Chapitre 17

Ecrit par Les Chroniques de Naty

Chapitre 17

 

Mota me regarde la bouche toujours ouverte. Elle risque de prendre une mouche en pleine gueule si elle ne la ferme pas.

—Akabla qu’est-ce que tu fais comme ça ?

—Qu’est-ce que toi tu as vus ? Répondis-je sur la défensive.

Elle ne me répond pas et continue de me fixer.

—J’ai vu que tu as mis quelque chose dans la sauce.

—Ah bon ? Et dis-moi ce que j’ai mis vue que c’est toi qui en parle.

—Je vais le dire à madame. Parce que ces derniers temps j’ai remarqué que tu es toujours entrain faire des trucs bizarres. La dernière fois je t’ai vue uriner sur des salamandres que tu as fait bruler ensuite. C’est quoi toutes ces choses que tu fais ? En tout cas aujourd’hui j’irai tout raconter à la patronne.

Je ne sais pas comment, mais en moins de quelques secondes je suis à côté d’elle. Je la saisis par les cols et la coince contre le mur.

—Lâche moi Akabla tu me fais mal ; tu vas me tuer ou quoi ?

—La mort sera trop douce pour toi ma petite.

—Pardon laisse moi je ne vais rien dire ; pardon.

Elle suffoquait. Je serais tellement fort sur le col de sa camisole qu’elle n’arrive plus à bien respirer. Je sens l’air quitter ses poumons. Elle a voulu jouer avec le feu et voici maintenant que la connasse me supplie de la laisser en vie.

Tu aurais dû y penser avant de t’immiscer dans mes affaires.

—Ne t’ais je pas dis depuis le début de ne jamais te mêler de ma vie ?

Elle remue vigoureusement la tête car incapable de parler.

—Et pourquoi le fais-tu ?

—Je ne vais plus jamais m’en mêler. Pardon, pardon.

Des larmes de douleurs ruissellent sur ses joues ; elle se met à chialer comme un bébé et ça m’énerve encore plus. Je la lâche après lui avoir assené un grand coup de poing au milieu de la tête. Elle se laisse tomber comme un gros tas de merde ! Car c’est ce qu’elle est. Un giga tas de merde.

—Tu vas m’écouter maintenant petite imbécile. Si jamais tu répètes ce que tu as vue à qui que ce soit, compte sur moi pour te retrouver où que tu sois et tu tuer de mes propres mains. Ais je été assez claire ?

—Oui c’est compris.

—Aussi tu vas demander la route à Martine. Et pour ne plus revenir dans cette maison. Je te donne jusqu’au dimanche pour quitter cette maison ; sinon tu iras en prison. Car je vais prendre les bijoux en or de la patronne et les planquer dans ton baluchon. Après la fouille on les découvrira là-bas. Et crois-moi qu’après ça, tu passeras le reste de tes maudits jours en taule.

—Mais ce travail est tout ce que j’ai. Et puis je ne sais même pas où partir.

—D’accord ! Dans ce cas la prison sera ton nouveau toit.

—Pourquoi fais-tu ça Akabla ? Je te jure sur la tête de ma mère que je ne vais jamais ouvrir ma bouche. Mais je t’en prie laisse-moi rester ici. Je ne vais même pas dire à quelqu’un ce qui se passe. Je serai muette comme une tombe.

—Hum ! Ils arrivent que les tombes se mettent à bouger. Je ne veux pas prendre de risque. Alors tu sais ce qui te reste à faire si tu ne veux pas finir en prison. Vue ta tronche, je pari que les autres détenus se feront un plaisir de s’envoyer en l’air avec toi.

Elle avait la main sur la tête et ne faisait que pleurer. Ce sont les conséquences de la curiosité ; elle ne m’a pas écouté et maintenant elle en paie le prix fort.

—Sors d’ici avant que je te brise la nuque contre le mur.

Sans demander son reste, elle sort rapidement de la cuisine. Elle sait pertinemment que j’en suis capable. Cette petite ne m’a jamais plu ; elle a toujours eu une façon de me regarder, comme si elle me disait qu’elle voit et sait tout ce que je fais. Mais j’en fais pas fini avec elle, j’attends qu’elle s’en aille d’abord avant de crier victoire. Et j’espère pour son bonheur qu’elle ne me défiera pas, sinon elle aura signé son arrêt de mort.

J’avoue avoir eu peur quand je l’ai vue derrière moi. Mais la peur ne doit pas prendre le dessus sur moi et mon ambition. Je suis bien trop avancée dans mes plans pour me laisser distraire par une petite sotte de rien du tout. J’ai juré que cet homme serait à moi. Et cela se fera, je ne vais pas baisser les bras quoi qu’il advienne. Je ne suis pas de ces personnes qui se laisse mener par les affres de la vie ; j’en ai vue des vertes et des pas mûres. Alors ce n’est rien tout ça. Quand on nait femme, ce n’est pas pour jouer et s’en aller. Nous devons marquer notre monde et notre époque. Celles qui veulent s’amuser peuvent le faire si elles le veulent, mais je ne fais pas partir de celles-là.

Martine est faible. Ça s’est un fait. Elle ne sait pas la chance qu’elle ait d’avoir un homme de la trempe de Moctar avec elle. Comment une femme peut-elle être aussi lascive dans ses devoirs conjugaux ? Sa négligence et son manque d’attention feront mon bonheur. Son exemple devra me servir de leçon lorsque je serai marié à Moctar. Je devrai prendre soin de lui, faire attention à lui et à tout ce qu’il désire en tant qu’homme. Je ne parle pas d’amour ici, mais plutôt de devoir en tant que femme. On ne prend pas l’engagement de se mettre dans un foyer en comptant sur l’aide de la cuissière ; on ne fait pas d’enfant et compter ensuite sur la nounou pour qu’elle puisse l’éduquer.

Moi je n’étais là que pour m’occuper du bébé, pas du père. C’est vrai que j’avais déjà l’intention de le séduire. Mais je ne savais pas que cela serait aussi facile. Je pensais que j’aurais à fournir des efforts considérables. Au contraire, j’avais l’impression que Martine me poussait dans les bras de son mari. Je m’occupe de tout ; et même pendant la période où ils s’étaient réconciliés, quand ils finissaient de faire l’amour c’est moi qui l’avais encore les dessous et les draps qui contiennent souvent leur semence à tous les deux.

Mais aujourd’hui elle va payer pour sa négligence et son laxisme. Les hommes comme Moctar ça ne court pas les rues et je ne vais pas cracher sur la chance que j’ai. Je sais qu’entre nous ce  n’est que du sexe pour l’instant. Néanmoins, je préfère ça à rien du tout.

J’assaisonne une dernière fois mon plat, il est fin prêt et peut être servir. Bon appétit mon amour. Je sens qu’à partir de cet instant, tu es à moi pour toujours.

*

**

***

Martine

 

Je me sens très fatigué ses temps-ci. J’ai été voir Sié hier, c’est lui qui est devenu mon gynécologue. Vu que c’est lui qui a été la première personne à me faire remarquer que je suis enceinte, j’ai préférée me faire consulter chez lui. Et depuis lors j’y vais régulièrement pour mes visites. Parce qu’apparemment, la grossesse ne se présente pas bien. Je suis tout le temps anémié en dépit du fait que je prenne mon sirop pour le sang.

Il m’a intimé l’ordre de me reposer, et de me vider la tête de tout stress inutile.

Comment cela est-il possible avec tout ce que je traverse avec Moctar. Je le sens de plus en plus distant. J’ai réintégré notre chambre conjugale comme me l’a recommandée Maman. Mais à ma grande surprise, Moctar a pris ses affaires pour aller dans la chambre d’ami. Je n’ai pu lui en parler, car je ne veux pas qu’il pense que je me préoccupe de ce qu’il fait. Mais n’est-ce pas le cas ?

À la vérité, je souffre de ce qui se passe entre lui et moi. C’est mon mari et je l’aime beaucoup, peut-être plus qu’au premier jour. Je reconnais que j’ai été un peu trop dure envers lui et Fatou en ce qui concerne cette histoire de reçu d’hôtel et tout. Mais je me suis sentie tellement mal à l’idée qu’ils puissent se jouer de moi. J’y suis allé fort, seulement c’est ma nature d’être caractériel. Aussi je ne sais pas ce qui m’a prise ; la colère est vraiment mauvaise conseillère et j’aurais dû le savoir car maman me l’avait bien dit. Je me rappelle encore de tous ses conseils qu’elle me donnait. Mais je suis tellement bornée, que je me suis bouchée et les oreilles et la raison. J’ai fermé mon cœur aux supplications de mon mari, pire, j’ai même essayé de lui casser la tête.

Mon Dieu comme je regrette tout ça !

J’espère qu’il n’est pas tard. Mon orgueil m’a portée un peu trop loin dans mon désir de me venger.

Mais me venger de quoi et de qui ? Fatou est mon amie, ma sœur. C’est la seule personne qui me connaisse réellement car nous avons partagés tant de chose ensemble. Et voici depuis plusieurs mois que je n’ai plus de ses nouvelles, elle me manque beaucoup. Mon époux qui ne veut même plus me sentir. Au début c’est moi qui le fuyais, mais maintenant c’est le contraire. Il faut que je puisse remédier à cela. Je vais m’humilier pour mon foyer. Je dois faire table rase et demander pardon à mon mari et à mon amie. C’est vrai que j’ai été vraiment intolérante. Je ne sais pas ce qui m’a pris ; et comme maman l’a dit je n’ai pas fait preuve d’un esprit de discernement. J’ai été trop rapide dans mes conclusions ; encore une fois cette partie impulsive de moi a pris le dessus sur ma raison et voilà que j’en paie les frais.

Mais out ça finira aujourd’hui. Quand Moctar rentrera ce soir, nous parlerons. Je demanderai pardon, nous mettrons les choses à plat. Après ça nous irons chez Fatou. Je veux qu’elle me pardonne et revienne dans ma vie comme avant. Je sais que c’est facile de le dire, mais je ne veux pas la perdre et ce même si j’ai déjà tout faire pour que cela arrive.

Pour l’instant, j’ai envie d’une bonne sauce Gbagbassou avec assez de piment. Avec la grossesse, j’en suis devenue une grande adepte. J’en mange de manière presqu’exagérée. Mais ça me fait beaucoup de bien, et grâce à la forte consommation de piment, je n’ai pas toujours la nausée.

J’appelle donc Akabla pour qu’elle m’en prépare. Elle est de nouveau toute seule ; car la petite Mota s’en est allée depuis bientôt un mois. Elle ne m’a pas donnée de raison valable. Elle m’avait l’air triste même de partir, car elle n’a pas arrêtée de pleurer. Je lui ai demandé si c’est parce que je suis méchante envers elle, ou bien si j’ai eu à la blesser dans mes propos. Mais toutes ses réponses ont été négatives ; et elle s’en est allée. J’ai vraiment eu de la peine pour elle, parce que c’est un brave petit. Mais bon avec ses filles on n’est jamais au bout de ses surprises.

Akabla m’a rassurer qu’il n’y a rien, que c’est surement un homme qui lui monte la tête pour la mettre dans son lit. Je n’ai donc pas insistée, et lui ais reversé son argent en prenant soin d’en ajouter.

—Akabla est ce qu’il reste de la viande fumée dans le frigo ?

—Il reste un sachet si je ne me trompe pas.

—D’accord ! Tu vas prendre ça et me faire un bon Gbagbassou avec du riz local.

— Avec beaucoup de piment non ? dit-elle en souriant.

—Si si ! Toi-même tu connais ce que j’aime. Terminais-je dans un petit rire.

Je ne sais pas ce que je ferai sans cette fille. Elle m’est d’une aide sans nom ! Non seulement elle s’occupe d’Orphée, mais elle prend bien soin de nous autres, les grandes personnes. Je ne l’ai jamais vue en colère ou même entrain de rechigner. C’est une vraie perle. Maintenant que mon fils marche et parle comme un grand, j’ai peur qu’elle ne demande à partir. Il faut que je puisse en parler avec elle ; car je suis enceinte et j’aimerais qu’elle reste ne serait-ce que jusqu'à l’accouchement. Après quoi j’ai bien envie de voyager avec ma petite famille. Ça fait longtemps que nous n’avons pas prit de vacances ; nous en avons besoin pour nous ressourcer.

Je me dis qu’un petit moment  en famille pourrait nous faire du bien à moi et à mes garçons. Je veux réunir ma famille, recréer mon monde tel qu’il était. Je veux que tout redevienne comme avant. Je l’ais trop dit peut-être, mais je crois qu’il est temps que je mette en pratique tout ce que je dis. Je me fais un plan d’action afin de concrétiser toutes ces pensées positives. Une chose est sûre pour moi, il faut que je puisse régler toutes ces histoires avant la venue de mon deuxième bébé. Je veux que ce dernier arrive non seulement dans de bonnes conditions, mais je veux aussi qu’il vienne trouver ses parents déjà réconciliés et qui auront beaucoup de temps et d’amour à lui donner.

Je finissais mon bain lorsqu’Akabla vient m’informer que je pouvais passer à table. Je m’habille et part m’installer dans la salle à manger. L’horloge murale sonne 20 heures. Je ne sais pas si Moctar est rentré. Je demande à Akabla et celle-ci me dit qu’il est déjà là ! Moi qui ne le savais même pas. Par ailleurs il n’a pas jugé nécessaire de passer me saluer, et voir comment je me porte. Mais je vais finir de manger et on parlera ensuite je dois aussi lui faire le point de mon rendez-vous avec Sié; c’est bien qu’il soit dans la chambre. Ainsi nous pourront discuter à l’abri des oreilles indiscrètes.

Lorsque j’ouvre la soupière contenant la sauce, je sens une légère odeur de poisson qui me prend à la gorge et me donne même la nausée. J’ai pourtant dis à Akabla que je ne voulais même plus sentir du poisson, je ne mange que de la viande fumée et de la volaille. Plus de poisson jusqu’à nouvelle ordre, parce que je ne supporte plus ça. Mais j’ai l’impression qu’elle en a mise dans ma sauce. Néanmoins, je me sers pour voir le goût. Et comme d’habitude c’est exquis. J’oublie un instant l’odeur du poisson ; mais plus je mange, et plus je sens quelque chose montée en moi. J’ai soudain mal à l’estomac et je me tords sous l’effet de la douleur. 

Qu’est ce qui m’arrive ?

N’en pouvant plus, je dépose la cuillère et m’attrape le ventre. Je sens que je vais vomir. Je n’arrive plus à rien avaler.

Seigneur suis-je en train de mourir ?

Non pas maintenant mon Dieu, j’ai tellement de temps à rattraper avec Moctar. Surtout pas maintenant que je veux ouvrir les yeux sur mes erreurs du passé. Pas maintenant que je veux que tout redevienne comme avant dans ma vie.

Puis soudain, je sens des coups dans le ventre. La douleur se propage dans tous le corps, puis à mon bas ventre. C’est comme si un volcan entrait en éruption dans le ventre. Comme s’il se déroule un combat de boxe dans mon utérus. 

Je veux crier à l’aide, mais aucun son. Comme si ma voix m’avait quitté ; des larmes d’impuissance coulent sur mes joues. Il faut que je puisse crier au moins pour qu’on sache que je me meurs toute seule.

Dans un dernier essaie de survit, je fais tomber mon plat qui part se briser sur le sol. Je me sens évanouir, et j’emporte dans ma chute la nappe de table et tout ce qui se trouve dessus.

La dernière vision que j’ai est celle de Moctar courant pour me rattraper ; puis ce fut le néant. 

La nounou de mon fil...