Chapitre 13 : Larissa da MATHA
Ecrit par Auby88
Aujourd'hui
Margareth IDOSSOU
Le vrmm vrmm de mon mobile me ramène au présent. Je consulte l'écran. C'est Sibelle. Je m'empresse de décrocher.
- Bonjour, belle demoiselle !
- Bonjour, tata Margareth.
- Tata Margareth ! fais-je tout étonnée.
- Oui, c'est ainsi que j'ai décidé de t'appeler. Cela te plaît ?
Cette gamine est incorrigible. Elle décide toute seule de m'appeler comme bon lui semble et me demande si cela me convient !
- Oui, finis-je par dire. J'espère que ta fête d'anniversaire s'est bien terminée et que tu as eu beaucoup de cadeaux.
- Oui, mais le tien est unique. J'ai adoré. Actuellement, je porte ton bijou au cou.
- Je suis contente que cela t'ait beaucoup plu.
Je l'entends rire doucement.
- Je voulais juste te saluer et te dire que papa et maman m'autorisent à passer la journée avec toi demain, bien sûr si tu es d'accord.
Je suis surprise par sa requête. Mais l'idée me plaît bien. Pour une fois, je ne passerai pas une journée fériée toute seule, la tête dans mes paperasses.
- Avec grand plaisir, je t'accueillerai chez moi.
- Super ! s'écrie-t-elle. Bon, il faut que je te laisse. Y a maman qui m'appelle en bas. Elle te téléphonera plus tard pour que tu lui donnes ton adresse. Gros, gros bisou tata Margareth. mouak. Tu es trop gentille !
- Bisou, ma princesse.
Elle raccroche. Pourtant, durant quelques secondes encore, je garde le téléphone à l'oreille. Je reste nostalgique de sa douce voix toujours empreinte de gaieté. Je regrette vraiment que Sibelle ne soit pas ma fille, qu'elle ne soit pas Maéva.
Pour me changer les idées, je plonge à nouveau dans mes paperasses. Je compte étudier de fond en comble le dossier de madame Sèna pour bien structurer mon argumentaire. Je suis décidée à faire tout ce qui est de ma compétence pour qu'elle soit gagnante à l'audience et qu'elle obtienne la garde des enfants ainsi que des dommages-intérêts. Quant à son bourreau de mari, je compte bien lui faire écoper de la peine maximale prévue en cas de violences conjugales.
Tard dans la nuit. Dans la demeure familiale des da MATHA.
Charles da MATHA
Je demeure tapis dans le noir de mon salon. Perdu dans mes pensées. Je regrette mes erreurs du passé. Je regrette toutes ces cuisses entre lesquelles je me suis amusé, inconsciemment et parfois même sans vraiment me protéger. Et surtout je regrette tout le mal que j'ai fait à la mère de mon enfant, la seule qui m'ait fait père. Même si mon enfant, la chair de ma chair, mon unique héritier n'a pas survécu.
Je soupire profondément. J'avais fondé tout mon espoir sur cet enfant non désiré auparavant. Étant enfant unique de mes parents, j'ai hérité à la mort de mon père de la majorité de son patrimoine, y compris de la maison et la bijouterie familiales. C'est d'ailleurs cette bijouterie très prospère que je gère avec l'aide de mon épouse.
Je soupire longuement.
"Mel !"
Je murmure doucement le prénom de celle à qui, j'ai vilement pris l'innocence.
"Mel !"
A nouveau, je murmure son prénom.
Je me suis remis à la chercher suite à l'annonce de ma stérilité. La première fois que je l'ai revue, c'était par hasard à la cour d'appel. Elle ne m'avait pas vu. Elle était si pressée. Je n'ai pas eu le temps de l'approcher. J'ai fini par apprendre qu'elle avait changé de nom, qu'elle était avocate. Grâce à mes contacts, j'ai pu avoir son numéro. J'ai continué à venir à la cour d'appel et j'ai eu l'opportunité de la revoir pour la deuxième fois. C'est ainsi que je l'ai suivie jusque chez elle.
L'avoir, tout près de moi ce jour-là, m'a fait un tel effet. Jamais je n'aurais pensé être si pertubé en la revoyant. Elle est tellement différente de l'ingénue et banale fille que j'ai connue auparavant. Elle est une femme à présent, belle, forte avec un fort sex-appeal. Je ne peux nier l'avoir désirée à l'instant où je l'ai approchée. Je n'avais qu'une envie : toucher ses lèvres pulpeuses, son corps de gazelle et cette poitrine si joliment offerte devant mes yeux. Si je me suis retenu, c'est par respect pour elle et surtout pour Larissa, mon épouse.
Qu'est-ce qui m'arrive ? Pourquoi est-ce que je ressens cela pour une femme autre que mon épouse ?
Cela fait un an que je me suis marié avec Larissa. Et je me suis juré de ne jamais désirer autre femme qu'elle, de ne plus céder aux tentations, de ne pas la tromper. A cette promesse, je me tenais jusqu'à ce que je retrouve Mel.
Larissa da MATHA, née DUPONT, une franco-gabonaise que j'ai rencontrée lors de mes études universitaires en France. Elle est belle comme le jour, étincelante comme la lune, avec cette teinte café au lait qui la rend unique. Elle étudiait le stylisme et moi la gestion des entreprises. Au départ, j'avais juste envie de m'amuser avec elle. Mais tenace, autoritaire et indépendante qu'elle était, elle parvenait chaque fois à déjouer mes pièges. Peu à peu, j'ai senti mon coeur battre pour la première fois, battre pour elle. Mais étant éconduit à chaque tentative, je continuais mes aventures libidineuses sans pour autant arrêter de la courtiser. Mon endurance a finalement payé, même si elle a duré près de deux ans. Elle a accepté de devenir ma fiancée. Jamais plus, nous ne nous sommes quittés. Même quand je suis tombé malade et que le docteur m'a annoncé que j'étais devenu stérile, Larissa n'a pas daigné me quitter. Au contraire, elle était décidée à rester avec moi et à devenir légalement ma femme. Pour elle, notre amour compte plus que tout. Je lui dois tant. Parfois, je me sens égoiste de la laisser se sacrifier ainsi pour moi.
- Chéri !
Sa douce voix me tire de ma rêverie. Elle allume l'une des lampes du salon et se rapproche de moi.
- Oui, mon coeur !
- Qu'est ce que tu fais là tout seul et dans le noir ?
Elle me rejoint dans le canapé en cuir que j'occupe, s'asseyant sur mes jambes.
- Pas grand chose. J'avais juste besoin de cogiter quelque peu.
- Tu penses à cet enfant qui semble être mort-né ?
- Oui, je ne peux rien te cacher.
Elle prend ma tête dans ses mains.
- Arrête de te martyriser. Je n'aime pas te voir ainsi. Je sais que tu comptais beaucoup sur cet enfant, mais je te rappelle que je t'aime, t'aimerai et ne te quitterai jamais.
- Je sais et je t'en serai reconnaissant toute ma vie. Tu es mon rayon de soleil, Larissa ! Je t'aime tant.
- Moi non plus, réplique-t-elle.
J'approche mes lèvres des siennes et nous nous embrassons longuement...
- Et si elle t'avait menti ?
Là, je ne la suis pas.
- Pardon !
- Je parle de la mère de ton enfant. Il se peut qu'elle n'ait pas voulu te dire la vérité, juste parce qu'elle t'en veut encore.
- Je ne pense pas. Elle m'a paru sincère. Et je n'ai pas envie de nourrir espoir à nouveau pour être complètement désillusionné à la fin.
- Je te comprends mon amour, mais tu devrais revoir cette femme, d'autant plus qu'elle ne t'a donné ni preuve, ni explication convaincante.
- Tu n'as pas tort, Larissa, mais je n'ai pas trop envie de la brusquer. A vrai dire, je ne suis pas en droit de lui réclamer quoi que ce soit. D'autant plus que j'ai renié cet enfant, tout en sachant qu'il était le mien.
- Tu n'étais qu'un adolescent, Charles ! Tu n'étais pas préparé à être père si jeune. De toute façon, si ton enfant est bien vivant, personne ne pourra t'empêcher de réclamer tes droits sur lui. Ton sang coule dans ses veines. Tu restes son père quels que soient tes choix passés.
Je la regarde avec plein d'admiration. Elle trouve toujours les mots pour me réconforter. A ses yeux, je reste toujours l'homme idéal malgré tous mes défauts.
- Alors, promets-moi que tu ne baisseras pas facilement les bras. Pense à ta mère qui a vraiment hâte d'être grand-mère.
Je hoche la tête.
- C'est vrai qu'elle nous presse tout le temps pour cela. Je me sens mal pour elle, mais je n'ose pas lui dire la vérité.
- Il vaut mieux que tu ne lui dises rien, de peur de porter atteinte à sa santé déjà fragile. Et puis si tout tourne mal, s'il s'avère que ton enfant est bel et bien mort, nous pourrons toujours recourir à l'adoption. Il y a beaucoup d'enfants orphelins qui rêvent de se retrouver dans un cadre familial propice et harmonieux comme le nôtre.
J'esquisse un sourire en sa direction.
- Tu es un amour, finis-je par conclure en l'embrassant à nouveau.
- Allez, viens. On monte. Le lit est trop froid sans toi à mes côtés !
En parlant, elle me sourit coquinement, se lève et me prend les mains. Je me lève, l'enlace amoureusement et l'embrasse avec fougue. Puis du sol, je la soulève et l'emmène en haut. La porte se referme derrière nous...
Le lendemain.
Charles da MATHA
Après une nuit d'amour intense, nous nous réveillons revigorés et pleins d'énergie pour affronter la journée. Nous restons là à nous bécotter encore et encore puis nous nous apprêtons et allons petit-dejeuner avec ma mère, en bas.
Comme à son habitude, elle est déjà là, assise à table en train de nous attendre. Je ne peux expliquer tout l'amour que je ressens pour cette petite femme âgée. J'ai toujours admiré sa force de caractère. Sur sa joue vieillie par les années, Larissa et moi déposons des bises puis nous nous asseyons à ses côtés. Je remercie chaque jour le ciel de m'avoir donné deux femmes aussi précieuses et qui, contrairement à la normale, s'entendent merveilleusement bien pour une belle-mère et une belle-fille.
- Enfin, vous daignez descendre ! commence-t-elle. Je vois que vous n'avez pas chômé cette nuit !
- Voyons, maman !
- De toute façon, cela n'est qu'à mon avantage. J'ai bien hâte de tenir mon petit-fils ou ma petite-fille dans mes bras.
Mon regard croise celui de Larissa.
- Chère maman, ne vous inquiétez surtout pas pour cela. Je vous promets que vos mains ne resteront pas longtemps vides.
- Que Dieu t'entende ma fille ! achève maman.
Elle affiche un large sourire, découvrant sa fossette que j'ai toujours trouvée très particulière. Elle n'en a qu'une seule, uniquement sur sa joue gauche ; un trait qu'elle tient de sa feue mère, ma grand-mère maternelle.
Nous lui sourions à nouveau puis attaquons notre petit-déjeuner.