Chapitre 25
Ecrit par Plénitudes by Zoé
Chapitre 25 :
**** Sabine ****
Ding dong
Charlotte (ouvrant la porte) : Nathaniel chéri, entre mon fils. Comment vas-tu aujourd’hui ? Quel bon vent t’amène ?
Nath (lui faisant la bise) : Bonjour maman, toujours aussi belle dès le matin.
Moi : Bonjour Charlotte, j’espère que vous allez bien.
Charlotte (ne m’accordant pas un regard) : Hum… Nath, arrête de me flatter autant, que tu es gentil mon fils !
Elle et Nath sont passés devant bras dessus bras dessous et j’ai refermé la porte derrière. Je ne me fais aucune illusion concernant Charlotte. Je sais qu’elle ne m’aime pas beaucoup mais je sais aussi qu’elle ne me déteste pas. Je la comprends, Nathaniel est son seul fils et en plus son dernier alors elle le surprotège. Je n’ai pas encore le temps pour m’occuper de ceci mais je pense à prendre un moment pour aller dans le fond des choses avec elle et savoir comment me faire aimer d’elle. Tant qu’elle ne m’insulte pas ni ne dit du mal de moi pour le moment, ce n’est pas ma priorité.
En parlant de priorités, Sara est presqu’à terme et je m’inquiète de plus en plus. Parce que les présages ne sont pas bons. Je veux dire par là que je sais que le bébé sortira sain et sauf mais en ce qui concerne Sara je n’en sais rien du tout. Je n’ai rien vu la concernant or je me suis tellement attachée à cette jeune femme, elle est devenue comme la grande sœur que je n’ai jamais eue. Je ne veux vraiment pas la perdre, surtout qu’elle n’a pas réellement connu de bonheur dans sa vie, des parents partis trop tôt, aucune famille, elle a été trimballée de maison d’accueil en maison d’accueil mais sans jamais perdre sa douceur et sa joie de vivre. Et rien que pour ça je l’admire tellement.
Je suis sortie de mes pensées par les roucoulades de la mère et du fils. Hum, je les regarde seulement, quand ces deux-là sont ensemble je n’existe plus. Je ne sais même pas pourquoi Nath a tellement voulu que je vienne avec lui. Ses deux grandes sœurs sont chacune dans son foyer, j’aurais au moins pu passer le temps à discuter avec elles. Le courant passe très bien entre nous trois. Elles ont toutes les deux épousé des blancs, peut-être est-ce pour cela que Charlotte ne m’aime pas ? Parce que je ne suis pas blanche ? Bref.
Nath (se tournant vers moi) : Chérie, en fait je voulais que maman et toi commenciez à discuter par rapport aux préparatifs du mariage. Je ne veux pas que nos fiançailles soient trop longues sinon cela risque d’être des portes ouvertes à d’autres choses. Je voulais qu’on choisisse une date ensemble selon les disponibilités de chacun.
Moi (fronçant les sourcils) : Mais dans ce cas j’aimerais que ma mère aussi ait son mot à dire. Et si on reprogrammait une réunion avec nos parents ? En fait, j’aurais cru qu’on choisirait la date tous les deux.
Nath : Oui bien sûr, ce sera à nous que reviendra le dernier mot mais tu sais que maman est très occupée et qu’elle voyage beaucoup. Je voulais qu’on sache dès maintenant.
Moi : D’accord, mais je tiens quand même à ce que ma mère ait son mot à dire…
Charlotte : Ne t’en fais pas chéri, vous devez choisir cette date tous les deux et je m’arrangerai à être disponible pour vous. Après tout mon fils ne se mariera qu’une fois.
Vous voyez quand je vous dis qu’elle ne me déteste pas ? D’ailleurs cela me surprend qu’elle ne veuille pas s’accaparer l’événement et tout décider par elle-même. Peut-être de mon côté l’ai-je mal jugée ? Seigneur pardonne-moi d’avoir nourri de mauvaises pensées à son égard.
Le rendez-vous a finalement été pris pour le samedi prochain. Nos deux mères ensemble dans la même pièce ? Je me demande ce que cela va donner. Je vais prévoir le pop-corn.
**** Marla ****
Alors là, je ne pensais pas me retrouver un jeudi soir dans la salle d’attente d’un hôpital à me demander « mais qu’est-ce que je fous là ? »
A minuit, Sabine est venue cogner chez moi en mode panique tout en disant des choses incompréhensibles, j’ai fini par décoder que Sara était sur le point d’accoucher et qu’elle était trop secouée pour conduire alors elle me demandait de l’accompagner chez Sara. J’ai immédiatement troqué mon pyjama contre un jean, un T-shirt et des baskets et ai appelé une ambulance en chemin pour leur communiquer l’adresse de Sara et leur dire d’y aller. Sabine et moi nous sommes mises en route, sommes arrivées chez Sara juste au moment où on entendait la sirène de l’ambulance au loin. Je l’ai suivie dans l’appartement de Sara qui heureusement était au rez-de-chaussée. Je l’ai vue encore plus paniquée que la future maman. C’était la première fois que je la voyais aussi affolée. Eh bien, tout le monde peut avoir des moments de panique, cela me rassure un peu de voir que comme tout être humain elle peut être dépassée par les événements. J’ai ensuite guidé les ambulanciers qui sont venus transporter Sara sur un brancard, elle a l’air tellement faible et fragile avec tous ses cheveux tombés à cause de la chimio. Je me surprends à avoir un très mauvais pressentiment. J‘ai alors commencé à prier à voix basse pour que tout se passe bien. Sabine est sortie quelques secondes après moi avec le sac contenant toutes les affaires nécessaires à l’accouchement. Elle ne pouvait pas rentrer avec Sara dans l’ambulance car n’étant pas de sa famille. Nous avons dû suivre l’ambulance, moi en train de conduire et de prier comme je pouvais, Sabine derrière qui récitait des passages bibliques, faisant valoir les promesses de Dieu pour Ses enfants.
Nous arrivâmes finalement à l’hôpital un peu après l’ambulance. Et Sara avait été prise en charge, Sabine a dû remplir des papiers pour l’assurance et autres. C’est lorsqu’elle a fini qu’elle s’est souvenue qu’elle n’a pas prévenu son fiancé. Elle l’a appelée mais n’arrivait pas à être cohérente alors elle m’a passé le téléphone et j’ai dit à Nathaniel que nous étions au Sacré Cœur et qu’il devait nous rejoindre dans la salle d’attente.
Il nous a rejoint une demi-heure plus tard, mais les médecins ne nous ont toujours pas dit ce qui se passait. Nous avons dû patienter trois bonnes heures avant qu’ils viennent nous annoncer qu’ils ont dû pratiquer une césarienne car Sara était trop faible pour accoucher par voix basse. L’enfant a survécu mais malheureusement ça n’a pas été le cas de la mère. Immédiatement, Nathaniel a pris sa fiancée dans ses bras avant que celle-ci ne s’effondre. Il lui disait des mots réconfortants et je me sentais étrangère à leur douleur. Pauvre femme, c’est tellement étrange de se dire qu’elle est juste partie ainsi. C’est la première fois que je suis confrontée à la mort d’une personne que je connaissais. Même si nous n’étions pas proches, j’avais déjà accompagné Sabine chez elle quelques fois.
Je me suis sentie de trop dans leur douleur et me suis un peu éloignée pour les laisser seuls, je ne savais pas du tout quoi dire ni quoi faire. Dans ma vadrouille je me suis retrouvée devant la chambre 202 à l’étage des hospitalisations. Je vois à travers la fenêtre une jeune femme reliée à tout un tas de machines et sur un rocking-chair dans l’angle une dame qui a l’air tellement épuisée. Je me dis à cet instant que les hôpitaux sont vraiment déprimants. Je fais demi-tour et vais m’installer sur un banc dans les jardins. Je fais un message disant à Sabine où je suis et que je l’attendrais dehors le temps qu’il faudrait.
**** Sabine ****
J’ai l’impression d’être vidée de toutes mes forces. Sara est partie. C’est fini, sa vie est terminée. Je ne sais vraiment pas quoi faire pour l’instant. Heureusement que Nath est là. Sans lui je me serais effondrée depuis longtemps. Je pleure encore de longues minutes et me calme progressivement. Je ne peux pas me laisser aller. Il y a à la maternité un nourrisson qui n’a rien demandé à personne et qui va avoir besoin de tout l’amour possible. Je ne peux qu’espérer que Sara aura trouvé la paix dans le sein d’Abraham. Lentement je me détache de l’étreinte de Nath et nous allons tous les deux mains dans la main jusqu’à l’étage de la maternité. Nous regardons par la vitre la petite Sara Grâce TADADJEU qui dormait paisiblement dans un petit couffin.
Nous avons été autorisés à la prendre, alors nous avons d’abord porté les blouses bleues réglementaires puis sommes entrés. Là, une infirmière est venue déposer Sara Grâce entre mes mains et Nath s’est penché au-dessus de moi pour pouvoir la contempler. Elle est tellement petite, elle est parfaite.
« Si petite et tu dois déjà commencer la vie avec des problèmes. Mais je te promets petite puce que tant que je vivrai je te protégerai et t’aimerai comme si je t’avais mise au monde, parce que oui tu es ma fille à partir d’aujourd’hui. »
Nath nous a fait des bisous à l’une puis à l’autre, ses yeux brillent tellement que je le soupçonne de vouloir pleurer. Mais il est trop fier pour le faire.
Je reporte mon attention sur Sara Grâce, je ne peux déjà plus la quitter des yeux. Même si cela s’est fait dans les pires circonstances, je suis désormais maman. Que c’est étrange de dire cela. J’ai une petite fille, il me faudra m’y habituer.