Chapitre 13
Ecrit par Jennie390
⚜️Chapitre 13⚜️
Yolande Otando épouse Biyoghe
En arrivant dans le Hall, nous trouvons le manager qui discute avec la réceptionniste et deux autres hommes. Nous les saluons et je présente mes excuses à tout le monde pour mon comportement d'hier. Je leur dis que je n'avais pas pris mes médicaments à l'heure à cause du décalage horaire qui m'a embrouillée. Que je n'ai pas voulu créer un scandale dans leur établissement. Ça ne me plaît pas mais je suis obligée de faire profil bas pour l'instant.
Pendant que je parle, je sens le regard de la réceptionniste sur moi, j’ai l’espoir qu’elle pourra lire entre les lignes. Que peut être elle verrait que je suis en train de jouer un rôle et qu’elle appellerait quand même l’ambassade en cachette. Au nom de quoi ? peut-être d’une certaine intuition féminine...
Le manager accepte mes excuses et me dit quelques paroles gentilles, puis il nous escorte lui-même jusqu’à la terrasse du restaurant où on sert le petit déjeuner.Je n’ai pas vraiment faim mais je fais un effort d’avaler quelque chose parce qu’il faut que je prenne des forces.
Pendant le petit déjeuner Émile fait la conversation en me parlant de toutes les activités qu’on va faire aujourd’hui pour nous divertir étant donné qu’on est en lune de miel.
—Donc aujourdhui, on va visiter "les Ruines de San Miguelito puis nous irons voir le Musée Maya. La richesse culturelle de ce pays est incroyable, ça va te plaire ma belle.
Il m'a menacée avant de sortir de la chambre, donc je dois jouer le jeu en public mais c'est trop dur. Je ne suis pas aussi bonne actrice que lui, donc je ne fais que le stricte minimum, petit sourire forcé et réponses courtes.
—J'ai hâte d'y être, répondé-je.
Lui par contre, il est à fond dans son rôle. De temps en temps, il me caresse la main et la joue en me regardant avec des yeux amoureux. Les gens autour nous, nous regardent avec le sourire et complimentent le joli petit couple qu'on forme.
Quand le petit déjeuner se termine il m’emmène devant un hôtel ultra luxueux, où on prend des photos de nous hyper « heureux ». Dès qu’on finit la fameuse séance photo, nous allons visiter les sites dont il a parlé. Ce sont de jolis endroits mais la situation dans laquelle je me trouve gâche toute l'expérience touristique, j'ai juste envie de me casser de ce pays le plus tôt possible et sortir Emile de ma vie aussi vite qu'il y est entré.
En fin d'après-midi, nous retournons à l'hôtel après avoir pris des tonnes de photos pour les apparences. Dès qu'on entre dans la chambre, je me tourne vers Émile.
—Je veux parler à Mélissa, je peux avoir mon téléphone? Je veux savoir si tout va bien.
—Si quelque chose n'allait pas, Oasis allait m'appeler. Donc, non tu ne l'appeleras pas.
—J’ai promis que j'allais l'appeler, elle doit penser que je l'ai abandonnée.
—Elle est à OASIS, on prend soin d'elle, tu veux l'appeler pour lui dire quoi ? Et d'ailleurs, elle est mangée, elle sait c'est quoi l'abandon? Me demande t-il amusé.
—Emile je te déteste, dis-je, amère.
—Ca c'est ton problème, répond t-il en haussant les épaules. Bon je sors un moment, pas la peine de chercher un moyen pour crocheter la serrure en mon absence parce j’ai pris tout ce qui est important et évidemment ton passeport et ton portefeuille sont avec moi.Donc assieds-toi ou endors toi.
—Et quand tu verouilles la porte, comment je vais recevoir mon dîner?
—Tu peux rester sans manger pourquoi ce soir.
—J'espère que tu vas crever là bas, lancé-je.
—Continue, j'aime ça! me dit-il en sortant de la chambre.
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Les jours qui suivent, la même mascarade continue pour mon plus grand désespoir. On prend le petit déjeuner dans l’hôtel, après on va prendre des photos devant des monuments, au musée. Après le déjeuner dans des restaurants huppés où nous prenons un nombre incalculable de "photos-bonheur".
Souvent on va sur des plages exotiques pour étaler "notre amour", toujours photographié d'ailleurs. De retour à l'hôtel, il m'enferme dans la chambre pendant des heures et revient très tard dans la nuit ou tôt le matin. La sensation que j’ai d’être comme un animal en cage me rend folle. Mais en pensant à mon bébé Mélissa, je sais qu’il me faut résister au moins jusqu’à ce qu’on rentre au pays.
Au bout de quelques jours, je comprends que dans ce pays je n’ai aucune chance d’évasion. Je ne boude plus, tout ce qu’il me demande de faire, je le fais sans rechigner. À un moment donné, il dort même souvent dehors et ne rentre qu'au petit matin ou alors il part sans verrouiller la porte, vu qu'on doit m'apporter mon repas. Au début je me dis qu’il le fait exprès, qu’il le fait certainement pour me piéger. Donc même si j’ai une folle envie de sortir de la chambre et m’enfuir, je m’abstiens sachant que c’est peut être un piège.
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—Emile ça fait plus de 2 semaines qu’on est ici et je n’ai toujours pas parlé à Mélissa. Même tante Bertille doit s’inquiéter du fait qu’elle n’ait encore reçu aucune de mes nouvelles.
—Je ne pense pas qu’elle s’inquiète de ton silence,au contraire elle doit se dire que tu profites bien au point de ne pas penser à elle.
—Je ne pense pas que ça te convienne que ma famille commence à me chercher. Si on se rend compte que je suis injoignable en permanence, les gens vont commencer à se poser des questions et tu seras dans de beaux draps.
—Quand tu ouvres ta gueule pour dire "ma famille", tu parles de qui au juste?
Ta tante et son mari? Ce sont ces crevards là qui peuvent m'effrayer?
—À ce que je vois, tu te crois intouchable et inaccessible grâce à ton argent. Mais tu seras surpris Emile.
—Tes menaces m'amusent ma chérie, dit-il en souriant. En ce qui concerne les appels, n'insiste pas. Tu ne vas appeler personne. Et à vrai dire on s’amuse tellement que j’ai l’intention de prolonger notre lune de miel. On va donc rester une ou deux semaines de plus.
Mon teint vire au vert quand je l'entend dire qu'il a l'intention de prolonger notre séjour. Je ne peux pas rester davantage ici. Surtout depuis que je suis moins rebelle, monsieur a pris ses aises. Il profite vraiment de ce voyage à fond.
Quand il sort de la chambre cet après-midi, il ne revient que le lendemain à midi et il fait de même le jour suivant.Je commence à me dire que ça peut être une opportunité pour moi. Il est possible qu'il pense que j'ai baissé les bras et que je n'ai plus l'intention d'essayer de m'echapper ici. Voilà pourquoi je vais encore tenter ma chance. On a dit aide-toi et le ciel t'aidera, je dois me bouger pour ma liberté.
Je ne peux pas compter sur le manager parce qu’il semble vraiment apprécier Emile, dès que je débarquerai à la réception il l’appellera. Celle par qui je peux passer c’est peut être la réceptionniste. À chaque fois qu’on passe devant la réception elle me regarde souvent avec comme de l’interrogation dans le regard et peut être aussi quelque chose qui s’apparente à de la compassion.
Je ne dirai pas qu’elle a compris ce que je vis mais je pense qu’elle doit sans doute trouver notre couple bizarre parce que hormis le soir où j’ai fait un scandale et chercher à exposer Émile, le reste des jours j’ai toujours l’air extrêmement soumise.
Les fois où on sort souvent la nuit pour aller faire des photos dans des restaurant hors de l’hôtel, je remarque qu’en début de soirée, vers 19-20h le manager ne traîne pas dans le hall.Je décide donc de tenter ma chance à cette heure là, Emile étant absent comme d’habitude et la porte non verrouillée.
Dès que je sors de la chambre,je referme la porte et je marche rapidement le long du couloir en évitant toujours de prendre l’ascenseur.Quand j’arrive au bas des escaliers dans le hall, je jette un coup d’œil circulaire dans la salle, aucun signe du manager mais la réceptionniste est à son poste.
Je marche rapidement jusqu’à elle, dès qu’elle me voit, elle a l’air surprise.
—Mme Biyoghe ? Me dit-elle. Je peux faire quelque chose pour vous ?
—Bonsoir, vous avez l’air surprise de me voir, pourquoi ?
—Oui ça m'étonne un peu de vous voir ici toute seule, vous ne descendez jamais ici sans votre mari. Il est sorti en après midi et généralement il ne revient qu'au petit matin et pendant tout ce temps, on ne vous revoit plus, même pas pour profiter de la piscine.
—Vous devez vous demander quel genre de lune de miel étrange, n'est ce pas?
—Ah non, ça ne me concerne en rien madame. Je ne devrais pas me mêler de la vie des clients, excusez moi. En quoi puis-je vous être utile ?
—J’ai besoin de votre aide Miranda, lui dis-je en regardant le prénom sur son badge.
—Madame Biyoghe vous n’allez pas encore remettre ça s'il vous plaît.
—Ecoutez, dis je en me passant la main sur le visage.Je sais qu’avec la scène de la derrière fois, j’ai perdu en crédibilité,tout est contre moi. Mais je vous assure que j’ai besoin d’aide.
—Madame j'ai du travail s'il vous plaît.
—Je n'ai aucun problème mental et je ne cherche pas non plus à attirer l'attention sur moi. Si j’avais la moindre chance dehors, je ne me serai pas arrêtée ici pour vous demander de l’aide.Je serai allée tenter ma chance dans la rue. Mais le problème c’est que je n’ai ni papier, ni argent, ni téléphone, je ne parle pas espagnol, je ne connais pas la ville, je suis en réalité perdue.
Elle quitte son écran des yeux et m'écoute désormais attentivement.
—Depuis qu’on est arrivé le manager et vous, êtes les seules personnes que j’ai entendues parler français. Naturellement je ne peux me tourner que vers vous, ma seule issue à l’heure actuelle est d’arriver à l’ambassade de mon pays, s'il vous plaît.
—Madame honnêtement je ne veux pas me mêler de ça. Mon travail consiste à m'occuper des clients, pas de leurs vies privées.
—Je vous en supplie, supplié-je les larmes aux yeux. Aidez-moi pardon.
—Madame Biyoghe, je ne peux pas appeler votre ambassade parce que le…
Elle regarde de gauche à droite...
—Les appels effectués depuis la réception et le secrétariat de l’hôtel sont d’abord interceptés par le bureau du manager, dit-elle en chuchotant. Avec un appel effectué vers votre ambassade, Madame je peux perdre mon boulot.
—Donc emmenez moi avec vous, conduisez moi directement à l’ambassade ou appelez moi un taxi.
—Madame franchement, répond t-elle dans un soupir.
—Vous êtes ma seule issue Miranda, vous savez j’ai une fille dans mon pays, c’est pour elle que je me bats, aidez moi svp, dis je en larmes.
Après une pause, elle capitule.
—Bon écoutez, je termine mon service dans une heure,je prends généralement un taxi pour rentrer chez moi. Assurez-vous d’être ici dans une heure Madame Biyoghe. Si je franchis la porte de cet hôtel sans vous je ne viendrai pas vous chercher et vous ne reviendrez plus me demander de l’aide parce que c’est mon poste qui est en jeu, l’idéal serait que vous restiez dans les parages jusqu’à ce que je finisse.
—Mais le manager pourrait me voir...
—À partir de 19h il est dans son bureau avec la secrétaire et son assistant pour faire le bilan de la journée, il ne sortira pas avant un bon moment.
—Merci beaucoup Miranda, que Dieu vous bénisse.
—Espero que no me estoy equivocando (j'espère que je ne suis pas en train de me tromper) me répond t-elle.
—Je ne comprends pas l'Espagnol.
—Je disais juste que j'espère ne pas être en train de faire une erreur en vous aidant.
—Non, Dieu va vous le rendre.
Elle hoche la tête et je m'éloigne de son comptoir pendant qu'elle s'occupe d'autres clients. Je ne peux pas retourner dans ma chambre pour prendre mes affaires c’est trop risqué, Émile pourrait revenir quand je serai en train de faire ma valise, on ne sait jamais.Je ne peux pas aussi rester dans le hall étant donné que la réception se trouve carrément en face des portes d’entrée de l’hôtel, ça aussi c’est dangereux.
Je me suis donc mise à l’entrée du bar de l’hôtel, de cette manière j’ai les yeux en permanence sur la réceptionniste et quand elle sera sur le point de sortir je pourrai directement la suivre.
Elle continue à s'occuper de la clientèle en vérifiant de temps en temps si je suis toujours là. Quand elle termine son service, une autre réceptionniste vient la remplacer. Elle prend son sac à main et se dirige vers moi.
—Madame Biyoghe, vous êtes toujours sûre de vouloir partir ?
—Oui Miranda je n’ai pas le choix.
—Donc on y va. Il est 21h, vous êtes sûre que votre ambassade est ouverte à cette heure ci ?
—Je n’en sais rien, et même si c’est fermé, je dormirai devant l’entrée jusqu’à l’ouverture.
—Ok, ne traînons pas ici.
On sort de l’hôtel jusqu’au parking, je regarde de gauche à droite craignant de voir le fils du diable surgir de nulle part. Miranda arrête un taxi, au bout de deux minutes, nous montons à l'arrière puis le véhicule démarre.
—Merci Miranda, lui dis-je reconnaissante.
—Je ne sais pas quel est votre problème et je ne vous le demanderai pas. Si je peux vous empêcher de pleurer d'avantage et de retrouver votre fille, ça me va. Dieu me le rendra.
—Gracias, lui dis je.
Pendant le trajet, j’ai les idées ailleurs.Je pense à Mélissa, à comment je ferai tout pour la protéger, je ne peux pas la laisser à la merci d’Émile, c'est impossible.
Je suis perdue dans mes pensées jusqu’à ce que je me rende compte que la voiture s’arrête et que quelqu’un monte à l'avant, dans le siège à côté du chauffeur.
Quand cette personne se retourne pour me regarder, mon cœur rate un battement.
—Salut ma chérie, tu allais quelque part ? Me demande t-il.
Bonne lecture.