Chapitre 22
Ecrit par Christelle K
CHAPITRE 22
Arrêtée devant la porte de la classe, j'attend qu'on fasse l'appel. Nafi est dans une autre classe . Je suis tellement énervée . Je n'aime pas me mélanger aux gens ..
Ce que je deteste dans les ecoles publiques, c'est le nombre élevé d'élèves dans une seule classe . Les ecoles publiques au burkina faso pour la plupart sont souvent le reflet de la jeunesse laissée à elle même . Aucune éducation !
Franchement, je n'aime pas du tout cette école. Si seulement je n'etais pas autant pauvre .
Je me demande parfois pourquoi je suis née métisse si c'est pour souffrir?
Les gens ont parfois tendance à me regarder à deux fois . Partout , on parle de l'égalité des races mais lorsque je marche dans la rue, je remarque que les gens ont toujours ce complexe d'infériorité là .
L'appel du surveillant me ramène à la réalité. Je remarque quelques regards sur moi . Je n'y prête pas attention.
Il commence à appeler les premiers noms de l'alphabet . Lorsque mon tour arrive , j'avance lentement.
Je veux entrer comme les autres lorsque le monsieur me regarde d'un air bizarre . Je ne comprend pas .
- Presente lui dis je une seconde fois.
- Tu es blanche et tu as un nom de famille burkinabé ?
Lorsqu'il me dis ça, j'ai envie de l'étrangler .
- Monsieur s'il vous plait je peux entrer ? Ajouté je d'un ton énervé
Franchement , je ne comprend pas . Il est censé faire l'appel ou rechercher nos origines?
- Mais vous êtes impolies ! Vous êtes nouvelle ?
Je ne le repond pas et me met à l'ecart . Lorsqu'il sera prêt à me laisser entrer ,je le ferai . Mais moi , Vita je ne répondrai pas à ces questions stupides .
Que je sois blanche ou noire avec un nom de famille burkinabé il est où son problème ?
Je regarde les autres . Ils ont tous les yeux braqués sur moi , ce qui a le don de m'enerver encore plus que je ne le suis .
Quelques minutes plutard lorsqu'il finit d'appeler la centaine d'élève. Il me fait signe d'entrer .
Mon regard se porte sur une place vide au fond de la classe . Je m'y assied .
J'ai la mine toujours serré . Il vient de gacher ma journée ce maudit surveillant .
Pleins de garcons se tournent et me fixent. Je ne les calcule même pas . Si seulement je pouvais disparaitre de cette classe .
Je prend mon téléphone et met mes ecouteurs .
Au bout d'une heure ,aucun prof ne vient donc je me lève et sort . J'apelle Nafi pour qu'elle me rejoigne .
Je lui explique ma mésaventure avec ce surveillant.
Elle me taquine au point que je finisse par sourire. On rentre à la maison car , d'après les élèves aucun prof ne viendra . Tant mieux alors .
****
Je prend mon sac à dos et tournoie sur moi - même. Le vieux miroir posé depuis belle lurette, me donne une image assez satisfaisante de moi .
Mes cheveux sont attachés en chignon . Des klaxons me parviennent. Je cours et ferme la porte à clé rapidement . Nafi est là. Je me dépêche de jeter la clé au fond de mon sac .. et hop c'est partie pour une journée aussi penible que les précédentes.
Les cours ont bien commencé. Et bon , pour le moment ca va .
Aujourd'hui particulièrement, je suis contente. Qu'ai - je? Bah rien, je me suis juste lèvée du bon pied .
*
* *
- Hey ..
Je pousse la moto .
- Hey dit encore la voix .
Je tchipe agacée. Qui est ce?
Je regarde du coin de l'oeil. Euh cette voiture je la reconnais . Oh c'est celle d'Edouard .
J'avance vers lui . Il baisse bien sa vitre et me tend la main . Je lui repond chaleureusement.
- Ca va?
- Euh oui bien et vous ?
- Mais arrête de me vouvoyer .
- ok désolé ca va et toi ?
- Voilà que tu parles bien. Dis moi tu ne serais pas à l'université toi ?
Oh la honte ! Oups ! Je lui avais dit que j'etais à l'université. Je regarde mon kaki . Il se met à sourire .
- Euh ..
- Bon pas grave . Tu ne m'as plus fait signe depuis la dernière fois?
- weh
- ok on se voit ce soir ? J'ai bien envie de discuter avec toi.
- ok je t'apelle . Je dois y aller . J'ai cours ce soir
- ok bye . Et j'attend ton appel hein .
- D'accord .
Je le regarde s'eloigner avec sa voiture classe. Le bruit même du moteur aah . L'argent oh l'argent.
Mon téléphone se met à vibrer . Je regarde . C'est un message . Woow je n'en reviens pas . Édouard vient de me faire un transfert de 10 000f . Je sautille .
Je balaie du regard les alentours à la recherche de Nafissa . Qu'est ce qu'elle fait ? Je la vois arriver de loin , toujours aussi morose . Franchement quand je retrouverai ma meilleure amie joviale ? Depuis que ce Karl a fait son apparition dans sa vie. Que dis - je ? Son passage , plutôt, je ne reconnais plus ma "djarabi" mon coeur en langue dioula ) .
***
Edouard est passé me chercher à la sortie des cours . J'ai dû y aller en tenue parce que j'ai devoir demain et je ne connais absolument rien . Le regard des élèves , lorsque je suis montée avec lui etait à son paroxysme . Les filles surtout mais bon , moi , je m'en fiche de ce que les gens pensent de moi ou du moins du moment que je marque les attentions , c'est déjà bien .
- Qu'est ce que tu prend ?
- Une glace m'ira merci .
- Seulement ?
- euh oui .
- ok sinon ca va ?
- oui je vais bien . Ca peut aller juste le stress des cours.
- Ah d'accord .
Il continue de me questionner et on bavarde pendant une bonne heure . C'est bizarre mais il ne me pose aucune question sur le fait que je lui ai menti sur ma classe .
- il faut que je rentre . Demain j'ai devoir .
- oh il fallait me le dire . Je ne savais pas . Bonne chance surtout
Il paye la note et achète une seconde glace pour moi sans même que je m'en rende compte . Elle sera pour Nafi vue que je l'ai abandonnée ce soir . Ce sera mon prix du pardon .
**
- Ça m'a vraiment fait plaisir de bavarder avec toi .
- oh merci .
- j'aurai aimé de déposer chez toi mais bon ...
- non c'est mieux ici . Je ne veux pas te fatiguer . C'est juste à côté merci beaucoup .
J'ouvre la porte . Il me retient par la main . Je le tourne et il met quelque chose dans ma main .
De l'argent ? C'est sûr.
- non merci lui dis je en le lui tendant .
Je fais juste semblant pour ne pas qu'il me croit intéressée . Sinon qui refuse l'argent gratuitement ?
- non si tu refuses je vais me fâcher.
- ok merci bye lui je tout en souriant
Je descend cette fois- ci . Je le regarde s'en aller en souriant. Heureusement qu'il n'a pas insisté pour me raccompagner. Je ne veux pas que ses pneus frolent le sol de la misère dans laquelle je vis . Je murmure tout en mettant mes ecouteurs la tête baissée . Je tombe nez à nez avec Ahmed .
Mon coeur bat comme à l'accoutumé. Ça ne m'etonne plus du tout cette sensation. C'est toujours ainsi qu'il reagit lorsque mon regard se pose sur ce Ahmed . Je l' ignore et continue mon chemin.
- Vitalina.
Depuis quand il m'apelle Vitalina ? Je ne suis plus "sa princesse" ou encore "Vita" . Je ne l'écoutes même pas et augmente le volume de la musique tout en hâtant le pas .
Il retire mes ecouteurs de force et me tire vers lui . Je me retire vite de son emprise .
- C'est quoi ? Tu veux quoi ? Est ce forcer de te parler ? Tu sais que j'existe ? Tu te souviens de moi ? Non ! Donc laisse moi passer mon chemin. Demain j'ai devoir .
- Woh toutes ces questions pour moi ?
- bye .
- c'etait encore ce monsieur hein?
- qui ?
- le monsieur avec qui tu viens d'arriver . Je t'ai vu de loin .
Je rêve ou il me fait une scène de jalousie ?
- Ahmed! Je ne perdrai même pas mon temps à bavarder avec toi . Je n'ai pas ton temps et je n'ai pas de compte à te rendre. Même si c'était mon gars il où ton problème ?
Je lève le regard vers lui et decouvre qu'il a les yeux plongés sur ma poitrine .
- Ahmed!
- euh oui oui begaie- t-il .
- tu étais comme ça avec ce gars ?
- comme ça comment ?
Il pointe du doigt mon décolleté. C'est vrai qu'il est vraiment plongeant . Mais il où son problème ? D'ailleurs pourquoi il regarde là- ba .
- Bye je t'ai déjà dit que j'ai devoir demain .
- mais je t'ai dit que je veux discuter quelques secondes avec toi .
- mais moi non ajouté - je agacée.
Je remet mes écouteurs. Mais je ne met pas la musique à fond cette fois ci .
Je chantonne et me dirige chez moi .
- Je vais au Maroc la semaine prochaine. J'ai eu la bourse.
Je reste figée sur le champ . Je me tourne vers lui . J'ai bien entendu ? Ou mon esprit me joue des tours ? Il va où ? Au ma quoi ? Maroc ?
- tu dis quoi ?
- je viens de recevoir la bourse pour le maroc . J'avais déposé tout en minimisant mes chances mais finallement j'ai été accepté.
- ok dis je d'une petite voix .
- tu me dis ok ? C'est tout,
- tu veux que je te dise quoi ? Lui dis- je la voix tremblante.
Une vague d'émotions m'envahit tout d'un coup . Entre colère et tristesse , je ne sais pas où me situer .
Un silence de mort s'installe entre nous. C'est bizarre mais je me sens triste. J'ai toujours vécu avec Ahmed depuis que je suis petite, je l'ai toujours vu . Et comment dirais - je c'est devenue une habitude .. il est devenue mon indispensable.
- je suis contente pour toi . Tu pourras etudier dans de bonnes conditions. C'est ce que tu as toujours voulu n'est ce pas? Mentis -je
- oui mais ...
- ......
- je ne veux pas être loin de toi .
Je sursaute .
- tu es .. humm Vita je t'aime et tu le sais . Malgré nos embrouilles tu restes celle qui est dans mon coeur . Jours et nuits tu envahis toutes mes pensées . Je t'aime depuis qu'on est tout petit. Tu es la femme de ma vie . Je te jures que je n'ai jamais aimé aucune autre à part toi .
Pendant qu'il parle , je ne sais quelle attitude adopter .
- hum mais tu viendras les vacances non?
Il soupire ..
- non .... tu sais que la situation est un peu compliquée avec mes parents .. donc je dois faire le minimum de depense possible . Pour ce fait, je préfère m'abstenir de cela .
Encore l'argent ! Toujours l'argent! Comme quoi l'argent est le moteur de ce monde. Celui qui le nie a tord sur toute la ligne .
Donc si je calcule bien, il ne sera là que dans 5 ans environ? Et moi je fais quoi? Suis- je censée l'attendre pendant tout ce temps ?
Je me contiens difficilement . Une larme s'echappe de mes yeux . Je la repousse violemment . Donc c'est ça l'amour ?
Un jour , je feuilletais un document de philosophie d'une amie de classe supérieure et j'y ai vu une phrase qui m'a vraiment paru absurde mais j'en comprend tous le sens et toute la profondeur maintenant . Je ne me souviens plus du nom du philosophie en question .
Il disait " Un seul être vous manque et tout est dépeuplé " .