Chapitre 2
Ecrit par EdnaYamba
Chapitre
2 :
Mélanie
BOMO
-
Je ne comprends pas Ghislain, tu me dis bien
qu’il n’a personne non !?
-
Oui. Il n’a pas de copine ça fait plus de
3ans.
-
Depuis plus de 3 ans tu dis !?
demandé-je, intéressée par un peu plus de détails.
C’est ainsi que j’apprends
par Ghislain qu’Antoine avait une copine au lycée de LEBAMBA. Ils étaient
ensemble de la 4e en seconde, puis un jour de retour des vacances,
il a tout arrêté sans donner plus d’explications à la jeune fille. Elle a beau
eu se plaindre chez tous les amis d’Antoine, il ne changea pas d’avis. Et
depuis, on ne lui connait plus aucune autre relation. Tout ça me semble
bizarre, et je suis d’autant plus vexée que malgré mon aveu, il m’ignore. Et
pourtant je suis belle, j’ai tout ce qu’il faut là où il faut alors je ne
comprends pas pourquoi il me repousse.
Je suis amoureuse d’Antoine depuis l’année passée quand
je suis venue en vacances au village, c’était le plus beau des garçons du
village, nous admirions ses abdos ma cousine et moi chaque fois qu’il jouait au
ballon.
On se mettait aux premiers rangs, mais jamais son regard
n’a louché vers moi, je ne comprends toujours pas pourquoi pourtant je suis
belle. Ma mère me le répète toujours, je pourrais faire tomber à mes pieds
n’importe lequel des hommes que je voudrais avec mon teint mat et mes courbes
généreuses et aguicheuses. D’ailleurs j’ai bien reçu quelques poèmes çà et là
de quelques garçons mais d’Antoine BOUMI rien.
Malgré tout ce brulant amour à l’intérieur de moi, je
suis rentrée en ville en espérant qu’il passerait mais toute l’année, je n’ai
pensé qu’à lui. Qu’une fois le bac proclamé, mes papiers faits, je me suis prise
un billet pour le village. Parce que je savais bien qu’il serait là pour le
dernier tournoi inter village.
C’est alors que j’ai décidé de tenter ma chance en
faisant de Ghislain, le petit-ami de ma cousine mon émissaire. Ils jouent tous
les deux dans l’équipe du village. Mais c’est à un mur que je m’heurte, Antoine
BOUMI, ne veut pas de moi.
Et je ne peux m’y résoudre.
Je l’aime. Je rêve de lui tous les soirs, je me vois dans
ses bras puissants et le matin je n’ai pas envie de me réveiller tellement
c’est agréable.
-
Mais ma belle, me dit Ghislain, tu vas à la
fac, il y a de beaux garçons là-bas, laisse tomber BOUMI s’il refuse.
Laisser tomber BOUMI ? Je ne peux pas ! Je l’aurais paroles de
Mélanie BOMO. Par tous les moyens.
-
Toi qui le connait bien, dis-moi que puis-je
faire pour qu’il s’intéresse à moi ?
Ghislain me regarde dépassé par ma détermination. S’il ne
savait pas que je suis une personne déterminée maintenant il le saura, quand je
veux quelque chose, je l’obtiens. Quitte
à remuer ciel et terre pour l’avoir. On ne refuse rien à Mélanie BOMO. Rien.
Après mon entretien avec Ghislain, je prends le chemin
qui mène à la maison. C’est une des plus belles maisons du village. Papa l’a
faite construire en dur, elle ne ressemble en rien à toutes ces demeures à
l’architecture datant de la préhistoire, en terre battue qu’il y a sur mon
chemin. Un peu comme la maison des MOUKAMA.
J’aperçois Isabelle dehors, préparant le repas. Chaque
fois que je la vois, je ne peux m’empêcher de remercier Dieu de n’être pas
elle. On a environ le même âge, mais elle fait tellement vieille avec ses
tresses au fil. Elle ne porte jamais rien de neuf. Rien. Et son destin semble
déjà tragique si on croit les dires des gens du village. Aucun garçon ne la
regarde et toutes les filles se moquent d’elle. La dernière fois en
accompagnant Gnomba, les jeunes filles à son approche se sont mises à fredonner
un chant plein de pamphlets à son endroit. J’ai quand même éprouvé un peu de
pitié à son endroit, c’était méchant. Au fond qu’a-t-elle fait pour mériter
ça ?
Une famille maudite, m’aurait répondu Gnomba.
Si seulement on pouvait choisir sa famille. Mais ce n’est
pas le cas.
Je ne vois pas pourquoi la faute de leurs parents
retombent sur elles, mais bon je ne suis pas le bon samaritain pour l’aider, ça
ne me regarde pas tout ça.
Elle se lève et nos yeux se croisent. Je m’empresse de
détourner mon visage et de continuer ma route.
Antoine BOUMI
-
Mon garçon, me dit mon père alors que nous
rentrons des champs de ma mère, je vois les jeunes de ton âge avec des copines.
C’est à cet âge qu’on sait déjà avec qui envisager l’avenir, c’est à cet âge
que j’ai épousé ta mère…
Mon père s’arrête
et prend une mine inquiète.
-
Je ne t’ai jamais vu avec une fille du village,
aucune rumeur ne m’est parvenue sur toi, hormis le fait que tu repousses toutes
les jeunes filles qui t’approchent. Aurais-tu un problème que tu ne me dis
pas ?
-
Papa, je ne comprends pas très bien où tu
veux en venir !
-
Je veux dire Antoine, est-ce que en bas
là-bas, dit-il en en posant un regard vers mes parties génitales, ça
fonctionne ?
Je ne peux m’empêcher de rire. Si je m’y attendais ?
Je sais que la réputation d’un homme pour la plupart se bâtit au nombre de
conquêtes qui passent par son lit, mais je n’avais pas imaginé qu’on puisse
douter de ma virilité parce qu’officiellement je n’ai pas de copines. Mais
alors que je ris, l’expression de mon père devient de plus en plus grave.
-
J’ai pensé t’emmener chez mon oncle au
village voisin, il règle ce genre de cas.
-
Ce n’est pas la peine papa, je vais très bien,
ça fonctionne aussi très bien !
-
Alors c’est quoi le problème, tu trouves que
les filles du village ne sont pas assez jolies pour toi ?
Si je répondais oui. Ce serait une insulte. Autant me
taire. Et si je répondais qu’il y a bien une qui me plait, je ne crois pas que
ce soit le bon moment pour qu’il sache de qui il s’agit.
-
Y en a qui font même bien l’école, si c’est
ça ton problème, complète-t-il, tu sais que nous ne t’empêcheront jamais de
fréquenter qui que ce soit sauf les filles de la famille MOUKAMA.
Oui ce n’est pas le bon moment pour lui parler
d’Isabelle. Même si à ce moment je me demande ce qu’il en penserait.
-
Et si jamais j’aimais une fille MOUKAMA ?,
me risqué-je à demander.
-
N’y pense même pas ! riposte automatiquement papa, cette famille
est à éviter comme la peste, la dernière chose que je voudrais c’est que mon
garçon finisse mal !
-
Mais papa cette histoire de malédiction est
ridicule !
Il me lance un regard
menaçant comme si j’avais offensé je ne sais quelle divinité en le disant.
-
J’ose espérer que tu n’es pas amoureux d’une
fille MOUKAMA, me dit-il d’une voix qui se voulait autoritaire, si c’est le
cas, tu ferais mieux d’oublier. Moi vivant jamais !
-
Ce n’est pas le cas papa, mentis-je, effrayé
par l’expression que je lisais sur son visage.
-
Maintenant on rentre !
Ma discussion est close. Et nous reprenons le chemin pour
la maison alors que mon père est silencieux moi je suis pensif. Je savais dès
les débuts avec Isabelle que cette histoire ne serait pas gagnée d’avance, mais
qu’au fil du temps cette histoire serait trouvée ridicule. Mais là maintenant
comme un doute m’envahit.
Moi
vivant jamais !
Je connais mon père pour ses résolutions. C’est un homme
très dur.
-
Bonjour BOUMI, lance Hyppolite BOMO quand
nous passons devant chez eux.
Mon père s’arrête pour discuter avec Hyppolite BOMO. Le
directeur de l’école publique. Je reste à l’écart quand papa m’interpelle pour
me dire de le suivre à l’intérieur de la maison, où Hyppolite nous offrait un
peu de ce vin qu’il a fait le matin.
Alors que nous nous asseyons à l’extérieur, Hyppolite
fait appel à sa fille qui revient accompagné de sa cousine Mélanie.
-
Mélanie, je ne savais pas que tu étais là,
lui dit son oncle.
-
Je suis venue papoter avec Gnomba un peu, mon
oncle. Bel ma sogha !
-
E na wè ! lui répondons-nous.
-
Bernard, c’est ma nièce Mélanie, la fille
d’Albert !
-
Ah oui, elle a bien grandis dis donc !
ma fille tu as quel âge maintenant ?
-
17 ans ! répond-t-elle
-
Elle vient d’obtenir son bac, elle aussi.
-
Oh mais c’est bien ça ! mon fils Antoine
aussi, dit mon père tout fier, vous vous connaissez non !?
-
Oui, on va souvent le voir jouer !
répond Gnomba.
-
C’est bien allez-y supporter votre mari. Vous
savez que dans la tradition vous êtes ses petites filles et donc ses femmes, allez-y
marquer votre terrain oh ! nous taquine Hyppolite.
-
Vraiment avant c’est comme ça qu’on se
mariait, dit mon père, hein Antoine, regarde tes petites filles là comment
elles sont belles, voilà une intelligente et belle….
-
Surtout que nous cherchons à unir nos
familles depuis le temps ! approuve l’autre
Il ne manquait plus que ça. Soupiré-je alors que je vois
Gnomba et Melanie qui sourient et se lançent des regards complices.
Elles se retirent ensuite en se chuchotant je ne sais
quoi. J’espère que Mélanie, n’entend pas prendre au sérieux les dires de son
oncle et de mon père. La dernière chose que je voudrais c’est l’avoir tout le
temps dans mes pattes. S’ils veulent unir leurs familles, ils composeront sans
moi. Je ne compte pas me mettre en couple ave Mélanie.
***
C’est la mi-temps.
Le village de BOUNDONO mène 2-0. L’entraineur essaie de
nous remonter les bretelles, il n’est pas question qu’on perde alors qu’on est
en demie- finale comme l’année précédente. Je jette un regard autour de moi,
les gars sont épuisés et moi aussi d’ailleurs, il faut dire que les gars de
BOUNDONO nous ont malmené depuis le début du match, ils sont en forme.
-
Antoine c’est toi le capitaine et c’est toi notre buteur !
on compte sur toi !
Quelle responsabilité ! Je suis moi aussi épuisé mais
en tant que capitaine je me dois de remotiver l’équipe ce que j’essaie de faire
avant le coup de sifflet annonçant la reprise du match. On change de tactique
et au bout de 15 minutes on parvient à réduire le score, les gars sont à
nouveau motivés avec les cris de la foule, les jeunes du village sont là, alors
que je mène le ballon, un joueur de l’équipe commet une faute sur moi dans la
surface de réparation. L’arbitre siffle le pénalty.
Aucun gars de l’équipe ne veut porter la charge sur ses
épaules de rater le but qui pourrait nous faire égaliser.
Devant les buts face à LEPENDI le gardien d’en face, je
fais une petite prière.
Vas-y
BOUMI
C’est la foule qui crie mon nom. Je regarde, je vois
quelques visages connus, mes frères sont là, Mélanie qui croisent les doigts en
prière, je regarde encore plus loin quand je la vois dans un coin Isabelle.
Elle est donc venue. Elle me fait un sourire qui sert à
me donner le courage dont j’avais besoin avant de tirer.
-
Hip hip houra ! crie-t-on dans le bar où
on est descendu fêter notre victoire.
Nous allons en finale !
-
BOUMI tu es un Dieu du ballon ! me dit
MATASSA un gars de l’équipe, non seulement tu as égalisé mais tu as marqué
aussi le but qui nous fait aller en finale.
-
N’abusons pas ! dis-je en souriant, je
n’ai pas les compétences de Messi ou de Ronaldo !
-
Ça c’est ce que tu crois type, au village tu
es la star toutes les filles ne parlent plus que de toi, appuie Ghislain, en
parlant de filles…
Quand nous levons nos regards, c’est Mélanie et ses
cousines qui avancent vers nous.
-
On est venu fêter avec vous ! j’offre la
prochaine tournée ! nous dit-elle alors que les gars heureux poussent des
cris et leur font de la place.
Elle s’assoit à côté de moi, m’offrant un sourire radieux
alors que je m’éloigne un peu. Depuis la conversation avec mon père, j’ai
l’impression qu’elle a gagnée en assurance. Elle est amoureuse je le sais alors
je n’ai pas envie de lui donner de faux espoirs. Autant garder des distances.
-
Détends-toi BOUMI, je ne vais certainement
pas te manger ! me sourit-elle.
-
Ey gars, tu as peur des femmes
maintenant ? ey les gars BOUMI fuit la femme ! me taquine un gars de l’équipe qui a suivi la
scène, ce qui entraine l’hilarité générale
Les gars commencent à me chahuter et bientôt ça vire au
fait qu’on ne m’a jamais vu avec une femme et que je serais certainement
puceau. Ça m’agace. Ils se foutent tous de ma gueule. En colère, je me lève et
les laisse seuls au bar alors qu’ils crient tous de protestation. Je regarde à
ma montre il est 21h, j’ai rendez-vous avec Isabelle. Je vais m’asseoir à notre
lieu secret attendant qu’elle arrive.
C’est assez frustrant de la voir toujours en secret et de ne pas pouvoir
montrer à ces idiots qui se moquent de moi que je suis bien viril et que j’ai
l’une des plus belles filles du village. Si seulement les choses pouvaient être
simples. Je prends des pierres que je balance nerveusement dans le vide en
attendant son arrivée, en proie au doute. L’incertitude quant aux lendemains et
au futur de toute cette histoire. Frustré de ne pas vivre pleinement mon amour.
Je regarde l’heure, elle est en retard de 30 minutes.
Peut-être ne viendra-t-elle plus ? Cependant 20
minutes plus tard, le craquement des feuilles mortes m’indique qu’elle est là.
-
Tu es en retard Isabelle ! lui dis-je
quand elle apparaît.
-
Désolée, ma grand-mère était encore éveillée,
c’est comme si elle soupçonnait quelque chose, elle ne voulait pas dormir…
-
Ça va toujours être comme ça ? dis-je,
las.
-
Quoi ? me demande-t-elle perdue
-
On va toujours vivre cachés ? jamais on
ne pourra se voir à la lumière du jour, au vu et au su de tout le monde ?
continué-je énervé
-
Tu sais bien que ça ne dépend pas de
nous !
-
Et ça dépend de qui ? tu n’en as pas
marre toi !
-
Et qu’est-ce que tu veux que je fasse ?
tu connais toi-même ce que les gens de ce village pensent de ma famille, si ta
famille l’apprend tu sais bien les conséquences,
-
Je suis fatigué Isabelle, lâché-je
-
Qu’est-ce que ça veut dire ? me
demande-t-elle en essayant de maitriser sa voix tremblante.
-
Je…je…je ne sais pas
A peine ai-je terminé ma phrase, qu’elle retournait les
talons, s’en allant en courant. C’est le cœur serré que je la regarde s’en
fuir, me demandant moi-même ce que signifiait ma phrase que je regrettais déjà
d’avoir prononcé.