chapitre 11

Ecrit par leilaji

Chapitre 11

 

***Elle***

 

Je prends une petite pause avant de répondre tandis que le regard de Leila me scrute à l’affut du moindre indice.

 

-          Hum toi tu t’intéresses trop aux affaires de Denis hein. Dis-je pour faire diversion.

-          Tu ne peux pas comprendre. On s’est tellement détesté au départ que c’est très agréable de s’apprécier maintenant. Je le détestais et lui me prenait pour une croqueuse de diamant qui allait faire du mal à son ami. Mais maintenant, il a beaucoup de respect pour moi et il prend toujours ma défense face à Xander. Denis m’est très précieux alors si je peux à mon tour lui rendre ce qu’il me donne, je le ferai.

-          Heureusement que je sais que tu es folle de Xander. A t’entendre, on croirait presque que t’es amoureuse de lui.

-          Meuh non. Je parle de respect et d’amitié. J’aime mon mari, plus que tout. Il n’y a rien que je ne ferai pour lui. Mais je souhaiterai que Denis aussi trouve une femme qui l’aime et lui fera oublier sa première épouse, c’est tout. Parfois il a un regard étrange ou il redevient le mec vaniteux et détestable qu’il était et ça me fait mal au cœur parce que je sais qu’il est capable de bonté. Mais il faut savoir le prendre c’est tout. Le problème c’est que la plupart des femmes pensent seulement à son compte en banque et non à qui il est réellement. Et ça, ça ne fait que le conforter dans son idée des femmes. 

 

J’avoue qu’il est difficile de fréquenter Denis sans penser à son compte en banque. C’est comme sortir avec un homme canon sans penser à sa beauté. Ce n’est tout simplement pas possible. L’homme finit par devenir son apparence première. J’ai aimé être avec Denis. Avec lui, on peut se retrouver à New York ou Singapour en deux temps trois mouvements. Avec lui, les cadeaux pleuvent. Il aime offrir des choses luxueuses. Quelle femme détesterait recevoir un collier de perles ? 

Je ne sais pas si c’est en rapport avec le milieu duquel je viens mais j’aime qu’un homme puisse prendre soin de la femme qu’il aime. C’est dans l’ordre des choses et ça n’a rien de commun avec du matérialisme. C’est juste que je trouve que le monde tourne plus rond ainsi. 

Quand je pense que c’est moi qui suis sorti avec lui et c’est elle qui le connaît si bien. S’il n’y avait pas eu Xander…

C’est bon, je pense que la catastrophe est loin maintenant. Elle a oublié que j’ai parlé de secret. 

 

-          Denis trouvera chaussure à son pied quand il sera prêt. Pas avant.

-          J’ai hâte de découvrir celle qui va faire battre son cœur dur là. Dit-elle en rigolant. Et toi ? Es-tu prête à trouver chaussure à ton pied ?

 

Je soupire…

Je n’en sais absolument rien.

Quand est-ce que les rôles se sont inversés entre nous. Moi qui écoute les conseils et Leila qui en donne ! Ce n’est pas courant.

 

-          Quand as-tu su que tu devais te battre pour Xander ?

-          C’est étrange mais c’est le jour où il m’a le plus détestée… répond-elle après un moment de réflexion.

-          Comment ça ?

-          Tu ne te rappelles pas ? Quand je lui ai menti sur la grossesse parce que je pensais éviter ainsi qu’il ne s’oblige à rester avec moi. Ce jour là, il était complètement ivre, il m’a agrippée les cheveux comme un malade et je te jure que je pensais qu’il allait me cogner quand vous êtes partis. Mais il n’a rien fait. Il s’est endormi ainsi, la main dans mes cheveux. Il ne m’a pas lâchée de la nuit alors que je venais de lui briser le cœur. C’est ce jour là que j’ai su. Que j’avais beau lui faire du mal, il ne pouvait pas s’empêcher de m’aimer. Je me suis dit ce jour là que ça valait la peine de jouer le tout pour le tout pour cet homme.

 

Jouer le tout pour le tout.

Peut-être.

Le mérite-il ?

Est-ce que nos histoires sont comparables ? Evidemment que non. Leila et Xander ce sont lancés dans leur histoire le cœur vierge. Ils avaient peut-être des problèmes personnels, familiaux à résoudre mais rien qui concernait l’amour. C’était nouveau pour eux et peut-être plus aisé de se lancer les yeux fermés.

Ce n’est pas mon cas, et je crois fermement que ce n’est pas non plus celui d’Adrien. On a tous les deux déjà connu l’échec et la douleur …

 

Ce n’est pas facile de se lancer avec ce poids sur le cœur.

 

***

 

Nous nous séparons un peu plus tard et je me rends tout d’abords au guichet automatique de BGFI (banque) pour tirer un peu de sous sur le compte. Puis, je vais directement à petit Dubaï (zone commerciale où les magasins vendent de tout) tandis que Leila retourne à son cabinet. Ces deniers temps, je n’ai pas beaucoup eu l’occasion de rendre visite à ma mère. Je suis en permanence débordée par la fondation et tout ce qui tourne autour. Une de mes petites cousines qu’elle élève m’a fait un message alarmant sur son état de santé qui ne lui permettait même plus de laver son linge.

 

Ma mère a travaillé toute sa vie. Elle nous a élevé mon frère et moi avec très peu de moyen. Une secrétaire, ça ne gagne pas gros. Puis, elle a marié sa fille pensant qu’elle pourrait enfin souffler un peu. Beaucoup de belles-mères voient leur vie changer grâce à des beaux-fils … généreux. Elle n’a pas eu cette chance. Pas de courses de Gaspard pour remplir son congélateur, pas de maison construite et offerte clef en main, rien. Je ne lui ai donnée que du souci car très peu de temps après mon mariage, elle s’est rendue compte que je n’étais pas sortie d’affaires malgré mon somptueux mariage.

 

Je me suis promis à moi-même que dès que je finirai avec ma maison ou si j’en avais l’occasion, je ferai la même chose pour ma mère. Elle est trop orgueilleuse pour venir habiter avec nous, c’est une femme indépendante avec beaucoup de caractère et je respecte son choix. Elle dit toujours qu’une mère à la maison m’empêcherait d’avoir la chance de mener une autre relation confortablement si elle se présentait. Je n’en sais trop rien moi. Qu’elle fasse comme elle veut. Le plus important c’est qu’elle quitte cette terre un jour en étant fière de ce qu’aura accompli sa fille.

 

J’ai tourné un peu dans les différents magasins pour trouver une machine à laver de marque Samsung qui entre pile poil dans la fourchette de prix que je me suis donnée.

 

Direction, chez maman… son sourire me fera oublier les turpitudes de ma relation avec Adrien.  Lorsque j’arrive dans la maison où j’ai grandi, je ne trouve que ma petite cousine car maman est à l’église. Les fils du voisin m’aident à transporter et poser la machine à laver dans un coin de la cuisine. Il n’y a pas de place ailleurs. J’en profite pour bavarder un peu avec Sharone qui me parle de ses résultats scolaires et qui se bat comme elle peut pour ne pas être une charge pour maman. Je lui souris et lui remets ce qu’il me reste dans le porte-monnaie pour qu’elle s’achète ce qui lui plaira. Elle est très contente et propose d’aller m’acheter quelque chose à manger. Je préfère qu’elle ne se dérange pas et lui dis de me servir ce qu’il y a à la maison. Elle détourne les yeux, genée et m’explique que la gazinière (qui doit je crois avoir à peu près le même âge que moi) est en train de rendre l’âme et est devenue très compliqué à allumer. Il n’y a plus qu’un seul feu qui donne de petites flammèches.

 

Seigneur !

 

Pourquoi ne me l’a-t-elle pas dit ? Combien peut-il bien me rester sur le compte ?

 

-          Bon, dis à maman qu’elle aura une nouvelle gazinière sous peu d’accord ?

-          Oh la grande, si elle sait que je t’en ai parlé, elle va se fâcher. Déjà que je ne sais pas comment je vais expliquer pour la machine à laver. 

 

Je rigole. Ma mère c’est une vraie peau de vache quand elle veut alors je comprends que Sharone ne soit pas très emballée d’avoir à lui avouer ça.

 

-          Si elle commence à trop bavarder à ton gout, appelle moi ok ?

-          Ok.

 

Je pars quelques instants plus tard.

 

*** Adrien***

 

Je transpire dans la salle de sport comme un malade. Mon attitude attire le regard des curieux mais je n’y prête guère attention. Tout ce que je veux c’est … oublier.

 

Mais j’ai beau pousser des poids pour fatiguer mon corps, Elle m’habite encore.

 

Je lui ai dit de sortir de chez moi comme si elle ne valait rien à mes yeux. J’étais tellement en colère ce soir là. J’ai merdé et je crois qu’elle est blessée. A sa place, je le serai aussi. Le lendemain matin, j’ai voulu aller lui parler, même si je ne savais pas quoi lui dire. Au moins m’excuser pour mon comportement de la veille. Mais les choses ne se sont pas vraiment bien passées. 

Léonie est venue me chercher et nous sommes allés prendre notre petit déjeuner avec Archange dans une pâtisserie du centre ville, avant de nous séparer de lui. Elle m’a proposé de m’accompagner à la Fondation où j’avais des consultations à faire et comme je n’avais pas la tête à conduire : j’ai accepté. Arrivé devant le portail de la fondation, elle est descendue de la voiture en même temps que moi et est venue me retrouver côté passager pour qu’on bavarde un peu. 

 

-          Tu es bizarre ce matin. Ca a un rapport avec ta copine ?

-          Je n’ai pas très envie d’en parler Léo.

-          T’en fais pas, je te comprends. Mais quand j’avais des problèmes avec mon ex, t’étais là pour moi alors j’aimerai pouvoir t’aider aussi.

-          Je n’ai pas besoin d’aide. Je peux gérer.

-          T’es sûr ?

-          Ouep. J’ai répondu en fourrant mes mains dans mes poches.

-          T’es pas seule tu sais…

 

Elle s’est rapprochée de moi et m’a prise dans ses bras. Ca m’a fait du bien même si ce n’était pas ses bras que j’avais envie de sentir autour de moi. Ca m’a fait du bien …. Jusqu’à ce que je tombe sur le regard glacial d’Elle venue surveiller l’entrée de ses élèves. Léonie m’a senti me crisper et elle a desserré son étreinte.  Je ne sais pas pourquoi, je me suis senti légèrement mal à l’aise après ça. Je sais qu’Elle a un problème de confiance et ça, elle le doit surement à son imbécile d’ex. Elle est toujours méfiante quand il y a une femme pas très loin de moi. Je pressens que le courant ne passe pas vraiment avec Léonie qui pourtant n’est qu’une très bonne amie.

 

-          Je suis là si tu as besoin. Tu m’appelles et c’est tout. Ok.

-          Ouep.

 

Elle est remontée dans sa voiture sans un regard pour Elle, puis s’en est allée. Je me suis avancée vers Elle mais je n’ai même pas eu le temps d’ouvrir la bouche qu’elle a tourné ses vertigineux talons et a marché vers le bâtiment qui abrite son bureau.

 

Et elle portait, si mes souvenirs sont bons, le complet marron clair que j’ai surnommé le complet du supplice… Une robe qui moulait outrageusement ses formes généreuses. 

La journée a été très galère, et maintenant, je décharge ma frustration sur le punching ball. Je donne un dernier coup avec force …

 

-          Hé man ! Si tu rates le punching ball, tu vas me briser la côte !!! Tu n’es pas traumatologue que je sache alors fais gaffe. 

- Tais-toi Arc. 

- C’est Elle ? 


Mais pourquoi tout le monde me pose cette question ? 


- Pourquoi t’as couché avec Elle si tu savais que tu n’allais pas pouvoir gérer la suite ? Je ne te comprends pas Adrien. 


Je me suis reconcentré sur le sac de frappe pour ne pas avoir à continuer la conversation entamée par Archange. 


- Adrien ? En plus maintenant que vous êtes liés par une relation professionnelle, tu te décides à la plaquer !! Je croyais que tu savais ce que tu faisais ?


Je continue à frapper dans le sac sans prêter attention aux mots qui sortent de sa bouche. Mais je ne me rends même pas compte que je frappe de plus en plus fort. 


- Adrien c’est toi-même qui le dis, tu ne veux plus de famille, pas de femme, pas d’enfant… Que crois-tu qu’une femme comme Elle désire pour elle et ses enfants? Pas un mec de passage sois en sûr. Et pour le moment c’est tout ce que tu as à lui offrir. Laisse la tranquille Adrien. 


Laisse la tranquille Adrien ! Cette phrase tournoie dans ma tête et réussit à faire sortir de moi ce que je tente de me camoufler. Je donne un dernier grand coup qui propulse Archange loin derrière. Toute la salle s’est mise à nous regarder. 


- Et si je n’y arrive pas ! Merde tu y as pensé à ça ? Elle me rend dingue cette femme. Tu l’as déjà tenu dans tes bras ? Non, alors tu ne peux pas comprendre ce que je ressens. T’as vu ce qu’elle me fait faire. Je suis là à me ridiculiser dans une salle de sport en te parlant de … Merde Arc. Si je n’y arrive pas, je fais quoi ? J’attends stupidement qu’un autre me la prenne alors que je rêve d’elle depuis des années. 


Archange se relève tandis que je défais les bandes qui m’entourent les mains. 


- Alors parle lui et demande lui de te laisser du temps. Parce que moi, je ne vais pas pouvoir te supporter encore très longtemps dans cet état. Tu me casses les couilles !


Il sort de la salle en claudiquant légèrement. 

Merde !


***Elle***


Oxya et Annie, accompagnées de la nounou, sont au salon de coiffure pour se faire belles et les garçons quant à eux finissent leur devoir avant que je n’y jette un coup d’œil. La maison est calme et je bois tranquillement un verre de vin assise à ma terrasse à peaufiner mon projet de collaboration avec une institution professionnelle canadienne, lorsque mon téléphone vibre bruyamment sur la table en plastique. 


Le nom d’Adrien s’affiche sur l’écran et je tente désespérément de ne pas répondre avant de céder face à son insistance. 


Sa voix me manque. J’ai besoin de l’entendre. 


- Salut Elle, merci d’avoir décroché. 

- Pas de souci. En quoi puis-je t’aider ? je lui demande en espérant avoir l’air complètement détachée. 

- Ecoute je voulais m’excuser pour … mon … Je suis désolé Elle, je n’aurai jamais dû te parler comme je l’ai fait. 

- Pas de problème. 

- …

- Si c’est tout je vais raccrocher. 

- Attends pourquoi tu es aussi froide avec moi ? 

- Oh ! Je suppose que c’est la partie du film où la fille est tellement contente que le mec l’appelle qu’elle tire un trait sur ce qui s’est passé ? je n’apprécie pas particulièrement d’être larguée dans une maison comme tu l’as fait ce soir là. Malheureusement pour toi Adrien, on n’est pas dans un film alors si tu n’as plus rien à ajouter, je vais raccrocher. 

- … Ca sera toujours à moi de te courir après c’est ça ? 

- Quoi ? 

- Je constate juste que jamais tu ne te battras pour m’avoir. Je serai toujours celui qui te courra après…


Ce n’est pas la première fois qu’il me dit cela. 


- Adrien. Je …

- Ce n’est pas grave Elle. Tu n’as pas à te justifier. 

- Je le sais mais je veux que tu comprennes que tu arrives trop tard. Je suis déjà tellement … abimée. 

- Qui t’as dit que tu étais abimée boo. Jamais. A mes yeux tu ne le seras jamais. 


Je ne sais plus quoi répondre. Voilà qu’il redevient l’Adrien que je connais et avec lequel je veux être. Comme il fait un peu froid, je ferme mon pull et me frotte le bras pour me réchauffer un peu. 


- T’as froid ? devine-t-il. 

- Oui un peu. 

- Tu veux que je vienne ? 

- … Non. Mes gosses sont là. 

- Ma proposition n’avait rien de sexuel tu sais. On aurait pu passer la soirée ensemble. Je me débrouille plutôt bien avec les gamins. Mais je suppose que de toute manière, tu n’as pas non plus envie de me présenter à ta famille. 

- Je n’ai jamais dit ça Adrien, ce n’est pas ça…

- Les gens que je fréquente, je te les ai présentés, Archange et Léo. Le reste ne compte pas. Toi t’es une femme fang, et je sais que pour vous les fangs c’est la famille avant tout. Mais je ne connais personne de chez toi. 

- Leila est comme une sœur pour moi. Tu la connais. 

- Seulement parce qu’elle m’a défendu pas parce que tu voulais me la présenter. 


Un long silence s’est installé. Comment fait-il pour avoir autant raison et me faire sentir comme la dernière des misérables ? 


- Je ne suis pas ton type d’homme n’est-ce pas Elle ? 

- Adrien…

- J’ai rencontré Gaspard. Coupe –t-il. Plus vantard que lui, tu meurs. Avec lui au moins on sait direct à qui on a affaire. Je suppose que c’est un cadre dans une grande entreprise ou quelque chose dans le genre. 

- Oui, cadre dans une banque. 

- Wo ! banquier ! Dur de lutter… 


On rigole tous les deux parce qu’on sait très bien que rien n’est plus vrai. Gaspard aime afficher sa réussite. C’est un homme très sûr de lui et c’est ce qui m’a d’abord séduit chez lui … avant de finir par m’exaspérer. 


- Je ne serai jamais Gaspard. 

- Je ne t’ai jamais demandé de l’être. 

- Je sais, mais je préfère te le dire maintenant. Je me fous du regard que les gens portent sur moi. Je ne m’obligerai jamais à être ce que je ne suis pas. 


Qu’est ce que cette conversation augure pour nous ? Qu’on efface ce qui s’est passé pour avancer encore un peu … ensemble ? Je ne sais pas. 


- J’aime … ce que tu es Adrien. 

- …


Il ne dit plus rien. Je l’entends respirer au phone très doucement. 


- Je te veux Elle.  


Cette fois-ci c’est moi qui ne sais plus quoi dire. Le téléphone bipe.  J’ai un double appel. C’est ma mère. Je suppose qu’elle veut me remercier pour la machine à lever. 


- Je te rappelle Ad. J’ai un double appel. 

- J’attends que tu me rappelles. 

- Promis je te rappelle. C’est ma mère au phone. Je te rappelle. 

- Ok. 


Dès qu’il raccroche, je décroche l’appel de maman. 


- (en fang) C’est ton frère ohhh maman. On l’a retrouvé inerte chez lui à Owendo. Oh seigneur Etienne oh. Je ne comprends pas ton frère…

- Maman ! Arrête, je ne comprends pas ce que tu dis. Etienne ? Que se passe-t-il ? 

- La ménagère a expliqué qu’il a voulu faire soigner sa dépendance à l’indigénat (de manière traditionnelle). Elle, on ne sait pas ce qui s’est passé, il ne se réveille pas. On l’emmène à l’hôpital général.  Rejoins-moi là-bas ma fille. 


Je raccroche. Puis j’explique la situation aux garçons avant de sortir de la maison démarrer la voiture. J’appelle la nounou pour savoir où elle est et si elle peut déjà rentrer avec les filles. Elle me rassure, elles ne sont plus très loin. 


A la seule idée de perdre mon frère, à la seule idée qu’il peut laisser Annie orpheline, je panique complètement. Ma main tremble et je n’arrive pas à démarrer la voiture car la clef tombe à chaque tentative à mes pieds avant même que je ne puisse l’introduire dans la serrure. Le gardien n’étant pas encore là, je redescends de la voiture pour ouvrir mon portail avant de retourner me remettre au volant. J’arrive enfin à démarrer la voiture mais elle fait juste quelques mètres avant que les voisins ne me signalent que la roue arrière est complètement crevée. 


D’exaspération, je tape sur le volant tandis que de grosses larmes roulent sur mes joues. 

Je ne veux pas perdre mon petit frère. C’est le seul que j’ai. Et ma pauvre petite Annie qui n’a plus que lui. Non. Le seigneur ne peut pas être aussi cruel…  c’est le seul frère qu’il m’a donné, il ne peut pas déjà me l’enlever. Et tout ça est peut-être de ma faute. Je lui ai enlevé sa fille alors qu’il ne le voulait pas en pensant bien faire. Je voulais juste lui donner le temps de se reprendre et voilà ce qui arrive. Maman ne va jamais me pardonner, c’est son unique fils. 


Mon téléphone vibre sur mes cuisses. Je décroche. 


- Tu devais me rappeler…


Pour toute réponse, je laisse échapper un gémissement de douleur. 


- Elle ? 

- ….

- J’arrive tout de suite. Où es-tu ?


*

*

*





Je t'ai dans la peau