Chapitre 2 : Si tôt parti
Ecrit par Verdo
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LE JOURNAL D'AMINA (Roman)
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****Chapitre 2 : Si tôt parti…****
« La chance sourit toujours à ceux qui savent attendre ».
Verdo Lompiol…
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Quelques mois plus tard…
J’étais plus attachée à mon père qu’à ma mère. Je l’accompagnais n’importe où il allait. Je pleurais même lorsqu’il devait se rendre quelque part qui ne nécessitait pas ma présence. Pour m’amadouer, il me prenait dans ses bras et me berçait avec de douces chansons qu’il me composait et qu’il me chantait. Cela me calmait du moins un petit peu. Maman par contre restait souvent à la maison et s’occupait de son commerce. Elle m’apprenait généralement en absence de papa à articuler et guidait également mes premiers pas. Elle m’avait fait confectionner chez le menuiser du quartier un petit chariot de marche en bois sur lequel je m'appuyais pour me lever sans risque et qui favorisait mon déplacement. Lorsque je tombais et que je me mettais à pleurer, elle faisait également semblant de pleurer avec moi bien avant de me prendre dans ses bras et de me consoler. Des fois, elle laissait ses activités et me portait au dos tout en me chantant des chansons le temps que je m’endorme pour qu’elle me couche…
Je passai avec mes parents les meilleurs moments de mon enfance. Je ne pourrais jamais l’oublier. J’étais pour eux comme ils le disaient souvent « la meilleure des choses qui leur soit arrivée » car quelques années après ma naissance, leur situation avait incroyablement changé. Papa avait réussi à économiser un peu d’argent malgré son travail de métayer et à louer des parcelles de terrain où il cultivait lui-même des céréales. Au début, les récoltes n’étaient pas assez pour les commercialiser ; pour cela elles nous servaient de provisions durant les périodes arides et les moments de famine. Cela me rappelait les temps où j’aidais maman à les mettre en grenier. Mais par la suite après que papa ait appris plusieurs méthodes modernes d’irrigation et d’enrichissement des sols chez certains agriculteurs voisins, les choses avaient tourné en notre avantage. Il les mettait petit à petit en pratique et les fruits commencèrent à tenir la promesse des fleurs. Les récoltes comme par magie s’accroissaient au fil des saisons. Les parents décidèrent donc de les commercialiser. Pour cela, ils contactèrent chacun de son côté des contacts de la ville pour qu’il leur aide à trouver des acheteurs. Et comme cela petit à petit, ils écoulaient facilement les stocks. A la longue, ils devinrent les grossistes du village en matière de céréales. Papa ne labourait plus lui-même le sol, par contre il engageait des sociétés spécialisées de la ville qui avaient des outils modernes et qui faisaient rapidement et efficacement le travail. Il avait également construit des fermes où il élevait les animaux domestiques. Quant à maman, il lui avait arrangé un petit espace avec des machines à l’appui qui lui permettaient de mettre en bidons et en sac les céréales. Elle ne se contentait donc plus seulement de la vente. Elle avait également plusieurs employés sous ses ordres.
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Une dizaine d’années plus tard, nous avions fait fortune. Nous étions devenus les plus riches du village. Papa avait construit un manoir qui laissait tout le monde sur sa salive. Il avait également construit plusieurs maisons qu’il avait mises en location. Il était devenu un modèle et était dorénavant craint de tous. Sa famille avait essayé à plusieurs reprises des approches pour pouvoir renouer les liens avec lui sans succès. Il la renvoyait souvent. Il n’avait jamais digéré le fait que son propre père puisse le mettre lui et sa femme qui était presque à terme de sa grossesse à la porte en pleine nuit, casser les murs et ôter le toit de la chambre. Ces genres de blessures prennent assez de temps avant de guérir.
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J’eus le brevet d’études du premier cycle à seize ans. Les parents m’organisèrent une petite fête en famille avec l’aide de quelques uns de leurs amis qui étaient venus de la ville. Pendant la soirée, nous mangeâmes et bûmes comme jamais. Papa annonça devant tous les invités que je partais en Europe pour continuer mes études. Il m’avait inscrit dans un lycée scientifique où plus tard je pourrais choisir à l’université la médecine. C’était mon rêve de devenir médecin. Je n’arrêtais sans cesse de le lui répéter à chaque fois que nous discutions. Sincèrement, je ne m’entendais pas à cela. C’était venant de lui et maman mon cadeau d’anniversaire. Je me sentais la plus heureuse au monde. D’ailleurs, comment ne pas se sentir pareille lorsqu’on a de si merveilleux parents qui s’occupent on ne peut plus bien de nous ?
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Malheureusement ma vie de jeune fille chouchoutée de ma famille fut très tôt étouffée dans l’œuf et mes rêves de faire des grandes études s'estompèrent. Dans la semaine qui suivit la fête de ma réussite au BEPC, un grand malheur s’abattit sur nous. Mon père fut retrouvé mort dans l’un de ses champs et personne ne savaient concrètement ce qui lui était arrivé. Il avait quitté la maison à l’aube pour parcourir tous ses champs car cela faisait pratiquement des mois qu’il ne l’avait pas fait. Cela lui permettait de savoir où en était les cultures et aussi de contrôler le travail que ses contremaîtres abattaient.
La douleur était trop vive pour moi et mère et le chagrin inexprimable. Papa était le centre de notre monde à tous les deux. Sans lui, nous n’étions rien. Pourquoi il a fallu que la mort le fauche précisément au moment où il allait jouir du fruit de son dur labeur ? Qu’allons-nous devenir ? Etaient les questions que je me posais intérieurement face auxquelles je n’avais aucune réponse.
Nous enterrâmes notre seule famille avec le cœur meurtri. Tout était à nos frais. Sa famille de leur coté n’avait pas bougé un petit doigt pour nous venir en aide ni financièrement, ni matériellement. Ce ne fut lors de la veillée et de l’enterrement qu’elle était venue s’installer pour recueillir les cotisations des invités. Maman les avait regardés faire sans broncher durant tout le déroulement de la cérémonie. Que c’était désolant !
Après les cérémonies de funérailles de papa, sa famille envoya une délégation de trois personnes composée de deux de mes oncles et une de mes tantes pour informer ma mère d’une réunion de famille qu’elle organisait le lendemain à laquelle elle devait obligatoirement assister. C’était la première fois qu’ils mettaient les pieds chez nous. Du vivant de mon père, ils n’oseraient jamais. Maman s’était contentée de leur dire « ok » pour qu’ils dégagent de la maison et que nous pussions respirer du bon air. Ils étaient vraiment ridicules ! Ils n’avaient jamais aimé ma mère du vivant de mon père et de plus aucun d’entre eux ne m’avait jamais adressé la parole. Pourquoi maintenant ? Je conseillai donc à maman de ne pas se rendre à la réunion ; de plutôt quitter le village pour s’installer en ville. Papa n’était plus là pour nous protéger et cela sentait à l’avance beaucoup la vengeance. Une fois en ville, nous allons trouver des acheteurs pour ses biens. Cela nous appartenait.
À suivre...
RDV mardi 27-10-2020 pour la suite.
Écrit par Koffi Olivier HONSOU alias Verdo Lompiol. (Noveliste togolais).
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