Chapitre 24

Ecrit par Myss StaDou

Chapitre 24


Je le regarde un moment avant de me ressaisir et pousser sa main loin de ma joue.

 

− Qu’est-ce qui te prend ?

− Drôle de manière de me souhaiter un bon retour, dit Victor en riant.

 

C’est quoi cette histoire ? Il ne manquerait plus qu’il m’invite à boire un verre pour qu’on trinque sur son retour.

 

− Tu t’attendais à quoi ? Aux majorettes et à la fanfare nationale ? Tu rêves !

 

Victor rit et me regarde de la tête aux pieds, visiblement heureux de me voir. Il tend ensuite la main vers moi, comme pour me toucher. Là, je vois rouge, tout d’un coup. Je ne me suis moi-même pas compris, mais je lève juste ma main et une gifle bien appliquée part directement sur la joue droite de Victor ! Ce sont les yeux grands ouverts qu’il porte la main à sa joue, perdu par ma réaction. Je m’éloigne un peu de lui – on ne sait jamais. Victor me regarde, je vois la colère passée dans ses yeux. Il serre les poings et me regarde.

 

Eh Dieu… S’il me rend la gifle, que dirais-je ?

 

− Nick, pourquoi as-tu fait ça ? 

− Ne m’énerve même pas ! C’est quoi cette histoire ?

 

Victor s’approche de moi :

 

− Nick, écoute…

− Ne m’approche même pas. Je vois ta manière de venir t’excuser. Tu veux juste abuser de moi.

− Pourquoi dis-tu de pareilles choses ?

 

Je le regarde et la colère ne fait que monter. Heureusement qu’il n’y a pas trop de gens en route, sinon on leur offrira un spectacle de premier choix.

 

− Tu as du couscous chaud dans ta tête ? Tu te ramènes et tu m’embrasses comme si de rien n’était ? demandé-je, ahurie. Tu es fou ou tu t’en fous ?

− Mais…

− Mais quoi ? C’est quelle manière de traiter les gens ça ? Même pas un peu de considération, ni de respect pour moi.

− Pourquoi réagis-tu comme ça ? demande-t-il avec stupéfaction.

 

C’est quoi son buzz ? Il veut jouer aux gentils ? Cette fois, il a menti ! J’ai trop cotisé la colère pour son retour. Je vais lui donner ça ! En parlant, je m’éloigne peu à peu de lui. Je préfère rester à distance. Je ne me fais pas confiance quand cet homme est dans les parages. Victor veut m’approcher.

 

− Si tu es sage, ne m’approche pas sinon je vais crier ici ! Je suis dans mon quartier, n’oublie pas !

− Calme-toi, bon sang !

− Me calmer ? Pourquoi ? Parce que toi tu veux ? Comme d’habitude, il ne s’agit que de toi. Tu t’en fous de moi ou de ce que je pense.

 

Il me regarde sans répondre.

 

− C’est quoi ces silences ? Tu ne me parles pas. Je suis fatiguée d’être traitée de la sorte.

 

Il me regarde, ne comprenant pas où je veux en venir.

 

− Ce n’est pas ce que tu crois, Nick. Ne t’énerve pas.

− Vu la manière dont tu t’es approchée de moi, je sens que tu n’es pas prêt cette fois non plus à parler. Va- t’en ! Ne viens pas gaspiller mon temps pour moi. J’ai des choses à faire.

 

Victor tend la main vers moi :

 

− Tu veux mettre carte sur table ou pas ?

 

Il me regarde, hésitant.

 

− Mais Nicole….

− Va t’en ! Et ne m’approche que si tu es prêt à me dire la vérité. Je te préviens : avec tout ce qui s’est passé ces dernières semaines, je n’écouterais ni demi-vérité, ni mensonge.

 

Je m’éloigne. Après deux pas, je m’arrête sans me retourner:

 

− Victor ?

− Oui ? répond-il, la voix pleine d’espoir.

− Tu m’as trop déçu. Et je refuse de souffrir de tes mensonges.

 

Je vais vers la route et je m’enfonce dans le quartier juste pour qu’il ne me suive pas. Je vais chez une amie qui n’habite pas loin, passer du temps chez elle. Au cas où Victor m’attendrait encore devant la maison. 

Mince ! Après tout ce qui s’est passé, il revient, m’embrasse comme si de rien n’était. Ce n’est pas parce qu’il sait que je l’aime qu’il doit en profiter comme un raccourci. À cause de lui, j’ai même failli pleurer l’autre jour au restaurant. Qu’ai-je fait aux hommes ? Toutes ces questions, tous ces doutes. Au lieu de venir m’expliquer pourquoi il était si absent avant son voyage, pourquoi me prévenir par SMS pour que je l’attrape avec deux femmes au resto.

 

Il est 20h quand j’entre dans ma chambre. J’ai tapé les divers avec ma pote jusqu’à on ne savait même plus quoi se dire. Je vois des appels en absence de Victor. Pourquoi je n’y réponds pas ? Je ne veux pas lui donner l’occasion de tourner autour du pot. Je veux qu’on se parle face à face et selon les conditions du moment.  Les baisers, les caresses et les mots doux là, ce n’est pas pour maintenant. Il a failli m’affaiblir la première fois – conséquence de la jachère. Mais je tiens à mettre tout au clair pour être sûre  que tout est vraiment ok entre nous ou cette relation est foireuse. J’aime beaucoup Victor, mais ça ne sert à rien de naviguer dans une relation quand on ne sait même pas dans quelle direction on va.

 

Je m’endors de fatigue. Rêvant de bons moments, de grosses voitures et bien sûr de vie de luxe.

 

Le lundi matin tôt, je dois aller à l’hôpital apporter à manger à ma cousine Rosie et pour voir si elle et le bébé se portent bien. Sa maman est revenue entre temps de Dubaï et elle m’a même remercié pour avoir assisté Rosie. Mais la famille avant tout. Je suis contente que tout aille bien maintenant. C’est clair qu’il faudra un peu de temps pour se remettre. Mais elle est bien entourée cette fois.

 

Il est 10h passé quand j’arrive à la fac. J’ai déjà raté le premier cours. Je vais suivre le suivant. Une migraine atroce et une grosse fatigue me déconcentrent au point où je me décide à rentrer m’allonger. Ça ne sert à rien de rester là si ce n’est pas suivre ce que le prof dit. J’arrive à la maison vers 13h. Quand je veux m’allonger, mon téléphone sonne. C’est Jeanne :

 

− Allô ?

− Allô, c’est moi, dit-elle. C’est comment ?

− Suis là, dis donc.

− Où es-tu ? Je t’ai aperçue tout à l’heure. Maintenant je te guette partout sans pour autant te voir.

− J’ai trop mal à la tête. J’ai préféré rentrer à la maison.

− Assia (expression de compassion). Toi aussi ! Tu pouvais venir t’allonger chez moi.

− Ça va  aller, merci.

 

Elle reste silencieuse un moment.

 

− Et je fais comment avec Victor maintenant ?

− Qu’est-ce qu’il y a avec Victor ? demandé-je, intriguée.

− Il m’a appelé ce matin pour nous inviter à manger après les cours. Je lui ai dit de venir vers 16h30. Mais tu es déjà partie.

− Vous avez fait votre programme à deux. Allez-y à deux. Je dors.

− Mais Nicole…

− Jeanne pardon, j’ai mal à la tête. Je ne veux pas bavarder maintenant. On se voit demain. Bonne journée.

 

Crac !!! J’ai raccroché mon téléphone. Victor ne passera par aucun raccourci pour gérer cette situation. Il va faire les choses comme il se doit ou il laisse !

 

Je n’entends pas les autres rentrer. Junior vient me réveiller vers 18h.

 

− Nini.

Il secoue violemment mon pied.

 

− Nini, wah, réveille-toi ! C’est le sommeil de quoi que tu dors comme ça depuis ?  Debout !

− C’est quoi ? demandé-je d’une voix lourde. Qu’est-ce qu’il y a à couper le sommeil des gens ?

− Abeg (pardon), lève-toi d’abord. Je veux que tu m’accompagnes quelque part.

 

J’ouvre alors bien les yeux pour le regarder.

 

− Depuis quand as-tu besoin d’une baby-sitter pour sortir ?

− Juste par mesure de sécurité. Je veux récupérer un truc.

− Hum…Hum… Toi et tes affaires bizarres, maugrée-je avec suspicion. Ce n’est que la nuit que tu as vu pour traiter des business louches ?

 

Il se met à rire.

 

− Il n’y a rien de louche. Si tu veux, après on peut aller manger quelque chose.

− Il fallait commencer par là, commenté-je en souriant. Sors donc. Je me change.

− Nicole et la bouffe ! s’écrie-t-il en riant. Tu ne te fatigues jamais. Toi qui mangeais à peine, tu es devenue une grosse mangeuse internationale.

− Mouf ! Quittes de là. On t’a envoyé ? Sors sinon, demain va nous trouver ici.

− Ok ok, je sors. Mais fais vite et habille-toi bien.

 

Il sort et s’en va dans sa chambre. Je vais dans ma penderie et choisis un haut près du corps noir, accompagné d’un boléro blanc et d’une jupe mi jambe paysanne noire. Je les porte avec une paire de ballerines blanches aux pieds et un sac à main et je suis sortie. Je frappe à la porte de la chambre voisine. Junior sort, bien habillé.

 

− Dis donc Papi, comment tu es chaud comme ça ce soir ?

 

Junior rit et se tourne sur lui. Il porte un pantalon noir avec une chemise et une paire de mocassins noires aux pieds. Ce qu’il est mignon mon petit frère.

 

− Tu es à croquer.

− Merci, murmure-t-il, ému. Toi-même tu ne t’es pas négligée. Tu es belle.

 

Je lui fais la bise.

 

− Merci. Tu es un petit frère valable !

 

Nous éclatons de rire en sortant. Je m’étonne qu’il ne m’ait pas dit oùnous allons d’ailleurs. On s’avance vers la route. La nuit est déjà tombée.

 

− Papi ?

Junior tourne la tête vers moi :

 

− Oui.

− Où allons-nous ?

− Suis-moi seulement. Tu ne me fais pas confiance.

− Si si. Mais je veux quand même savoir.

− La patience est une vertu, dit-il en riant. Tu le sauras bien assez tôt.

 

Arrivés en route, je me dirige vers l’endroit où les taxis prennent des clients.

 

− Non, par ici.

− Ici où ?

 

Il me tire la main et on se dirige vers un taxi garé en bordure de route. Nous montons dans le taxi qui démarre sans rien dire. Je me tourne vers Junior qui est assis sans mot dire. C’est quoi cette histoire ?

 

− Junior ?

− Ne t’inquiète pas. C’est moi qui ai tout arrangé. Je ne vais pas te faire marcher n’importe comment la nuit.

 

Je suis étonnée mais je ne peux rien faire et il est là pour me défendre en cas de danger. On ne roule pas longtemps. Je reconnais le quartier Bastos. Le taxi prend une entrée à droite et se gare devant un petit restaurant pas loin de la route. Je vois Junior descendre sans hésitation et venir ouvrir ma portière. Je descends intriguée. Sûrement Junior a-t-il rendez vous avec quelqu’un ici ? Nous entrons dans le restaurant. Il est beau et décoré à l’africaine. Il n’y a pas encore trop de monde. Junior me dirige vers une table et me fait asseoir.

 

Junior est debout près de moi :

 

− Ça va ? Es-tu à l’aise ?

− Oui, ça va. C’est plutôt pas mal ici.

 

Il sourit et regarde autour de lui, comme s’il cherchait quelqu’un.

 

− Attends-moi ici. Le serveur va venir prendre ta commande. Je serais assis là à côté. Dès que je finis, nous partons. Ok ?

 

Je suis assez intriguée par tout ce qu’il se passe :

 

− Ok.

 

Il va s’asseoir deux tables plus loin. La serveuse vient prendre ma commande. Comme j’ai pitié de mon frère, je commande juste un petit jus. Je ne sais même pas ce qu’il cherche ici, donc mieux ne pas lui sortir une facture kilométrique. La serveuse m’apporte ma conso et l’ouvre. Ça fait à peine quelques minutes que je suis là, toute seule, à observer mon frère que je vois une personne s’approcher de ma table. C’est Victor…

Mon amour, mon comba...