Chapitre 22: Avancer malgré tout.

Ecrit par L'UNIVERS DE JOLA

CHAPITRE 22: AVANCER MALGRÉ TOUT 

Vraiment désolée pour le silence, c'était indépendant de ma volonté. 



**MYRNA NZAOU**


Voix des bébés : (pleurant) Niennn, Niennn, Niennn.


J'avais pris ma taie d'oreiller pour me boucher les oreilles. C'était fou comme ces petits monstres là aimaient pleurer pour un oui ou un non et surtout la nuit. Ils ne pouvaient pas rester tranquilles comme tout le monde. J'avais bien dit ici que c'étaient des choses qui devaient venir me gâcher davantage la vie. Voici maintenant ce qui était là. Ils passaient tout leur temps à pleurer et à geindre. Depuis maintenant un mois, ils ne faisaient que ça. 


Ça faisait exactement un mois jour pour jour que ces choses avaient vu le jour et depuis, je ne les avais jamais touché et je n'avais pas l'intention de le faire. Depuis cette première fois que maman Jeanne avait voulu me les donner et que je n'avais pas voulu cela n'avait pas changé. Je l'entendais encore me gronder à l'hôpital.


Maman Jeanne : Tu veux les porter ?

Moi: Non. 

Maman Jeanne : Oh! Non comment? Tu ne vas pas les porter?

Moi: Non. 

Maman Jeanne : Tu as quel problème ?

Moi: Je t'avais dit que je ne voulais pas de ces enfants maman Jeanne, je ne veux pas d'eux. Tu avais dit que je devais seulement accoucher et tu devais les prendre. C'est bon maintenant, tu peux les prendre et faire ce que tu veux d'eux car je n'en veux pas.

Maman Jeanne : Tu refuses tes enfants Mimi?

Moi: Ce ne sont pas mes enfants. 

Maman Jeanne : Ce ne sont pas tes enfants, ce sont les enfants de qui? Ils ne sont pas sortis de ton ventre ? Tu es consciente des paroles que tu es en train de prononcer ? Tu ne sais pas qu'il y a des esprits qui se baladent dans les airs pour entendre les paroles et se saisir de ça pour agir ? Tu ne sais pas qu'en tant que mère, toutes les paroles que tu prononces à l'égard de ces enfants ont un poids sur le plan spirituel ? À peine nés que déjà tu veux les condamner? Je ne vais pas continuer cette discussion avec toi au risque que tu ne sortes plus de bêtises que tu n'en as déjà dit. Je te pardonne aussi à cause de la douleur de cette opération que tu as subi et ton jeune âge. Mais à l'avenir, si tu n'as rien à dire de bénéfique sur la vie de ces enfants, il faut garder ta bouche fermée, c'est mieux. Si c'est pour dire des bêtises, ne parle plus. 


Elle était allée s'asseoir avec lui et l'avait bercé jusqu'à ce qu'il se calme avant d'en prendre un autre et ainsi de suite. Plus tard ma gynécologue et une sage femme étaient venues me voir et prendre ma température. Cela faisait près de 10 heures de temps que j'avais accouché apparemment. Le médecin m'avait dit que mes enfants et moi étions des vrais miraculés car il y avait eu plusieurs complications qui ne s'expliquaient d'ailleurs pas et que de toute sa carrière, elle n'avait jamais vu ça. Une chose était sûre, c'était soit que Dieu m'aimait tellement avec mes enfants et qu'il veillait à ce que quelque soit les complications qui pouvaient survenir ,sa bonne mains devait être sur nous, soit c'était que les esprits protecteurs de ma famille étaient très forts. Mais que ce soit dans l'un ou l'autre des cas, l'entité qui veillait sur moi et mes enfants, tenait à ce que nous restions en vie. Je m'étais fait la réflexion que si cette entité pouvait laisser mourir ces enfants, cela ne m'aurait pas dérangé. 


Elle m'avait ensuite félicitée en me disant que j'avais eu trois costauds garçons en très bonne santé de 2kilos 300 chacun. Elle disait que c'était énorme pour une grossesse multiple. Elle m'avait aussi dit que compte tenu du fait que j'étais endormie et que les enfants devaient être nourris, ils avaient dû prendre le biberon mais apparemment ils ne voulaient pas de ça, donc je devais les nourrir personnellement. Heureusement pour moi, ma poitrine était aussi sèche qu'une branche d'arbre séparée de son arbre en saison sèche, donc il n'y avait pas de lait. Elle m'avait dit de ne pas m'inquiéter que cela viendrait quelques jours plus tard et que je pourrais le faire. Pour le moment, les bébés allaient se contenter du biberon même s'ils ne le voulaient pas. Pour une fois, Dieu avait écouté ma prière en ne me donnant pas le lait pour ces créatures. De toutes les façons, je n'allais pas les toucher. 


Enfin, elle m'avait dit que j'allais rester pendant une semaine là-bas en raison de mon opération, je devais suivre quelques soins. Mon séjour à l'hôpital avait ruiné toutes les économies de maman Jeanne aussi bien qu'une partie de la facture avait été prise en charge par son église. Durant cette semaine, le personnel médical avait constaté que je ne voulais pas m'occuper, encore moins toucher les enfants et ils avaient dit que j'étais atteint d'une "babyblues" et que c'était assez fréquent chez la plupart des femmes qui venaient d'accoucher et que ça passerait rapidement. Toutefois, ils avaient conseillé à maman Jeanne de me surveiller, que si cela durait plus de deux semaines, elle devait le signaler à l'hôpital car cela pourrait être "une dépression post-partum" et c'était quelque chose de très grave pour laquelle je devais être suivie. Mais ni moi, ni maman Jeanne, ne prenions en compte ce qu'ils étaient en train d'énoncer comme théorie. Nous savions très bien que mon rejet de ces choses était lié à une cause qui transcendait largement leur venue au monde et au-delà, leur existence. 


Nous étions sortis la deuxième semaine, j'avais toujours hyper mal à ma blessure et j'avais toujours du mal à marcher mais les voisins m'avaient énormément aidé. Ils avaient d'ailleurs fait une petite fête de bienvenue avec quelques membres de l'église et ceux du marché. Tout le monde cherchait à savoir comment s'appelaient les enfants et ils m'avaient tous regardé pour avoir la réponse et j'avais sorti.


Moi: NDZAMBA .

Tantine Maggie :  C'est le nom de leur père NDZAMBA ?

Moi: (Du bout des lèvres) Oui. 

Tonton Demba: Et les prénoms ? Tu as déjà trouvé les prénoms ?


Maman Jeanne n'arrêtait pas de me mettre la pression pour que je nomme les enfants mais je ne le faisais pas. Comme il y avait des gens autour, il fallait que je le fasse et tant qu'à y faire, j'allais les appeler comme leur père comme ça à chaque fois que je les verrais à cause de la forte ressemblance qu'il y avait entre eux, et que je les appellerais par ses prénoms je me souviendrais toujours qu'eux et leur père avaient détruit ma vie et j'allais les détester tout autant que lui. 


Moi: Kilian, Lilian et Ethan. Ce sont leurs prénoms.

Maman Jeanne : (mettant en hauteur celui qu'elle avait dans les mains, un large sourire sur les lèvres) Voici Ethan, Ethan NDZAMBA. 

Tantine Maggie : (montrant celui qu'elle tenait) Lui c'est qui?

Maman Jeanne : (le fixant) Lui c'est Kilian, Kilian NDZAMBA.

Pasteur Mike : (qui tenait le troisième, le regardant) Tu es donc Lilian NDZAMBA. 

Maman Raphaëlle : (femme du pasteur) Ce sont des jolis prénoms, en plus ça leur va très bien. Kilian, Lilian et Ethan NDZAMBA.


Mon cerveau m'avait envoyé l'acronyme "KLEN" par lequel j'appelais leur sorcier de père et mon cœur s'était serré dans ma poitrine ravivant la colère que je ressentais à son égard. Le pasteur m'avait demandé si j'étais d'accord pour qu'il prie pour les enfants. Le regard que maman Jeanne avait posé sur moi m'avait dissuadé de tout écart de langage car elle savait que comme je restais loin de ces enfants, je restais aussi loin de l'église et tout ce qui se rattachaient à savoir les pasteurs et compagnie. Les gens que je considérais comme ma famille et devant qui j'étais née et j'avais grandi, n'avaient pas hésité à me tourner le dos, me clouer sur une croix et me chasser loin d'eux donc je ne voulais plus. 


Moi: Oui. 


Sa femme et lui avaient prié pour eux . Ils avaient demandé à Dieu de les protéger contre toutes les attaques du diable , qu'ils soient source de paix et de bonheur, qu'ils soient des instruments de réconciliation et que surtout l'objet de beaucoup d'amour de la part de leurs parents. J'avais regardé ces gens avec des yeux masquant à peine ma colère et ma frustration. Maman Jeanne qui l'avait remarqué, m'avait dit d'aller m'allonger à la chambre car j'avais besoin de me reposer. Elle avait raison car si je restais là pour continuer à écouter toutes les bêtises que les uns et les autres étaient en train de dire sur ces créatures, leur père et moi, j'allais finir par exploser. 


Le lendemain, maman Jeanne était allée faire la déclaration de naissance des enfants et les papiers étaient sortis une semaine plus tard. Comme elle ne travaillait plus et avait fini toutes ses économies à l'hôpital, nous n'avions plus rien. C'était son église qui survenait à nos besoins. J'avais beau être fâchée contre ces gens, je devais reconnaître qu'ils aimaient vraiment maman Jeanne et veillaient toujours à ce qu'elle ait toujours de quoi manger.


Entre-temps, je n'avais pas changé d'avis à propos des enfants, je ne les avais jamais touchés. Maman Jeanne avait fini son français en vain sur cette affaire, j'avais gardé le statut quo. Elle les avait même laissés dans ma chambre dans l'espoir que je change d'avis mais rien. C'était elle-même qui s'occupait d'eux et de moi. Pour ne pas changer, ces monstres ne voulaient pas du biberon et c'était à coup de force qu'ils les buvaient. Malgré les un mois qu'ils avaient passé à les boire, ils ne voulaient toujours pas. Et la nuit comme ça, c'était des grands cris qu'ils poussaient, on aurait dit que quelqu'un les battait. 


J'attendais patiemment que maman Jeanne vienne les calmer comme elle le faisait à chaque fois mais elle ne venait pas. Entre leurs cris et mes tétons qui tiraient à cause du lait qui était venu en grande quantité au bout de la deuxième semaine, je ne savais plus où donner de la tête. Je m'étais levée du lit et j'étais allée dans la chambre de maman Jeanne. Elle était allongée en donnant dos à la porte.


Moi: (la secouant pour la réveiller) Maman Jeanne ?

Maman Jeanne : C'est quoi NZAOU ?

Moi: Les bébés pleurent.

Maman Jeanne : Et?

Moi: (surprise) Oh.

Maman Jeanne : Tu me réponds "oh" par rapport à quoi? Les bébés pleurent et c'est moi qui vais faire quoi? Tu ne sais pas pourquoi ils pleurent? Tu as vu le lait dans mes seins ? Tu viens me réveiller pour me dire que les bébés pleurent, et alors? Comme tu ne veux pas les nourrir, il faut les laisser pleurer. Tchuip. Les bébés pleurent, les bébés pleurent. Il ne faut pas m'énerver la nuit là. 


Elle avait remis son drap jusqu'aux épaules. J'étais restée debout en train de la regarder un moment avant de retourner dans ma chambre où les choses là n'avaient pas arrêté de faire du bruit. 


Moi: (en colère) Vous êtes obligés de faire autant de bruit ? Bande de petits sorciers comme votre père. Vous allez bien pleurer. 


J'étais remontée sur mon lit et je m'étais rallongée toujours avec leurs cris dans les oreilles. Au bout de dix minutes de pleurs, maman Jeanne était rentrée en colère dans la chambre.


Maman Jeanne : Attends NZAOU, tu es allongée sur le lit alors que les enfants pleurent à côté de toi? Ça c'est quel genre de cœur que tu as et puis tu es insensible aux cris de tes propres enfants ? Normalement c'est parce que


Elle n'avait pas terminé sa phrase et s'était dirigée vers le berceau. Je l'avais vu déshabiller les enfants l'un après l'autre jusqu'à les laisser complètement nus. Je pensais que c'était parce qu'elle avait constaté que les enfants étaient mouillés. Mais elle avait soulevé Ethan et Kilian, oui aussi fou que cela pouvait paraître, j'arrivais à distinguer qui était qui d'un simple regard. Nous étions d'ailleurs les seuls à le faire, maman Jeanne et moi. Les autres les confondaient à chaque fois. Mais moi je les reconnaissais très bien que ce soit à leur vue ou au son de leur voix. Depuis le salon, lorsque l'un d'entre eux se réveillait et pleurait, j'étais capable de savoir lequel c'était. Je ne savais pas comment c'était possible, mais c'était ainsi.


Maman Jeanne les avait donc pris et les avait emmenés devant moi.


Maman Jeanne : (visage fermé) retire moi ton pagne.

Moi: (confuse) Hein?

Maman Jeanne : (fâchée) J'ai dit de me retirer ton pagne Myrna ne me fait pas perdre mon temps. 


J'avais retiré le pagne avec lequel je dormais et je m'étais retrouvée en slip. 


Maman Jeanne : Arrange moi l'oreiller là. (Je l'avais fait) Adosse toi dessus. 

Moi: Mais je.

Maman Jeanne : (Grondant) NZAOU adosse toi sur cet oreiller tout de suite si tu ne veux pas que je te gifle. 


J'avais fait comme elle l'avait dit. Quand j'avais compris qu'elle voulait me déposer les enfants sur la poitrine j'avais voulu me défiler mais trop tard, le petit corps de Kilian touchait le mien et presque aussitôt celui d'Ethan le suivait. Elle était allée chercher Lilian et il retrouvait ses deux frères. Nous avions poussé un cri à l'unisson avant de nous mettre à pleurer. Quelque chose s'était brisé dans mon cœur ce jour et il avait complètement fondu. J'avais pleuré à chaudes larmes ce jour. C'était comme si c'était ce jour que j'avais accouché. Toutes les barrières que j'avais érigé et les résolutions que j'avais prise avaient été balayées d'un seul coup et j'avais réalisé qu'il s'agissait de mes enfants, mes trois petits bébés qui étaient posés tout contre moi et maintenant pleuraient parce qu'ils avaient faim. 


Maman Jeanne : Maintenant il faut les jeter si tu veux. 


Elle s'était retournée et était sortie de la chambre, nous laissant en train de pleurer tous les quatre. 


Moi: (pleurant) C'est fini mes bébés, c'est fini. Je vous demande pardon, je ne vais plus vous rejeter. Je vous aime, je vous aime tellement mes petits anges, pardonnez moi, maman vous demande pardon. 


J'avais fait passer ma main autour d'eux pour resserrer ce contact et ils s'étaient automatiquement calmés. 


Maman Jeanne : (rentrant avec un grand sourire sur les lèvres) Tu vois que c'est bien non? Il faut maintenant les jeter.

Moi: (pleurant) Non, maman Jeanne, ce sont mes enfants.

Maman Jeanne : Hum. Il faut leur donner à manger. Ils ont faim.


Elle avait retiré Ethan et avait placé les deux autres sur chacun de mes seins. À peine leurs bouches connectées aux tétons qu'ils s'étaient mis à les tirer comme si leurs vies en dépendaient, provoquant en moi des sensations à la fois bizarres mais agréables. J'avais du mal à mettre des mots sur ce que je ressentais. Ils avaient tous les deux les yeux rivés sur mon visage et me regardaient comme s'ils me disaient qu'ils avaient commencé à vivre. Le sourire béat que j'avais sur les lèvres ne me quittait plus. Lilian avait été le premier à quitter mon sein, repus pour laisser la place à son frère qui comme les deux autres avait tiré goulûment sur mon sein. Maman Jeanne avait fait faire son rot à Lilian avant de le rhabiller, il n'avait pas tardé à s'en dormir. Kilian l'avait rejoint un peu plus tard en suivant le même processus. J'étais restée dans un temps d'intimité avec Ethan. C'était moi qui lui avait fait faire son rot avant de le donner à maman Jeanne qui l'avait rhabillé et mis à côté de ses frères. Je m'étais levée et j'étais allée me mettre devant le berceau pour les regarder. J'avais remarqué que maman Jeanne voulait se retirer pour retourner dans sa chambre mais je m'étais rapidement retournée et j'étais partie l'étreindre par le dos.


Maman Jeanne : Aïe ! C'est quoi qui se passe encore NZAOU ?

Moi: (Dans son dos) Merci……. maman.


Je l'avais senti se figer et rester immobile pendant un moment. Elle s'était ensuite retournée avec des larmes coulant le long de ses joues et m'avait serré dans ses bras. Nous avions pleuré l'une dans les bras de l'autre. Cette nuit, nous avions commencé à être une véritable famille. Je ne voyais plus la femme qui m'avait sauvé de la mort à plusieurs reprises et de plusieurs façons différentes, mais plutôt une mère, c'était ma mère. De son côté aussi, elle venait de gagner une fille, pas la fille qu'elle avait rencontré un jour de pluie et qui s'apprêtait à sauter d'un pont, mais sa fille. Elle venait par la même occasion, d'être véritablement grand-mère et moi une mère. Nous étions restées ainsi pendant un long moment avant de toutes les deux , nous allonger sur mon lit et nous endormir. 


Les jours qui avaient suivi, je m'occupais maintenant très bien de mes enfants et je souriais toute seule devant eux pour le grand bonheur de leur grand-mère que j'appelais désormais maman. Tout allait bien, sauf que j'avais maintenant du mal avec leur identité. Maintenant que j'avais accepté que c'était mes enfants, je ne voulais plus qu'ils portent le nom de cet homme. D'ailleurs je ne les appelais pas par leurs prénoms mais "bébé" . Je voulais changer et j'étais allée me renseigner à la mairie avec maman Jeanne et on nous avait dit d'aller au tribunal. Sur place, on nous a compliqués et demandé beaucoup d'argent. Nous étions sorties de là.


Maman Jeanne : Je t'ai dit de laisser les noms des enfants tranquilles, c'est joli et ça passe avec leurs visages, toi tu ne veux pas, tu veux compliquer. Maintenant tu vas trouver tout l'argent qu'on demande là où ?

Moi: (le cœur lourd) On va laisser, ils vont rester avec ça comme ça. 


Nous étions rentrées à la maison et je m'étais efforcée de prononcer ça. J'avais décidé de faire abstraction de leur père car il était évident que même si je ne voulais pas, j'allais être obligée de le voir tous les jours sur les visages de ses enfants qui, plus ils grandissaient, plus ils lui ressemblaient. La chose était telle qu'ils avaient pris jusqu'à son sourire et même ses mimiques. Si ce n'était pas de la sorcellerie, je ne savais pas c'était quoi. C'est-à-dire que j'avais seulement été sa mère porteuse hein, ils n'avaient rien pris de moi. On pouvait faire des choses comme ça ? 


Quand ils avaient commencé à ramper, à se lever, à marcher, à m'appeler maman ou à rire de leur toutes petites voix mélodieuses, mon cœur se gonflait de bonheur et de fierté. Je ne pouvais échanger ces moments contre rien au monde. Je savais que je ferais n'importe quoi pour ces enfants qui étaient véritablement un baume sur mon cœur et avait sû mettre la joie dedans. Eux et leur grand-mère étaient toute ma vie.


Quand les enfants avaient eu un an, on avait fait une petite fête et le lendemain nous avions commencé à aller vendre au marché avec maman Jeanne. Nous l'avions fait jusqu'à ce que les enfants aient deux ans. J'avais dû arrêter parce qu'ils tombaient beaucoup malades.


Maman Jeanne : Tu ne viendras plus au marché Mimi, tu vas rester à la maison avec les enfants. Tu as compris ce que le médecin a dit. 

Moi: Mais moi je ne veux pas rester à ne rien faire ici mam (mam=maman)

Maman Jeanne : Maintenant tu veux qu'on fasse comment, les enfants ne peuvent plus venir au marché et il faut quelqu'un pour rester avec eux . Ou bien on fait aussi une petite table ici devant la porte et tu vendras à la maison. 

Moi: D'accord. 


Le lendemain même, j'avais commencé à vendre à la maison et je veillais aussi sur les enfants. On avait beaucoup de clients, surtout de la gente masculine qui défilaient à la maison. Mais je ne déridais pas mon visage, il était toujours fermé et ce même quand j'étais au marché. Maman Jeanne disait souvent qu'à force de froisser mon visage de la sorte, j'allais avoir beaucoup de rides et je faisais fuir les clients, elle me disait de sourire un peu, mais je ne le faisais presque jamais hors de la maison. Les courageux qui avaient la malchance de vouloir me faire des avances, je les insultais, les mouillais, les chassais de chez moi ou les frappais avec quelque chose. Au quartier on m'appelait la cartésienne, l'orgueilleuse, celle qui ne chiait pas ou encore l'arrogante parce ce qu'en dehors du bonjour et du bonsoir, je ne parlais avec personne et je m'en foutais. Je ne voulais pas me lier à qui que ce soit car je savais d'expérience que les gens étaient mauvais et près à t'abandonner à la première occasion.


L'école, est-ce que j'avais pensé à y retourner ? La réponse était non. D'abord, je n'avais pas les moyens pour le faire, car s'occuper des enfants coûtaient très cher. Ensuite, je n'avais personne avec qui laisser les enfants pour les garder en mon absence. Enfin, en dehors de mon acte de naissance, je n'avais aucun document administratif qui pourrait justifier de mon niveau scolaire alors j'avais mis une croix dessus. J'economisais pour mes enfants qui devaient aller à l'école quand ils allaient avoir quatre ans et c'était l'année qui allait suivre…



LE JOUR OÙ MA VIE BA...