Chapitre 24

Ecrit par EdnaYamba

   

Chapitre 24 :

 

Grace Jeannie MOUKAMA

C’est main dans la main que Jonathan et moi sortons de la pizzeria, nous n’arrivons pas à trouver un taxi alors nous décidons d’avancer un peu à pied. De quoi nous laisser le temps de nous faire à l’idée des sentiments que nous partageons.

-         Il faut que tu saches que je ne compte pas te forcer à quoi que ce soit, me dit Jonathan alors que nous avançons,

-         Mais comment ça va se passer, moi ici, toi en France ? parce que vous allez bientôt retourner et moi, ce n’est qu’après le bac !

-         Le bac c’est cette année, il y a Whatsapp on pourra toujours communiquer tous les jours…

-         C’est  vrai…

J’entends klaxonner derrière nous, et là je panique. Je ne connais que trois personnes avec une voiture, mon père, tantine Mireille et tonton Richard avec sa voiture du service, dans tous les cas, je suis morte.

Quand je me retourne, c’est tonton Dean que je vois qui baisse la vitre de sa voiture. Son regard passe de Jonathan à moi.

-         Je me disais bien que c’était toi : me dit-il,

-         C’est mon oncle, murmuré-je à Jonathan, en lâchant immédiatement sa main, apeurée.

Je m’empresse d’avancer vers sa voiture

-         Bonsoir tonton Dean,

Si tonton Dean m’a vue, il le dira à tantine Mireille, si tantine Mireille sait, ça arrivera aux oreilles de maman et si maman sait, il ne vaut mieux pas que j’y pense maintenant.

-         Tu fais quoi dehors à cette heure ? me demande-t-il, et c’est qui ce jeune homme ?

Je me retourne pour regarder Jonathan qui reste à l’écart attendant.

-         C’est un ami, le petit fils de madame Gisèle maman la connait….

-         Vous vous teniez la main tout à l’heure, alors ami ou petit ami ?

Il fait un de ses sourires malicieux dont il a l’habitude.

-         Quoiqu’il en soit tu es une GRANDE fille, mignonne en plus….c’est de ton âge en plus. Rentre à la maison, je ne dirais rien à ta tante. Eh jeune Homme, crie-t-il à l’attention de Jonathan. qui s’approche.

-         Bonsoir Monsieur, dit-il poliment

-         Alors c’est toi qui secoue ma nièce ?

Il ricane alors que Jonathan tout comme moi, parait choqué par le terme employé.

-         Monsieur, ce n’est pas ce que vous imaginez !

Tonton Dean éclate de rire alors que je ne sais plus où me mettre.

-         Ah les jeunes, sourit-il, mais maintenant plus trop de bêtises, rentrez à la maison ! Gracie tu passes bientôt nous voir n’est-ce pas ?

J’hoche la tête alors qu’il démarre sa voiture. C’est soulagé que je vois sa voiture s’éloigner.

-         C’est ton oncle ? me demande Jonathan dubitatif

-         C’est le mari de la sœur de maman, dis-je,

-         Je l’ai trouvé un peu bizarre…

-         Oui, soupiré-je, inquiète par la suite des évènements.

Tonton Dean ne me trahira peut-être pas mais pourtant je ne suis pas rassurée pour autant.

Je n’aime pas ce sourire qu’il affiche, je n’aime pas ce regard qu’il pose sur moi, mais peut-être que je me fais des idées.

-         Qu’est-ce qu’il y a ? tu as peur…si tu veux je peux expliquer à tata Isabelle…

-         Ne fais pas ça, ici ce n’est pas la France où on peut avoir un petit copain dès 12 ans, moi si maman apprends ça, elle me tue !

 

Isabelle MOUKAMA

-         Ça va ? me demande Mireille en me regardant du coin de l’œil alors qu’elle conduit

J’hoche tout simplement la tête.

J’ai dû l’appeler pour qu’elle vienne me chercher et me voyant troublée, elle m’a emmenée faire un tour pour que je me vide la tête avant de rentrer à la maison. Il le fallait, j’étais trop submergée par les émotions pour rentrer dans cet état. Je n’imagine pas ce que René penserait, ça causerait encore une énième dispute.

« Je serais égoïste si je te demandais de tout abandonner pour moi Isabelle, pourtant Dieu seul sait que si tu le faisais je serais l’homme le plus heureux du monde. Mais cette idée me fait terriblement souffrir parce qu’il n’y a pas que toi et moi »

Antoine et moi sommes restés longtemps dans les bras l’un de l’autre, désolés du sort que nous avait réservé la vie.

Nous n’avions plus rien à ajouter, ce moment avait suffi à remplacer les mots qui auraient encore pu être di. J’avais désormais René et les enfants, il n’y avait plus de nous possible. Bien que j’étais perturbée parce que je venais de me rendre compte que ce que je ressentais pour René ne ressemblerait jamais à ce que je pouvais ressentir pour Antoine, je n’avais rien à reprocher à René, aucune raison ne serait suffisante pour le quitter, il ne méritait même pas qu’une telle pensée m’effleure l’esprit, et mes enfants seraient malheureux. Et quel que soit la décision que je devais prendre, des malheureux il y aurait toujours dans cette histoire, des dommages collatéraux qui n’auraient jamais dû exister si cette femme capricieuse et égoïste n’avait pas décidé de jouer à la marionnettiste avec nos vies. Un choix s’imposait maintenant.

 Et s’il fallait choisir qui serait malheureux ce serait lui et moi, pas mes enfants. J’ai vécu 17 ans durant la souffrance de Grace qui n’avait pas son père près d’elle, je ne le ferais pas à mes garçons, quitte à me sacrifier.

À peine j’arrive à la maison qu’ils viennent se jeter dans mes bras.

René est assis devant le journal.

-         Bonjour chérie, me dit-il alors que je rentre.

Il m’a l’air bien trop calme, ce n’est pas le même René que je quittais ce matin fâché à cause d’Antoine BOUMI. Quoiqu’il en soit c’est mieux parce que je ne suis pas d’humeur pour une prise de tête.

Je vais à la cuisine réchauffer les marmites et venir les servir avant d’envoyer les enfants au lit.

Quand je finis avec les enfants je vais moi aussi me coucher, rejointe bientôt par René. Quand il arrive, je ferme les yeux feignant de dormir. Il retire doucement la couverture et me caresse le long de mon corps au travers de ma nuisette. Je ne réagis feignant toujours de dormir.

Je n’ai pas la tête à ça ce soir. Mais il ne se démonte pas et passe sa main sous mon chemisier, je ferme mes cuisses.

-         Je suis fatiguée René, j’ai eu une journée chargée !

Je retire sa main et refait monter la couverture sur moi.

-         Une journée Chargée, justement ça va t’aider à te déstresser !

Il retire à nouveau la couverture.

-         J’ai dit Non ! lui dis-je en me levant du lit.

-         Non, pourquoi ? parce que tu as couché avec ton ex à nouveau c’est ça !

Il se lève à son tour. Nous nous tenons debout chacun de part et d’autres du lit.

-         Qu’est-ce que tu racontes ?

-         Ne me prends pas pour un imbécile, je t’ai appelé toute la journée tu n’as pas décroché, tu étais avec lui, oui ou non !?

-         J’étais avec lui, mais pas pour ce que tu crois, m’offusqué-je, je suis allée lui parler de Grace. Sa femme est venue me menacer, surtout elle a menacé Grace…

-         Mais merde Isabelle, ne me prend pas pour un idiot ! Grace a 17 ans , si elle a un problème , elle peut très bien le gérer avec son père

-         Elle n’en demeure pas moins ma fille, 17 ans ou pas !

-         Tu cherches des prétextes !  au final, peut-être qu’elle avait raison, tu tournes vraiment autour de son mari !

-         C’est Lydie qui t’a appelée c’est ça ? demandé-je en me rendant compte que lui et moi n’avions pas parlé de cet épisode, et toi  directement tu crois que je t’ai trompé ?

-         Prouve-moi le contraire, recouche-toi sur ce lit et faisons l’amour.

Je ne peux pas croire ce que j’entends. Qu’est-ce qu’il veut insinuer ?

Je n’ai pas couché avec BOUMI, je ne l’ai même pas embrassé pourtant ce n’est pas l’envie qui me manquait mais je me suis retenue à cause de lui, par respect pour lui.

-         Ma parole tu es malade. Je dors dans la chambre des enfants ! lui dis-je en colère

-         Ne te donne pas cette peine c’est moi qui y vais, il ramasse sa taie et sort en claquant bien fort la porte.

-         Surtout  réveille aussi les enfants, murmuré-je en allant me recoucher en colère.

Comme si je n’en avais pas déjà assez subi pour cette journée, il fallait que ça se termine avec une dispute avec René.

Au réveil le matin, je le trouve laçant ses chaussures, je ne sais pas où il va, il ne me dit rien non plus. Quand il finit, il sort de la maison. Pfff

Je le regarde s’en aller sans rien lui dire. Je n’ai pas le temps pour ces enfantillages ce matin, j’ai passé une nuit horrible. J’ai même vu ma pauvre grand-mère assise sur un banc pleurant. Elle pleurait quoi, je ne sais pas. je ne sais pas si c’est mon esprit qui formé tout ça à cause des paroles de Mélanie mais je sais aussi que rien ne doit être pris à la légère, en attendant que BOUMI fasse quelque chose, je dois m’asseoir avec ma fille et lui parler, la prévenir à propos de cette femme que son père a eu comme épouse.

Il est déjà 07h30 elle devrait être réveillée déjà mais quand je l’appelle, c’est la voix encore ensommeillée qu’elle me répond.

-         Tu dors encore à cette heure ? tu es en vacances mais tu es chez ton oncle faut aider ta tante avec les travaux

-         Oui, mama…n

-         Hummm. Bref rejoins moi chez tantine Mireille tout à l’heure !

-         Pourquoi ? j’ai fait quelque chose ? demande-t-elle comme si elle sortait brusquement du sommeil

-         Rien, pourquoi tu me sembles paniquée comme ça ? y a un souci

-         Non, non.. c’est juste qu’il est tôt et ça ressemble comme une convocation

-          Y a rien.. bon y a quelque chose mais viens sur place tu sauras !

Les enfants se réveillent.

-         Allez y vous laver, après vous venez prendre votre petit déjeuner, on va chez tantine Mireille.

C’est à 11h30 que le taxi nous dépose devant le portail de Mireille, les enfants et moi.

 

Grace Jeannie MOUKAMA

C’est le cœur battant que j’ai rejoint maman et tantine Mireille. Tonton Dean m’a peut-être  dénoncée ? Je n’imagine pas la gifle qui va atterrir sur ma joue tout à l’heure.

Quand elles me demandent de les rejoindre dans la salle à manger, je fais mes prières intérieurement.

Je suis presque tentée de me dénoncer moi-même.

-         Gracie, on voulait te parler à propos de la  femme de ton père ! me dit tantine Mireille

Soulagement. Ouf

-         Qu’est-ce qu’il y a avec la femme de papa ? ils ne sont plus ensemble vous savez bien !

-         Oui chérie, mais tout de même tu as écouté comme nous, cette femme est très dangereuse ! renchérit maman, très dangereuse, elle est capable du pire…

L’air grave de maman m’inquiète.

-         Qu’est-ce qu’il y a ?

Je passe mon regard de maman à tantine Mireille, déroutée.

Maman soupire.

-         Après tout tu es grande déjà, elle est venue me menacer hier c’est pourquoi je suis allée voir BOUMI, je ne sais pas ce qu’elle prépare à nouveau mais Gracie tu l’évites au maximum, si elle va à droite tu vas à gauche, je me demande même si en attendant que toute cette histoire ne soit définitivement réglée tu ne devrais pas rester éloignée de ton père

-         Ah ça non, c’est Non maman. Après 17 ans ce n’est pas suffisant ? maintenant que j’ai retrouvé mon père je ne le laisse plus, Non !

-         Mais si je te dis qu’elle est dangereuse ! gronde maman

-         Papa t’a dit quoi quand tu lui as dit ?

-         Qu’il va régler ça, soupire-t-elle, mais j’ai aussi peur Gracie, moi aussi je suis ta mère au cas où tu l’aurais oublié…

-         Je sais maman, me radoucis-je, je sais ! mais si Papa a dit qu’il va régler il va régler ! moi je ne m’éloigne plus de mon père, on vient juste de se retrouver !

Il faut qu’elles me comprennent.

Cette femme ne va pas continuer à diriger nos vies, elle se sait découverte maintenant elle veut créer un vent de peur pour obtenir ce qu’elle veut.

Elle nous a déjà fait assez de mal pour nous en faire encore. Si elle a déjà pu séparer mes parents à jamais elle ne le fera pas avec moi.

Je suis la semelle de mon père désormais, où il va je vais.

-         Je suppose qu’on s’inquiète pour rien , dit Tantine Mireille, tout de même tu feras attention !

-         Oui, promis-je, je ferais attention maman.

-         D’accord.

Elle m’a l’air peu convaincue mais au moins elle accepte.

Je les laisse entre elles alors que je vais trouver les enfants au salon.

À midi la voiture de tonton Dean se gare dans la cour, je me dépêche pour aller rejoindre à nouveau maman et tantine Mireille dans la cuisine.

Bientôt les bruits de ses pas approchent. Je stresse.

Quand il apparait, il embrasse sa femme et  maman.

-         Tu ne viens pas embrasser ton oncle Grace ? me dit-il

J’y vais à contrecœur.

Il me garde  près de lui.

-         Mon Dieu tu as encore grandi, la dernière fois que je t’ai vu tu n’étais pas comme pas

-         Vraiment elle grandi trop vite, dit maman avec nostalgie alors que tonton Dean me garde près de lui, 17 ans déjà, je n’arrive pas y croire souvent !

-         Eh oui, notre petite gracie devient une femme ! approuve tantine Mireille souriante

-         Une vraie femme, il va falloir faire attention bientôt à tous les petits garçons qui voudront tourner autour…. Appuie tonton Dean en me faisant un sourire appuyé, faudra leur dire que tonton Dean est méchant.

Dieu du ciel.

 

 

Antoine BOUMI

Quand j’arrive chez ma sœur, j’y trouve mes oncles. Le frère de mon père en profite pour me  faire le compte rendu de leurs échanges plutôt houleux avec la famille BOMO. Le père de Mélanie aurait explosé de colère à cause de mon absence. Il aurait crié au manque de respect, aurait réfuté les raisons qui lui ont été présentées, sa fille est un ange et moi BOUMI le démon qui lui a volé 17 ans de sa vie sans lui donner en plus la possibilité de concevoir. C’est l’hôpital qui se fout de la charité.

-         Ton oncle a déposé une bouteille de sable, en leur disant que s’il t’arrivait quoi que ce soit à toi ou ta fille, on la tiendrait pour responsable, ajoute maman.

-         J’espère que ça suffira à calmer les ardeurs de cette folle !

-         Avec ça, elle a compris je pense, dit mon oncle, tu sais que c’est très significatif chez nous …. Au moins sur ce côté dis-toi que tu es libre

Et au civil ?

-         Elle refuse toujours de signer les papiers du divorce !

L'orpheline