Chapitre 15 : Du grabuge dans l'air...
Ecrit par Chrime Kouemo
Simon appuya sur la sonnette à droite du portillon d’entrée de la maison de Pascal. Esther, debout à côté de lui, observait les alentours d’un œil admiratif. Son ami et collègue avait construit une superbe baraque avec des briques de terre et à la toiture en tuiles. La bâtisse aux angles arrondis s’intégrait parfaitement dans ce coin chic de Santa Barbara.
Une jeune femme d’une vingtaine d’années environ, probablement la domestique, vint leur ouvrir. Ils empruntèrent l’allée en pavés de béton qui menait à la grande véranda ainsi qu’à la porte principale de la maison. De part et d’autre du chemin en dur, s’étalait le splendide jardin à la pelouse parfaitement entretenue.
— C’est beau hein ? s’extasia Esther.
Il ne fit aucun commentaire, se contentant de hocher la tête. Son esprit était à mille lieux de là, envahi par de multiples questions auxquelles aucune réponse claire ne lui parvenait pour le moment. Pourquoi ne parvenait-il pas à se sortir Denise de la tête ? Les affiches de son spectacle placardées au centre ville dont une, juste en bas de son immeuble de bureaux, n’étaient pas les seuls responsables. Pourquoi sa relation avec Esther lui était devenue tout d’un coup fade, sans saveur ? Il avait toujours été quelqu’un de rationnel, discipliné. Pourquoi ne réussissait-il pas à se remettre sur le chemin qu’il s’était tracé ?
La revoir deux jours plus tôt après son retour de voyage avec Amandine était venu saccager le peu de lucidité qu’il pensait avoir retrouvée en son absence. Ils s’étaient pourtant à peine adressés la parole, avaient à peine échangé un regard, mais cela avait suffi pour remettre les compteurs à zéro.
Pascal apparut sur le seuil de la porte, son fils de deux ans dans les bras. Il les accueillit d’un grand sourire aux lèvres et les fit entrer. Edwige, la femme de son ami les rejoignit, les mains encombrées par un plateau rempli d’amuse gueules. Elle déposa le plateau sur la table basse et s’avança vers eux pour leur faire la bise.
— C’est vraiment très joli chez vous, fit Esther dont les yeux parcouraient les moulures du plafond.
— Oh... merci. Je dois t’avouer que c’était très difficile de trouver des techniciens qualifiés pour parvenir à ce résultat, répondit Edwige, flattée.
D’un geste, la femme de son ami les invita à s’asseoir. Esther et elle se mirent aussitôt à discuter de la décoration de sa maison.
Le repas terminé, Pascal et lui s’étaient assis dans les chaises en rotin autour de la petite table de bois de la véranda pour déguster un whisky de dix-huit ans d´âge, laissant les femmes poursuivre leur échange sur les adresses à Dubai où se procurer des meubles de bonne qualité. Edwige avait également entrepris de faire visiter toute la maison à Esther pour son plus grand plaisir.
Simon fit tournoyer le liquide brun dans son verre avant d’en boire une gorgée. Le fils de son ami trottinait en babillant autour d’eux.
— Tu m’as l’air perturbé, cher ami.
— Ça se voit donc tant que ça ?
— Tu n’aurais pas mieux fait en marchant avec une pancarte sur ton front. Qu’est-ce qui ne va pas ?
— Je n’y arrive pas... Je n’arrive pas à l’oublier.
Pascal intercepta la main de son fils qui tentait de s’emparer de la bouteille de whisky. Il lui fit un non de la tête avant de se tourner vers lui, les sourcils froncés.
— Comment ça ?
— J’ai envie de recommencer. Elle m’obsède. Avec Esther, tout me semble plat à présent, avoua t-il d’une voix basse en se passant une main sur le visage.
— Hum... Si tu étais un « bandit », je te conseillerais éventuellement de jouer sur les deux tableaux et de profiter un peu de la situation en attendant d’y voir plus clair, mais te connaissant tu ne t’en sortirais pas.
Pascal le connaissait bien en effet. Il ne s’imaginait même pas une seule seconde se mettre dans ce genre de situations.
— Bon, reprit son ami en le fixant d’un regard sérieux. En mon expérience en la matière, c’est très souvent quand nous sommes près de nous engager que des tentations de toute sorte viennent se mettre en travers de notre chemin. De ce que je vois avec Esther et toi êtes bien assortis. Vous avez les mêmes visions et les mêmes attentes. Es-tu prêt à mettre ça de côté pour une histoire qui finalement ressemble plus à une superbe partie de fesses qu’autre chose ? Pour une flamme qui risque de s’éteindre une fois que l’adrénaline de l’interdit aura disparu ? Et puis, tu te vois toi expert-comptable avec une danseuse ?
Piqué au vif par le ton condescendant de son interlocuteur, il se redressa sur sa chaise.
— C’est un métier comme un autre, je te signale. Elle gagne sa vie honnêtement.
— Je ne dis pas le contraire, mais quand on choisit la femme avec qui on veut faire sa vie, il y a certaines choses à prendre en considération. Comme tu le sais, je suis sortie avec un tas de filles avant d'épouser Edwige. Elle était loin d'être celle qui me faisait le plus décoller, mais elle avait les pieds sur terre et ça faisait la différence avec toutes les autres. Je crois que c'est ce que tu devrais retenir. Et si tu veux vraiment mon avis, Esther te correspond beaucoup plus, voire même de très loin, comparée à Denise.
Simon hocha la tête en silence. Les propos de son ami, sur le même diapason que celui de sa raison, heurtaient étrangement son coeur. Que se passait—il ? Qu’est—ce que son coeur venait faire dans cette réflexion ? Il avait des sentiments pour Esther et non pour Denise. Sentiments mis à rude épreuve parce qu’enfin après plusieurs années, il envisageait de s’engager. Pour aller régulièrement à l’église, il était bien placé pour savoir que la tentation arrivait toujours lorsqu’on se rapprochait de ses objectifs. Denise et lui ne pouvaient pas être plus mal assortis. Pascal avait raison. Leur symbiose sexuelle venait juste brouiller son jugement.
Les voix d’Esther et d’Edwige se firent entendre comme elles les rejoignaient à la terrasse. Pascal lui adressa un dernier regard entendu.
***
Denise leva son verre et le fit tinter contre celui d’Eloïse. Elles étaient attablées dans un bar lounge du carrefour Bastos après son dernier cours de la journée.
— Alors, raconte, c’était comment le Nord ?
— Franchement ? Génial ! J’ai adoré les paysages, le climat. Il y a tellement de sites à magnifiques à visiter, la région est immense, et c’est vraiment dommage qu’il n’y ait pas plus de route pour faciliter les déplacements.
— Oh, j’espère avoir l’occasion d’y aller moi aussi. J’ai toujours eu envie de visiter le grand nord. Et alors , reprit Eloïse, Samy t’a parlé de la mater ?
— Non, pas du tout et ce n’est pas plus mal, je l’aurais mal pris s’il avait essayé de me faire la leçon et il a bien compris. J’avais vraiment besoin de ce break. J’entame la dernière ligne droite de la préparation de mon spectacle et je n’ai pas besoin de stress supplémentaire. Je me suis quand même promis d’appeler les parents plus souvent.
Eloïse fronça un instant les sourcils, puis inclina la tête.
— C’est déjà mieux que rien.
— Tu ne vas pas commencer toi aussi…
— Non, ce n’est pas mon intention, mais même s’ils le font maladroitement, tes parents t’aiment.
Denise hocha distraitement la tête. Elle trouvait louables les tentatives de son entourage de la rabibocher avec ses parents, mais pour le moment, il était impératif pour elle de se focaliser sur son évènement. Il y avait encore tellement de choses à faire et elle devait continuer ses cours en parallèle; elle ne pouvait se permettre financièrement d’y mettre une pause ou même de les espacer.
Son téléphone vibra sur la table. C’était un message d’Armelle. Son amie se triturait apparemment les méninges sur la tenue la plus adaptée à porter pour son rendez一vous galant du soir avec Bobby. Amusée, elle cliqua sur les photos pour les télécharger et les fit défiler une par une. Elle sélectionna une photo et confirma son choix en écrivant : « Pardon, ne faites pas trembler les murs avec vos chocs oh. En tout cas, je veux tous les détails demain à la première heure ». Armelle lui répondit par une émoticône tirant la langue, la faisant pouffer de rire.
Relevant la tête de son smartphone, elle surprit le regard vexé d’Eloïse sur elle.
— C'était Armelle c'est ça ? demanda Eloise d'un ton qu'elle n'apprécia pas du tout.
— Oui. C'est quoi ce ton ?
— Vous ne vous quittez visiblement plus à ce que je vois. Tout une semaine ensemble dans le Nord, et à peine rentrées, vous êtes pendues au téléphone l'une avec l'autre.
Denise sentit la moutarde lui monter brusquement au nez.
— Euh… pardon ? Je ne savais pas que j’avais des comptes à te rendre concernant mes amis.
— Je n’ai pas dit ça. Je trouve juste qu’elle te colle un peu trop et que tu lui as fait trop vite confiance. Avec tous les messages bizarres que tu as sur ta page, tu devrais faire attention.
— Non, mais je rêve ! explosa t-elle en se redressant sur sa chaise. Tu ne vas pas recommencer les petites jalousies que tu me faisais quand on était au lycée dès que j'avais une nouvelle amie.
— Tu dis ça maintenant, mais je te rappelle que c'est quand même grâce à ma petite jalousie que tu as évité de justesse un probable viol.
Estomaquée, Denise ne put articuler un son. elle peinait à croire qu’Eloïse ressortît cette histoire vieille de plus de quinze ans pour justifier sa jalousie envers Armelle. Car il n’était question que de jalousie et pas d’autres choses. En vingt cinq ans d’amitié, elle maîtrisait suffisamment celle qui était comme une seconde soeur pour elle pour savoir de quoi il en retournait. Eloïse avait toujours été possessive envers elle. Cela avait occasionné beaucoup de disputes quand elles étaient adolescentes, mais elle avait appris à l’accepter tel quel, la recadrant quand cela était nécessaire. Toutefois, elle reconnaissait que son amie l’avait sortie d’un bon nombre d’histoires douteuses avec des filles jalouses de sa popularité au lycée et même avec certains de ses petits copains. Sa naïveté d’antan la conduisait très souvent à accueillir tout le monde à bras ouverts, sans réellement distinguer ceux qui ne lui voulaient pas du bien. Mais cette fois一ci, il ne s’agissait de rien d’autre que de l’animosité gratuite envers Armelle, et cela, elle ne pouvait le tolérer.
Denise recula, raclant le sol de sa chaise. Elle s’empara de son sac à mains et sortit un billet de son portefeuille qu’elle jeta sur la table.
— Je crois que j'ai eu ma dose aujourd'hui. Quand tu reviendras à de meilleures sentiments, tu me sonnes.
— Attends...
Sourde aux protestations d’Eloïse, elle pressa le pas vers la sortie du bar lounge et regagna rapidement la rue.
Denise n’avait toujours pas décoléré en arrivant à sa résidence. Eloïse avait clairement passé les bornes et il fallait qu’elle comprenne la leçon cette fois. D’un pas pressé, elle emprunta les escaliers et monta les marches deux par deux. alors qu’elle ouvrait la porte d’accès au couloir, elle percuta violemment quelqu’un.
— Oh... pardon.
Elle leva la tête. C’était Simon.
— Ca va ? Je ne t’ai pas fait mal ? demanda t-il en tendant spontanément la main vers elle.
— Euh, non pas du tout…
De longues secondes durant, ils se scrutèrent du regard en silence. Immobiles. Elle pouvait presque sentir les fines particules de l’air se déplacer entre eux.
Les prunelles de Simon s’animèrent d’une douce lueur, l’emprisonnant petit à petit. Son coeur dans sa poitrine, sans lui demander son avis, s’élança dans une course folle, perturbant son souffle. Ses petites inspirations et expirations régulées n’eurent aucun effet.
Résignée, Denise laissa son regard avide parcourir les contours du visage de son dernier amant, imprimant dans sa mémoire les angles de sa mâchoire recouverte par sa barbe soyeuse. Les narines de Simon frémirent, signe de son émoi. Elle ne put retenir un son étouffé lorsque les doigts de sa main se refermèrent sur son avant bras, la transperçant de leur chaleur.
Non ! Ce n’était pas une bonne idée ! Loin de la même ! Rassemblant les derniers vestiges de sa volonté, elle rompit le contact visuel et secoua son bras pour se défaire de l’emprise de Simon.
— Il faut que je retourne chez moi...
— Denise...
— Passe une bonne soirée, acheva t-elle sans tenir compte de son propos.
Serrant son sac contre sa poitrine comme un bouclier, elle gagna sa porte d'entrée et s'engouffra dans son appartement.
S’adossant contre la porte fermée, elle se laissa glisser doucement et s’assit à même le carrelage froid. Mais que lui arrivait-il ? C’était quoi ce truc avec Simon ? Il n’était même pas son type d’hommes, avec son air intello-coincé et ses vêtements informes. Pourquoi tout d’un coup lui faisait-il autant d’effets ? Il n’était pas le premier homme avec qui elle passait une nuit fabuleuse. Des bons coups, elle en avait eus et avait tourné la page à chaque fois qu’elle l’avait décidé. Mais, avec son propriétaire, son simple bon vouloir ne suffisait pas.
Elle prit sa tête entre ses mains et la frappa doucement contre le battant de bois derrière elle. Il fallait à tout prix qu’elle le sorte de son crâne, qu’elle oublie sa douceur, sa gentillesse, la magie de leurs corps imbriqués, sinon ce serait l’enfer. Déjà, elle s’était surprise à ressentir pour la première fois de l’animosité envers Esther lors de la commémoration. De prime abord, elle l’avait mis sur le compte de l’admiration que Madame Rita manifestait ouvertement envers la jeune femme. Avec le recul, elle admettait que ce n’en n’était pas la seule raison. La façon qu’elle avait de ne pas lâcher Simon du regard ou celle qu’elle avait eu de jouer les futures épouses parfaites auprès de sa tante du village l’avait prodigieusement asticotée. Et pourtant, elle reconnaissait de façon logique que la jeune professeure serait l’épouse parfaite pour lui. Mais son émoi se foutait de la logique. Un étau lui comprima le coeur, obstruant la circulation de l’air dans ses poumons comme elle les imaginait convoler en justes noces.
Enervée et triste à la fois, elle se leva et alla s’affaler sur son canapé. Cette journée n’était définitivement pas la sienne.
***
Armelle émergea lentement du sommeil par le biais d’un doux baiser sur le front. Elle ouvrit doucement les yeux et son regard croisa celui de Bobby penché sur elle, un doux sourire sur son visage.
— Bonjour Eyenga.
Sa voix de velours provoqua de nouveaux frissons en elle, lui donnant envie de l’attirer contre elle dans le lit pour reprendre leur délicieux corps-à-corps de la nuit précédente.
Elle lui sourit à son tour et s’étira longuement avant de lui répondre :
— Bonjour Bobby. Ca fait longtemps que tu es debout ?
— Un peu oui. J’ai eu le temps de faire mon footing, commander notre brunch et mettre la table, énuméra t-il d’un ton légèrement moqueur.
— Oh… Tu aurais pu me réveiller.
— Ne t’en fais pour ça. Tu avais visiblement besoin de te reposer et ça me fait plaisir de prendre soin de toi.
Le coeur d’Armelle chavira dans sa poitrine. Depuis combien de temps n’avait-elle plus entendu ces simples mots qui faisaient du bien ? Ces mots qui la faisaient se sentir spéciale.
Attendrie, elle tendit les bras vers lui. Il s’assit sur le lit près d’elle et elle le serra de toutes ses forces, bouleversée. Après des années à s’être convaincue qu’elle ne méritait rien d’autre qu’une place de figurante dans la vie de Ralph, elle avait parfois l’impression de vivre un rêve. Sa raison essayait bien sûr de mettre des gardes-fous, lui rappelant que ce n’était que le début, que tout allait trop vite, mais elle n’avait plus envie de l’écouter. Elle voulait juste enfin se laisser vivre et apprécier pleinement ce que Bobby lui offrait.
Il déposa un petit baiser sur ses lèvres et se détacha d’elle.
— Merci chéri.
— Je t’en prie, mon coeur. On va manger ?
— Avec plaisir. Je veux juste faire ma toilette avant si possible.
— Je t’ai sorti tout ce qu’il faut dans la salle de bains. Ne mets pas trop longtemps s’il te plaît, je meurs de faim.
— Je me dépêche !
Armelle sortit de la salle de bains et se dirigea vers la chambre, une serviette éponge nouée autour de sa poitrine. Elle récupéra sa robe de soirée de la veille posée sur le dossier du fauteuil installé dans un angle de la pièce. L’étoffe toute froissée était un subtil rappel de leurs ébats fougueux de la veille.
Elle délaissa la robe, elle serait forcée de la remettre pour rentrer chez elle, mais pour le moment, rien ne l’y obligeait. Dans le placard, elle s’empara d’une chemise de Bobby et la revêtit.
Des éclats de voix lui parvinrent soudain depuis le salon. Intriguée, elle ferma rapidement les boutons et ouvrit la porte de la chambre avant de se figer sur place. Son regard tomba aussitôt sur une femme, grande de taille, très apprêtée dans un ensemble tailleur pantalon de couleur crème. A ses côtés, une jeune fille qui était sa copie miniature, se tenait debout et triturait les ongles de ses mains.
La femme se rendit enfin compte de sa présence. Elle fronça les sourcils et la détailla d’un air dédaigneux de la tête aux pieds.
— Ah ! Tu as une invitée à ce que je vois ? s’enquit-elle en croisant les bras sur sa poitrine où pendait un sautoir doré.
Bobby se retourna brusquement, un air confus sur ses traits. Armelle resta immobile, indécise quant à l’attitude à adopter.
— Chéri, tu ne nous présentes pas ? Demanda encore la femme d’un ton suave.
— Alicia… fit Bobby
— Quoi ? Je suppose que tu ne lui as pas parlé de moi.
Armelle scruta du regard son amant, cherchant une explication à la situation. Il passa les mains sur ses dreadlocks pour les ramener à l’arrière de son crâne.
— Bobby, tu peux me dire ce qui se passe, articula t-elle enfin quand elle émergea de sa léthargie.
La dénommée Alicia s’avança vers elle, faisant claquer ses hauts talons sur le carrelage lisse.
— Oui, Bobby, dis-lui. La pauvre, elle mérite de savoir
— Alicia, arrête ton cirque ! Gronda Bobby d’une voix sourde, les poing serrés.
La femme continua de s’approcher vers elle, complètement indifférente à l’injonction de Bobby. Elle était maintenant à quelques centimètres d’elle. Son visage à l’ovale parfait sublimé par un maquillage savant, s’inclina légèrement; ses lèvres luisantes de gloss s’étirèrent en un sourire moqueur.
— Je vais répondre à sa place puisqu’il ne semble pas disposé à vous répondre. Je suis la femme de Bobby. Et la jeune fille là-bas, c’est notre fille Jessica.
Le souffle coupé, Armelle se raidit. Le silence s’étira durant de longues secondes. Elle leva à nouveau les yeux vers Bobby. Tête baissée, il avait posé les mains sur le dossier d’une chaise.
Dans un état second, elle retourna dans la chambre, enfila sa robe et rassembla rapidement ses affaires.
Quand elle revint dans le salon, Alicia arpentait tranquillement la pièce et inspectait les photos sur les étagères; Bobby et sa fille n’avaient pas bougé.
— Armelle, attends ! Protesta t-il faiblement comme elle passait à sa hauteur.
C’en était déjà fini avec « Eyenga »? Dégoûtée, elle gagna la porte d’entrée sans lui accorder un regard et sortit de l’appartement.