CHAPITRE 13

Ecrit par Flore LETISSIA


~l'eau qui est déjà versé, on ne peut plus ramassé~


Quand Ibra rentra de mission, il découvrit une Dorlande épanouie sur laquelle son absence de deux semaines semblait n'avoir pas eu le moindre effet. Elle ne manifesta d'ailleurs pas de véritable intérêt à son égard. Elle ne l'entraîna pas dans leur chambre pour des retrouvailles intimes comme elle en avait l'habitude après ses longues absences antérieures.

Il lui en fit immediatement la remarque. Elle lui rétorqua qu'elle avait désormais un emploi qui l'absorbait et qu'elle n'avait pas la tête à autre chose. Une telle affirmation surprit Ibra, il lui dit pourtant que lui avait besoin d'elle parce qu'elle lui avait manqué. Ce fut lui qui l'entraîna dans la chambre. Elle se livra sans ardeur, ni enthousiasme, en proie à une subite appréhension. « Et s'il remarque un changement et vient à se douter de quelque chose ? », ne peut-elle s'empêcher de se demander, le coeur battant la chamade. 

Fort heureusement, Ibra ne s'aperçut de rien et tout se passa fort bien. Il sembla d'ailleurs prendre plus de plaisir qu'à l'accoutumée, à leur accouplement. Ce constat fut un immense soulagement pour Dorlande et dissipa définitivement ses craintes. Elle pouvait continuer de le tromper et dormir sur ses deux oreilles, il ne saurait rien, pas sur le plan anatomie en tout cas. Son inquiétude n'aurait eu de sens que si son amant avait été doté du point de vue de son anatomie intime. Ibra, avec sa trique n'avait de toute façon pas à craindre que sa « sa féminité » soit détendue par les effets du passage d'un autre mâle.

Cette pensée amusa tellement Dorlande qu'elle pouffa et dut faire des efforts pour ne pas éclater carrément de rire. Son fiancé qui percevait ses spasmes musculaires se méprit et redoubla d'ardeur.

L'infidélité de Dorlande ayant créé des dérèglements en elle, la rendait tellement cynique qu'elle avait du mal à se reconnaître. Elle avait d'ailleurs la désagréable impression que certaines de ses pensées, ses faits et gestes ne lui appartenaient plus ; comme si quelqu'un d'autre agissait à travers elle.

Le lendemain, Dorlande se réveilla presque au même moment que Ibra. Elle se doucha, s'habilla et descendit dans sa foulée. Elle travaillait au Deux-Plateaux et voulait profiter de son véhicule.

- peux tu me déposer ? Tu n'auras à faire aucun détour, c'est sur ton chemin, lui demanda t'elle en montant a ses côtés.

- c'est donc sérieux ton histoire de travail la ? Fit Ibra d'un air ironique.

- c'est peut être la chose la plus sérieuse qui arrive dans ma vie ! Répondit elle sur le même ton.

- a ce point ? Mais tant mieux si cela t'amuse. Quoique tu n'avais vraiment pas besoin de travailler ! Au moins tu n'as plus la moindre excuse pour ne pas me faire d'enfant désormais !

- qui vira verra !

- ne serait ce pas plutôt « à bon entendeur salut » ? Au fait c'est dans quel secteur d'activité ? Reprit il.

- la communication.

- pas grand chose à avoir avec ta formation, apparemment.

- quand on a mon niveau d'instruction, on peut aisément s'adapter à toutes sortes de situations professionnelles.

- c'est bien rémunéré, j'espère ?

- je commence avec 150.000 FCFA

- 150.000 FCFA ??? S'etrangla Ibra. Tu aurais pu t'épargner cette fatigue quotidienne et me les demander bébé ?

- je ne suis pas en manque d'argent, Ibra ! Ma quête était d'abord et avant tout professionnelle, pas pécuniaire !

- n'empêche !

- et puis quoi encore !? Je ne veux plus en parler, Ibra ! Accepte le ainsi, c'est moi qui suis la principale concernée, après tout !

- ok, comme tu voudras ! Mais au fait, comment tu l'as eu, ton fameux job ?

- en répondant à une petite annonce parue dans la presse, mentit Dorlande.

Ils partirent. Quand ils arrivèrent, Ibra la descendit devant la société.

- bonne journée, chérie, lui dit-il en l'embrassant

- à ce soir, répondit Dorlande avant de descendre.

Elle fit une vingtaine de pas et franchit le portail. Puis elle poussa l apporte vitrée de Mo & Noke Communication et se retrouva d'un pas allègre dans le hall coquet.

 Comme d'habitude, elle fut accueillie chaleureusement par les cinq autres employés qui avec elle, constituait le personnel. C'était tous des hommes. Parmi eux, seul le comptable et l'infographiste avaient des fiches de poste clairement définies. Les trois autres et elle touchaient à tout, dans une ambiance bon enfant.

Cependant, Dorlande avait surpris plus d'une fois chez ses collègues, des regards qui lui parurent étranges, qui semblaient véhiculer des sentiments confus. Elle avait l'impression d'y déceler de l'ironie, de la peine et de la compassion. Comme s'ils savaient que quelque chose de dramatique et d'inéluctable, à la fois, lui arriverait tôt ou tard.

Ce constat suscita en elle de nombreuses interrogations et l'inquiéta un moment, puis elle finit par se dire qu'elle déchiffrait mal ces regards et que c'est qu'elle croyait y lire était le fruit de son imagination.


~souvent face à nos démons nous cherchons a déversé notre mal être sur d'autre personne pour avoir la conscience tranquille ~


Dorlande poursuivait sa relation avec Mohamed parallèlement à sa vie de couple. Son amant croyant désormais avoir acquis des droits sur elle, était devenus de plus en plus exigeant. Il l'appelait et demandait à la voir comme bon lui semblait. Et lorsqu'elle lui répondait qu'elle n'était pas libre de tout ces faits et gestes, parce qu'elle vivait sous le toit d'un homme, il lui retorquait qu'il la savait capable de trouver les voies et moyens pour se soustraire à la surveillance de son Cerbère.

Elle entra dans son jeu et s'arrangeait toujours pour être à son rendez-vous, à l'endroit de son choix, un lieu toujours différent du précédent. Dorlande sortait parfois sans fournir d'explication satisfaisante à Ibra. Et quand il arrivait à ce dernier de la questionner sur sa destination ou son emploi du temps, elle avait en permanence des réponses toutes faites. Parfois, d'unbton sarcastique, elle prenait plaisir à lui réciter les explications que lui-même lui donnait du temps où elle l'interrogeait constamment sur ses fréquentes sorties. En réalité, Dorlande était plus perturbée qu'elle ne voulait le laisser croire. Le temps de lui avait pas apporté l'apaisement de l'âme ni l'extinction de la conscience. Elle avait du mal à se réconcilier avec elle-même parce qu'elle n'était pas faite pour mener cette double vie tout a fait en contradiction avec son éducation, sa nature intrinsèque. Paradoxalement, elle n'arrivait pas à mettre un terme à cette relation.

N'entrevoyant pas de solution à cette situation, elle se laissait aller, comme si elle voulait forcer le destin. Si Ibra la quittait, elle s'en irait avec l'autre. C'est dans cette disposition d'esprit que Dorlande se rendit un jour, à la pause de midi, chez Corcher. Alors qu'elle s'était juré de ne jamais souffler un seul mot à son amie de cette nouvelle donne de sa vie, ce drame qu'elle vivait. Elle semblait être mue par une volonté donc elle ignorait l'origine, c'était plus fort qu'elle.

Elle s'embrassèrent affectueusement et s'installèrent dans le salon. Dorlande ne savais plus pas où commencer son propos. Elle finit par déclarer sans ambage à son amie qu'elle avait un amant. Ce qui eut naturellement pour effet de désarçonner son interlocutrice.

- si tu espérais pouvoir attirer mon attention pas une telle entrée, et bien, c'est fait ! Alors, vas-y maintenant, raconte-moi, mais surtout donne moi le pourquoi ! 

- et le comment ?

- cet aspect ne m'intéresse pas ! Je ne crois pas qu'il y ait récemment des innovations dans la manière dont un homme et une femme couchent ensemble ! Peut-être devrais-je dire forniquent !

- je constate que tu as déjà choisi ton camp ! J'ai tous les torts à tes yeux ! Tu me condames sans même te donner la peine de m'écouter, de connaître les tenants et les aboutissants de cette affaire !

- Vas-y, je t'ai dit que je t'écoutais !

- Cela en vaut-il encore la peine, étant donné que tu as déjà revêtu ta toge de juge des conscience ! Peut-être que tu es jalouse ! J'ai fait une chose à laquelle tu penses certainement, mais que tu n'oses pas, ligoter par ta vertu ! 

- De quoi parles-tu ?

- D'aller voir ailleurs ! 

- c'est un haut fait ou quoi ? Tu es allé voir dehors parce que tu soupçonnes Ibra d'en faire autant, ton acte est dégradant, profondément immoral ! Il anéantit totalement tous les efforts que tu as fait par le passé pour te préserver !

- je ne suis pas venu entendre tes prêchi-prêcha de ta petite sainte !

- à quel dessin obéit donc ta démarche ? À quoi t'attendais-tu ? Que je te félicite avec des applaudissements ? Que je me fasse l'écho de ta conscience pour que tu puisses te dédouaner ? Et bien, non ! Pour la simple raison que je n'approuve pas ton acte. Je le trouve ignoble, profondément dégradant ! Parce qu'un adultère, quelles qu'en soient les raisons, souille beaucoup plus la femme que l'homme !

- c'est bien ce que je me disais ! J'ai eu tort d'être venu t'en parler ! De grâce, ne court pas le raconter à Ibra ! Avec les filles comme toi, il faut s'attendre à tout !

- toute cette méchanceté inutile pourquoi, Dorlande ? Quel but vises-tu ? Tu te sens mal dans ta peau et tu veux me transmettre ton désarroi, me rendre responsable de ta tourmente, c'est ça ? Je refuse, parce que ce n'est pas moi qui t'ai mise dans cette situation ! Je ne t'ai jamais donné des conseils dans ce sens, encore moins de telles exemples !

- tu fais deux poids deux mesures ! Jamais tu n'as été aussi intransigeante et sévère à l'encontre d'Ibra quand j'étais informée qu'il me trompait ! C'était ici, dans ce même salon !

- ce n'est pas du tout la même chose et tu le sais bien ! Tu n'avais pas la moindre preuve de ce que tu hypothèses ! Alors que là, tu fais une confession en bonne et due forme ! Tu avoues un acte grave et avéré ! Si Ibra était venu me voir pour m'apprendre qu'il avait une maîtresse et qu'il te trompait, je lui aurais tenu le même langage ! Quoiqu'un homme qui trompe sa femme soit de nos jours, la chose la plus ordinaire ! Ce qui l'est moins, c'est ce que toi tu viens de me dire !

- tu veux dire c'est qui est extraordinaire ?

- oui ! Je trouve extraordinaire que tu en soit arrivée là, à avoir un amant comme ça, sur un coup de tête ! Qu'est-ce que tu recherchais ? Qu'est-ce que ton amant te donne que tu n'as pas avec Ibra ! Hein, le sexe ?

- tu crois que ce n'est rien ? Tu penses peut-être que je suis devenue frigide ? Tu sais depuis quand Ibra ne m'a pas touchée ?

- il ne peut pas être en mission à l'extérieur du pays et sauter chaque dans un avion pour venir faire l'amour a sa petite femme ! Et a ce que je sache les chercheurs n'ont pas encore découvert la formule pour le faire à distance !

- je trouve ton ironie de mauvais goût et tes propos injurieux ! Je ne suis pas venue ici pour me faire insulter !

- et tu es venue pour quoi alors ? Pour que je te félicite ? Et puis, entre nous, Dorlande, tu sais parfaitement que ce qui valorise une femme, c'est l'irréprochabilité de son comportement ! Une femme n'a pas à singer un homme, à tromper son mari ! Elle doit au contraire être fière du rôle qui est le sien, celui de stabilisateur du couple, de pilier du foyer !

Dorlande n'ayant pas obtenu auprès de sa meilleure amie, l'approbation et le soutien escomptés, la toisa méchamment puis elle se leva et se dirigea vers la porte, sous le regard abasourdi de Corcher.

- j'espère que tu sais ce que tu fais ! J'espère surtout que tu n'es pas en train de chantons cheval borgne pour un aveugle ! Fit cette dernière, peinée. 

- je sais que c'est ce que tu souhaites ardemment, pour jouir du plaisir d'avoir raison ! Rétorqua Dorlande en claquant la porte.


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PASSION DÉVORANTE