Chapitre 25 : sur le qui vive

Ecrit par Nifêmi


Une canne à pêche dans les mains d'un homme est la preuve de sa patience. Depuis quelques jours, après l’épisode de Sheyi, je fais le résumé de toutes ces histoires. Je n’ai pas été patiente, c’est humain. Peut-être qu’une femme devrait tomber enceinte pour mon mari avant que mon tour vienne. Oui je sais que cela se passe. Mais c’est une destinée à ne pas souhaiter même à son ennemi. Je suis en partie responsable à ce qui est arrivé à ma bonne, mais elle a eu à faire ses choix. J’apprends à moins culpabiliser.

La vie a repris son cours, nous sommes revenus dans notre maison. Car les parents et amis sont venus pour soutenir mon maria après la perte de sa mère. On a pris soin de changer les meubles, mettre une nouvelle peinture et changer le décor carrément. Nous avons joué de nos relations  pour ramener l’électricité et l’eau dans notre habitation. L’absence de ma belle-mère est une bénédiction. Je respire mieux, les couleurs de ma vie ont changé. Je ne ressens plus ce poids pressant sur mon dos. Certes je ne dois pas jubiler sur la mort d’un être humain, mais ma défunte belle-mère est loin d’être un humain. Bientôt 8 mois 3 semaines, ma grossesse évolue sans aucun problème mais l’obstétricien a prévu déclencher le travail dans 10 jours, Rokan et moi ne sommes pas contre. Je suis énorme et en bonne santé, voilà les bienfaits d’un suivi avec l’assistance de Dieu. Ce que je n’ai jamais pensé faire au paravent. J’étais en train de lire les frais de douane concernant les nouvelles commandes quand Shalewa est rentrée dans mon bureau :

Elle : tu es dans les nuages ma petite, ça fait un moment j’étais devant ta porte à cogner

Moi : tu peux toujours rentrer ici sans cogner, je ne te cache rien. Et tu as raison je suis dans les nuages, la vie est belle, je savoure…

Elle : tu devrais te reposer davantage Woumi, et non traîner au boulot comme tu le fais.

Moi : que vais-je faire à la maison ? En plus ici je travaille même allonger sur le divan. Ne t’inquiète pas nous les trois nous sommes en bonne santé.

Elle : si tu le dis, je n’insiste pas. Et tes nouveaux aide-ménagers ? Comment tu gères ? C’est mieux d’avoir un boy qui vit avec toi et une bonne qui ne passe pas la nuit.

Moi : huum !!! Merci de m’avoir donné l’idée de prendre un jeune homme comme aide-ménager, mais comme tu le sais les femmes sont mieux pour certaines tâches. C’est pour cela j’ai pris la vieille dame. Et tous les soirs à 20h elle rentre. Mais sais-tu qu’il y a une jeune fille qui attend tous les soirs depuis 6 jours à 19h30 au portail ?

Elle : ah non ! Tu ne m’avais pas dit ! Pourquoi ? C’est qui ?

Moi : figure-toi que c’est la fille de la vieille, bien jolie je te dis pas. Elle vient chercher sa mère tous les soirs après le travail et moi ça ne me plait pas du tout. Rokan l’a aussi croisé à mainte reprise quand il rentre le soir ou quand il ressort pour le restau. Je ne veux plus qu’une autre histoire se crée à la ‘’Sheyi 2.0’’

Elle : tu as raison. Ou bien c’est la vieille qui a maitrisé un peu vos habitudes et veut glisser sa fille à ton mari pour lui soutirer un d’argent.

Moi : Shale, je n’ai jamais étalé ma fortune, tu sais très bien que je suis plus riche que mon mari, mais les gens pensent que c’est sa fortune qui maintient mon style de vie et pour cela je dois avoir des problèmes.

Elle : vraiment c’est compliqué, votre maison et grande tu ne peux pas faire le ménage seule. Pardon il faut remercier cette dame qu’elle aille loin de votre vie.

Moi : je vais la remercier et lui donner comme dédommagement trois mois de salaire. J’ai bien peur que ça n’attire pas plus les vautours.

Elle : comment ça ?

Moi : quand tu fais du bien, on te trouve une faille et on veut en profiter. Sa fille peut s’intéresser davantage et roder dans les parages ou suivre Rokan un soir lorsqu’il se rendra au restau.

Elle : bon bon, arrêtons la paranoïa, on a aucune preuve de ce qu’on avance, mais c’est toujours bien d’être sur ses gardes. Et fais confiance à ton mari.

Moi riant : ahahahaha est-ce qu’on peut faire confiance à garçon même, en tout cas je n’ai pas de choix. En rentrant ce soir je vais avoir une discussion avec la vieille pour ne pas paraître injuste.

Elle souriant : c’est mieux ainsi. Bon je te laisse, je vais lire les rapports des amants du terrain, et rentrer retrouver tes filleuls.

Moi étonnée : et ton assistant il devrait s’occuper de ses rapports en temps normal ?

Elle faisant un clin d’œil : t’inquiète, je supervise tout ce qui transite par ici… aller ciao bisous

Elle referme la porte derrière elle. Elle travaille super dur. C’est compréhensif, car moi je suis souvent absente, mais pour une bonne cause, sourire.

Je quitte le bureau, après 18h. Ma collaboratrice la plus proche était toujours en train de relire les rapports quand je lui dis au revoir. Je prends la route de la maison, j’ai envie d’une bonne douche. Je rentre dans la rue qui mène à chez nous et au loin je vois la jeune fille au loin assise sur sa moto. Au fur et à mesure que je me rapproche je découvre une silhouette assez coquette, elle a l’air beaucoup plus belle et bien vêtu. Je sens une once de jalousie. Je klaxonne, le gardien ouvre rapidement, je rentre le véhicule sans prêter attention à elle. Je garde mon calme. Le boy, un jeune homme d’à peine 20 ans vient à ma rencontre pour me saluer.

Toujours calme, je rentre dans le salon pour m’assoir et j’appelle la ménagère pour avoir une discussion concernant la présence de sa fille tous les soirs.

Moi : iya agba (maman âgée en yoruba)

Elle : oui ma fille, je viens

Cela ne me gêne pas qu’elle m’appelle ‘’ma fille’’, elle est âgée et je lui dois le respect

Moi : je vois souvent une dame qui les soirs au portail, c’est qui ?

Elle : c’est ma fille, mon unique enfant

Moi, faisant semblant : ah ok !! je vois, au début je  ne la voyais pas, mais ces jours-ci elle est fréquente.

Elle : oui c’est vrai, elle vient me raccompagner, elle a peur que je prenne les taxi-motos qui roulent dangereusement c’est pour ça.

Moi  toujours semblant: Aah je comprends ! Dites-lui que ça n’en vaut pas la peine, que le chauffeur va vous déposer désormais et viendra les matins vous chercher aussi, et dans ce cas les frais de transport seront déduits de votre salaire.

La vieille avait l’air triste d’un coup et s’apprête à s’agenouiller, automatiquement  je me lève pour l’empêcher de le faire

Moi : pourquoi iya agba ?

Elle : j’ai confié mes frais de transport à ma fille, ça fait presque deux semaines qu’elle a perdu son travail et elle a deux enfants à charge, mon gendre est décédé depuis deux ans maintenant. Grace frais de transport, elle sort chercher du travail et s’occuper des enfants. À la fin de la journée elle vient me chercher, les matins elle me dépose avant d’aller chercher du travail. Je t’en prie ma fille…

Moi sérieuse : je vois, elle travaillait où ?

Elle : tu sais, je suis âgée et je ne connais rien de son ancien travail, je sais juste qu’elle porte une veste tous les jours et elle me dit qu’elle parle au téléphone toute la journée.

Moi : iya agba, il faut aller la rejoindre, Peter (le boy) et moi on finir le reste. Votre fille doit-être fatiguée.

Elle me remerciait, j’étais tellement touchée. J’espère seulement qu’elle ne me baratine pas ! En tout cas qui s’y frottera désormais s’y piquera. J’allais dans la cuisine pour voir ce que je pouvais préparer quand j’entends la vieille criée en pointant son index entre mes jambes :

Elle : ma fille !! L’eau !!

Moi paniquée : quoi l’eau !!

Subitement je ressens une chaleur, un liquide coule. Je panique encore plus. La vieille court en direction de la sortie. Elle m’abandonne ou quoi, j’ai peur je n’arrive pas à bouger. Ce n’est pas vrai, je pensais qu’on devrait déclencher ça. Je dois appeler mon mari

Moi : Peter !! Peter !! Apporte-moi mon sac

Lui : oui maman

Moi : ouvre ouvre sors mon téléphone je vais appeler papa

La fille de la dame rentre à ce moment dans la cuisine et dit :

Elle : où sont vos clés madame ? Je vous conduis à l’hôpital, de la voiture on va appeler votre mari et il viendra vous rejoindre. Dépêchons-nous vite vite, le bébé risque de sortir.

Peter et elle m’aident à rentrer dans le véhicule. Je panique toujours. Au même moment je m’inquiétais. Donc cette fille sait conduire ! Dieu merci qu’elle soit là, je voulais la chasser, mais c’est elle qui me sauve à l’instant. Je suis allongée derrière sur la banquette, la tête sur la cuisse d’iya agba. Elle me rassurait, elle est bien attentionnée cette vielle. Je lui demande d’appeler mon mari. De lui indiquer qu’on va à la clinique de zone de notre quartier.

Il était 20h moins, l’heure qu’indique l’horloge à l’entrée de l’hôpital de zone. On me prend rapidement en charge, direction salle d’accouchement sur un brancard…

Je ne peux vous décrire ce qui s’y passe là-bas, des douleurs, des cris j’en passe. Je lutte très fort pour ne pas m’évanouir ; je voulais entendre leurs petits cris de bébé : je voulais entendre mes enfants d’abord. Jusqu’à présent j’ignore les sexes…

La Fissure