la nuit, mais finit par se lever, vu la force des coups. Quand elle apprend ce qui se passe, elle se précipite auprès de Cica et la secoue vivement. Celle-ci reste prostrée, le regard vide.
Soeur Anne entame alors une litanie consacrée aux âmes des défunts, et la postulante en fait autant.
Cica se laisse retomber sur son lit. Elle brûle de fièvre. Soeur Anne lui met un linge humide sur le front et ordonne à la postulante de s'endormir. Au chevet de Cica, elle reste toute la nuit, égrenant son chapelet.
Au petit matin, quand elle ouvre les yeux, Cica voit soeur Anne endormie sur une chaise près de son lit. Elle se rappelle du cauchemar de la veille. Un frisson parcourt son corps. Elle réveille soeur Anne qui doit se rendre à la chapelle pour la prière matinale. La religieuse manifeste sa joie en la voyant de meilleure mine. Elle lui dépose une bise sur le front, lui recommande de faire sa prière et de les rejoindre à la messe dominicale. Plus tard, toutes deux discuteront de ce qui s'était passé la veille. Cica acquiesce de la tête et la nonne part rassurée.
La journée poursuit son cours comme tous les dimanches. Ce n'est qu'au crépuscule, quand soeur Anne parvient à se libérer quelque peu, qu'elles se revoient. À sa confidente, Cica révèle qu'elle a refait le même songe.
"Vers elle, s'avance une silhouette masculine qu'elle a du mal à reconnaître. Elle prend peur et marche à reculons. Malheureusement, elle bute contre une pierre et tombe par terre. La silhouette se fait plus proche. Terrorisée par la peur, elle reste immobile, s'attendant au pire. Finalement, elle le reconnaît. C'est Leo. Il lui sourit en l'appelant par son prénom et tend vers elle une main. Elle veut l'agripper, mais il disparaît."
Soeur Anne reste perplexe.
- C'est bien inquiétant, ma fille ! Mais nous ne devons pas tirer des conclusions hâtives, en nous fondant sur une seule nuit mouvementée. La prière et la patience resteront nos uniques alliées. A présent, joignons nos mains pour prier.
Cica acquiesce.